Affichage des articles dont le libellé est 1 Co 1. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est 1 Co 1. Afficher tous les articles

06 mars 2021

Homélie du 3eme dimanche de carême - année B

Projet 4

On peut faire fausse route en lisant ces textes qui nous parlent d’un Dieu jaloux qui condamne jusqu’à la quatrième génération ou si l’on s’arrête sur la colère du Fils. Ce serait d’abord oublier ce père aimant et miséricordieux que la liturgie nous a donné à contempler samedi...

Comme souvent, il y a également des points de tension entre chaque lecture. Ou plutôt ce que François appelle des contratensions (1), c’est-à-dire des tensions qui nous conduisent à grandir...

 La première lecture nous rappelle l’importance de cette sortie d’Égypte et du chemin pris par les Hébreux pendant 40 années. Cela rejoint notre chemin de carême. 

Il faudrait méditer longuement chacune des phrases que nous propose Exode 20 et voir ce qu’elle nous dit aujourd’hui, comment elle nous interpelle, prépare notre chemin de réconciliation et nous fait grandir.

La première parole qui peut nous interpeller aujourd’hui en ce temps de désert est probablement cet avertissement sur les idoles : « Tu ne feras aucune idole, aucune image de ce qui est là-haut dans les cieux, ou en bas sur la terre »... je vous laisse la reprendre intérieurement. Quels sont nos idoles, nos veaux d’or qui nous détournent de l’essentiel...?

 [long silence] 

Quelles sont nos idoles ?

Il faut noter surtout contempler ce don que nous fait Dieu sur cette route, ce qu’on appelle faussement les commandements alors qu’ils sont plutôt à prendre comme des paroles, des cadres de vie, des cadres d’éthique personnelle. 

Je pourrais commenter chacun des dix commandements, mais je m’arrêterai seulement sur le premier. 

« Tu honoreras ton père et ta mère ». Cela ne veut pas dire pour nous une dépendance mais plutôt de leur donner la juste place, surtout en ce temps de confinement et de solitude. On a entendu par ailleurs, il y a qq jours ce commandement de Genèse 2 : «  tu quitteras ton père et ta mère ». Il faut trouver un juste milieu entre le fait de quitter et d’honorer qui se trouve peut-être dans la contemplation de cette sagesse que nous recevons des anciens même s’ils sont à nos yeux plus affaiblis. Cela fait un lien avec ce que nous dit la lettre de Paul sur cette différence fondamentale entre Sagesse apparente des hommes et la faiblesse de Dieu plus sage que l’homme.

Quel est l’enjeu ?

Peut-être de prendre une distance sur l’apparence ou les nouvelles idoles. Et c’est ce que fait Jésus à propos du Temple. 

Le peuple s’est enfermé dans des rites, Des commandements stériles, des dîmes, des colombes à offrir et beaucoup d’autres choses qui ont réduit le temple à une dimension très sacrificielle. Cela énerve le Christ et on peut le comprendre. Sainte colère qui ne justifiera jamais la nôtre, car elle est aussi profonde tristesse sur l’aveuglement de l’homme qui ignore et déforme les dons de Dieu.

Moïse avait créé le sabbat non pas pour enfermer l’homme dans des rites, mais pour une prise de distance, un désert, un silence propice à la venue de Dieu en nous.  L’enjeu des rites n’est pas d’acheter la grâce ou l’indulgence, mais de laisser la place nette, s’ouvrir notre cœur à sa Présence. Détruisez les temples de pierre, fermez les églises, ce n’est pas grave si Dieu fait en nous sa demeure. 

L’enjeu pour nous est là, dans la contemplation de ce qui est vraiment le temple, de ce Jésus qui va donner sa vie et qui vient nous habiter, nous envahir et nous conduit, à sa suite, sur le chemin du don, de l’agapè, de cette charité véritable que nous ne pouvons exercer qu’habiter par la force qui vient de lui. Pas étonnant que les dix paroles de vie données  à  Moïse deviennent chez Jésus qu’un seul double commandement : aimer Dieu et son prochain, totalement, d’une mesure bien tassée et débordante, comme nous le rappelait l’évangile de lundi (Luc 6).

Comprendre cela, c’est participer à ce Corps en relèvement, c’est reconstruire ce qui a été brisé en nous par nos idolåtreries stériles, c’est participer au banquet, ce «  festin, en effet, c'est la plénitude de la réjouissance et de la tranquillité que de se reposer en Dieu et de contempler sa béatitude. » nous glisse Saint Ambroise.





07 juin 2020

Christ crucifié - un oxymore

J’écoute sans me lasser les commentaires des lettres de Paul du P. Morin en podcast sur le site des Bernardins. Cette phrase m’a touché à propos de 1Co 1 : Christ crucifié est par excellence un oxymore (je cite de mémoire) parce que le Messie attendu par les Juifs (le sens de Christ) n’avait pas vocation à être crucifié.
Nous sommes en effet dans cette tension théologique par excellence, disruption majeure dans la pédagogie de Dieu...
Nous attendons trop souvent, comme Judas, un Christ vainqueur et de la même manière une Église toute puissante de sagesse alors que nous ne cessons de faire l’expérience de nos fragilités.

«Quant à nous, nous prêchons le Christ crucifié: c'est un message scandaleux pour les Juifs et une folie pour les non-Juifs; mais pour ceux que Dieu a appelés, aussi bien Juifs que non-Juifs, le Christ est la puissance et la sagesse de Dieu. Car la folie apparente de Dieu est plus sage que la sagesse des hommes, et la faiblesse apparente de Dieu est plus forte que la force des hommes. Considérez, frères, qui vous êtes, vous que Dieu a appelés: il y a parmi vous, du point de vue humain, peu de sages, peu de puissants, peu de gens de noble origine. Au contraire, Dieu a choisi ce qui est folie aux yeux du monde pour couvrir de honte les sages; il a choisi ce qui est faiblesse aux yeux du monde pour couvrir de honte les forts; il a choisi ce qui est bas, méprisable ou ne vaut rien aux yeux du monde, pour détruire ce que celui-ci estime important. Ainsi, aucun être humain ne peut se vanter devant Dieu.» ‭‭1 Corinthiens‬ ‭1:23-29‬ ‭BFC‬‬

Heureux les fêlés car ils laissent passer la lumière reprend l’Arche comme slogan. Alors un peu d’humilité.... et je parle aussi pour moi...


21 février 2020

Au fil de Marc 8, 29-33 - suivre malgré tout

« Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Pierre, prenant la parole, lui dit : « Tu es le Christ. »
Alors, il leur défendit vivement de parler de lui à personne.
Il commença à leur enseigner qu'il fallait que le Fils de l'homme souffre beaucoup, qu'il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu'il soit tué, et que, trois jours après, il ressuscite.
Jésus disait cette parole ouvertement. Pierre, le prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches.
Mais Jésus se retourna et, voyant ses disciples, il interpella vivement Pierre : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. » (Marc 8, 29-33l

La tentation de Pierre mets en lumière nos propres fragilités. Comme le souligne en substance saint Cyrille, nous ne devons pas avoir honte de la croix du Sauveur, mais plutôt se laisser traverser par sa signification profonde : « Le langage de la croix est scandale pour les juifs, folie pour les païens », mais pour nous elle est le salut. (...) elle est puissance de Dieu (1Co 1,18-24).(...) Ce n'est pas par contrainte qu'il a quitté la vie, ce n'est pas par force qu'il a été immolé, mais par sa propre volonté. Écoutez ce qu'il dit : « J'ai le pouvoir de donner ma vie, et le pouvoir de la recevoir à nouveau » (Jn 10,18). ~ Il est venu délibérément à sa Passion, (...) Il n'a pas eu honte de la croix, car il sauvait toute la terre. Ce n'était pas un pauvre homme qui souffrait, mais Dieu fait homme qui allait combattre pour obtenir le prix de la patience.
Ne te réjouis pas de la croix en temps de paix seulement ; garde la même foi en temps de persécution ; ne sois pas l'ami de Jésus seulement en temps de paix, (...) . Tu reçois maintenant le pardon de tes péchés et les dons spirituels prodigués par ton roi ; lorsque la guerre éclatera, combats vaillamment pour ton roi. Jésus a été crucifié pour toi, lui qui était sans péché.Ce n'est pas toi qui lui as fait cette grâce, car tu l'as reçue le premier. Mais tu rends grâce à celui qui a payé ta dette en étant crucifié pour toi sur le Golgotha(1)


(1) Saint Cyrille de Jérusalem, Catéchèse baptismale n° 13, 3.6.23 (Livre des jours – Office romain des lectures ; Le Cerf – Desclée de Brouwer – Desclée – Mame ; © AELF Paris 1976 ; 4e jeudi TO, 578-579), source : l'Évangile au Quotidien

14 novembre 2018

Un seul pain - Hans Urs von Balthasar - 1 Co 10

Trois mots de Balthasar suscite ma méditation : « la manducation d'un seul pain, comme participation au Corps du Christ (1 Co 10,17) » (1)
Relisons la référence chez Paul : «La coupe de bénédiction, sur laquelle nous prononçons la bénédiction, n'est-ce pas une communion au sang du Christ? Le pain que nous rompons, n'est-ce pas une communion au corps du Christ? Puisqu'il y a un seul pain, nous, la multitude, nous sommes un seul corps; car nous partageons tous le même pain
‭‭(Première aux Corinthiens‬ ‭10:16-17‬) ‭

Dans nos églises nous mangeons des hosties bien rondes et bien lisses en oubliant qu'il s'agit d'un seul pain et surtout d'un seul corps. L'unité se joue déjà dans cette contemplation de ce qui est pourtant une évidence. Nos individualismes nous font oublier cette invitation à l'unité. 

On entend comme en écho le premier chapitre de la même lettre : « «J'entends par là que chacun de vous dit: « Moi, j'appartiens à Paul! » – « Et moi, à Apollos! » – « Et moi, à Céphas! » – « Et moi, au Christ! » Le Christ est-il divisé? Est-ce Paul qui a été crucifié pour vous, ou bien est-ce pour le nom de Paul que vous avez reçu le baptême?»
‭‭Première aux Corinthiens‬ ‭1:12-13‬.

Il nous faut sans cesse prier pour que l'unité se fasse en nous et entre nous, deux dimensions d'une même danse en Christo.

Hans Urs von Balthasar va plus loin : «  l’Esprit [conduit] (...) a une unité indivisible [au point que] la contemplation et le sacrement forment une unité ecclésiale première et indissociable » (ibid. p. 99)


(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 97

Photo : Détail de Fra Angelico, la danse des anges.