24 août 2005

Théologie et pastorale - III

L'intelligence de la foi est pour moi la clé centrale de la nouvelle évangélisation (non pas au sens prosélyte que lui donne parfois certains essais modernes de notre Eglise), mais dans le sens de tout ce qui va permettre à ceux qui sont loins de la foi d'accéder à une compréhension du mystère et une adhésion/participation à la lueur intérieure qui réside déjà en tout homme et qui ne cherche qu'à être déployée.

La difficulté principale qui se pose à notre temps et de rendre accessible cette "fission nucléaire du coeur" que vient d'évoquer Benoît XVI dans son homélie à Marienfeld...
Dans des explosions subjectives que peuvent être les JMJ cette présence réelle et efficace de Dieu est sensible et témoigne d'elle-même... Mais peut-on voir le Christ avant Sydney 2008 ?

Oui, si chacun de nous actualise et révèle par l'amour présent en actes et en vérité, cette lumière intérieure, cette radiation du coeur qui ne vient pas de nous mais qui est grâce... Un long chemin qui se nourrit de mutiples manières (dont la théologie, comme la pastorale...)

16 août 2005

Théologie et Pastorale - II

La difficulté de toute approche théologique tient surtout au langage, qui s'est élaboré suite à une longue tradition deux fois millénaire et à l'interpénétration de courants phylosophiques et théologiques différents qui en se compénétrant voire s'opposant ont conduit à préciser les concepts, les figer.

Cette tradition est incontournable mais s'éloigne de fait des préoccupations pastorales plus accès sur l'intelligence de la foi.

Il y a donc des passerelles permanentes à construire, qui ne soit pas de la pure démagogie mais des couches successives, des marches d'escalier qui permettent à ceux qui entrent dans la foi, à prendre conscience de l'essentiel sans se perdre dans les méandres de discussions parfois difficiles.

C'est l'enjeu de la pastorale.

05 août 2005

Théologie et pastorale

Le danger d'une recherche théologique poussée est de construire une montagne loin d'une réalité simple et accessible. Mais cette recherche est aussi une aide possible à la compréhension même des enjeux et des difficultés d'une pastorale de proximité qui en simplifiant à l'extrême risque d'aboutir à des impasses.
Il doit donc y avoir une tension permanente entre une nécessaire accéssibilité (qui n'est pas la caractérisque principale de ce blog) et le souci d'une rigueur scientifique...
Pour une recherche pastorale plus accessible mais encore balbutiante, cliquer ici

01 août 2005

Une intériorité qui devient élan.

Balthasar note chez saint Augustin : "la voie de l'intériorité" comme moyen le plus important pour chercher Dieu dans l'âme spirituelle, pour l'y contempler comme en un miroir non pas pour se complaire en soi-même mais pour s'élancer vers Dieu". (1)
Il relève aussi chez Staudenmaier "l'Idée éternelle qui dessine d'avance toute l'histoire de l'incarnation du Fils et celle de son Eglise" et "contient aussi des idées particulières de chaque personnalité qualitativement unique" et cette pensée est une idée particulière de Dieu. Chaque individu doit tenter de l'atteindre selon l'inspiration de l'Esprit-Saint. Pour Balthasar on rejoint la thèse de Grégoire de Nysse, qui comme Staudenamaier, note la ressemblance (par opposition à l'image) qui est entendue comme une conformation active de l'homme à cette image par la grâce de l'Esprit Saint. L'effort moral de l'homme est une donnée dynamique appartenant à l'image. Pour Martin Deutinger (Grundlingen der Positiven Philosophie III, Die Denklehre 1844) ; "Dans l'homme, la nature et la liberté sont des pôles contraires et cette antithèse ne saurait être surmontée que par la révélation d'une volonté divine supérieure. C'est en rejoignant cette volonté que l'homme saisit à la fois le fondement de l'être et celui de la liberté. Au contraire, l'homme qui refuse la vérité divine en même temps qu'il nie la liberté nie aussi le fondement de l'être (...) l'être est la liberté et la liberté est l'être. (3)
Que conclure sinon que l'homme peut devenir acteur de lui-même. Mais cet invitation à l'agir n'est pas pour autant une opposition entre les actes et la grâce. Je verrais plutôt une notion relative où la grâce est perçu comme infinie face aux actes finis de l'homme. Pour que cette infinitude trouve en l'homme un écho, il faut que par des actes finis, l'homme se rende participant, et se faisant, devienne tremplin et temple de la grâce.
(1) d'après Hans Urs von Balthasar, ibid p. 286
(2) ibid p. 288
(3) ibid p.290

29 juillet 2005

Chemins de dialogue

Une bonne lecture pour découvrir le meilleur de nos religions dans le respect des uns et des autres et l'humilité des dérives passées.

Le Roi, le sage et le bouffon, de Shafique Keshavjee,
ISBN 202039910.5

Une réalisation en partenariat de la plateforme interreligieuse de Genève...

28 juillet 2005

Participant du Verbe

En renonçant à notre humanité, nous devenons admis à la procession du Fils, par et à travers l'Esprit Saint pour devenir enfants de Dieu. Ainsi, pour Irénée, le Verbe divin se fait porter par l'homme et l'homme offre une place au Verbe.
L'âme devient comme une femme enceinte qui a reçu la semence du Verbe. "Etre en grâce", cela se produit à partir du moment où l'autopossession de soi déploie ses dimensions à la fois vers l'origine et la fin jusqu'à reconnaître le don de Dieu et entrer dans la transcendance qui ouvre le fini à l'infini.
Cette grâce est l'amour divin offert et l'être de Dieu donné. La convergence recherché entre le don total de la créature à la volonté divine jusqu'à l'acte de se laisser engendrer par le Père avec le verbe Fils qui va jusqu'à dire "qu'il m'advienne selon ta Parole", c'est se laisser nouer la ceinture et en cela accueillir l'Esprit comme le don absolu de Dieu et dans cette rencontre devenir fécond.
De fait, étant infini par nature, la liberté divine ne peut pas ne pas être là où il y a une liberté finie mais sa présence est "secrète et latente" ce qui permet à la liberté de se réaliser, radicalement comme décision authentique pour ou contre son abandon à Dieu. L'immanence de Dieu comme grâce ne peut être une réalité étrangère ni autre chose. C'est donc d'une altérité intérieure qui est en cause.(1) On rejoint là ce soi-même comme un autre de Ricoeur, où la liberté finie est travaillée dans l'histoire et dans le temps à la recherche d'un appel transcendant véritable.
(1) d'après Hans Urs von Balthasar, ibid p. 264 à 273

Petite pause

La vie familiale étant prioritaire...
Vous n'aurez que quelques billets clairesemés jusqu'au 16 août...
Bon été.

26 juillet 2005

Exercices spirituels ignatiens...

"Quand l'individu s'est dépouillé de soi, il s'est fait différent pour se tourner uniquement vers la volonté divine, loin de sombrer dans l'abîme "sans mode" de la divinité, il se voit revêtu par la volonté infinie du Père, de la forme de son Fils et il obtient par là un mode bien défini qui est "l'être dans le Christ" ou l'être du Christ en lui. Accueillir ce mode est précisèment toute la pratique des exercices spirituels d'Ignace de Loyola." (1)
On rejoint là pour moi tout ce qui a été introduit en matière de décentrement, en soi, pour se laisser interpeler par le Christ, habiter en lui et se faisant renoncer à tout ce qui en nous n'est pas de lui. D'où cette belle prière ignatienne : "Fais que mes pensées, mes actes et mes paroles soient au service de ta divine majesté".

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, ibid p. 264-5

25 juillet 2005

Prière inutile ?

A cette question lancinante, Balthasar insiste sur l'exhortation du Fils à la prière et notamment au Notre Père. Il évoque aussi ce qu'il appelle la "circumincession trinitaire" (1) c'est-à-dire la demande en communion avec une unanimité écclésiale et dans l'esprit qui est seule capable d'infléchir la volonté de Dieu le Père. On peut résumer cela dans le sens de cette symphonie des libertés finies en Dieu, où l'on verrait une hypostase faire une demande à une autre hypostase dans la cadre d'une alliance instituée par le Christ.

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, ibid p. 261

24 juillet 2005

Je et Tu

Le Je et le Tu s'inscrit dans cette intimité véritable d'un Dieu qui n'est pas autre puisque nous sommes en lui et donc d'une relation qui ne peut être qu'un coeur à coeur.
Le Tu s'insère donc dans cette double dimension d'un Dieu proche et qui nous considère comme unique. C'est le Tu dis à Zachée dans l'"aujourd'hui, je vais habiter dans ta maison...."
Mais en même temps il s'inscrit dans la reconnaissance que cette liberté finie au sein de l'infini est une grâce, une somme de dons. Alors l'élan du coeur passe au delà de la distance, dans un dialogue véritable, à l'image de ce coeur à coeur du Fils et du Père, comme une réponse à cette invitation à participer à la symphonie des Personnes divines dans la Sainte Trinité...

23 juillet 2005

Présence

Il est là présent dans la chair d'un individu juif crucifié, présent aussi dans sa chair et son sang partagés. Ce Dieu caché c'est aussi le don excessif d'un amour et une exigence plus grande vis à vis de la liberté finie.
On retrouve ce corollaire à la grâce. Si nous en prenons conscience, il devrait naître en nous un appel immense à la responsabilité...

22 juillet 2005

Talents

Balthasar évoque un repli de Dieu qui pourrait aller jusqu'à l'effacement et qui peut s'expliquer comme le désir de Dieu de donner à l'homme une liberté (finie) Cette réserve divine il faut l'entendre pour lui comme la parabole des talents : il leur donne liberté mais c'est sa propre fortune qu'il leur donne, un présent immense et caché. On ne peut le connaître (Rm 1,21) (1)
On voit surgir par delà cette description la parabole du fils prodigue, où Jésus nous décrit si bien la miséricorde de Dieu, devant ceux qui dilapident les richesses, mais restent aimés de Dieu...
(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 235-236

21 juillet 2005

Trinité...

Pour Balthasar, il semble que dans l'infini des personnes divines "soient ménagés en elle comme des espaces infinis de liberté pour que puissent s'effectuer les échanges entre" les trois personnes divines de telle sorte qu'il n'y ait aucune fermeture sur une identité confinée en elle-même. Pour lui, cela permet de qualifier ces échanges comme don, communion, réciprocité, joie, espérance et accomplissement parce que Dieu peut tout attendre de Dieu. Il parle à ce stade d'une intercession réciproque, d'une "parfaite transparence" et du mystère personnel inviolable (1) de chaque hypostase (personnes divines). Pour quelqu'un qui s'est spécialisé dans l'anthropologie du couple, cette danse des libertés divines, n'est pas sans rebondir sur cet échange conjugal, ou les libertés sont appelées à entrer dans une danse similaire. Le couple est alors à l'image de l'échange trinitaire...

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 222-3

20 juillet 2005

Libérer de l'esclavage...

Dieu vient nous libérer de nos servitudes. La liberté en Dieu, c'est peut-être cette aptitude à maîtriser tout ce qui nous détermine, tout ce qui nous rend esclave. De la passion, de l'idolâtrie, nous pouvons nous libérer, sans rejeter la réalité, le réel mais éclairé dans nos choix par ce qui au fond de nous est présence.
Ainsi, pour saint Augustin, " la liberté finie est le mouvement rationnel et autonome de l'âme, un mouvement dans lequel le moi se possède lui-même librement" (1) de sorte qu'il trouve en toute liberté une faculté de jugement (liberum arbitrum) et qu'au bout de ce chemin sa liberté finie se réalise et devient réellement liberté en actes au sein de la liberté infinie.
A la différence des pélagiens qui exalte la liberté de l'homme, Augustin insiste sur le fait que la liberté est donnée par Dieu à travers l'Esprit Saint (il évoque 14 fois l'Esprit Saint dans ce texte) . C'est la grâce de l'Esprit qui aide l'homme à rentrer dans la liberté vivante.
L'amour dépasse la loi, mais n'en demeure pas une loi (lex caritas (nº 29 de Spiritu et Littera) : "C'est Dieu qui parle intérieurement à notre esprit par son Esprit mais sous forme de persuasion et d'appel à quoi l'homme ne peut répondre qu'en exprimant gratitude, adhésion, délectation consentante." (2) Quand surgit l'assentiment la liberté finie atteint aussi sa liberté infinie. En adhérant à Dieu, elle trouve sa sagesse...
Chez Grégoire de Nysse, la liberté finie est donnée. Se recevoir d'un autre "déclenche en elle un mouvement infini qui est désir de se réaliser non en se coupant de cette source mais en s'assimilant à elle". (3)
Il y a donc rencontre, intérieure et délicate, de l'infini de Dieu en nous. Et cette rencontre reste marquée par la pédagogie et la tendresse de Dieu.
2 Chez saint Thomas d'Aquin, la liberté finie se découvre dans l'acte de présence intime à soi-même, où elle se connaît comme existante, "l'âme saisit à la fois son être propre et l'être universel, en transcendant tout les êtres singuliers. Dans cette saisie, l'être en sa réalité apparaît comme vrai et directement aussi comme bien auquel il peut adhérer." (4). Je retrouve là ce que G. Médevielle décrit dans Le Bien et le mal, ce niveau intérieur de conscience qui ne fait que reprendre la prophétie d'Ezéchiel : "Je mettrais en vous un esprit nouveau"...
Dieu m'est plus intérieur que moi-même...(5)
(1) De spiritu et Littera cité par Urs von Balthasar, ibid p.199
(2) ibid
(3) ibid. p. 203
(4) ibid p. 204
(5) ibid p. 209

19 juillet 2005

Pédagogie

"L'homme du salut, dans sa progression de l'Ancien au Nouveau Testament et à l'intérieur de celui-ci, nous décrit une "paidagôgia" (cf. Ga 4,2) qui fait passer l'humanité d'une aliénation à une condition divinement accordée "de parrhêsia", c'est-à-dire d'ouverture franche et mutuelle. Cette condition est, en principe, accessible dès maintenant mais sa pleine réalisation est encore à acquérir, car c'est aussi la condition dans laquelle Dieu sera tout en tous (1 Co 15,28)." (1)
Cette pédagogie de Dieu est pour moi une double preuve. Preuve de la liberté réelle donnée à l'homme et preuve de cette tendresse qui caractérise le dessein de Dieu sur l'homme. Non seulement nous sommes libres, mais nous ne sommes pas abandonnés par Dieu sans savoir quoi faire de cette liberté. Il nous prends par la main, et nous accompagne, se fait chemin pour nous aider à trouver en nous, cette vérité qui nous rendra vraiment libre et à la fois participant d'une liberté plus grande encore.

(1) d'après Urs von Balthasar, ibid p. 197