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23 août 2014

Les deux églises

Dans un compte rendu paroissial, j'ai osé un jour parler de l'Église pécheresse, un  concept que je tiens de J. Moltman et de H. Kung. Un ami diacre a eu la gentillesse de corriger mon texte et de parler d'hommes pécheurs.
Depuis cette idée me travaille. Je conçois que le terme peut choquer une brebis sans berger. Et pourtant le péché de l'institution en tant que corps constitué est possible, probablement par qu'il est le fruit de dérives et d'aveuglements personnels. Et je ne parle pas seulement de l'inquisition. De tristes histoires nous le rappelle encore dans l'actualité. En cela la demande de pardon de Jean-Paul II avait du sens.
En fait, je crois qu'on peut dire qu'il y a deux églises en parallèle, de même que se côtoient en nous le bien et le mal. J'ai visité à Zagreb en Croatie une église dans lequel une barque est traversée d'une marque blanche en son milieu en souvenir des guerres fratricides qui ont marqué ce peuple.
Ce qui compte n'est pas l'Église visible, mais cette Église invisible que Dieu seul connaît, nourrit, habite et fait grandir. Cette Église sainte est celle que constituent tout ce bien qui, en nous, vient de Dieu, corps du Christ en marche.
L'autre Eglise, la visible, est parfois aussi très belle. Et dans nos efforts pour la rendre plus catholique (universelle) et
"diaconale" c'est à dire au service de tous les hommes‎, nous parvenons doucement à faire converger les deux. Quand je dis nous, c'est un peu prétentieux. Disons plutôt que l'Esprit en nous y veille.
Parler de deux églises est néanmoins osé. Il serait peut être plus sage de reprendre le mot souvent utilisé dans ce blogue de tension.
Sur un thème voisin, p. 217 de ESE*, J. Moingt décrit à sa manière cette tension entre des communautés ecclésiales qui cherche à vivre une diaconie horizontale et une structure verticale nécessaire qui ordonne et rassemble. Mais dire cela, à ce stade serait aller trop loin. La réalité, c'est que les deux pôles sont nécessaires, un peu comme Marthe et Marie se complètent.

* J. Moingt op. Cit.
Photo : C.HD (DR) , Eglise de Saint Lubin de Cravant. Pas très droite, mais si fragile...


Sur le même thème : "Cette Église que je cherche à aimer."

15 mars 2014

Saint Philippe - II, Le bien commun, in "Eglise et Société", Doctrine sociale de l'Eglise

Tant qu'à évoquer la vie de la "Paroisse de midi" à Saint-Philippe du Roule, autant citer aussi le projet en cours qui travaille sur le thème "Eglise et Société".

A - Extrait du programme

Comme les années précédentes, ce temps de partage hebdomadaire est proposé pendant le Carême,
chacun des cinq mercredis suivant le Mercredi des Cendres, de 12h30 à 13h30,
c'est-à-dire les 12, 19, 26
mars, 2 et 9 avril.

Cette année, le thème retenu est :
ÉGLISE ET SOCIÉTÉ ? TOUS CONCERNÉS !
Nous réfléchirons sur ces valeurs et principes très actuels que sont :

  1. Le bien commun (le 12/3/14)
  2. La propriété et la destination universelle des biens (le 19/3)
  3. L'attention aux plus pauvres (le 26/3)
  4. La subsidiarité (le 2/4)
  5. L'engagement dans la vie publique et dans la vie associative (9/4)


Où ?
À la salle Baltard de l’église Saint-Philippe du Roule (au fond à
gauche) ou à défaut, à l'ancienne sacristie, au fond à droite de l'église.

Comment ?
Un temps de discussion conviviale suivi d’un temps de prière libre à partir d'un document, envoyé au préalable
et dont vous trouverez en PJ le premier chapitre. Après inscription, des sandwichs seront proposés pour la deuxième séance.

Accès ?
Libre, mais vous pouvez vous inscrire à saintphilippepros@hotmail.fr pour recevoir les chapitres suivants.


B - Extrait révisé du Compte-rendu de la première séance


Un participant lit le texte des Actes des Apôtres, 4.31-37 en guise de prière.
La discussion s’ouvre. Elle aborde le bien commun sous différents angles, hésite, balbutie :  qu’est-ce au juste  que le bien commun ? Est-ce en référence à la propriété ? aux talents de chacun ? Est-ce lié au respect de la personne ? à la responsabilité personnelle ?

Un conflit semble exister entre les textes du Nouveau Testament (Talents, Mise en commun, voir C). On parle d'une tension théologique...

L’entreprise et ses problématiques de licenciement sont abordées. La notion de bien commun est rapprochée du bien de certains groupes :
- la famille,
- les membres d’une entreprise versus la société.

Une jeune femme évoque sa difficulté à voir l’entreprise rechercher le bien de ses salariés. Pour elle, l’entreprise recherche avant tout son profit, la croissance de son chiffre d’affaire et de ses revenus sans égard pour ses salariés.

Pourtant, certaines personnes trouvent dans leur fonction – qui peut-être humble -  un accomplissement personnel de par le rayonnement qui en résulte, ainsi une femme qui participe à la constitution des dossiers de mécénat d’une entreprise.

Le bien commun est-il du même ordre que l’intérêt général? L’intérêt général recherche le bien du plus grand nombre, non celui de chaque personne. Au moment du nazisme, les personnes handicapées étaient perçues comme inutiles et massacrées sous prétexte qu'elles portaient préjudice à l’intérêt général…
Ce n'est pas le bien commun...

Si l’entreprise est porteuse d’un bien commun, directement fondé sur l’épanouissement de chaque personne qui la constitue, pourrait-on faire une analogie entre l’entreprise et le monastère ?

Une encyclique de 1961 évoque le bien commun comme « l’ensemble des conditions sociales permettant à la personne d’atteindre  mieux et plus facilement son plein épanouissement » (Mater et Magistra, 1961). L’entreprise pourrait-elle s’inscrire pleinement dans cette perspective, son projet viser aussi l’épanouissement de chacun de ses membres dans ses talents particuliers ? La phrase de St Basile est à nouveau évoquée : « le charisme propre de chacun devient le bien commun de l’ensemble…de sorte que dans la vie commune, la force du Saint-Esprit donne à l’un devient nécessairement celle de tous » (St Basile, Grande Règle, 7).  Les talents de l’un appartiennent à tous et sont la richesse de la communauté. Si l’entreprise parvenait à développer les talents de ses membres, ceux-ci ne s’avéreraient-ils pas un surcroît de valeur, d’engagement, et de fidélité à son actif ?

Cela semble idéaliste. Et pourtant, nombre d’entreprise cherchent à développer les critères ESG pour attirer des talents (cf. aussi l'article sur ce sujet dans la Croix du 12 mars). C’est un premier pas, peut-être un facteur bénéfique pour l’entreprise. Mais qu’en est-il du projet commun ?

Un participant évoque l’entreprise qui est la sienne et sa direction exemplaire : le dirigeant fondateur a toujours vu son entreprise comme une communauté de personnes, et il a associé le développement économique de sa société à celui des hommes qui la constituait. L’entreprise ne doit pas trop s’écarter de cette visée, sous peine de toutes sortes de déviations et d’errements, la première étant la recherche effrénée de la croissance pour elle-même…

Un autre évoque un groupe qui met en place, en son sein, un groupe de réflexion éthique. Les salariés peuvent alors évoquer un point qui gène leur éthique personnelle. Cela conduit à l'évolution d'une charte interne de déontologie.

Finalement, la société elle-même semble en carence de toute idée de bien – ou de projet -  commun, comme les entreprises. Pourtant le secret d’un vrai succès – d’une véritable cohésion sociale -  ne se cacherait-il pas dans la redécouverte de cette dimension sociale et spirituelle d’un bien commun – d’une richesse commune -  compris comme la recherche de l’épanouissement de chacun de ses membres ? Au niveau de la famille, de l’entreprise, de la société, de l'Église et au-delà…


C  - Support de la réunion


Texte/Prière d'ouverture Actes 4, 31-37

31 Quand ils eurent fini de prier, le lieu où ils étaient réunis se mit à trembler, ils furent tous remplis du Saint-Esprit et ils disaient la parole de Dieu avec assurance.
32 La multitude de ceux qui étaient devenus croyants avait un seul cœur et une seule âme ; et personne ne disait que ses biens lui appartenaient en propre, mais ils avaient tout en commun.
33 C’est avec une grande puissance que les Apôtres rendaient témoignage de la résurrection du Seigneur Jésus, et une grâce abondante reposait sur eux tous.
34 Aucun d’entre eux n’était dans l’indigence, car tous ceux qui étaient propriétaires de domaines ou de maisons les vendaient,
35 et ils apportaient le montant de la vente pour le déposer aux pieds des Apôtres ; puis on le distribuait en fonction des besoins de chacun.
36 Il y avait un lévite originaire de Chypre, Joseph, surnommé Barnabé par les Apôtres, ce qui se traduit : « homme du réconfort ».
37 Il vendit un champ qu’il possédait et en apporta l’argent qu’il déposa aux pieds des Apôtres.

Le bien commun - Autres textes du Nouveau Testament

Mat 25 : 20 Celui qui avait reçu cinq talents s’approcha, présenta cinq autres talents et dit : “Seigneur, tu m’as confié cinq talents ; voilà, j’en ai gagné cinq autres.”
21 Son maître lui déclara : “Très bien, serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur.”

Actes 5 : 1-4 1 Un homme du nom d’Ananie, avec son épouse Saphira, vendit une propriété ;
2 il détourna pour lui une partie du montant de la vente, de connivence avec sa femme, et il apporta le reste pour le déposer aux pieds des Apôtres. 3 Pierre lui dit : « Ananie, comment se fait-il que Satan a envahi ton cœur, pour que tu mentes à l’Esprit, l’Esprit Saint, et que tu détournes pour toi une partie du montant du domaine ? 4 Tant que tu le possédais, il était bien à toi, et après la vente, tu pouvais disposer de la somme, n’est-ce pas ? Alors, pourquoi ce projet a-t-il germé dans ton cœur ? Tu n’as pas menti aux hommes, mais à Dieu. »


§ 164 De la dignité, de l'unité et de l'égalité de toutes les personnes découle avant tout le principe du bien commun, […] par bien commun on entend: « cet ensemble de conditions sociales qui permettent, tant aux groupes qu'à chacun de leurs membres, d'atteindre leur perfection d'une façon plus totale et plus aisée ».


Le bien commun - Compendium


Le bien commun ne consiste pas dans la simple somme des biens particuliers de chaque sujet du corps social. Étant à tous et à chacun, il est et demeure commun, car indivisible et parce qu'il n'est possible qu'ensemble de l'atteindre, de l'accroître et de le conserver, notamment en vue de l'avenir. Comme l'agir moral de l'individu se réalise en faisant le bien, de même l'agir social parvient à sa plénitude en accomplissant le bien commun. De fait, le bien commun peut être compris comme la dimension sociale et communautaire du bien moral.

§ 165 Une société qui, à tous les niveaux, désire véritablement demeurer au service de l'être humain, est celle qui se fixe le bien commun pour objectif prioritaire, dans la mesure où c'est un bien appartenant à tous les hommes et à tout l'homme. La personne ne peut pas trouver sa propre réalisation uniquement en elle-même, c'est-à-dire indépendamment de son être « avec » et « pour » les autres. Cette vérité lui impose non pas une simple vie en commun aux différents niveaux de la vie sociale et relationnelle, mais la recherche sans trêve du bien sous forme pratique et pas seulement idéale, c'est-à-dire du sens et de la vérité qui se trouvent dans les formes de vie sociale existantes. [...]
166 Les exigences du bien commun [...] concernent avant tout l'engagement pour la paix, l'organisation des pouvoirs de l'État, un ordre juridique solide, la sauvegarde de l'environnement, la prestation des services essentiels aux personnes, et dont certains sont en même temps des droits de l'homme: alimentation, logement, travail, éducation et accès à la culture, transport, santé, libre circulation des informations et tutelle de la liberté religieuse.[...]
167 Le bien commun engage tous les membres de la société: aucun n'est exempté de collaborer, selon ses propres capacités, à la réalisation et au développement de ce bien. Le bien commun exige d'être servi pleinement, non pas selon des visions réductrices subordonnées aux avantages partisans que l'on peut en retirer, mais à partir d'une logique visant à prendre les responsabilités aussi largement que possible. Le bien commun découle des inclinations les plus élevées de l'homme, mais c'est un bien difficile à atteindre, car il requiert la capacité de réaliser le bien des autres comme si c'était le sien et de le rechercher constamment.
Tous ont aussi le droit de bénéficier des conditions de vie sociale qui résultent de la recherche du bien commun. L'enseignement de Pie XI demeure très actuel: « Il importe donc d'attribuer à chacun ce qui lui revient et de ramener aux exigences du bien commun ou aux normes de la justice sociale la distribution des ressources de ce monde, dont le flagrant contraste entre une poignée de riches et une multitude d'indigents atteste de nos jours, aux yeux de l'homme de cœur, les graves dérèglements »*.

Patristique

Si tu cherches un exemple de mépris pour les biens terrestres, tu n'as qu'à suivre celui qui est le Roi des rois [...]  ; sur la croix, il est nu, tourné en dérision, couvert de crachats, frappé, couronné d'épines, enfin abreuvé de fiel et de vinaigre.  Ne sois donc pas attaché aux vêtements et aux richesses, car ils se sont partagé mes habits ; ni aux honneurs, car j'ai subi les moqueries et les coups ; ni aux dignités car, tressant une couronne d'épines, ils l'ont enfoncée sur ma tête ; ni aux plaisirs car, dans ma soif, ils m'ont abreuvé de vinaigre.
Conférence de Saint Thomas à ses étudiants sur le credo

Le charisme propre de chacun devient le bien commun de l’ensemble… de sorte que, dans la vie commune, la force du Saint-Esprit donnée à l’un devient nécessairement celle de tous.
Saint Basile, Grande Règle, 7

« Celui qui a recevra encore ; mais celui qui n’a rien se fera enlever même ce qu’il a »
Heureux le serviteur qui fait hommage de tout bien au Seigneur. Celui au contraire qui en revendique une part pour lui-même, celui-là cache au fond de lui-même l’argent du Seigneur Dieu, et ce qu’il croyait posséder en propre lui sera enlevé (Mt 25,18.28).
Saint François, Admonitions, 19-22.28 (trad. Desbonnets et Vorreux, Documents, p. 50s)

Pistes pour les échanges

  • On n'a rien qui ne nous ait été donné par Dieu. L'échange sacramentel du mariage le dit à sa manière. Il ne parle pas de donner puis de recevoir mais de recevoir avant de donner. Une distinction qui donne à penser.
  • Ce don du meilleur de Dieu, s’exprime enfin dans cette source jaillissante du cœur du Christ, qui traduit l’immensité du don, mais aussi son humilité, puisque le donateur s’efface dans la mort. Comme le souligne Jean-Luc Marion, « il se donne d’autant mieux qu’il disparaît (inconnu, mort) aux yeux de son éventuel donataire1 ».
  • Le bien commun en entreprise qu'est-ce que c'est ? L'entreprise elle-même ? Notre capacité à la maintenir vivante et porteuse de sens, d'humanité. Ses hommes ? Ses résultats ?
  • Est-ce un rêve ou quelque chose d'accessible ?

Pour aller plus loin :

1 Jean-Luc Marion, Jean Luc Marion, La conscience du don, in Jean-Noël Dumont et Jean Luc Marion, Le Don, Colloque interdisciplinaire, Novembre 2001, Le Collège supérieur, Lyon, p. 66sq.

20 octobre 2012

Je viens de finir la lecture des "deux pieds dans un bénitier" d'Anne Soupa et C. Pedotti... On ne peut plus l'éviter maintenant que Christine Pedotti a fait son coming out... et que Pietro de Paoli perd un peu de sa masculinité légendaire. Au fil de la lecture, si je retiens avec intérêt leur leitmotiv : "ni se taire, ni partir", je préfère, à la suite de mon propre chemin de relecture (cf. lien) qui m'a conduit chez Congar et Lubac, une version plus positive... Un "je veux hurler parfois, mais je cherche à aimer"... Certes notre église est pécheresse pardonnée... Certes elle faute parfois... Pourtant, les propos du livre manquent parfois de retenue. Je ne suis pas femme et donc la souffrance du mépris m'échappe peut-être. Il y a des analyses qui provoquent un déplacement. Il reste des choses que je n'aurais pas écrites et d'autres sur lequel je signe... Leur chemin ne laisse, en tout cas, pas indifférent...

28 avril 2012

Eglise et sacrements - I

Depuis le concile de Latran IV et la définition du septénaire, l'Eglise s'attache, non sans raisons à son auto-limitation à sept sacrements. Ce choix qui se fonde en partie sur la tradition, n'exclue pas l'existence de ce que l'on appelle les sacramentaux, que peuvent être tout signe expressif au sein ou non d'une liturgie appropriée (prise de voeux, consécration, prière, lavement des pieds). Pour le lavement des pieds, les Pères de l'Eglise s'étaient même interrogés sur le fait que cela puisse être un autre sacrement avant de conclure que c'était de fait, toute l'Eglise qui devait vivre dans cette symbolique... Tout cela nous interpelle sur la place et le centre de ces sacrements dans nos vies. Louis-Marie Chauvet, note dans Symboles et sacrements, combien ces sacrements peuvent aussi constituer un goulet d'étranglement, hors de lequel toute vie ecclésiale semble limitée. Cette trop grande focalisation interpelle, aujourd'hui, ceux qui se sont exclus de certains sacrements et cette exclusion décidée par le Magistère est pour nous tous une question posée. Sommes-nous capables d'apprécier à leur juste mesure ce qui se joue ? Avons-nous pleinement conscience de l'enjeu des sacrements, de ce qu'ils disent des dons de Dieu ? La miséricorde divine se limite-t-elle à cela ? Sont-ils des lieux "liturgiques" où l'Eglise se rassemble et exprime, par ce biais, son désir de participer au corps du Christ ? Ceux qui sont exclus de certains sacrements sont-ils exclus du corps de l'Eglise ? Bref, y a-t-il une vie possible hors des sacrements ? Ces questions, je me les pose depuis quelques semaines, dans le cadre de ma formation à l'ICP. Cela fait naître en moi quelques travaux de recherche, dont le plus original est probablement celui-ci, que je vous laisse découvrir... Nous en reparlerons...

25 janvier 2012

Où est l'Eglise ?

En cette semaine de l'unité, on peut encore se poser la question de la réalité de ce que l'on appelle l'Église ...
Notre point de vue catholique attache une (trop ?) grande importance à la tradition apostolique, c'est-à-dire à cette transmission depuis les apôtres de l'héritage par l'onction. L'argumentation se tient. Pourtant, l'affirmation fondamentale de Jean 3 : "le vent/l'Esprit souffle où il veut" vient toujours mettre en question toute tentative de récupération de l'icône du Christ. De fait, si l'on suit Moltmann, la sainteté de l'Église est eschatologique, ce qui sous entend qu'elle est déjà là mais surtout pas encore totalement visible. C'est dans cette direction qu'une vision plus large de l'unité dans la diversité reste possible et que personne, moi en premier, ne peut revendiquer être l'Église. Par contre, une communauté, rassemblée à la double table de l'écoute de la Parole et dans une charité humble et vivante, peut y tendre. Cf. également sur ce point, ma version remise à jour de "Cette Eglise que je cherche à aimer"...

24 octobre 2011

Doctrine sociale de l'Eglise

Le Ceras vient de compléter la mise en ligne de la "Doctrine sociale de l'Église ". Plus qu'un simple recueil de tous les textes publiés par le magistère, on y trouve commentaires, contextualisations et annotations. On appréciera aussi son index thématique et les multiples liens dynamiques qui améliore la lecture. Une source complète sur le discours de l'Église catholique sur la société. A ne pas manquer.

07 juin 2010

Cette Eglise que je cherche à aimer


A l'heure où notre Eglise est fortement critiquée, trainée dans la boue pour des actes commis par ses membres, il peut être bon de s'interroger sur ce qui la rend aimable. A partir d'une réflexion éclairante de Joseph Moingt (in Dieu qui vient à l'homme, tome 3), l'auteur fait le point sur ses propres arguments en faveur de l'Eglise. Ce constat en demi teinte ne fait pas d'impasse sur les problèmes actuels de l'Eglise. Il insiste sur ce qui déjà est "sacrement du Christ" et trace quelques sentiers pour qu'ensemble nous puissions faire grandir l'Eglise...
L'une des principales propositions, déjà partiellement entendue, c'est d'arrêter de présenter l'Eglise comme la Cité de Dieu sur terre, mais de reconnaître, à l'image des hommes qui la compose, qu'elle reste traversée par le mal... Alors peut-être, cette Eglise de pécheurs pardonnés pourra être témoin du travail difficile mais actif de la grâce en elle...
Un texte engagé... A découvrir...
Comme tous mes ouvrages, "Cette Eglise que je cherche à aimer" est disponible sur http://stores.lulu.com/cheriard

04 octobre 2007

Eglise habitée

On a trop souvent tendance à voir le Christ et rejeter son Église, mais pourtant, c’est dans le corps souffrant et blessé de ses membres qu’elle continue à se révéler le mieux, à sa manière.

« Là où est l’Eglise, là aussi est l’Esprit de Dieu et là où est l’Esprit de Dieu, là est l’Eglise et toute sa grâce. Et l’Esprit est Vérité » (1)

Certes, ajoute le théologien : « Il y a bien plus de vérité dans le Christ que dans la foi de l’Eglise et plus de vérité dans la foi de l’Eglise que dans les dogmes explicitement formulés » (2)

(1) Irénée Contre les hérésies, III, 24 Cerf 1974 p. 474-475 cité par Hans Urs von Balthasar, Théologique III, L’Esprit de Vérité, p. 13

(2) ibid p. 15

10 février 2007

Construire une église en "open source"

Je retiens le mot d'André Fossion, qui sera probablement parlant pour la "blogosphère". Loin des structures classiques, il nous faudrait dit-il proposer une Eglise en "open source" pour "puiser librement, s'appuyer et construire son existence" (1). Certes cela n'exclue pas l'importance de garder un lien apostolique force entre tous les membres, mais l'accès aux "ressources" de l'Eglise mériterait un élargissement, qui ne conduirait pas tous les hommes de bonnes volontés à devoir passer obligatoirement et en préalable sous les fourches caudines des conditions "sacramentelles" pour jouir, connaître, apprécier, comprendre, le sens de l'Evangile. L'Eglise sacramentelle ne prenant son sens que dans une deuxième étape, basée non sur une "obligation" mais sur une invitation à aller plus loin… Utopie peut-être, mais l'idée me semble interpellante sur nos processus pastoraux…

(1) André Fossion, Une nouvelle chance pour l'Evangile, ibid p.81

07 février 2007

Dogme et écoute mutuelle

"Il ne s'agit plus de partir d'une Eglise définie par un dogme, une tradition et une hiérarchie dont la mission est de définir les contours d'un système d'emprise (…) mais de la retrouver à l'écoute qu'elle accorde à ceux qui disent leur foi." (1)

Ces propos sont peut être un peu durs, mais ils interpellent le cœur de notre situation pastorale. A quoi sert de prêcher le dogme si nous ne vivons pas les valeurs évangéliques, pourrait-on dire. Mais à l'inverse, peut-on encore vivre ces mêmes valeurs, sans se retrouver structurer dans un cadre, une structure qui limite le "vagabondage" de la pensée et la recentre sur l'Evangile. Cela rejoint pour moi les propos entendus lors d'une homélie de Mgr Perrier en 2000 où il distinguait le problème de la rigueur personnelle de l'ouverture pastorale. Pour être aimant vers l'autre, il faut se contenir soi-même. Mais cette rigueur n'est pas une obéissance aveugle, elle doit résulter d'un travail sur soi, un travail de liberté.

Jean Marie Donegani, Une nouvelle chance pour l'Evangile, ibid p. 44

31 janvier 2007

Dieu et le monde

S'il semble essentiel comme le souligne Balthasar de "considérer avec bienveillance les valeurs que l'on rencontre et montrer avec douceur qu'elles ne s'achèvent vraiment que dans le message chrétien"(1) il subsiste un risque, souligne-t-il, que le sel s'affadisse.

Si Jésus est venu dans le monde, puis s'est retiré (cf. Jn 16,28) il demeure en lui jusqu'à la fin des temps (Mt 28,20). Il subsiste donc une tension permanente qui peut éviter pour Balthasar, l'affadissement de l'Eglise par le monde. De fait, pour lui l'Eglise devrait avoir disparue depuis longtemps. Mais comme le souligne Paul, nous sommes "moribonds et pourtant nous vivons" 2 Co 6,9. Je trouve finalement resplendissante cette Eglise que l'on croit morte et qui rejaillit dans la fleur d'une âme, au milieu de nulle part.


(1) Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p. 432ss

28 janvier 2007

Communauté de pécheurs...

Pour Balthasar, l'Eglise est une "communauté de pécheurs, justifiés par le baptême, dont la faillibilité toujours rémanente ou renaissante conduit à la discorde". Comme il le note avec acuité, elle "n'est pas le Corps mystique et vivant du Christ, lequel peut avoir de véritables membres en dehors de la Catholica... et ce depuis l'origine comme le montre déjà 1 Co 11,19, 2 Co 12, Ga 5, 15". Pour Urs von Balthasar l'histoire de l'Eglise est inévitablement tragique.
Mais au delà de ces divisions il souligne que les vraies forces regénératrices de l'Esprit sont les saints. Finalement, la véritable Eglise n'est-elle pas depuis l'origine la Communion des saints...
Et cette vision de l'Eglise est plus large, plus catholique que notre Eglise Romaine, même si je continue de croire que notre Eglise est porteuse de sens, dans sa fidélité apostolique. (cf. mes notes de lecture sur Les Principes de la théologie catholique, Esquisses et matériaux, de J. Ratzinger)

NB : A noter, sur Regard Chrétien, une série de billets sur le thème Mutations religieuses et société en lien avec mon billet précédent...

15 janvier 2007

Eglise - sacrifice

Pour Balthasar, notre Eglise s'offre par un sacrifice externe et en cela s'unit au sacrifice du Christ :
a) dans la reconnaissance que le sacrifice s'est fait pour nous (credo)
b) à travers l'adhésion de Marie
c) dans le fait de faire "en mémorial de moi" c'est-à-dire d'offrir l'agneau égorgé pour tous les pécheurs (1)
Cette triple reconnaissance est pour moi la face officielle de la communion des saints, toutes ces "mains de Dieu" qui par leur amour rende visible le don de Dieu

(1) Urs von Balthasar ibid 366 - 370