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18 mars 2021

Homélie du 5eme dimanche de Carême - année B

Projet 5 (écrit à 4 mains)


Cette année encore, nous sommes bousculés dans nos habitudes, nous allons vivre cette grande fête de Pâques dans des conditions difficiles liées à la pandémie. Rejoignons dans la prière toutes celles et ceux qui en souffrent et tous ceux qui ne comptent pas leur énergie pour les soigner.

Associons nous à ce chemin qui passe par la Passion avant d’atteindre cette Résurrection où nous pourrons proclamer et redire l’essentiel de notre foi. 


Comment aujourd’hui l’Ecriture nous interpelle elle particulièrement,  que nous dit la Parole aujourd’hui ?

Écoutons à nouveau les paroles de Jeremie 31 : « Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je l’inscrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple. »

Notre carême s’inscrit dans cette direction : faire alliance, apprendre à connaître Dieu, voir le Sauveur dans ce mystère tout particulier de la mort et de la résurrection. Et le suivre. Il ne s’agit pas d’une conversion du bout des lèvres, non une anecdote dominicale dans le cours de la semaine mais une transformation de l’intérieur. Dieu nous fait miséricorde. Il nous invite surtout sur son chemin, a avoir un cœur nouveau, un esprit nouveau, comme le dira à son tour Ézékiel. Il s’agit d’une nouvelle naissance disait Jésus à Nicodème, c’est à dire ne plus se laisser emporter par le vent mais choisir au fond de notre cœur le Chemin, la Vérité et la Vie.

« Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. (...) Rends-moi la joie d’être sauvé ; que l’esprit généreux me soutienne », nous dit le psaume 50.


L’évangile insiste. « si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit.

Nous sommes tout proche de la Passion. Le chapitre 12 décrit la dernière méditation de Jésus avant de basculer vers ce qui sera son Heure...


Jésus est médiateur d’une alliance nouvelle 

Ce grain de blé tombé en terre qui doit mourir pour refleurir et porter du fruit, c’est bien sûr d’abord le Christ qui annonce par la sa mort prochaine sur la Croix. Comment ne pas être interpellé par cette parole même de Jésus saisi par la crainte : « mon âme est bouleversée, que vais-je dire ?, Père sauve moi de cette heure ?  et Jésus de conclure : « NON, c’est pour cela que je suis parvenu à cette heure-ci ! »


Faut-il s’arrêter là ?

Non,  ce chemin est aussi le nôtre.

Pour avoir un cœur nouveau il nous faut aussi mourir...

Mourir à quoi ?

Ce n’est pas à moi de vous dire ce qu’il faut laisser mourir en vous, c’est à vous de discerner ce qui en vous conduit à la vie et d’oublier l’inessentiel, de le faire mourir...

Quel est l’enjeu... ? Qui aime sa vie la perd ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle.poursuit saint Jean.

Jésus nous appelle au décentrement, à un déchirement intérieur...

Prenons le temps cette semaine de laisser résonner cela en nous, de le relire en silence, en goûtant, en manduquant ces mots comme on le ferait avec nos plats préférés, une façon comme une autre de les intérioriser, de les faire nôtres en acceptant qu’elles nous bousculent, qu’elles changent notre cap de vie..

Mourir pour revivre...

Une clé est donner dans la suite du texte....

Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive ; et là où moi je suis, là aussi sera mon serviteur.

Quelle exigence cela entraine-t-il pour nous ? Apprendre à sortir de nos chemins de certitude, de nos zones de confort, apprendre à se dépouiller comme le Christ l’a fait lui-même.Souvenons-nous de ce bel hymne aux Philippiens (2,7-9) : « ils’est dépouillé, s’est abaissé… » s’est fait serviteur...


Servir...

Qu’est ce que servir...?

Il ne s’agit pas de servitude, d’auto flagellation mais d’amour.

Si notre cœur ne meurt pas à ce qui n’est pas amour, si nous n’arrivons pas à l’amour, cela ne sert à rien.

« L’amour prend patience, ne cherche pas son intérêt. » (1Co 13). L’amour est vie.

Cette semaine nous méditions un beau texte d’Ezechiel 47 qui évoque cette eau abondante qui « vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède ». 



Qu’est ce qui nous vient de Dieu ? 

Prenons le temps de contempler le double don que Dieu nous fait... la Parole et le pain...

Et laissons notre cœur habité par celui qui veut nous visiter...


Nous sommes chacun selon nos capacités, dépositaires d’un trésor, d’un grain de blé enfoui qui ne demande qu’à éclore pour ressusciter en nouspar le souffle de l’Esprit, les forces de vie, « pour nous rendre la joie d’être sauvé ». (ps 50).

Faisons silence quelques instants pour demander au Seigneur d’apprendre à écouter sa Parole en nous laissant toucher au cœur..jusqu’à retrouver ce cœur sensible, ce cœur de chair dont parle Jérémie.


Le Christ est lumière sur ce chemin. Mettons nos pas derrière celui qui est amour.

Alors, nous comprendrons pourquoi vint une voix qui disait : « Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore. »

Qu’est ce que la gloire du Fils ? L’élévation...

« Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. »

Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir. » (Jn 12)...

La gloire du Christ s’est l’amour qui se révèle dans sa mort. C’est le grain qui meurt pour nous montrer que la mort est vie, que mourir à ce qui n’est pas amour est vie. Jean 12 précède Jean 13, le lavement des pieds et la Croix. Marchons nous aussi vers la vie...en choisissant l’essentiel...l’amour.


31 janvier 2020

Au fil de Marc 4,26-34 - semence et pédagogie divine - amour en toi - 52

« Il en est du règne de Dieu comme d'un homme qui jette en terre la semence : nuit et jour, qu'il dorme ou qu'il se lève, la semence germe et grandit, il ne sait comment. D'elle-même, la terre produit d'abord l'herbe, puis l'épi, enfin du blé plein l'épi.
Et dès que le blé est mûr, il y met la faucille, puisque le temps de la moisson est arrivé. »
Il disait encore : « À quoi allons-nous comparer le règne de Dieu ? Par quelle parabole pouvons-nous le représenter ? Il est comme une graine de moutarde : quand on la sème en terre, elle est la plus petite de toutes les semences.
Mais quand on l'a semée, elle grandit et dépasse toutes les plantes potagères ; et elle étend de longues branches, si bien que les oiseaux du ciel peuvent faire leur nid à son ombre. » (Marc 4, 27-32)

On peut lire cette parabole sur deux niveaux ; en mode contemplatif pour voir le chemin de Dieu dans l'humanité depuis l'origine, comme une graine fragile qui suscite un vent de fécondité dans une terre libre et réceptive. On entre alors en résonance avec ma recherche déjà commentée plus haut sur la pédagogie divine.

On peut lire aussi cela sous le mode méditatif à la suite de Maxime le Confesseur : « La parole de Dieu (...) paraît bien petite (...) Mais quand elle a été cultivée comme il faut, elle se montre si grande que les raisons nobles des créatures sensibles et intelligibles se reposent sur elle. Car elle embrasse les raisons de tous les êtres. Mais elle-même, aucun être ne peut la contenir. C'est pourquoi celui qui a la foi comme un grain de sénevé peut, par la parole, déplacer la montagne, comme l'a dit le Seigneur (cf. Mt 17,20), c'est-à-dire chasser le pouvoir que le diable a sur nous et changer le fondement.
Le Seigneur est un grain de sénevé, semé en esprit par la foi dans les cœurs de ceux qui le reçoivent. Celui qui l'a soigneusement cultivé grâce aux vertus, déplace la montagne du souci terrestre. Puis, lorsqu'il a chassé de lui-même l'habitude du mal, si difficile à infléchir, il fait se reposer en lui les paroles des commandements et les modes d'existence ou les puissances divines, comme les oiseaux du ciel. (...) Ce n'est pas en dehors de ceux qui cherchent qu'il faut chercher le Seigneur, mais ceux qui cherchent doivent le chercher en eux-mêmes, par la foi qu'ils mettent en œuvre.
Car il est dit : « La parole est près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur » (Rm 10,8), c'est-à-dire la parole de la foi, comme le Christ lui-même : la parole de Celui qu'on cherche. »

L'amour est en toi comme un germe, une musique qui t'invite à « danser » sur les places. Ne refusons pas la valse de Dieu.

(1) Saint Maxime le Confesseur, Centurie sur la théologie II, n ° 10-11, 35 (Philocalie des Pères neptiques ; trad. J. Touraille, éd. DDB-Lattès), source : l'Évangile au Quotidien

21 juillet 2019

Grâce et Gloire 3 - Nu devant Dieu

J'ai souvent commenté ce concept à propos de Gn 3 ou Exode 33(1). Balthasar développe dans GC3AT une thèse comparable : "Au bon sens du terme, est nu celui dont le coeur est dévoilé dans l'amour devant Dieu qui se dévoile à lui par amour : un tel homme est revêtu d'éclat et de gloire. Mais celui qui est privé de la grâce, et par là de la nudité de l'amour, doit se revêtir de la ceinture de feuilles de figuier, il est couvert de honte comme un manteau" (Jr 3,25, Mi 7, 10, Ps 35, 26 et 109, 29) (2)

Que dire de cette nudité véritable ? Jean Paul II développe ce thème dans ses catéchèses du mercredi (cf. homme et femme il le créa). On peut aller un cran plus loin dans l'analogie sponsale : la nudité conjugale qui appelle à une véritable exposition et transparence est image fragile de cette nudité réciproque entre un Dieu crucifié et mis à nu et l'homme qui conscent à son tour à l'humilité et la dépendance.
À méditer
(1) cf. notamment l'amphore et fleuve
(2) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et La Croix, Théologique 3, Ancien Testament GC3AT, ibid. p. 130

30 octobre 2018

Au fil de Luc, 13, 18-21 - le grain - Maxime de Turin

« Un homme a pris une graine de moutarde et l'a jetée dans son jardin ; elle pousse et devient un arbre, et les oiseaux du ciel s'abritent dans ses branches. » 

Cherchons à qui s'applique tout cela... Je pense que la comparaison s'applique plus justement au Christ notre Seigneur qui, en naissant dans l'humilité de la condition humaine, comme une graine, monte finalement au ciel comme un arbre. Il est grain, le Christ broyé dans la Passion ; il devient un arbre dans la résurrection. Oui, il est une graine quand, affamé, il souffre de manquer de nourriture ; il est un arbre quand, avec cinq pains, il rassasie cinq mille personnes (Mt 14,13s). Là il subit le dénuement de sa condition d'homme, ici il répand le rassasiement par la force de sa divinité.
Je dirais que le Seigneur est grain lorsqu'il est frappé, méprisé, injurié ; il est arbre quand il rend aux aveugles la vue, qu'il ressuscite les morts et remet les péchés. Lui-même reconnaît qu'il est grain : « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas... » (Jn 12,24) (1)

Commentaire de saint Clément de Rome :
Remarquons, mes bien-aimés, comment le Seigneur ne cesse de nous montrer la résurrection future dont il nous a fourni les prémices en ressuscitant d'entre les morts le Seigneur Jésus Christ. Observons, mes bien-aimés, la résurrection qui s'accomplit périodiquement. Le jour et la nuit nous font voir une résurrection. La nuit se couche, le jour se lève, le jour s'en va, la nuit survient. Prenons les fruits : comment se font les semailles, et de quelle manière ? Le semeur sort, jette dans la terre chacune des semences. Celles-ci, tombant, sèches et nues, sur la terre, se désagrègent. Puis, à partir de cette désagrégation même, la magnifique providence du Maître les fait ressusciter et un seul grain en fait pousser une quantité, qui portent du fruit.(2)

Comme le suggère aussi Ignace d'Antioche, je voudrais être à son tour le froment de Dieu


(1) Saint Maxime de Turin, CC Sermon 25 ; PL 57, 509s (trad. coll. Pères dans la foi, Migne 1996, p. 123), source Evangelizo 
(2) saint Clément de Rome, lettre aux corinthiens, source AELF 
Sur le sujet voire aussi mes développements in Le troisième arbre

14 juin 2015

La graine de moutarde - Dynamique sacramentelle

Quel va être le fruit du sacrement en nous ?N'est il pas comparable à cette "graine de moutarde : quand on la sème en terre, elle est la plus petite de toutes les semences. 
Mais quand on l'a semée, elle grandit et dépasse toutes les plantes potagères ; et elle étend de longues branches, si bien que les oiseaux du ciel peuvent faire leur nid à son ombre." ( Marc 4, 31-32)
Comment cela est-il possible ? A écouter Saint Pierre Chrysologue, "tant que la graine de moutarde demeure intacte, ses vertus restent cachées, mais elles déploient toute leur puissance quand la graine est broyée. De même le Christ a-t-il voulu que son corps soit broyé pour que sa force ne reste pas cachée..." (1)

Qu'est ce à dire pour nous ? Si nous recevons en nous le sacrement comme grâce,  ce ne peut être que dans un esprit broyé ( cf. Ps 51), comme une terre vierge qui se laisse féconder après avoir accueilli la blessure du laboureur. 
Porter du fruit ce n'est pas claironner le mérite de notre foi comme un dû, mais s'effacer devant ce travail mystérieux de l'Esprit en nos coeurs,  reconnaître qu'il nous échappe,  qu'il est plus grand que nous et que notre décentrement sera le lieu de Sa croissance,  que notre faiblesse sera le terreau de Sa puissance. 

(1) Saint Pierre Chrysologue, Sermon 98, 1-2 ; CCL 24A, 602 (trad. Delhougne, Les Pères commentent, p. 225 rev.)