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25 février 2018

Dynamique 8 - la tentation mystique

" Et Pierre répondit à Jésus : Rabbi il est bon que nous soyons ici. » Marc 9, 2-10.
"Quand je lis les Écritures et que je comprends spirituellement quelque enseignement sublime, moi aussi je ne veux pas descendre de là, je ne veux pas descendre à des réalités plus humbles : je veux faire dans mon cœur une tente pour le Christ, la Loi et les prophètes. Mais Jésus qui est venu pour sauver ce qui était perdu, qui n’est pas venu pour sauver ceux qui sont saints mais ceux qui se portent mal, sait que, s’Il reste sur la montagne, s’Il ne redescend sur terre, le genre humain ne sera pas sauvé" (1). 

J'appelle cela la tentation mystique.  Ce que Mounier souligne à sa manière en décrivant le risque bourgeois des bonnes idées qui ne passent pas à l'acte.

A méditer à l'aune de notre agir. Aimer Dieu n'est rien si l'on n'aime son frère dans sa pauvre réalité et sans retour, un chemin autrement plus difficile. 

Dieu en nous donnant son fils unique nous conduit sur les pas d'Abraham (Gn 22) vers le don total.

"Il n’a pas épargné son propre Fils,mais il l’a livré pour nous tous :comment pourrait-il, avec lui,ne pas nous donner tout ?" Rom 8, 31

(1) Saint Jérôme, Homélies sur Marc, n°6, SC 494 (p. 165,167,161,172, trad. SC) 

17 février 2018

Dynamique 6 - Saint Irénée et la gloire de Dieu

" Les hommes qui sont dans la lumière n'illuminent pas, eux, la lumière, mais par elle sont illuminés et par elle resplendissent : loin d'apporter quoi que ce soit à la lumière, ils en bénéficient et sont illuminés par elle.Ainsi en va-t-il du service de Dieu : à Dieu, il n'apporte rien, car Dieu n'a pas besoin du service humain. Mais à ceux qui le suivent et le servent, Dieu procure la vie incorruptible et la gloire éternelle. Il accorde ce bienfait à ceux qui le servent, parce qu'ils le servent, et à ceux qui le suivent, parce qu'ils le suivent, mais ne reçoit d'eux nul bienfait : car il est riche, parfait, et sans besoin.Dieu sollicite le service des hommes par bonté et miséricorde pour combler de bienfaits ceux qui le servent avec persévérance. Car autant Dieu n'a besoin de rien, autant l'homme a besoin de la communion de Dieu. La gloire de l'homme, c'est de persévérer et demeurer au service de Dieu. Et c'est pourquoi le Seigneur disait à ses disciples : Ce n 'est pas vous qui m'avez choisi, mais moi qui vous ai choisis ; il voulait dire par là qu'eux ne le glorifiaient pas en le suivant, mais que, pour avoir suivi le Fils de Dieu, ils étaient par lui glorifiés. Et il disait encore : Je veux que là où je suis, là ils soient aussi, pour qu'ils voient ma gloire."

Saint Irénée,  Contre les hérésies,  source AELF,  Bréviaire 1er samedi de Carême,  office des lectures

16 février 2018

Dynamique 5

Il y a un tout intérieur à trouver dans nos vies et toute action rituelle,  même le jeûne doit prendre conscience de la globalité du geste. 

 « Celui qui pratique le jeûne doit comprendre le jeûne : il doit sympathiser avec l'homme qui a faim s'il veut que Dieu sympathise avec sa propre faim ; il doit faire miséricorde, celui qui espère obtenir miséricorde. Ce que nous avons perdu par le mépris, nous devons le conquérir par le jeûne ; immolons nos vies par le jeûne, parce qu'il n'est rien que nous puissions offrir à Dieu de plus important, comme le prouve le prophète lorsqu'il dit : « Le sacrifice qui plaît à Dieu, c'est un esprit brisé ; le cœur qui est broyé et abaissé, Dieu ne le méprise pas » (Ps 50,19). Offre donc à Dieu ta vie, offre l'oblation du jeûne pour qu'il y ait là une offrande pure, un sacrifice saint, une victime vivante qui insiste en ta faveur. Mais pour que ces dons soient agréés, il faut que vienne ensuite la miséricorde. Le jeûne ne porte pas de fruit s'il n'est pas arrosé par la miséricorde ; le jeûne devient moins aride par la miséricorde ; ce que la pluie est pour la terre, la miséricorde l'est pour le jeûne. Celui qui jeûne peut bien cultiver son cœur, purifier sa chair, arracher les vices, semer les vertus : s'il n'y verse pas les flots de la miséricorde, il ne recueill pas de fruit. Toi qui jeûnes, ton champ jeûne aussi s'il est privé de miséricorde ; toi qui jeûnes, ce que tu répands par ta miséricorde rejaillira dans ta grange. Pour ne pas gaspiller par ton avarice, recueille par tes largesses. En donnant au pauvre, tu donnes à toi-même ; car ce que tu n'abandonnes pas à autrui, tu ne l'auras pas." (1)

(1) Saint Pierre Chrysologue, Homélie sur la prière, le jeûne et l'aumône ; PL 52, 320 (trad. bréviaire, 3e mercredi de Carême)




15 février 2018

Dynamique 4 - du personnalisme sacramentel

« Je ne commence à être une personne que du jour où se révèle à mes yeux [l'appel] (...) les valeurs qui me tirent au-dessus de moi. (...) le jour où chacun des membres a découvert chacun des autres comme une Personne et se met à la traiter comme telle (...) où chacune des personnes particulières s'occupe premièrement de tirer chacune des autres au-Dessus de soi vers les valeurs singulières de sa vocation propre et s'élève avec chacune d'elles. » (1)
Là se crée la deuxième phase de la dynamique sacramentelle que je cherche à décrire.

(1) Emmanuel Mounier, L'engagement de la foi, Paris, Parole et silence, 2017, p.42

Dynamique 3

Le sermon de Carême de saint Léon le grand s'inscrit en continuité des billets précédents en nous inscrivant de la même dynamique qui va dudon de la création à notre responsabilité : "Il est vrai en tout temps, mes bien-aimés, que la terre est comblée de miséricorde par le Seigneur. La nature elle-même enseigne à chacun des croyants qu'il doit adorer Dieu, puisque le ciel, la terre et la mer, avec tout ce qu'ils renferment, attestent la bonté et la toute-puissance de leur Créateur ; puisque l'admirable beauté des éléments mis à notre service exige de la créature douée d'intelligence une juste action de grâce.

Mais voici revenus les jours plus spécialement marqués par les mystères qui ont renouvelé les hommes, les jours qui précèdent immédiatement la fête de Pâques ; nous sommes donc invités à nous y préparer plus activement par une religieuse purification. ~

La solennité pascale a ceci de propre que toute l'Église s'y réjouit de la rémission des péchés. Cette rémission se réalise non seulement chez ceux qui renaissent par le baptême mais encore chez ceux qui déjà font partie de la communauté des fils adoptés par Dieu.

Le bain de la nouvelle naissance a pour effet principal de faire des hommes nouveaux ; toutefois, il incombe à tous de se renouveler quotidiennement pour combattre la routine de notre condition mortelle et, dans les étapes de notre progrès, chacun doit toujours devenir meilleur ; tous doivent faire effort pour qu'au jour de la rédemption personne ne demeure dans les vices de sa vie ancienne. 

Ce que chaque chrétien doit faire en tout temps, mes bien-aimés, doit donc être recherché maintenant avec plus d'empressement et de générosité. C'est ainsi que nous accomplirons le jeûne de quarante jours institué par les Apôtres ; nous ne nous contenterons pas de réduire notre nourriture, mais nous nous abstiendrons absolument du péché. ~

Rien n'est plus profitable que de joindre aux jeûnes spirituels et religieux la pratique de l'aumône ; sous le nom de miséricorde, elle englobe beaucoup d'actions de bonté qui méritent l'éloge, et c'est ainsi que les âmes de tous les croyants peuvent se rejoindre dans un même mérite, malgré l'inégalité de leurs ressources.

En effet, l'amour que l'on doit avoir tout ensemble pour Dieu et pour le prochain n'est jamais entravé par de tels obstacles que ce désir du bien ne soit librement à sa disposition. Les anges ont dit :Gloire à Dieu dans les hauteurs et paix sur la terre aux hommes pleins de bienveillance parce que non seulement la vertu de bienveillance, mais aussi le bien de la paix rend bienheureux celui qui compatit par sa charité à toutes les misères dont souffrent les autres.

Les œuvres de bonté sont extrêmement vastes, et leur diversité même permet aux vrais chrétiens de participer à la distribution des aumônes, s'ils sont riches et dans l'abondance, et même s'ils sont de fortune modeste ou dans la pauvreté ; et ceux qui, pour faire des largesses, sont inégaux en ressources, se ressemblent pourtant par les sentiments profonds." (1)

(1)Saint Léon le grand, sermon de carême, source AELF,  office des lectures du premier jeudi de carême

14 février 2018

Dynamique chez Mounier 2

Une distinction apportée par Mounier renforce cette idée. Pour lui, l'homme « n'est pas situé, il est pris dans un corps, dans un temps, dans un lieu, dans un monde, dans une tranche d'histoire (...) en liaison avec une mission singulière, par une attention particulière de Dieu. (...) il est un esprit manifesté dans une chair, s'irradiant en elle (...) vocation »(1)
C'est pour moi le premier pas de cette dynamique sacramentelle qui fait de nos corps des temples de Dieu dans cette dynamique déjà évoquée chez Bonaventure entre vestiges et ressemblances (Hans Urs von Balthasar parle de traces et de miroir)

(1) Emmanuel Mounier, L'engagement de la foi, Paris, Parole et silence, 2017, p. 31sq.

Dynamique sacramentelle chez Emmanuel Mounier

Je commence la lecture de « L'engagement de la foi » un recueil de textes d'Emmanuel Mounier paru sous la direction de sa femme chez Parole et Silence.
Outre cette filiation à la pensée de Blondel déjà évoqué dans mes chemins de lecture, je découvre cet auteur longtemps ignoré à tort.
A partir de l'évocation de Gabriel Marcel que je connais mieux, le voici qui évoque la tentation de l'avoir. « Mais l'homme n'est pas créé pour posséder les choses et développer sur elle son instinct de puissance, mais d'abord, dit la Genèse pour les nommer, c'est à dire en introduisant avec elle un dialogue en tu ». Suit chez Mounier une évocation du rapport à la nature de notre frère François et du lien entre vestiges et ressemblances chez Bonaventure, mais la nouveauté est pour moi l'évocation du « caractère sacramentel de l'univers chrétien » d'une « sorte de sacrement naturel qui contribue à le tourner vers Dieu (...) dans un geste d'accueil et de salut ».(1) Il y a des germes de Laudato Si dans ce passage...

(1) Emmanuel Mounier, L'engagement de la foi, Paris, Parole et silence, 2017, p. 30

28 novembre 2017

Vie et sacrement - 2

Les options ouvertes par Christoph Théobald dans les pages décrites précédemment sont complétées par son évocation des tentatives(1) de sacrement à deux vitesses qui traduisent une recherche d'adéquation entre demande et sacrement, allant jusqu'à proposer pour les jeunes enfants une « présentation au temple » qui n'est pas sacramentelle mais ouvre un mouvement.
Christoph Théobald cite un texte d'Augustin qui résume bien la problématique : « est esclave d'un signe celui qui fait ou révère un acte signifiant, sans en connaître la signification »(2). Si Augustin se réjouit que les signes de l'Ancienne Alliance se soient simplifiés en des sacrements « faciles à faire et très augustes et à comprendre », on peut s'interroger sur la réalité de cette compréhension dans une société marquée par l'exculturation du catholicisme.
J'apprécie également la distinction soulevée par Congar entre sacrements signes et sacrements personnes(3). Elle rejoint ce que j'ai cherché à exprimer dans ma « dynamique sacramentelle ». L'enjeu de ces sacrements personnes est, par leur seule présence d'être « en relation significative avec d'autres ». Tout cela inaugure dit Christoph Théobald un « état de mutation continuelle et de conversion missionnaire » (...) un appel « à revêtir le Seigneur Jésus-Christ »(Ga 3, 27) et à cette imitation de Jésus-Christ qui nous fait passer de l'image à la ressemblance comme le soulignait Bonaventure.
Je rejoins là l'idée de gradualité et de morale vectorielle déjà commenté dans ces pages...
L'enjeu est probablement d'axer nos élans missionnaires dans la compréhension de ces « vecteurs » de progression ouverts à tous, en direction du sacrement source qu'est le Christ lui-même.


(1) cf. Christoph Théobald, Urgences Pastorales, Paris, Bayard, 2017, p. 349
(2) Saint Augustin, La doctrine chrétienne, livre III, 12 et 13 cité in op. Cit p. 352
(3) Y. Congar, Esquisse du mystère de l'Église, Paris, Cerf, 1966, p. 22

27 novembre 2017

Vie et sacrement

J'ai déjà évoqué plus haut le schéma de Christoph Théobald entre vie et sacrements. On retrouve cette tension ici(1) quand il regrette « l'effet pervers de la ritualisation systématique de la sacramentaire du fameux « Septénaire » des sept sacrements [qui] renforce la coupure entre vie quotidienne et cette sphère du sacré [et] rend possible son « exculturation » et finalement sa fragmentation et son érosion »(1). S'il souligne que l'Église a réagi « en ménageant des espaces intermédiaires entre l'existence quotidienne des femmes et des hommes et son culte sacramentel » en évoquant les sacramentaux, il me semble que l'enjeu ne se résume pas à cela, car ce n'est pas le sacré qui compte, à mon avis, mais l'humanité toute entière qu'il faut habiter et rendre signe efficace de la vie en Dieu (2).
Le travail des prêtres ouvriers avait en soi cette exigence et l'on peut regretter qu'elle n'est pas trouvé une forme qui la fasse durer. La vie professionnelle des diacres est-elle son substitut...? Diaconie transformante...

(1) Christoph Théobald, Urgences Pastorales, Paris, Bayard, 2017, p. 347
(2) cf. ma « dynamique sacramentelle »

23 novembre 2017

Qui est le sujet de nos célébrations ?

La question posée par Christoph Théobald est essentielle. Qui est le sujet de nos célébrations ? Est-ce le prêtre venu parfois de l'extérieur au service d'une paroisse rendue passive ou est-ce la communauté elle-même « sujet collectif qui l'accueille pour qu'il la préside au nom du Christ(1) ». Derrière cette question se trouve l'enjeu de la refondation d'une unité véritablement sacramentelle de nos communautés, une pastorale de l'engagement et de la responsabilité sans tomber dans le double écueil du cléricalisme ou de l'excès d'autonomie des laïcs. Au milieu, la place du diacre est-elle de trancher d'un côté ou de l'autre ou d'avoir toujours en tension l'idée d'être un entre-deux qui favorise la prise de conscience de la dynamique sacramentelle de la communauté.

(1) Christoph Théobald, Urgences Pastorales, Paris, Bayard, 2017, p. 323sq

15 novembre 2017

Pertinence et impertinence de l’Église - Étienne Grieu

Un deuxième point qui mérite de s'arrêter dans l'analyse d'Etienne Grieu est ce paragraphe qui ose affirmer, à la différence de ce que pouvait dire Pierre Rabhi, interviewé ce matin sur RND, que l'Evangile passe par l'Église.
Cette affirmation ne va pas de soi. Elle est possible dans ce déplacement évoqué par Grieu à la suite de Théobald(1) dans la manière de penser la Révélation. Non pas un ensemble d'articles de foi mais une « dynamique relationnelle toujours à reprendre (...) une histoire qui se retisse et qui dans le feu de l'Esprit, projette de nouvelles lueurs sur ce qui nous a été donné par le Père » (2).

Dynamique qui avant d'être sacramentelle se tisse dans nos humanités...

« En redécouvrant l'Église comme fraternité nous sommes tout naturellement reconduits vers (...) ceux qui se tiennent au bord du monde », allusion explicite à la périphérie du pape François dans EG.

Cela nous ramène au coeur de l'alliance dans cet agenouillement de Dieu vers le monde.

Face à la tentation du repli, Grieu nous invite à une « audacieuse impertinence ». À méditer.

(1) Christoph Théobald, La réception du concile Vatican Il, Cerf, 2009
(2) Etudes n.4243 11/2017, op. Cit. p. 79

05 novembre 2017

Vie et sacrements

Je retombe sur le schéma de Christoph Théobald qui m'a conduit à écrire “la dynamique sacramentelle”. Il est tiré de la page 41 de "Présences d'Évangile: Lire les Évangiles et l'Apocalypse avec l'Église d'Algérie et d'ailleurs de Christoph Theobald, Paris 2003, p. 41. Pour moi ce schéma parle tout seul. il résume ce que je cherche à dire en 150 pages. Les sacrements n'ont de sens qu'en lien intime avec la  vie.

06 octobre 2017

Dynamique sacramentelle du salut - Théobald

Je poursuis ma lecture de "Urgences pastorales". Une tension intéressante est mise en lumière par Théobald : quitter l'illusion d'une "Église parfaite" pour la concevoir comme "sacrement universel du salut" (1) Il mériterait de préciser le sens du mot universel qui peut exclure les semences du verbe. Mais cette dynamique sacramentelle(2) rejoint mes travaux de recherche. Elle porte une espérance qui touche la nature même de l'Église, sa capacité intérieure à se transformer, à être signe.

(1) Christoph Théobald, Urgences Pastorales, Paris, Bayard, 2017, p. 58
(2) cf. mon livre éponyme

21 septembre 2017

Urgences pastorales de Christoph Théobald

Saluons ici la belle recension d'Élodie Maurot dans la Croix d'aujourd'hui qui m'invite à courir acheter le nouveau livre de Théobald(1).
J'y trouve déjà les thèmes que je ne cesse de travailler dans mes livres (la "pastorale du seuil", la "dynamique sacramentelle" ou "quel espérance pour l'homme souffrant ?").
On y verra aussi peut être des réponses aux questions soulevées par la lecture du dernier livre d'Alphonse Borras (cf. plus haut) ou les thèmes développés par Joseph Moingt dans L'Evangile sauvera l'Église.
Gageons que le défenseur de la pastorale d'engendrement va nous conduire un pas plus loin. À bientôt sur ce blog pour en commenter les meilleures pages.

(1) Urgences pastorales de Christoph Theobald, Bayard, 540 p., 19,90 €

06 septembre 2017

Dynamique sacramentelle et pneumatologie dialogale

Je me plonge avec plaisir dans l'œuvre phare du P. Georges Njila Jibikilayi (1) et m'arrête sur son analyse de la dynamique de l'esprit dans le "modèle témoignage" qu'il emprunte à Balthasar.

Il cite D. Mollat à propos des premiers chrétiens comme "cette communauté contagieuse parce qu'animée de la vie divine" en écho avec la "contagion du témoignage-langage" chez Hans Urs von Balthasar(2).

J'y vois un écho de ce que j'appelle de mon côté la dynamique sacramentelle. Mais l'intérêt de ses propos et de souligner justement ce qui est en jeu dans une dynamique de dialogue, à partir de ces fameux "spermata pneumatika" (p. 256) propre à toute culture et ici la culture africaine. L'incarnation en jeu ici est celle qui voit en tout homme la dynamique de vie et d'amour inscrite au coeur même de l'humanité que notre témoignage contagieux vient éclairer et stimuler, non comme des modèles mais dans la dynamique même d'un partage où tout homme est digne de révéler Dieu. L'enjeu n'est pas dans une évangélisation par le haut, mais bien dans une dynamique inductive qui ne nie pas la culture mais trouve en chacun l'œuvre de l'Esprit. C'est probablement là qu'il veut nous conduire en soulignant la faiblesse pneumatologique de l'approche théologique africaine et l'axe qu'il cherche à réveiller :
"L'inculturation n'est nullement une oeuvre d'autosatisfaction. Il ne serait pas utile d'amener l'évangile dans une culture sans aider celle-ci à s'épanouir" (3)
Il y a là pour moi une véritable pastorale d'engendrement au sens donné par Bacq/Theobald.

(1) Georges Njila Jibikilayi, La triple exégèse de la révélation chez Hans Urs von Balthasar, principe fondamentaux de la théologie du témoignage et implications théologiques sur le discours christologique africain, L'Harmattan, 2012, p.279
(2) Hans Urs von Balthasar, l'heure de l'Église, p. 24-25
(3) Georges Njila, ibid.

19 juillet 2017

Dynamique sacramentelle chez Ambroise de Milan


Une belle méditation sur la dynamique sacramentelle chez Ambroise de Milan :

"Dans le baptême trois témoins qui se rejoignent en un seul témoignage : eau, le sang et l'Esprit. Car, si tu en retires un seul, le sacrement de baptême disparaît. Qu'est-ce que l'eau, en effet, sans la croix du Christ ? Un élément ordinaire, sans aucune portée sacramentelle. Et de même, sans eau il n'y pas de mystère de la nouvelle naissance, car personne, à moins de naître de l'eau et de l'Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu. Le catéchumène croit, lui aussi, en la croix du Seigneur Jésus, dont il a reçu le signe, mais s'il n'a pas été baptisé au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, il ne peut recevoir le pardon de ses péchés ni accueillir le don de la grâce spirituelle. (...)
Le paralytique de la piscine de Béthesda attendait un homme. Lequel, sinon le Seigneur Jésus, né de la Vierge ? Avec sa venue, il n'y avait plus seulement une préfiguration qui guérissait quelques individus, mais la vérité qui guérissait tous les hommes. (...)
Ne considère pas le mérite personnel des prêtres, mais leurs fonctions. Et si tu tiens compte du mérite, de même que tu estimes Élie, tiens compte des mérites de Pierre ou de Paul : c'est eux qui nous ont transmis ce mystère qu'ils ont reçu du Seigneur Jésus. Un feu visible leur était envoyé pour qu'ils croient pour nous qui croyons, c'est un feu invisible qui agit. (...) Crois donc que le Seigneur Jésus est là, invoqué par la prière des prêtres, lui qui a dit : Quand deux ou trois sont réunis, je suis là, moi aussi. À plus forte raison, là où est l'Église, là où sont les mystères, c'est là qu'il daigne nous accorder sa présence.
Tu es donc descendu dans le baptistère. Rappelle-toi ce que tu as répondu que tu crois au Père, que tu crois au Fils, que tu crois en l'Esprit Saint. Tu n'as pas à dire : Je crois en un plus grand et en un moins grand et en un dernier. Mais, par un même engagement de ta parole, tu es tenu de croire au Fils de la même manière que tu crois au Père, de croire en l'Esprit Saint de la même manière que tu crois au Fils, avec cette seule différence que tu confesses devoir croire en la croix du seul Seigneur Jésus." (1)

(1) Ambroise de Milan, Traité sur les mystère, source AELF

17 juin 2017

Église sacrement

La question soulevée lors des débats de Vatican II sur l'utilisation de l'expression "Église sacrement" (1) rejoint mes réflexions sur la dynamique sacramentelle. Si je comprends bien les arguments avancés par les conservateurs, il n'y a que 7 sacrements et l'Église ne peut en être. N'est-ce pas réduire à la fois le signe au rite et l'esprit à l'action du prêtre. Je caricature peut-être. Mais si l'Église en dépit de ses humanités et du péché de ses membres n'est signe de rien pour le monde, les sacrements non plus seront inutiles. Il y a interpénétration entre l'Église et la vie sacramentelle qui l'habite et la dimension kénotique de l'Église dépasse tout ce qui la constitue puisqu'elle est habitée de l'intérieur par un souffle qui l'entraîne toujours plus loin.

Sur ce point j'ai longtemps glosé sur le fait qu'on considérait que le lavement des pieds n'avait pas besoin d'être identifié comme sacrement puisque l'Église serviteur était le coeur même de sa destination. (2)


(1) L'événement Vatican II op. Cit. p. 245
(2) l'idée est ancienne. Il me semble qu'elle est reprise par Moingt. Je la développe dans plusieurs ouvrages

06 juin 2017

Une tradition dynamique

"Cette Tradition qui vient des apôtres se poursuit dans l'Église sous l'assistance du Saint-Esprit : en effet, la perception des choses aussi bien que des paroles transmises s'accroît" DV8.

"Selon cette définition, précise John W. O'Malley, la tradition n'est pas inerte, mais dynamique" (1).

Je m'amuse à retrouver chez l'Américain cette expression qui est l'une de mes préférés dans mon essai sur la dynamique sacramentelle. Elle est l'enjeu pour moi d'une remise en question pastorale des conditions d'inculturation de la foi, non pour sombrer dans un relativisme tiède, mais parce qu'un travail à la périphérie nécessite une souplesse qui permet de rejoindre au plus près ceux qui n'ont plus accès à la source, à l'image de Celui qui mangeait avec les prostituées et les pécheurs.

Mais l'enjeu n'est pas pour autant de changer pour changer, mais bien un retour aux sources évangéliques, à ce qui fait le coeur de notre agir chrétien, un mouvement qui est proche de ce ressourcement prôné par Congar et Lubac (2)

(1) John W. O'Malley, Vatican II, p. 61
(2) ibid. p. 66

13 mai 2017

Monopole du prêtre ?

L'analyse d'Alphonse Borras part en fait d'un constat qui prend sa source dès les premiers siècles jusqu'à aboutir à une situation de fait : le monopole du prêtre dans la paroisse, avec tout ce que cela entraîne de clichés et de "mimétisme"(1)
Pour autant son analyse est disruptive puisque plus loin, rejoignant d'ailleurs la lettre du pape au cardinal Ouellet, il invite tout chrétien à un "sacerdoce d'existence" qui est pour lui "plus radical encore qu'un sacerdoce de fonction"(2). Cela ne nie pas la grâce sacramentelle de l'ordre mais donne à celle du baptisé toute sa puissance. C'est bien cela que je qualifie de dynamique sacramentelle.
(1) op cit p. 34
(2) p. 61

11 mai 2017

Sacerdoce commun - Alphonse Borras

Je reprends la lecture de Borras(1) Ce qui me frappe dans son chapitre 2 tient d'abord à la dynamique sacramentelle qu'il développe pour tous les baptisés, appelés et convoqués à la même fonction sacerdotale.

Pour lui, l'enjeu reste que tous baptisés se sentent "disciples missionnaires" et qu'ils "intercèdent devant Dieu pour le monde" au sein d'un "sacerdoce commun à tous les baptisés [qui] s'inscrit dans le Sacerdoce du Christ qui s'offre au Père et reconduit vers lui toute l'humanité"(1).
Il évoque nos églises actuelles comme des "minorités témoins, au sens sacramentel", rejoignant ce que je décris de mon côté dans "la dynamique sacramentelle"(2).

C'est pour moi à la fois l'enjeu et l'interpellation. Comme je l'écris après Theobald, la question sacramentelle doit être vue ici au sens le plus large. L'enjeu est une communauté qui est signe pour le monde, plus que dans la seule commémoration de l'eucharistie pour autant essentielle, mais à travers elle dans ses fruits d'unité et de charité, ce que Borras developpe en évoquant la multitude des charismes.

(1) Alphonse Borras, quand les prêtres viennent à manquer, Paris, Mediaspaul, 2017, p. 59
(2) cf mon livre éponyme.