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19 avril 2020

Esthétique et Pédagogie divine 26 - Gerhard von Rad

« La parole de Dieu doit, sans cesse, comme une source, murmurer dans le cœur et dans la bouche de l'homme pieux nous disent les psaumes 1,2 ; 19,15 ; 63, 7;  77,13 143, 5 »(1) 

Le but, nous dit à sa manière Urs von Balthazar est d'entretenir progressivement un lien tout particulier avec cette révélation divine progressive, « ce dialogue parfait où l'homme accepte qu'il soit déterminé par la fidélité à l'alliance, la crainte de Dieu et l'obéissance envers Dieu. dans la mesure où ce dialogue est tout entier informé par la grâce de dieu, il est, formellement, révélation trinitaire, avant même que la Trinité, matériellement, se révèle dans le Nouveau Testament. (2) »

Il est donc possible de chercher, comme nous l'avons fait dans pédagogie divine, ces traces de la révélation trinitaire, non seulement dans la construction même de l'histoire du peuple juif, mais à mon avis, de manière tout aussi légitime, dans ces traces ou semences du verbe dont nous parlait saint Justin et à sa suite Vatican Il dans GS.

Cette révélation progressive n’exclut pas que le rideau se déchire en Jésus Christ (3), mais il y a, comme le suggère Gerhard von Rad une « esthétique de l’Ancien Testament (4) : « c’est la foi qui façonne la forme et le style… C’est dans le domaine religieux qu’Israël a rencontré le beau avec le plus d’intensité, dans la contemplation de la révélation de Yahweh et de sa manière de conduire l’univers ; par cette manière de concentrer ses expériences esthétiques sur les articles de foi, il occupe une place spéciale dans l’histoire de l’esthétique ». Dans la contemplation du monde créé (psaume 104), Israël considère l’activité créatrice de Dieu avec « « tous les signes d’une émotion joyeuse », avec une suprême « délectation ». Dans la création tout est splendide, gratuitement splendide. Tous ces poèmes débordent  d’une ivresse de beauté qui ne pouvait être portée à un degré plus intense »(5).

Quel est l’enjeu, comme toute esthétique, il y a peut-être là une porte vers le ciel, comme l’est toute contemplation de l’univers. 

Dans notre monde plus noir, on peut effacer cela d’un trait. Le beau n’est qu’un chemin, une ouverture du cœur, une faille dirait Danièlou. De cette faille surgit l’espérance que la croix traduit en chemin vers ce que la résurrection dévoile de manière fugace. Dieu est au delà du beau, il est amour et miséricorde. 

« Si Sion est parfaitement belle (psaume 50,2) et « la joie de toute la terre » (psaume 48,3) (…) il ne conviendrait pas d’après Israël, « d’opposer cette déclaration emphatique à cette autre déclaration sur le serviteur de Yahweh qui n’avait ni beauté, ni éclat (Isaïe 53,2) et d’en faire un contraste absolu, car, dans ce dernier cas, il y a aussi une splendeur (sinon, elle n’aurait pas été exprimé sous forme poétique), mais beaucoup plus cachée. Cette audacieuse docilité à suivre les traces du mystère caché de la divinité, qu’Israël a assumé en parvenant à discerner une splendeur jusque dans le dépouillement le plus total de l’intervention divine, constitue certainement ce qu’il y a de plus remarquable dans les expressions esthétique de l’Ancien Testament (5).

Et Balthasar de conclure avec brio : « Dans le chant, Israël est heureux. En rendant à Dieu sa gloire, il s’accomplit lui-même en tant qu’image de Dieu, il comprend aussi pourquoi il ne doit y avoir aucune image taillée de Dieu. Dans l’échange de la parole divine, l’archétype et le reflet doivent se tenir découvert l’un devant l’autre. Ce n’est qu’ainsi qu’est préparé l’espace dans lequel la parole de Dieu pourra devenir chair ».(6)




(1) Urs von Balthazar, La gloire et la croix, 3 théologie, Ancienne Alliance, ibid. p. 179
(2) p. 181
(3) cf. plus bas mes essais éponymes 
(4) Hans Urs von Balthasar, ibid. p. 182
(5) Balthasar cite ici G. Von Rad , ThAT I, p. 361-365
(6) p. 183