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12 novembre 2014

Pourquoi Jésus a-t-il accepté le baptême de Jean - Jésus serviteur (suite)

‎La thèse d'Hollenbach, soulignée par John P. Meier (1) est qu'il se considérait comme pécheur, ce qui n'est pas inintéressant conceptuellement, même si notre position catholique exclut qu'il le fut. Demeure la question. Pourquoi ce geste ? Il n'est pas impossible de concevoir que ce geste s'inscrive dans le mouvement kénotique qui caractérise le sens même de son incarnation. Meier donne sur cette piste l'exemple d'Esdras qui souhaitait s'associer au repentir collectif du peuple. Christ a été jusqu'aux enfers relever Adam insiste nos amis orthodoxes dans leur iconographies. 
La réponse à la question n'est pas éloignée de leur contemplation. Elle travaille notre compréhension de la kénose, c'est à dire cette volonté de rejoindre l'homme jusque dans ses mouvements intérieurs. 
Quelle que soit la véracité des propos de Jean sur Jésus (celui qui vient après moi...), la quasi certitude ‎du baptême de Jésus nous indique les conditions même de cette kénose qui va jusqu'à reconnaître "l'autorité charismatique de Jean" (2) et donc implique que Jésus s'inscrive dans un rite d'origine humaine (même s'il était inspiré) probablement parce que ce geste accompagne tout homme dans le processus de conversion intérieur mais aussi collectif (avantage du rite) qui nécessite de passer par la mort - que signifie cette plongée dans l'eau - pour venir à la vie.

Bien sûr, la reprise théologique de ce geste va ensuite de source : elle est soulignée par les évangélistes dans les récits théophaniques ‎qui suivent. Elle rejoint aussi ce pont que nous avons souligné : le passage par la mort préfigure le sacrifice unique du Christ en Croix.

(1) op. Cit, tome 2, p. 98
(2) ibid. p. 103

08 novembre 2014

Serviteur de l'homme - Les limites de l'exercice

‎Le risque dans tout essai christologique, y compris celui sur lequel je travaille sur l'humilité du Christ, est d'avoir une idée préconçue de Dieu, de "projeter [ses] conceptions théologiques préférées sur une image de Jésus qui viendrait légitimer [sa] thèse" (1).

Ce n'est pas à exclure, en ce qui me concerne, d'autant que mes propres travaux sur la kénose sont très antérieurs à ces éléments. Quelques remarques sont à apporter pour ma défense :
- la thèse kénotique ne vient pas de moi, mais de Philippiens 2
- le fait que je souligne d'autres convergences dans les apports exégétiques ‎sur le baptême et le lavement des pieds me permettent de considérer que l'on répond là aux critères de la multiplicité des sources. Que le Christ lui-même souligne ce point dans des textes divers, et peu susceptibles de critique sur leur historicité, du fait de l'embarras qu'ils génèrent, me font perdurer sur cette voie.
Mais le lecteur est prévenu...

Il faut aussi souligner que tous apports et réflexions ‎sur Jésus ne peuvent présenter qu'une facette d'un ensemble plus vaste et par définition insaisissable.
Le fait de souligner l'insistance du Christ sur la notion de serviteur, qui s'appuie notamment sur de nombreuses citations et attitudes ( cf. Jn 13, Mt 18, 1-5; 20, 28 et Lc 9. 46. 48; 22, 27, Mc 9 34 ; 10, 44-45) n'exclut pas les autres aspects de la révélation. Ils ne font qu'insister sur une de ses facettes, et développer les implications qui en découlent, notamment en matière de pastorale. 

Notre propos cherchera donc à mettre en parallèle ces citations, les insérer dans un contexte plus large (vie et mort du Christ, reprise par les premiers chrétiens et notamment Paul, par les Pères de l'Eglise) avant de saisir la manière dont cette tradition diaconique a vécu et s'est développée ou éteinte dans l'Eglise.

Voici donc quel serait le plan possible de notre recherche.

1) Les actes kénotiques de Jésus 
2) Les ‎paroles qui accompagnent et expliquent les actes
3) Christ nous invite au service
4) La passion, ultime kénose 
5) Relecture paulinienne
6) Correspondance dans l'Ancien Testament (Serviteur souffrant dans Isaïe)
7) Diaconie
8) Conclusions et ouvertures

Plusieurs fragments préexistent à ce travail et devront être résumés et/ou insérer dans notre approche :
1) "A genoux devant l'homme" qui résume notre recherche sur les attitudes chez Jean 
2) nos notes récentes sur le baptême du Christ chez John P. Meier
3) "Le dernier pont" qui trace un lien avec la Passion
4) nos propos déjà repris dans Chemins d'Eglise 
5) les éléments déjà publiés ici sur la diaconie en lien avec le texte de la commission théologique internationale, et notre lecture de Congar, Moingt et Grieu
6) Certains points publiés dans "Dieu de faiblesse"



Le chapitre 2b sur le Christ nous invite au service pourra inclure notamment les textes suivants 

1. Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 17,7-10.

Jésus disait aux Apôtres : « Lequel d'entre vous, quand son serviteur vient de labourer ou de garder les bêtes, lui dira à son retour des champs : 'Viens vite à table'?
Ne lui dira-t-il pas plutôt : 'Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, le temps que je mange et que je boive. Ensuite tu pourras manger et boire à ton tour. '
Sera-t-il reconnaissant envers ce serviteur d'avoir exécuté ses ordres ?
De même vous aussi, quand vous aurez fait tout ce que Dieu vous a commandé, dites-vous : 'Nous sommes des serviteurs quelconques : nous n'avons fait que notre devoir. ' »


2. « Dites-vous : ' Nous sommes des serviteurs quelconques ' »

      Les yeux du Seigneur regardent les humbles, pour qu'ils se réjouissent. Mais la face du Seigneur se détourne des orgueilleux, pour les humilier. L'humble reçoit toujours de Dieu la compassion… Fais-toi petit en tout devant tous les hommes, et tu seras élevé plus haut que les princes de ce monde. Devance tous les êtres, embrasse-les, abaisse-toi devant eux, et tu seras honoré plus que ceux qui offrent de l'or. Descends plus bas que toi-même, et tu verras la gloire de Dieu en toi. Car là où germe l'humilité, là se répand la gloire de Dieu… Si tu as l'humilité dans ton cœur, Dieu t'y révélera sa gloire…       N'aime pas l'honneur, et tu ne seras pas déshonoré. L'honneur fuit devant celui qui court après lui. Mais l'honneur poursuit celui qui le fuit, et il proclame à tous les hommes son humilité. Si tu te méprises toi-même, afin de ne pas être honoré, c'est Dieu qui te manifestera. Si tu te blâmes toi-même par amour de la vérité, Dieu permettra que tu sois loué devant toutes ses créatures. Elles ouvriront devant toi la porte de la gloire de ton Créateur, et elles te loueront. Car tu es en vérité à son image et à sa ressemblance (Gn 1,26).  (2)


(1) John P. Meier op. Cit. p. 97
(2) Isaac le Syrien (7ème siècle), moine près de Mossoul, Discours, 1ère série, n°5 (trad. Touraille, DDB 1981, p. 87 rev.)

04 novembre 2014

Jean Baptiste et Jésus, une tension théologique - John Meier, tome 2

‎Je reprends la lecture de "Un certain juif Jésus" avec l'énorme tome 2 et ses 1340 pages (1). 
On arrive au coeur du sujet, avec l'analyse de l'histoire comparée de Jésus et de Jean-baptiste. Une vision historique permet de mieux comprendre les tensions théologiques entre les deux "cousins"...

Comme il précise plus loin(2), ce n'est pas une confrontation de deux théologies, mais bien une tension, puisque que Jésus se fera baptiser par Jean. Mais la théologie "sinistre" (sic) et eschatologique de Jean aura besoin d'une réinterprétation pastorale de Jésus, pour qu'elle rejoigne et convertisse les coeurs. 

(1) John P. Meier. Un certain juif Jésus, les données de l'histoire, tome 2, les paroles et les gestes. Paris, Cerf, 2010, p. 27ss

(2) p. 36ss


09 octobre 2014

Jésus un juif laïc


Après une étude qui doit en fâcher certains sur les origines du Christ, John P. Meier enchaîne sur la question " Jésus était-il marié ?" et conclut contre Phipps que cette thèse est sans fondement. On a eu chaud. Cela donne une vision très "sitz im Leben" de l'histoire des eunuques pour le royaume de Matthieu. Ce que le laïc que je suis ne peux s'empêcher de souligner c'est que Jésus était le premier laïc de l'église... laïc célibataire certes.
Comme quoi il faut de tout pour faire avancer le royaume.

Il est d'ailleurs intéressant de noter p. 220 que notre habitude de considérer Jésus comme prêtre est un hapax (seule mention du NT) qui nous vient d'un texte tardif, en l'occurrence Hébreux 7, mais que l'auteur de l'épître précise en 8, 4 que s'il était sur terre, il ne serait même pas prêtre. Autant pour ceux qui s'attachent peut-être trop à un ritualisme sous couvert d'imitation christique. On rejoint ici des propos croisés chez Moingt sur cette église non ritualiste des premiers temps.


Dois-je rappeler ici mes conclusions sur la diaconie reprise en bonus dans Chemins d'Eglise.
Le chemin pastoral adéquat n'est peut être pas celui qui passe par l'absolutisme des rites. Mais celui qui met ceux ci éventuellement au service de tous nos chemins d'humanité vers une communion véritable.

Contempler le chemin laïc du Christ montre qu'il n'a jamais passé par une stricte obéissance aux rites au grand dam des Pharisiens. Il a toujours mis la charité au premier plan.

22 septembre 2014

Jésus marginal - Un certain juif Jésus, vol 1. de John Meier, initiation de lecture.

John P. Meier, introduit son livre* sur la question de la "marginalité" de Jésus. 
Prendre en compte cette marginalité est en soi plein d'implications théologiques. N'est ce pas ce que l'on contemple dans la crèche : un enfant sans atout, sans histoire en lequel Dieu choisi d'apparaître ?  
Le récit de l'enfance par Luc, dont l'historicité reste critiquée** ne doit pas nous éloigner des propos de Meier. 

La marginalité de Jésus est un fait historique avec toute l'ambiguïté même du mot. C'est cette marginalité qui le conduit à la mort. Il n'était rien aux yeux des grands de ce monde. Il n'a pas laissé beaucoup de traces "historiques" visibles en dehors de celles partisanes des 4 évangiles. On pourrait s'en lamenter, mais il me semble au contraire que l'on est dans le plan de Dieu . Car la pauvreté et la kénose qui se joue dans la marginalité de Jésus est ce qui provoque chez nous un choix libre, celui d'un "je crois"...


Au delà du discours partisan, il y a finalement peu de choses crédibles jusqu'à ce qu'on fasse le saut de la foi. Folie aux yeux des Sages dira Paul. Mais folie qui nous conduit à Dieu, dans le décentrement‎ même du raisonnable.

* A Marginal Jew: Rethinking the Historical Jesus: The Roots of the Problem and the Person, Vol. 1 - Un certain juif Jésus, les données de l'histoire, tome 1, Lectio divina, Paris, Cerf, 2009 p. 17
** ibid p. 36ss


Voir sur le même théme, un post précédent : Bonhoeffer - II - Incognito christologique