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11 avril 2020

Homélie de la vigile pascale - année A

NB :  [cette homélie comme la plupart de celles préparées dans les jours derniers n’a pas été prononcée. Elle était pourtant « programmée » depuis février. Elle est comme toute les autres sur ce blog destinée principalement aux « chaises vides » d’hier soir, tous ces visages qui nous apparaissaient dans cette église vide de Nonancourt et que nous ne pouvions saluer, tous ces paroissiens confinés que nous avons porté, mon curé et moi dans la prière, en cette vigile pascale si particulière, mais aussi à toi lecteur inconnu qui cherche un éclair fugace de la présence divine dans un monde ombrageux]...

Version 3 


Quelle est notre espérance ?
Nous avons entendu beaucoup de lectures ce soir, et pourtant je vais faire une allusion à une autre, pour commencer cette méditation.
On la trouve dans le livre de Job, dans les derniers chapitres alors que les amis de ce dernier semblent abandonner tout argumentaire. Job se rend compte que ses questions le dépassent.
Pourquoi le mal ? pourquoi ?
Et Job de s'exclamer comme si le rideau s'était déchiré pour lui aussi : « je sais que tu peux tout. (...) J'ai parlé sans savoir de mystères qui nous dépassent » (Job 42, 1-3)

Ce soir, en cette vigile pascale, nous ne pouvons que nous taire. Dieu a déchiré le voile, pour nous montrer le mal et sa victime. Il nous introduit maintenant dans un éclair fugace et inexprimable : celui de la résurrection...

C'est là où, dans le silence, chacun des textes lus ce soir résonnent à sa manière comme un écho sublime de cette pédagogie divine qui nous a ouvert à l'acte créateur et nous introduit à l'espérance.

« Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance. (...) Dieu créa l'homme à son image, à l'image de Dieu il le créa, il les créa homme et femme. (...)
Et Dieu vit tout ce qu'il avait fait ; et voici : cela était très bon. » Gn 1, 31

Si vous relisez attentivement le premier texte, vous noterez que le texte de la Genèse dit la création de l'homme et de la femme qu'elle est très bonne - à la différence des autres jours... Le reste de la création est « bonne », la ressemblance est très bonne. L'hébreu me-od est un superlatif courant dans la bible (191 occurrences), mais le plus souvent il est le signe d'un excès de la bonté divine...
C'est peut-être notre première contemplation...

Qu'est-ce qui est si bon en l'homme pour mériter ce superlatif ? L'erreur serait de croire qu'il nous qualifie. C’était l’illusion et en même temps la dynamique ou le rêve que cherchait le psaume 111/112. L’homme bon, parfait. (1). La croix a montré au contraire que nous sommes capables de la plus vile violence. Elle l'expose, la met à nu.

Certes, ce qui est bon en nous vient de Dieu. Cette lueur fragile mise en nous et qui nous conduit à aimer...  Mais ce qui est très bon, nous disent certains pères de l'Église ce n'est pas l'homme ou la femme, c'est la ressemblance avec Dieu et, comme insiste Bonanventure, ce n'est pas l'homme mais l'homme parfait, celui qui a tout abandonné pour se faire esclave, « s'est vidé de lui-même » (kénose) et a gagné le nom qui surpasse tout nom : Dieu sauve - Jésus... » (cf. Ph 2, 11sq)...

Le mystère est là. La résurrection n'est pas un éclair aveuglant qui nous laisserait sans liberté, elle est une brise légère, une petite espérance qui porte notre vie au delà de la mort, au delà de toute incertitude dans un acte de foi qui résume tout.

Dans cette église vide, cette brise légère qui fait vibrer la flamme du cierge Pascal  résonne bizarrement, mais n’est-ce pas, d’une certaine manière une leçon d’humilité pour notre église blessée ?

L’espérance s'inscrit pour nous au bout du chemin comme cette lumière fragile qui nous dit qu'au delà de nos reniements l'amour est plus fort.

Si Abraham croit, c'est en cela. Si l'Exode est signe, c'est bien de cela. Nous devons nous détacher de ce qui nous retient au monde pour nous vider de nous mêmes et de nos ambitions humaines. Le Christ est ressemblance par son humilité, sa kénose, son abandon de toute puissance et là se réalise le dévoilement d'un possible, l'éclat de Dieu, comme amour jusqu'au bout, au delà de toute mort...

    « Si nous sommes passés par la mort avec le Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui.
Nous le savons en effet : ressuscité d'entre les morts, le Christ ne meurt plus ; la mort n'a plus de pouvoir sur lui. Car lui qui est mort, c'est au péché qu'il est mort une fois pour toutes ; lui qui est vivant, c'est pour Dieu qu'il est vivant. De même, vous aussi, pensez que vous êtes morts au péché, mais vivants pour Dieu en Jésus Christ. » Rom 6, 9-11

Quant à vous, « soyez sans crainte ! Je sais que vous cherchez Jésus le Crucifié. Il n'est pas ici, car il est ressuscité, comme il l'avait dit. » Mat 28.

Soyez sans crainte. En ces temps de troubles, l’affirmation de Jésus est la clé qui introduit à la résurrection à venir. Notre foi, c’est de croire que l’amour est plus fort que la mort. Dans la résurrection de Jésus se révèle une clé : l’amour est vie, communion, unité et espérance. Croire qu’il est le chemin c’est croire en l’amour.



(1) qu’il faut lire en parallèle du psaume précédent nous dit Hans Urs von Balthasar, La Gloire et La Croix, 3, Théologie, Ancienne Alliance, Paris, Aubier, 1974 p 179sq.