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15 décembre 2019

La voix, le silence et la Parole - saint Augustin - amour en toi, 49…

« La parole est déjà dans mon cœur ; mais lorsque je veux te parler, je cherche comment faire passer dans ton cœur ce qui est déjà dans le mien.

Si je cherche donc comment la parole qui est déjà dans mon cœur pourra te rejoindre et s'établir dans ton cœur, je me sers de la voix, et c'est avec cette voix que je te parle : le son de la voix conduit jusqu'à toi l'idée contenue dans la parole ; alors, il est vrai que le son s'évanouit ; mais la parole que le son a conduite jusqu'à toi est désormais dans ton cœur sans avoir quitté le mien.

Lorsque la parole est passée jusqu'à toi, n'est-ce donc pas le son qui semble dire lui-même : Lui, il faut qu'il grandisse ; et moi, que je diminue ? Le son de la voix a retenti pour accomplir son service, et il a disparu, comme en disant : Moi, j'ai la joie en plénitude. Retenons la parole, ne laissons pas partir la parole conçue au fond de nous.

Tu veux voir comment la voix s'éloigne, tandis que demeure la divinité de la Parole ? Où est maintenant le baptême de Jean ? Il a accompli son service, et il a disparu. Maintenant le baptême du Christ se multiplie. Tous nous croyons au Christ, nous espérons le salut dans le Christ : c'est cela que la voix faisait entendre.

Il est difficile de distinguer la parole de la voix, et c'est pourquoi on a pris Jean pour le Christ. On a pris la voix pour la parole ; mais la voix s'est fait connaître afin de ne pas faire obstacle à la parole. Je ne suis pas le Messie, ni Élie, ni le Prophète. On lui réplique : Qui es-tu donc ? Il répond : Je suis la voix qui crie à travers le désert : Préparez la route pour le Seigneur. La voix qui crie à travers le désert, c'est la voix qui rompt le silence. Préparez la route pour le Seigneur, cela revient à dire : Moi, je retentis pour faire entrer le Seigneur dans le cœur ; mais il ne daignera pas y venir, si vous ne préparez pas la route.

Que signifie : Préparez la route, sinon : Priez comme il faut ? Que signifie : Préparez la route, sinon : Ayez d'humbles pensées ? Jean vous donne un exemple d'humilité. On le prend pour le Messie, il affirme qu'il n'est pas ce qu'on pense, et il ne profite pas de l'erreur d'autrui pour se faire valoir.

S'il avait dit : Je suis le Messie, on l'aurait cru très facilement, puisqu'on le croyait avant même qu'il ne parle. Il l'a nié : il s'est fait connaître, il s'est défini, il s'est abaissé.

Il a vu où se trouvait le salut. Il a compris qu'il n'était que la lampe, et il a craint qu'elle ne soit éteinte par le vent de l'orgueil. » (1)



Il est au milieu de vous,                    
celui que vous ne connaissez pas ;
préparez le chemin du Seigneur,
écoutez sa voix, amis de l'Époux,
pour que votre joie soit parfaite.

℟ Réjouissez-vous dans le Seigneur !
Réjouissez-vous, car il est proche

(1) Saint Augustin, homélie pour la nativité de Jean Baptiste, source : office des lectures du troisième dimanche de l'avent

15 décembre 2018

Au fil de Matthieu 17,10-13.


« Descendant de la montagne, les disciples interrogèrent Jésus :
« Pourquoi donc les scribes disent-ils que le prophète Élie doit venir d'abord ? »
Jésus leur répondit : « Élie va venir pour remettre toute chose à sa place.
Mais, je vous le déclare : Élie est déjà venu ; au lieu de le reconnaître, ils lui ont fait tout ce qu'ils ont voulu. Et de même, le Fils de l'homme va souffrir par eux. »
Alors les disciples comprirent qu'il leur parlait de Jean le Baptiste. » Matthieu 17,10-13.

La figure d'Elie est une figure fragile. Elle convient bien à l'humble chemin de Jean Baptiste. Écoutons le commentaire de Saint Ephrem sur le texte célèbre de 1 Rois 19(1)
« Après avoir entendu ce murmure, Élie se couvrit le visage de son manteau. Il sortit, se tint debout à l'entrée de la grotte, et voici qu'une voix lui disait : 'Élie, que fais-tu ici ?' Il répondit : 'J'éprouve un zèle ardent pour mon Seigneur le Dieu des armées, parce que les fils d'Israël ont abandonné ton alliance' ». Le prophète se tint à l'entrée de la grotte, sans oser s'approcher de Dieu qui venait, et il se couvrit le visage, dans la pensée qu'il était indigne de voir Dieu... Il avait pourtant devant les yeux un signe de la clémence divine et, ce qui aurait dû le toucher plus encore, il faisait en personne l'expérience de la bonté merveilleuse de Dieu, dans les paroles qu'il lui adressait. Qui ne serait séduit par la bienveillance d'une si grande majesté, par une question si douce : « Élie, que fais-tu ici ? » (2)


(1) cf. aussi La voix d'un fin silence
(2) Saint Ephrem, Œuvres, éd. Assemani, t. 1, p. 486 (trad. Thèmes et figures, DDB 1984, coll. Pères dans la foi 28-29, p. 285), source Evangelizo 


23 août 2018

Au fil de Luc - 7, 28 - Kénose du baptiste

"Parmi ceux qui sont nés d'une femme,  aucun n'est plus grand que Jean ; et cependant le plus petit du Royaume de Dieu est plus grand que lui" (Luc 7, 28 Tob 88)

Commentaire :
"Il sera grand devant le Seigneur" disait déjà Lc 1, 15. Que pensez de cette limite ? Peut-on dire que la sagesse humaine du Baptiste n'est pas complète ? Elle reste conditionnée à la révélation du Tiduum pascal. Jean va au plus loin du Premier Testament,  pourtant cette sagesse partiellement révélée n'est rien par rapport à ce que va révèler la vie et la mort de Jésus.  La kénose du cousin de Jésus précède celle de ce dernier et l'introduit.  C'est dans la kénose du Fils que Dieu révélera "le Nom qui est au dessus de tout nom". (Ph. 2, 9).

Commentaire 2 :
Certains commentaires donnent au diacre un parallélisme intéressant avec le Baptiste. Comme Jean il est appelé à être signe et instrument (LG1) de la fonction de l'évêque, prologeant la fonction de serviteur de l'évêque(1)  Cette fonction prépare et s'efface devant le maître dont il n'est pas digne d'exercer les fonctions. Appelé à être ordonné diacre à Chartres le 22/9/18 je fais mémoire de mon futur saint patron Guildin, diacre appelé à être évêque et qui va jusqu'à Rome pour refuser cette fonction. Le diacre n'est pas appelé à gouverner, sauf dans des cas extrêmes de suppléance. Sa fonction n'est pas un monopole.  Il est signe, instrument et "passeur" d'une église serviteur de l'homme (2)

( 1) cf. Tournier
(2) cf. mon livre éponyme

13 décembre 2014

Voir Dieu - Le rêve des prophètes.

L'Avent nous permet de faire le long chemin des prophètes. Je retombe sur un livre commencé de A. von Speyr, qui a de très belles phrases sur ce temps de l'Avent : "Il entend la voix de Dieu", dit-elle (1), "il a maintenant une oreille pour la percevoir (...) l'obscure captivité de ce monde est suspendue (...) il est entré dans le monde de Dieu, avec des sens qui peuvent le saisir. (...) Il se voit soudainement tout entier transporté dans une nouvelle existence (...) il découvre
tout d'un coup le sens du nom de "Père". Plus loin (2) elle précise qu'il est "affaibli, aveuglé, chancelant". Il est pris de "tremblement".  "Il se sent comme un jeune garçon devant son père, il guette sa parole, la comprend jusqu'à un certain point, mais la cohérence et les motifs lui de ce que fait le Père lui restent voilés." (...) il obéit (...) avec une obéissance qui fait voler sa vie en éclats et la recompose de façon neuve selon un plan pour lui intelligible (...) il est dépouillé de lui-même, car Dieu l'a tellement associé à la sphère de sa volonté (...) qu'il exécute".

C'est sous cet angle que l'on peut contempler le texte de Matthieu 11,11-15 "En ce temps-là, Jésus déclarait aux foules : " Amen, je vous le dis : Parmi les hommes, il n'en a pas existé de plus grand que Jean Baptiste; et cependant le plus petit dans le Royaume des cieux est plus grand que lui.
Depuis le temps de Jean Baptiste jusqu'à présent, le Royaume des cieux subit la violence, et des violents cherchent à s'en emparer.
Tous les Prophètes, ainsi que la Loi, ont parlé jusqu'à Jean.
Et, si vous voulez bien comprendre, le prophète Élie qui doit venir, c'est lui.
Celui qui a des oreilles, qu'il entende !"

 Saint Augustin dira à ce sujet : "Jusqu'à Jean Baptiste la Loi et les prophètes comportaient des préfigurations qui avaient pour but d'annoncer l'avenir. Mais les sacrements de la nouvelle Loi, ceux de notre temps, attestent la venue de ce que les anciens proclamaient à venir. Et Jean a été, de tous les précurseurs du Christ, le messager qui l'annonce de plus près.  Car tous les justes et tous les prophètes des siècles antérieurs avaient désiré voir l'accomplissement de ce qu'ils discernaient déjà dans cet avenir dont l'Esprit Saint leur soulevait le voile. Le Seigneur Jésus le dit en personne : « Bien des justes et bien des prophètes ont désiré voir ce que vous voyez et ne l'ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l'ont pas entendu » (Mt 13,17). C'est pourquoi il a été dit de Jean Baptiste qu'il était « plus que prophète » et qu'« aucun des enfants des femmes ne l'a surpassé » (Mt 11,9-11).       En effet, les justes des premiers temps avaient eu seulement la faveur d'annoncer le Christ ; Jean Baptiste, lui, a eu la grâce de l'annoncer encore absent et de le voir enfin présent. Il a vu à découvert celui que les autres ont désiré voir. C'est pourquoi le signe de son baptême appartient encore à l'annonce du Christ qui vient, mais à l'extrême limite de l'attente. Jusqu'à lui, il y avait eu des prédictions du premier avènement du Seigneur ; maintenant, après Jean, cet avènement du Christ, on ne le prédit plus, on le proclame." (3)

Voir Dieu... Dans la deuxième partie de l'Amphore et le fleuve, j'ai donné une longue analyse du texte d'Exode 33 et 34 où je décris le désir de Moïse de voir sa face et la façon dont Dieu lui répond. C'est dans cet axe Moïse, Elie, Isaïe, ..., Jean, Jésus que nous pouvons entrer, à l'aube de Noël. C'est notre chemin de l'Avent.

(1) Adrienne von Speyr, La face du Père, P. Letheilleux,1984 p. 47
(2) ibid. p. 49ss
(3) Saint Augustin, Traité anti-donatiste « Contre les lettres de Petilianus » livre 2, §87 (trad. Bibliothèque augustinienne,  DDB 1986, vol. 30, p. 341), source : Evangile au quotidien

17 novembre 2014

Mt 11, 16-19 - danse trinitaire

‎Les lecteurs de Danse trinitaire (1) se rappelleront peut être de mon utilisation osée de Mt 11, 16-19 (//Lc 7) pour justifier le fait que Jésus nous appelle à la danse.


A qui comparerai-je cette génération? Elle ressemble à des enfants assis dans des places publiques, et qui, s'adressant à d'autres enfants, disent: 

A Nous vous avons joué de la flûte, et vous n'avez pas dansé;
B nous avons chanté des complaintes, et vous ne vous êtes pas lamentés.
B' Car Jean est venu, ne mangeant ni ne buvant, et ils disent: Il a un démon.
A' Le Fils de l'homme est venu, mangeant et buvant, et ils disent: C'est un mangeur et un buveur, un ami des publicains et des gens de mauvaise vie. 



La lecture de John P Meier qui voit dans ce texte un chiasme antithétique admirable (cf. A BB' A') en particulier dans la version de Matthieu me conforte dans mon analyse. Pour lui, c'est bien Jésus qui nous invite ici à une danse joyeuse, par opposition au chant funèbre de Jean (2).

Ce qui me réjouit aussi est que ce texte est considéré par lui, a la suite de E. P. Sanders, comme très certainement authentique et non comme un ajout de l'Église primitive, tant la citation qui suit et s'y accorde présentant Jésus comme "un glouton et un ivrogne" ‎ne peut être un ajout de l'Église primitive. (3)


(1) La danse trinitaire in A genoux devant l'homme
(2) John P. Meier, tome 2, op. Cit. p. 143
(3) ibid. p. 144-146