11 avril 2006

Lectio Divina

Dimanche des Rameaux 2006, le Saint Père nous a rappelé la meilleure méthode pour lire l'Evangile : la lectio divina. « La LECTIO DIVINA, constitue un véritable itinéraire spirituel par étapes. De la LECTIO, qui consiste à lire et relire un passage de l'Écriture Sainte en en recueillant les principaux éléments, on passe à la MEDITATIO, qui est comme un temps d'arrêt intérieur, où l'âme se tourne vers Dieu en cherchant à comprendre ce que sa parole dit aujourd'hui pour la vie concrète. Vient ensuite l'ORATIO, qui nous permet de nous entretenir avec Dieu dans un dialogue direct, et qui nous conduit enfin à la CONTEMPLATIO; celle-ci nous aide à maintenir notre c?ur attentif à la présence du Christ, dont la parole est une « lampe brillant dans l'obscurité?» (2 P 1, 19) »

Pour mémoire, une première expérience de Lectio Divina - Lecture cursive de Jean
suivie d'un deuxième essai : "Lecture cursive de Luc"

10 avril 2006

La Passion - Film de Mel Gibson

En ce début de semaine sainte, j'ai pris le temps de revoir le film de Mel Gibson. Une deuxième vision permet de dépasser cette intense distance que l'on ressent entre son propre chemin et celui du Christ et de voir combien ce film, au delà des scènes insoutenables, est construit dans une contemplation intense du mystère de l'Eucharistie. Le pardon, l'amour retentit à chaque scène, jusqu'au dévoilement final du pain eucharistique, qui se superpose au don du corps, exposé et offert sur la croix. On ressent plus qu'ailleurs, que le sacrifice de la messe n'est pas qu'un beau récit, mais est un véritable "faire mémoire" du sacrifice sanglant. Et en même temps, il est, à travers les souffrances du monde, auquel le Christ participe encore, une actualité sans pareille. Christ d'hier, d'aujourd'hui et de demain, souffrant à nos côtés, exposé et donné pour faire toutes choses nouvelles.

Voir aussi sur ce thème : Un autre regard

Ainsi que : Regards sur la passion du Christ
Lectures du film de Mel Gibson
sous la direction de Jean-Gabriel Rueg, ocd, Philippe Raguis, ocd et Pascal Ide
Editions du Carmel, septembre 2004

"Je suis le chemin,..."

Pour Balthasar "le Christ ne montre pas seulement au monde un homme divin il lui montre plutôt comment l'homme peut et doit chercher Dieu sans condition et sans retour sur lui-même" (1)
Je ne cherche pas ma gloire ni ma volonté mais la volonté de celui qui m'a envoyé, pourrait-on dire en paraphrasant Jn 5 à 8 de même, cela devrait être de fait notre chemin en église: "une recherche remplie par Dieu" (2)
(1) Urs von Balthasar, ibid DD 2,2 p. 333
(2) Ibid p. 334

09 avril 2006

Connaissance de Dieu

On ne peut connaître son être propre, ce qui repose au fond soi, ce qui est inscrit dans nos coeurs que lorsque la parole qui achève et la lumière qui vient de Dieu pénètrent dans notre être. Alors l'homme peut découvrir véritablement son être intérieur, et "l'aspiration à la possession du Dieu vivant". (1)
Le document conciliaire Ad Gentes, 18 constate des "traces" que l'homme, créé pour Dieu et naturellement religieux a laissées partout de sa recherche tâtonnante." (2)
Je crois qu'on peut ainsi concilier l'inconciliable ébauché dans le billet précédent, en admettant peut-être que ces traces, qui rejoignent la vision de Bonaventure ou d'Augustin sur les degrés, font partie des diamants donnés par Dieu à la création vivante. A l'homme d'ouvrir son coeur à cette étincelle de lumière et au chrétiens à aider à révéler cette lumière enfouie dans l'humanité comme étant celle du Dieu unique.
Certes les chances ne sont pas identiques avec les systèmes religieux objectifs. Pour Balthasar "elles sont le signe d'un axe unique suivant lequel le genre humain doit être conduit à son salut définitif, ce avec quoi l'idée d'une pluralité de voies du salut, parallèle en quelque sorte, qui peut être se contredisent entre elles sur l'essentiel n'est pas conciliable. Si ces religions étaient voulues par Dieu comme porteuses du salut, on ne pourrait, étant donné un tel éparpillement parler qu'abusivement d'un plan divin de salut : il ne posséderait plus aucune unité" (3) sauf peut-être à développer une thèse osée et peut-être orgueilleuse qui considère que les traces montrent aux chrétiens les bornes extérieures d'une révélation à laquelle ils doivent tendre mais qu'ils ne peuvent atteindre qu'eschatologiquement en se tournant sans cesse à l'essentiel, non de son fait mais en cherchant toujours plus à vivre en Christ car si le plan de Dieu est Christ alors nous sommes encore loin de le manifester et ces interprétations ne peuvent que nous conduire à plus d'amour et plus de recherche sur le chemin d'une unique vérité et une unique médiation...

(1) Urs von Balthasar, ibid DD 2,2 p. 332
(2) Henri de Lubac, Paradoxe et mystère de l'Eglise, Aubier, Paris, 1967, p. 150
(3) Balthasar, ibid p. 332-3

08 avril 2006

Chrétiens anonymes - IV

La charité chrétienne veut que nous ne soyons pas enfermés dans l'orgueil de croire que nous détenons seul la vérité et notre personnalisme foncier nous conduit à chercher chez tous hommes les traces de cette image de Dieu, voulue par le créateur. Cette ouverture à l'autre dans le mystère de sa conscience doit-il être cependant un aveuglement, une naïveté ? Doit-on pour cela renoncer à croire à ce qui fait l'essentiel de notre foi, la médiation unique et irremplaçable du Christ.
Il y a des limites à la thèse de Justin du "logos spermatikos". Pour Balthasar, "si l'auto-ouverture a priori de Dieu était "personnelle", l'individu dans les religions extra-bibliques, n'a-t-il pas réagi personnellement à cette révélation, ou n'a-t-il pas objectivé plus expressément ce facteur personnel ? (...) sans doute ces révélations furent aussi employées dans les prières et les sacrifices (...) mais reste sous développé le sens de la personnalité authentique." Pour lui, seul le christianisme détaché de subjectivité spirituelle reçoit une parole explicite de mission qui garantit à l'homme son unicité qualitative parce qu'elle la lui donne. "ils ont des yeux et ne voient pas" Ps 115 5,7)
Henri de Lubac a démasqué le fantôme d'une natura pura possible, mais aussi repoussé la limitation correspondante de l'horizon de la créature raisonnable comme telle à l'être analogue général (ens ut sic) qui ne devrait être élevé que par un existential surnaturel particulier au desiderium du Dieu vivant, tel qu'il est en lui-même. (1) On peut cependant continuer à confronter ces affirmations à la question fondamentale suivante : si Dieu est vraiment miséricordieux, pourquoi laisser 5 milliards d'être sans la révélation... et 1 milliard de privilégié ?
Je crois que la réponse est dans la tension entre ces deux thèses paradoxales et complémentaires.

(1) Urs von Balthasar, ibid DD 2,2 p. 330

Un pavé dans la mare.

Parfois j'ai le sentiment que tous ces billets ne servent à rien... Que je jette des cailloux dans la mare. Oeuvre vaine. Rien de nouveau sous le soleil. S'il n'y avait chez moi la double satisfaction de l'orgueil et de suivre patiemment un parcours intérieur qui me mène jusqu'au point sans retour, je cesserais d'aligner ces lettres sans suite... Tant pis pour le lecteur attardé ? Faute de retour, je m'interroge... :-)
C'est vrai que je ne fait pas grand chose pour être accessible...
Et que ce n'est que l'expression d'une vanité sans bornes.
Mais ce travail a pour moi l'intérêt d'être structurant et c'est pourquoi je persiste et signe... :-)
Alors à ceux qui sont encore là depuis plus d'un an courage et ceux qui arrivent depuis peu, "bon courage". N'hésitez pas en tout cas à réagir. Un monologue, c'est comme un cri dans le désert, inutile et stérile, sauf pour celui qui s'est soulagé en criant... :-)

07 avril 2006

Chrétiens anonymes - III

Si les païens sont sans loi, la loi est parfois inscrite en leur coeur. C'est en tout cas ce qu'affirme Rm 2,14s : "ils montrent que la loi est inscrite en leur coeur...". Cela doit être ce que l'on appelle la loi naturelle. Il n'y a donc pas que saint Justin qui évoque cela... Et cela permet de percevoir (sans être rousseauiste et croire que l'homme naît bon, en soi) que l'homme naît libre et qu'au sein de cette liberté, il peut trouver en lui (et dans les autres) la ressource nécessaire pour exercer sa propre liberté.

06 avril 2006

Juifs et chrétiens

Ils sont nos pères dans la foi, le peuple choisi, les héritiers de loi de Moïse et pour nous chrétiens, qui nous nourrissons de la lecture de la Parole qui leur a été révélée, il est toujours douloureux de voir que ce qui est pour nous joie et lumière reste nié et méconnu de leur part. A ce sujet, j'aime la citation donnée de K. Barth : "il n'y a qu'un seul peuple de Dieu, se composant de la Synagogue et de l'Eglise" à laquelle Urs von Balthasar ajoute : "toutes deux sont encore en route vers leur achèvement tout en restant dans une dramatique entre le oui et le non, à ce qui pour l'Eglise fonde tout et ce qu'Israël refuse de reconnaître comme son achèvement".
Pour K. Barth : "Israël et l'Eglise sont les deux faces d'un même mystère de rédemption, sa face de grâce et sa face de jugement". On pourrait aller plus loin, ajoute encore Urs von Balthasar en comparant les deux peuples aux deux larrons, l'un qui se tourne (l'Eglise) et l'autre qui ce détourne mais pour lequel le Christ est aussi médiateur, à travers sa judéité et son "incarnation dans sa personne du rôle de l'ébed Yahvé qui échoit à tout Israël souffrant par représentation". (1)
Pour nous en effet, notre Dieu n'est pas mort pour les seuls chrétiens mais pour l'humanité entière, et malgré ce refus dramatique de nos pères, nous osons croire que l'incarnation du Christ est salvatrice.
Dans un article du Monde en hommage à Emmanuel Lévinas, P. Ricoeur notait, le lendemain de sa mort, le 24 décembre, que même la mort du philosophe juif était signe de cette proximité. Il est mort, la veille d'une naissance. Pour avoir montré peut-être par catholico-centrisme combien on pouvait avoir une lecture chrétienne de son livre phare "Autrement qu'être ou au delà-de l'essence", je dirais que le philosophe a compris le mystère chrétien dans son essence, et que sa judéité, assumée et fidèle ne fait qu'honneur à l'homme.

(1) Urs von Balthasar, ibid DD 2,2 p. 317

Lire à ce sujet : Barth, Balthasar, Lévinas, Ricoeur

05 avril 2006

La chair et l'esprit

Nous n'avons pas fini de méditer le mystère de l'incarnation, qui est non seulement au coeur de la révélation mais également propre à notre humanité. Nous ne pouvons être qu'incarné et le fait que nous ne soyons pas des purs esprits est plus qu'une contrainte, elle touche à notre mission... Cette unité du pneuma (esprit-souffle) et de sarx (chair - relation) est "toujours inscrite dans une catéchèse d'Israël" (1). C'est aussi, d'une certaine manière l'enjeu d'un chemin qui n'est pas pure transcendance mais qui s'inscrit dans la relation. Pour dire les choses plus simplement, dès la naissance d'Israël, le peuple a été confronté au fait qu'il ne suffit pas d'invoquer Dieu, ou de fuir dans le sacré, mais que comme le rappelle saint Paul, s'il me manque l'amour, je ne suis rien... Phrase qui fait écho à celle du psaume : "Tu ne voulais pas de sacrifice, alors j'ai dit me voici". On peut reprendre ici la belle image de Jacques de Saroug qui rapproche la cote d'Adam à celle du Christ sur la croix (2). Notre incarnation, la chair de notre chair est au coeur de notre mission sur terre. Et de la rencontre, de la chair, peut jaillir des fleuves d'eau vive.

(1) Urs von Balthasar, ibid DD 2,2 p. 314
(2) cf. "Dernier adam"

04 avril 2006

La tentation du rétroviseur

Dans une société en perpétuelle évolution, on peut se demander si certain de nos contemporains ne tombent pas dans ce que L. Pareydt appelle la "tentation du rétroviseur", celle qui refuse assurément l'humanité et s'arc-boute sur la loi ancienne, comme la seule gardienne des moeurs et du monde. Mais cette tentation, qui résulte de nos peurs n'est-elle pas ce que combattait jésus dans l'attitude des pharisiens.
Je me souviens de l'excellente analyse que faisait P. Ricoeur dans le deuxième tome de La Philosophie de la Volonté a propos de ces pharisiens, qui a force de vouloir mettre Dieu partout dans leur vie avait oublier de lui laisser une place. Balthasar reprend une description similaire lorsqu'il décrit ceux qui se cramponnent à la loi et à son observation littérale et par là tombent "imperceptiblement dans la justice par les oeuvres que Jésus et Paul démasqueront comme le contraire de la véritable attitude de foi". Ils s'attachent "à des images du messie qui durcissent certaines choses que Dieu ne veut donner...", ils confondent "l'ordre de Dieu avec la sagesse du monde" et identifient "la justice du Dieu libre et miséricordieux avec une loi de justice immanente au monde, selon laquelle tout péché reçoit automatiquement son châtiment..." (1) Cette description du judaïsme pré-christique pourrait se retrouver dans certains mouvements catholiques actuels. S'il nous servent de garde fous par rapport à notre emballement pour le monde, il ne faut pas pour autant se laisser aller à ce rigorisme obtus qui nous fait virer dans l'élitisme et oubli notre mission principale d'un christianisme incarné, qui est "dans le monde", d'un Christ qui habite parmi les publicains et les pécheurs, non pour les condamner et les juger, mais pour les transformer de l'intérieur et les ouvrir à la découverte d'un Dieu miséricordieux.

(1) DD 2,2* p. 303

* Je reprends ici l'analyse de la Dramatique divine, de Urs von Balthasar, II - Les personnes du drame 2. Les personnes dans le Christ, Culture et Vérité, Namur, Editions Lethilleux, Paris, Le Sycomore, Trad. Yves Claude Gélébart et Camille Dumont. (C) Thedramatik, II Die Personnen des Spiel, 1 - Personnen ins Gott, Johannes Verlag, Einsiedeln 1976 (c) Pierre Zech Editeur, Paris 1986 pour la Version française.

Le corps, porche de la vie sprituelle - Espace pub - Session de formation

Une amie me demande de vous informer d'une session de formation
pour les religieux, religieuses, moines, moniales, séminaristes, prêtres ou laîcs...
en Mai 2006

LE CORPS, PORCHE DE LA VIE SPIRITUELLE Liturgie et poésie, lecture et écriture

Dates : arrivée le dimanche après-midi 7 mai, ou le lundi 8 matin
départ le vendredi 12 ou samedi matin 13 mai

Lieu : Abbaye Notre-Dame d?ORVAL, Belgique (juste à la frontière française. Gares la plus proche, selon les heures : Carignan (20km), Sedan (40 km). Soit depuis Paris-Est 3 :30h.

Frais : 240 euros. Ceci calculé sur 15 participants environ.


Pour en savoir plus écrire au webmestre (chdcpm@yahoo.com) qui vous transmettra le bulletin complet...

Prière en Christ

La prière filiale éclaire le fidèle de l'aube pascale. Il fait un avec le Christ. Du même coup, il accède à la liberté de l'Esprit. La liberté consiste à se laisser situer à sa place exacte - celle de fils, laquelle ne peut être que donnée - et à collaborer à la construction de sa propre stature croyante. Trois lignes s'entrecroisent ici : celle de la communion trinitaire dont l'homme devient participant, celle de l'union des fidèles dans le Christ et celle de tout croyant appelé à devenir ce qu'il est. Entre ces trois lignes existent un même rapport, celui de l'espérance. En effet, être fait fils du Père appelle à s'y reconnaître, à le vouloir et à en vivre. La prière est le moment où l'homme apprend qui il est : il apprend à être, ce qui ne va point sans agir. Il naît à lui-même, il renaît dans sa vérité de fils. Etre homme, c'est se recevoir d'un autre : la prière est un acte vital d'émergence de l'homme au niveau où Dieu recrée le monde en son Fils.
Mgr Albert Rouet, Vers Dieu ou en Dieu, Christus 96 p. 399

03 avril 2006

Emerveillement

L'autre est-il vraiment mon semblable différent ? Je dois aller chercher l'autre jusque dans sa différence, or souvent sa différence m'énerve. Il faudra passer par-dessus mon énervement pour parvenir à l'émerveillement.
Jean Bernard Livio, s.j., conférence aux 50ème anniversaire des CPM, repris dans Accueil Rencontre nº227-228

02 avril 2006

Homme intérieur...

Tu ne seras jamais un homme vraiment intérieur si tu ne t'efforces pas de te taire au sujet de ton prochain pour t'occuper principalement de toi-même.

Imitation de JC, traité spirituel du 15ème siècle, livre II, ch. 5, trad. Ravinaud, Médiaspaul 1989, p. 73

01 avril 2006

Tout se résume à la Croix ?

Pour Rahner, la contemplation du Christ en croix est source originelle de grâce. "De son côté transpercé que découlent ces fleuves de grâce". (1)
On retrouve l'héritage ignatien et la longue pratique des exercices spirituels qui n'aboutissent finalement à rien d'autre que ce sommet de la prise de conscience de l'unique médiateur, crucifié et qui nous assigne, dans et au delà de notre liberté à l'amour. Cela rentre en résonnance avec ce que développe Benoît XVI dans Deus caritas est.
La croix, n'est-ce pas finalement la clé centrale du mystère, ce qui donne sens à tout sacrement, le transfigure et l'élève. Plus je progresse dans ce chemin, plus je réalise que l'eucharistie ne peut se comprendre autrement qu'à travers la méditation de ce sacrifice sanglant. Non pour courir au sacrifice, mais pour percevoir, dans cette image véritable la hauteur, la profondeur, la longueur de cet amour kénotique du Fils, chemin unique et révélation de l'amour du Père.

(1) Karl Rahner, Coeur de Jésus chez Origène p. 173-174
Voir aussi : Deus Caritas est Kénose Rahner