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12 octobre 2018

La tentation cléricale - 2

« Évoquer le saint peuple fidèle de Dieu revient à évoquer l'horizon vers lequel nous sommes invités à regarder et à partir duquel réfléchir. C'est le saint peuple de Dieu que, en tant que pasteurs, nous sommes appelés à regarder, protéger, accompagner, soutenir et servir. Un père ne se conçoit pas lui-même sans ses enfants. Il peut être un excellent travailleur, professionnel, mari, ami, mais ce qui fait de lui le père a un visage : ce sont ses enfants. Il en est de même pour nous, nous sommes pasteurs. Un pasteur ne se conçoit pas sans un troupeau, qu'il est appelé à servir. Le pasteur est pasteur d'un peuple, et c'est de l'intérieur que l'on sert le peuple. Bien souvent, l'on avance en ouvrant la route, d'autres fois, l'on revient sur nos pas afin que personne ne demeure en arrière, et souvent l'on se trouve au milieu pour bien sentir le pouls des gens. 
Regarder le saint peuple fidèle de Dieu et sentir que nous en faisons partie intégrante nous positionne dans la vie, et par conséquent, dans les thèmes qui nous occupent, de manière différente. Cela nous aide à ne pas sombrer dans des réflexions qui peuvent, en soi, être très bonnes, mais qui finissent par homologuer la vie de notre peuple et par théoriser au point que la spéculation finit par tuer l'action. Regarder continuellement le peuple de Dieu nous sauve de certains nominalismes déclarationnistes (slogans) qui sont de jolies phrases, mais qui ne parviennent pas à soutenir la vie de nos communautés. (...)
Regarder le peuple de Dieu signifie rappeler que nous faisons tous notre entrée dans l'Église en tant que laïcs. Le premier sacrement, celui qui scelle pour toujours notre identité et dont nous devrions toujours êtres fiers, est le baptême. À travers lui et avec l'onction de l'Esprit Saint, (les fidèles) « sont consacrés pour être une demeure spirituelle et un sacerdoce saint » (Lumen gentium, n. 10). Notre consécration première et fondamentale prend ses racines dans notre baptême. Personne n'a été baptisé prêtre ni évêque. Ils nous ont baptisés laïcs et c'est le signe indélébile que personne ne pourra jamais effacer. Cela nous fait du bien de nous rappeler que l'Église n'est pas une élite de prêtres, de personnes consacrées, d'évêques, mais que nous formons tous le saint peuple fidèle de Dieu. Oublier cela comporte plusieurs risques et déformations dans notre expérience, à la fois personnelle et communautaire, du ministère que l'Église nous a confié. Nous sommes, comme le souligne bien le Concile Vatican II, le peuple de Dieu, dont l'identité est « la dignité et la liberté des fils de Dieu, dans le cœur desquels demeure l'Esprit Saint, comme dans un temple » (Lumen gentium, n. 9). Le saint peuple fidèle de Dieu est oint par la grâce de l'Esprit Saint, et c'est pour cela qu'au moment de réfléchir, de penser, d'évaluer, de discerner, nous devons être très attentifs à cette onction.(1)
La tentation, poursuit notre pape, est de « sous-évaluer la grâce baptismale que l'Esprit Saint a placée dans le cœur de notre peuple »
(1)  cf. Pape François, lettre au Cardinal Ouellet, Du Vatican, le 19 mars 2016

Source : http://m.vatican.va/content/francescomobile/fr/letters/2016/documents/papa-francesco_20160319_pont-comm-america-latina.html

16 juin 2017

Juridisme, cléricalisme et triomphalisme - Mgr de Smedt

Après une allocation qui fit déjà du bruit le 19 novembre 1962 en marquant son opposition au projet de Fontibus(1), Monseigneur Émile-Joseph de Smedt, l'évêque de Bruges, alla plus loin le 1er décembre 1962 en disant que trois dangers pesaient sur l'Église : le cléricalisme, le juridisme et le triomphalisme(2). Comme le note Congar dans son journal, c'était un peu excessif. Mais le danger de ces trois tentations qui ne sont que des variantes de celle dénoncées par Jn (avoir, pouvoir, valoir) est le lot de toute humanité.

Qu'en est-il 55 ans plus tard ? Les propos du pape au cardinal Ouellet déjà cités ne soulignent pas autre chose. La réception de Vatican II n'est pas terminée.

(1) John W. O'Malley op. Cit. p. 206
(2) p. 215

03 mai 2017

Le flair du peuple de Dieu - Pape François

Le peuple de Dieu a du "flair" nous rappelle Alphonse Borras, citant le pape Francois (1). Une expression qui traduit ce souci du pastoral qui prime sur l'idée, du réalisme plus grand que l'idéologie.
Le sens de la foi du peuple de Dieu est "éveillé et soutenu par l'Esprit de Vérité" (LG 12a), précise-t-il (2).

Bien sûr le peuple peut se tromper et c'est dans l'articulation et la respiration entre Parole, traditions et flair que souffle probablement l'Esprit...

Mais il y a là comme un contrepoids à une lecture trop figée de la Parole et des traditions, qui permet au souffle d'agir, de déplacer, de réveiller ce qui pourrait se statufier. C'est peut-être cela la dynamique à venir : voir dans le flair pastoral des baptisés une porte de sortie à un cléricalisme qui se meurt de son auto-référence. Il faut relire la lettre du pape au cardinal Ouellet qui insiste pour dire qu'avant d'être prêtre tout le monde est baptisé : "Personne n’a été baptisé prêtre ni évêque. Ils nous ont baptisés laïcs et c’est le signe indélébile que personne ne pourra jamais effacer. Cela nous fait du bien de nous rappeler que l’Église n’est pas une élite de prêtres, de personnes consacrées, d’évêques, mais que nous formons tous le saint peuple fidèle de Dieu(3)". Il nous faut  percevoir le souffle d'une communauté qui s'éveille et bouge dans le sens du bien.

En disant cela je ne critique en rien les efforts des ministres. Je défends plutôt une vision synodale qui sans nier la primauté voit dans le flair d'une communauté plus que les perceptions individuelles (4)

(1) Pape François, discours du 17 octobre 2015 : "le sensus fidei empêche une séparation rigide entre Ecclesia docens et Ecclesia discens, puisque le Troupeau possède aussi don propre flair pour discerner les nouvelles routes que le Seigneur ouvre à l'Église".
(2) Alphonse Borras, Quand les prêtres viennent à manquer, repères théologiques et canoniques en temps de précarité, Paris, Médiaspaul, 2017, p. 16
(3) Lettre du pape François au Cardinale Marc Ouellet du 19 mars 2016
(4) cf. sur ce thème mes développements dans Cette Eglise que je cherche à aimer.