30 novembre 2021

Danse trinitaire - 17

Est-ce que nous déformons la Trinité par notre prisme trop humain ?

Difficile de dire cela en des mots simples… 

Telle est en tout cas la question posée par Jean Luc Marion alors que j’approche de la fin de son livre (1)

Après une éloge et une critique mêlée des sentiers tracés par Schelling, Barth et de l’adage Rahnérien(2) le philosophe interpelle notre manière de lire historiquement la Trinité dans une succession pour lui trop « chronologique » qui met le Fils puis l’Esprit après la Révélation du Père. 

Je m’explique : est-ce que l’Esprit n’existe qu’après la révélation de la relation Père Fils qui n’existe lui-même qu’en temps que Fils ? Où la Trinité est-elle entre 3 Personnes, circumincession * ou cercle parfait, unité virevoltante, spirale infinie préexistante dans leurs processions que j’ose qualifier de danse…


C’est peut-être aborder, d’une certaine manière cette fameuse et difficile notion de « consubstantialité » beaucoup critiquée avec le nouveau missel.


La réalité n’est pas forcément dans ce que montre l’histoire de la révélation nous dit Marion, qui tente de privilégier l’immanence à ce qu’on appelle l’économie…


Comment expliquer cela avec des mots accessibles ? Faut-il du coup, se laisser interpeller, y compris par l’Esprit qui ne peut être réduit à un don, daté, du Fils, mais fait bien partie de cette danse infinie (3) qui fait des trois Personnes une valse, à laquelle nous sommes conviés de toute éternité. 


L’amour divin n’est pas successif ou généalogique mais bien danse…


L’Esprit, trop souvent oublié, est là, de toute éternité. Est-ce Celui qui souffle déjà sur les eaux originaires ?. Il vient en tout cas jusqu’au cœur de l’homme dans des germes fragiles (4) ou dans la grâce du baptême. S’il nous embrase, n’oublions pas qu’il souffle où il veut, semble nous habiter, mais s’enfuit bien vite, parfois, loin des ors de nos églises, il vient d’Ailleurs et nul ne peut le saisir tout en ne cessant d’avoir à se laisser « saisir par Lui » (cf. Ph 3).


L’Esprit est sortie de soi, il pousse au désert(5), à quitter(6), il est invitation presque forcée à sortir de soi (anamorphose dit Marion).


Faut-il rapprocher cela d’une image de

Balthasar qui va loin dans une analogie avec le mariage :


« L'image de Dieu doit se trouver aussi dans [un] mouvement opposé (...) , qui le force à sortir de lui-même : du Je au Toi, et au fruit de la rencontre, que celle-ci soit la rencontre sexuelle de l'homme et de la Femme (le fruit peut alors être l'enfant, mais aussi, au delà, un fruit intéressant tout l'humain, qui dépasse la sexualité) ou une autre rencontre dans laquelle le Je se donnant au Toi, deviens pour la première fois lui-même, tout deux se réalisant dans un nous, dépassant la recherche du Je. Ce n'est que dans un tel dépassement que se produit la première image, immanente à l'esprit et puisque ces dépassements sont innombrables dans la société humaine, ils brisent toujours ainsi le modèle clos (par exemple d'un mariage) et forment de nombreux mouvements […] comme des vagues. » (7)


Je trouve cette image très belle, parce qu'elle élargit encore plus la notion d'image et en même temps elle la relativise. Nous sommes à l'image de Dieu quand nous parvenons à vivre une véritable relation ouverte et féconde, homme et femme, vis-à-vis constructif(8), dansant et fécond(9). Pourtant nos petites épiphanies, constituent, avec d'autres, une immense tapisserie, que l'on ne peut percevoir, comme le disait saint Augustin, qu'en prenant de la distance. 

Toutes ces lueurs d'amour sur terre, éclaire le monde de l'intérieur. C'est le fourmillement de Dieu qui s'incarne dans nos mains et nos coeurs. Nous sommes les fourmis de Dieu. 

Même si la métaphore a ses limites, car nous restons des êtres libres et ce n'est que scintillements, à l'image des étoiles qui reflètent à leur manière, la beauté d'une création vivante et agissante.


La Trinité est perte de pouvoir, déchaussement (cf. Retire tes sandales) qui dévoile la danse du feu divin, en des langues qui dépassent les récipiendaires et signifient l’amour.


Chant en langues ? Démaîtrise, renoncements ou consentements, la danse nous fait perdre pied, dans une spirale du don qui nous échappe car elle vient et ramène à Dieu…


(1) Jean Luc Marion, d’Ailleurs la Révélation, p. 463sq et chapitre 17, op. cit.

(2) cf. notamment la Dogmatique de Barth et Karl Rahner, Dieu Trinité « La Trinité qui se manifeste dans l'économie du Salut est la Trinité immanente, et réciproquement »

Voir aussi : https://www.cairn.info/revue-des-sciences-philosophiques-et-theologiques-2006-3-page-453.htm#re58no58

(*) voir la thèse d’E. Durand sur la Périchorèse 

(3) cf. ma danse trinitaire reprise in A genoux devant l’homme 

https://www.fnac.com/livre-numerique/a14805155/Claude-J-Heriard-La-danse-trinitaire

(4) les semences de l’Esprit est un beau thème que l’on trouve dans la fin de la trilogie d’Hans Urs von Balthasar 

(5) voir « Le chemin du désert »

(6) chemin d’Abraham

(7) Urs von Balthasar, Dramatique Divine 2,2 p. 416

(8) cf. Sylvaine Landrivon, la femme remodelée 

(9) je développe ce point dans « Aimer pour la vie »

27 novembre 2021

Danse fragile - 16bis -

« Comment es-tu foyer de feu

   et fraîcheur de la fontaine,

une brûlure, une douceur

   qui rend saines nos [blessures] ?

Comment fais-tu de l'homme un [signe],

   de la nuit une lumière,

et des abîmes de la mort

   tires-tu la vie nouvelle?


Comment la nuit vient-elle au jour ?

   Peux-tu vaincre les ténèbres,

porter ta flamme jusqu'au cœur

   et changer le fond de l'être ?


Comment n'es-tu qu'un avec nous,

   nous rends-tu fils de Dieu même ?

Comment nous brûles-tu d'amour

   et nous blesses-tu sans glaive ?


Comment peux-tu nous supporter,

   rester lent à la colère,

et de l'ailleurs où tu te tiens

   voir ici nos moindres gestes ?


Comment de si haut et de si loin

   ton regard suit-il nos actes ?

Ton serviteur attend la paix,

   le courage dans les larmes !


Cette « variation » sur l’hymne donné par l’office des lectures est elle la clé que je cherchais pour mes essais d’homélie du WE ?

Voici une v4.0 😉

——-

Nous entrons dans le temps de l’avent. La lecture de Jérémie 33,15,, nous annonce  un « germe de justice ». Qu’est ce à dire ? une semence, un grain qui meurt ?


Une semence, un don de Dieu ?

Qu’est ce que cela peut être ?

Nous sommes au milieu de l’hiver, la neige est à nos portes, nous enfonçons dans la boue, jusque dans nos églises.


Quel va être notre manière de préparer le printemps de Dieu…?

Faire en nous une petite place, creuser notre terre asséchée par des plantes ingrates, se plonger dans l’essentiel, retrouver en nous le terreau fertile, ce qui nous fait vibrer de l’intérieur.


Sommes nous patients envers les autres, patients avec Dieu ?


Patient avec Dieu ? 

Sommes nous patients, quand il semble ne pas répondre  à nos « où es-tu ? »


Dans la nuit, dans le silence…En quoi croyons nous ?

Qu’est ce qui arrête notre regard ?

Où est la flamme ?

Nous allumons à l’extérieur de belles guirlandes mais qu’elle va être la source de cette lumière ?


L’amour…?

L’amour endure tout, prend patience..

L’avent est le temps de la patience.


Le germe de justice dont parle Jérémie est un acte de foi. Il a fallu plusieurs centaines d’années avant que vienne la réponse…


Le Christ, fragile espérance, signe qu’au milieu de la nuit, de la violence, l’amour est possible.


Le don de Dieu est Christ.


Sommes nous prêts à l’accueillir ? C’est la question de l’avent… 


Prenons nous le temps, chaque soir, de laisser résonner en nous le Christ, sa parole, dans le silence… comme une semence fragile ? 


Quelle semence ? 

Peut-être cette danse discrète vers l’homme, que Dieu nous donne à contempler dans les gestes de Jésus, dans cet homme Jésus qui se penche, écoute, se tait, guérit, relève, demande à boire, s’agenouille, puis s’offre tout entier, se laisse transpercer, jusqu’à ce que, de son cœur, jaillisse un fleuve immense…


L’avent, c’est prendre notre amphore et s’avancer vers l’amour, prendre conscience qu’il est don de Dieu et s’y altérer, pour faire grandir en nous cette graine fragile, semée le jour de notre baptême et nourrie à chaque eucharistie.


Dieu chaque hiver fait un rêve, celui qu’à chaque fois que nous avançons vers la table de la Parole et du pain, la petite graine qui germe en nous grandisse jusqu’à ce qu’au printemps de Dieu, un champ immense apparaisse au milieu du désert. Danse fragile,  germe d'amour qui, en scintillant de l'amour humain devient signe du buisson ardent qu’est le Christ.

« Que le Seigneur vous donne, entre vous et à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant, comme celui que nous avons pour vous. » nous dit la 2eme lecture. ((1Th 3) Un sentier se dessine…


Une mesure sans mesure…


Ouvrir nos cœurs à l’amour…jusqu’à cette

« profonde transformation de tout l’être sous l’action de l’Esprit Saint, [jusqu’au]« retournement » né de la rencontre vivifiante avec Dieu » (1)

De nos essais vers le don, Dieu rêve de faire un immense feu….


(1) Frère John de Taizé, cité dans La Croix du 18/11

25 novembre 2021

Danse fragile - 16


La lecture de Jérémie 33,15, dimanche prochain, nous annonce  un « germe de justice ». Qu’est ce à dire ? une semence, un grain qui meurt ?

Puissante prophétie puisqu’elle nous fait probablement à la fois espérer la venue du Christ, fragile espérance, mais aussi, peut-être, ce que Justin appellera les « semences du Verbe », ce que Vatican II (GS §2) relève comme ce don de Dieu fait à tous les hommes qui peut faire germer en nous l’amour…


Le message à porter au monde est-il de l’ordre d’une semence fragile ? Quelle semence ? Peut-être cette danse discrète vers l’homme, que Dieu nous donne à contempler en Jn 13, pour que se révèle en nous "la philanthropie de Dieu ". (1) Un message, précise J. Moingt qu'il ne suffit pas d’évoquer mais qu’il faut ensuite mettre en « oeuvre et en image, en paraboles comme le faisait Jésus »


Quelle sera notre trace ? 

Congar au Concile disait : "Dieu m’a amené à la servir et à servir les hommes à partir de lui et pour lui, surtout par la voie des idées. J’ai été amené à une vie solitaire, très vouée à la parole et au papier. C’est ma part dans le plan d’amour. Mais je veux m’y engager aussi de cœur et de vie et que ce service d’idées lui même soit un service des hommes."(2)


Pense-t-il alors à Pascal qui après l’écriture s’est consacré à la charité ?


Difficile de servir l'humain... Quel que soit soit sa forme, sa visibilité, l'essentiel est peut être ce qui rayonne, en dépit de nos balbutiements fragiles, de la philanthropie même de Dieu, de ce germe d’amour enfoui dans l’homme qui lui chatouille et lui réchauffe le cœur et le conduit, à son tour à aimer.


N'est-ce pas d'ailleurs ce que le monde retient de plus beau à travers les gestes désintéressés des soeurs Téresa, Emmanuelle ou d'un abbé Pierre ou Ceyras. Si ce service de l'humain est le seul message qui passe, n'est-ce pas parce qu’il est signe, à sa manière de celui qui le premier, à la suite des Marie et autres femmes figures fragiles de l’Evangile, s’est mis "à genoux devant l'homme".(3)


Poursuivons avec Congar : "Quand on regarde vivre l'Église, (...) ce qu'elle est et porte en elle (...) il y a là, de sa part, dans les formes mineures au moins de son sacerdoce, de son prophétisme, l'exercice d'une forme de royauté, non d'autorité et de puissance — elle ne l'a pas — mais d'influence et de service, qui répond à sa véritable situation par rapport au monde. Car on peut dire qu'elle en a la responsabilité (...)". (4) 


Un texte qui rebondit avec ma méditation n.15…. Non pas une royauté de pouvoir, mais le service diaconal du royaume. Danse fragile à la lumière de celles que je cherche à thématiser.


Congar précise que "l'Eglise a [notamment] dans ce cadre véritablement le nom de semence ou cellule germinale du Royaume qu'aiment à lui donner en particulier les théologiens de langue allemande (Keimzelle)(5)".


Ce que saint Justin appellait les spermatikos logos ne sont-ils pas ces germes d'amour qui, en scintillant de l'amour humain véritable, deviennent signes de la philanthropie de Dieu.


Germes en tout homme, chrétiens ou non ? C’est notre espérance, celle de voir l’homme touché par le Verbe.


« Que le Seigneur vous donne, entre vous et à l’égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant, comme celui que nous avons pour vous. » nous dit la 2eme lecture. ((1Th 3) Un sentier se dessine…


Une mesure sans mesure…


(1) J. Moingt, L'Évangile sauvera l'Église, op. cit p. 121

(2) Yves Congar, Mon Journal du Concile I, 1960-63, Cerf, Paris, 2002, op. cit. p. 384

(3) cf. mon livre éponyme 

(4) Yves Congar, Jalons pour une théologie du laïcat, Cerf 1953, p. 133

(5) ibid. p. 134 et sa note où il cite le livre de H. André, Die Kirche als Keimzelle der Weltgöttlichung (Leipzig, 1920)

Danse tragique avec la royauté ? - 15

Quelle est cette royauté que nous vénérons aujourd’hui ?  Elle est probablement aux antipodes de tout concept humain puisque le trône de notre roi est un gibet…

Non pas une royauté extérieure, mais le règne de la Vérité en nous, qui nous libère de l’apparence et stimule notre humilité par rapport aux dons du Père…


J’ai toujours un peu de mal avec l’expression qui est pourtant au cœur du sacrement de baptême : Dieu fait de nous des rois…

J’ai trouvé un jour cette nuance que je préfère : Dieu fait de nous des serviteurs du Royaume…


Cette réflexion rebondit avec une introspection récente sur la tentation de l’ordonné… Il n’est pas difficile de percevoir que dans notre Église toute initiative de pouvoir conduit à des dérives.

Qu’elle soit pour un prêtre comme pour un laïc engagé… une femme en charge du caté ou un sacristain trop zélé…

C’est peut-être l’enjeu d’une vraie démarche synodale. 

A commencer par moi-même, qui, pendant mon chemin diaconal avait de beau discours sur la tentation d’être clerc et qui ai pris pourtant plaisir parfois à monter en aube à l’autel. Dur souvent de résister… heureusement que ma tendre épouse n’est pas tendre sur ce point. Elle connaît trop les failles de mon humanité 🙂


Ce plaisir est inhérent à la fonction et atisé par le regard des paroissiens qui vous sanctifie sans discernement. Et vous appelle « mon père » alors que Claude est mon prénom 🙂 


C’est probablement pourquoi la quête des prêtres ouvriers ou des séculiers, sans soutane ou croix affichée, des jésuites sans col romain dans le monde, incarnés et discrets reflétera toujours mieux la kénose (dépouillement) christique que tous les ornements liturgiques, la blancheur virginale de certains réguliers et les soutanes rutilantes payées à prix d’or dans certaines boutiques romaines…


La solitude du prêtre de campagne reflète plus pour moi l’Église en marche que le cléricalisme urbain, mis à part certains vieux vicaires méprisés parce qu’ils ont perdu leurs statuts… et qui pourtant sont plein d’une sagesse humble.


C’est ce qui a motivé en tout cas mon désir de quitter la métropole pour prendre la route chaque WE et rejoindre mon curé solitaire et lui apporter mon fraternel soutien…


Ce qui me motive le plus, c’est qu’il a quitté à 64 ans son Afrique natale pour servir l’Église dans sa fragilité et que sa bonne humeur fait revivre 12 petits clochers bien pauvres, même si la paroisse est 1,5 x plus vaste que Paris… 


Pendant ses trois premières années ici, il a vécu dans un presbytère en ruine, avec une bassine dans sa chambre, qui recueillait l’eau qui traversait le toit (heureusement c’est fini, il est au chaud… )


Quel contraste avec les ors parisiens…

A quand une vraie péréquation ?

Pour moi, en dépit de ses faiblesses, de ses coups de cœur, il est en chemin vers cette sainteté ordinaire dont parle François…


Il incarne ce que j’ai écris il y a 15 ans, dans « cette Église que je cherche à aimer ». Je déteste cette expression « donnez nous des saints prêtres » car il serait tellement plus simple de dire, donnez nous des saints…Je pense que parce qu’il est un homme « donné » mon curé marche dans cette direction, dans la dynamique particulière de Ph. 3.


Les vrais saints ne portent pas souvent d’aubes blanches, ils sont trop occupés à laver les pieds des souffrants. Souvent je me dis que ma diaconie n’est que façade à côté de ceux qui sont l’amour agissant…


Combien de fois, en écoutant l’un et l’autre parler de ce qu’il fait pour le royaume je me sens bien petit. Parfois même je glisse à la personne qu’elle est bien plus « diacre » que moi.


Dansez avec le roi de nos vies, c’est découvrir les signes de l’amour chez autrui. 

Reprendre alors le cri d’Augustin : Tu étais là et je ne le savais pas…


Mardi, je vais « monter » à l’autel à la demande appuyée d’un père et d’une mère qui souhaite me voir accompagner leur souffrance (perte d’un enfant de 21 ans). J’aurais préféré rester dans la « fosse commune »… la souffrance d’une mère qui accompagne son fils pendant ses 18 mois de cancer et jusqu’à la fin est une vraie diaconie. Elle est « danse tragique » avec la royauté du Christ souffrant …

11 novembre 2021

Danse fragile dans la nuit étoilée - 14

Méditation pour dimanche, v7

Ce 33eme dimanche qui vient, termine l’année liturgique avant le Christ-Roi. On ne doit pas pour autant entrer dans la noirceur d’un discours apocalyptique, mais trouver ensemble un chemin vers la joie, vers ces feuilles de figuier au vert tendre qu’évoque l’Evangile. Notre chemin est peut-être de contempler le passé avec distance, de se serrer les coudes et de tracer un chemin de charité partagée (en cette journée mondiale des pauvres), mais aussi d’espérance et de miséricorde.  Dieu ne veut pas la souffrance et la mort de personne disait Ezechiel, mais la vie… (cf. Ézékiel‬ ‭18:32‬ )


Quels sont les pas de danse que nous allons entreprendre pour mettre en nous et en nos frères des traces de cet amour et de cette espérance qui viennent de Dieu ?


J’ai joué de la flûte, allez-vous danser demande Jésus ? Mais quelle danse ? Une danse macabre où une danse fraternelle et joyeuse ? 


À leur manière, les textes de ce dimanche tracent ce sentier sinueux que l’on peut probablement mieux contempler à l’aune des pépites de la liturgie de cette semaine…


Nous avions notamment mardi un beau texte sur le temple d’où coule un torrent de vie…(Ez 47), ce torrent vient de Dieu, mais donne du fruit en se mêlant à la terre, il n’est pas une eau magique à regarder de loin, mais vient au contraire abreuver et donner de la force à notre agir. 

Dans notre nuit, sachons découvrir ce Dieu qui semble si loin et qui est pourtant si proche…


Nous pouvons rester dans la nuit, nous attacher à des étoiles et les lumières anciennes. Elles ont perdu de leur éclat, mais ne désespérons pas pour autant. Écoutons la première lecture.


« Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront (...)  pour la vie éternelle » nous dit-elle.

    Ceux qui comme nous se rassembleront pour recevoir et écouter la Parole ensemble pourront transpirer voire resplendire de la lumière qui vient d’en haut, à condition de s’évider d’eux-mêmes pour laisser place à l’amour véritable à « la splendeur du firmament » et redonner ainsi place à ce Dieu qui nous aime pour toujours et à jamais.


« Garde-moi, mon Dieu,

j’ai fait de toi mon refuge.

Seigneur, mon partage et ma coupe :

de toi dépend mon sort….

De toi dépend mon sort..


Je garde le Seigneur devant moi sans relâche ;

il est à ma droite : je suis inébranlable.

Mon cœur exulte, mon âme est en fête,

ma chair elle-même repose en confiance :

tu ne peux m’abandonner à la mort

ni laisser ton ami voir la corruption.

Tu m’apprends le chemin de la vie :

devant ta face, débordement de joie !

À ta droite, éternité de délices ! (Ps 15 (16), 5.8, 9-10, 11)


Nous avons vu, au bout de la nuit LA lumière, dressée sur le bois, seul signe de l’amour véritable, sacrifice unique, pour qu’à sa suite, un peuple se mette en marche, une communauté de priants, les pierres vivantes d’un monde à reconstruire se nourrissent des trois dons de Dieu : amour, foi et espérance.


Nous savons que Christ est notre victoire, alors marchons, courons vers le but (cf. Ph 3), auquel Dieu nous appelle.


Le pain rompu ensemble, la parole partagée*, ce don de Dieu caché en nous dans le silence, cette eau vive, ce fleuve immense nous appellent à devenir le signe d’un demain meilleur, la danse scintillante des pierres vivantes que nous sommes, appelés à aimer, espérance pour les souffrants, à condition de ne pas nous cacher sous le boisseau et de faire grandir les dons reçus…


Feux follets ou scintillements de lumière ? Quel est ce firmament qu’évoque le livre de Daniel. La lumière divine sera Lumière si nos bougies fragiles allument ensemble un nouveau buisson ardent. Ce feu de l’amour et de la fraternité ne vient pas de nous. Il s’est allumé dans nos nuits obscures, dans nos soupirs et nos peines, mais il a réchauffé en nous ce cœur brûlant qui est don de Dieu et déjà une joie nouvelle brille en nos cœurs. Laissons là nous embraser…


Seul l’amour reçu et partagé sera lumière. L’eucharistie n’est rien si elle ne fait pas de nous un Corps, une charité vivante et agissante.


* cf. la Maison d’Évangile - La Parole Partagée