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15 août 2014

Primauté de la diaconie sur la liturgie ? (IV)

L'analyse historique du CTI montre qu'en dépit de certains efforts des Conciles, la hiérarchie entre diacres et presbytres reste difficile à établir : "Les sources nous font voir que même Chrysostome n'a pas réussi à placer, de manière évidente, les trois degrés de l'ordre ecclésial dans une continuité historique. Il y a eu des modèles chez les juifs pour le presbytérat; par contre, l'épiscopat et le diaconat ont été constitués par les apôtres. Il n'est pas clair ce que l'on doit entendre ici par ces notions.[55] Chrysostome a fait remonter le diaconat à une institution par l'Esprit Saint.[56]*"
 N'est ce cas d'une certaine manière le conflit qui oppose Paul et Jacques sur les oeuvres et la grâce. 
Y a-il aujourd'hui une question sur ce point ? Pas vraiment,  depuis que le 4ème siècle a tranché et défini le diaconat comme un degré de la hiérarchie ecclésiale,  "situé après l'évêque et les presbytres, avec un rôle bien défini. Lié à la mission et à la personne de l'évêque, ce rôle englobait trois tâches: le service liturgique, le service de prêcher l'Évangile et d'enseigner la catéchèse, ainsi qu'une vaste activité sociale concernant les oeuvres de charité et une activité administrative selon les directives de l'évêque."
Pour autant, la diaconie elle même a perdu peut être aussi son rang "sacramentel" dans l'église. J'avais noté dans "à genoux devant l'homme" que l'on n'a pas considéré bon de mettre le lavement des pieds dans la liste des 7 sacrements,  parce que toute la vie de l'Église était "lavement des pieds". On peut se poser maintenant la question. Non pas pour modifier à nouveau une hiérarchie établie qui a structuré l'Église,  mais pour réintroduire une tension. 
S'il y a pour moi une solution,  c'est en effet dans l'expression théologique: "tension". En effet toute opposition est stérile.  La tension traduit bien l'intérêt des deux sans mettre une hiérarchie là où il devrait y avoir communion. 


Source principale : CTI, II, III 


Les numéros entre crochets renvoient aux notes suivantes du document de la CTI.

[55] Hom. 14,3 in Act.; PG 60, 116: "Quam ergo dignitatem habuerunt illi (sc. les diacres et les évêques)…Atqui haec in Ecclesiis non erat; sed presbyterorum erat oeconomia. Atqui nullus adhuc episcopus erat, praeterquam apostoli tantum. Unde puto nec diaconorum nec presbyterorum tunc fuisse nomen admissum nec manifestum..."

[56] "Et c'est à juste titre; car ce n'est pas un homme, ni un ange, ni un archange, ni aucune autre puissance creée, mais le Paraclet lui-même qui a institué cet ordre en persuadant à des hommes qui sont encore dans la chair d'imiter le service des anges." De sacerdotio III 4,1-8; SCh 272, 142.

12 août 2014

Diaconie et pouvoir (III)

Revenons à l'histoire: "Dans la Didascalie, l'accroissement du prestige du diaconat dans l'Église est remarquable, ce qui aura pour conséquence la crise naissante dans les relations réciproques entre les diacres et les presbytres. À la fonction sociale et charitable des diacres s'ajoute leur fonction d'assurer divers services pendant les rassemblements liturgiques: indication des lieux pendant l'accueil des étrangers et des pèlerins, soin des offrandes, surveillance de l'ordre et du silence, soin de la bienséance de l'habillement*." On peut d'ailleurs comprendre les remarques d'Origène sur la cupidité des diacres en charge de la bourse de l'évêque,  qui n'est pas sans rappeler les critiques sur Judas dans le NT.
Mais plus encore cela interroge sur la possible tension entre pouvoir et Diaconie dont seule l'"impossible" [pour l'homme] prise en compte du fait que tout vient de Dieu pourrait nous libérer. 

Quel est l'enjeu pour aujourd'hui ?
Si charité est la première mission de l'Église, si une pastorale axée sur la charité devient, à la suite du Pape François,  la priorité des priorités,  alors la diaconie est au centre, ce qui ne réduit pas la place du prêtre,  mais bien au contraire confirme sa place sacramentelle tout en redonnant à tous les baptisés (et pas seulement au diacre) un nouvel élan. 
Je rejoins d'ailleurs là ce qu'écrivait J. Moingt** :" il y aura moins de confusion si l'Église cherchait à exploiter les ressources du sacerdoce commun des fidèles (...) et mettait son énergie à annoncer l'évangile au monde plutôt qu'à défendre ses traditions. (...) La communauté évangélique (....) n'existe pas sans esprit de communion ni sans communication. 

À noter aussi : "les diacres [vont] abandonner encore plus leurs fonctions originelles à d'autres clercs. Ils vont se définir de plus en plus explicitement par leurs attributions liturgiques et entrer en conflit avec les presbytres."

Nicée ira plus loin en affirmant : "qu'ils ne doivent pas siéger parmi les prêtres. "Que les diacres restent dans les limites de leurs attributions, sachant qu'ils sont les serviteurs de l´évêque et se trouvent en un rang inférieur aux presbytres" (can. 19).***"

Citons enfin Jean Paul II : "« La mission du Christ, prêtre, prophète, roi, se poursuit dans l'Église. Tous, le Peuple de Dieu tout entier, participent à cette triple mission. » Les fidèles laïcs participent à la fonction sacerdotale par laquelle Jésus s'est offert lui-même sur la croix et continue encore à s'offrir dans la célébration de l'eucharistie… : « Toutes leurs activités, leurs prières et leurs entreprises apostoliques, leur vie conjugale et familiale, leurs labeurs quotidiens, leurs détentes d'esprit et de corps, s'ils sont vécus dans l'Esprit de Dieu, et même les épreuves de la vie…, tout cela devient ‘ offrandes spirituelles agréables à Dieu par Jésus Christ ’ (1P 2,5) ; et dans la célébration eucharistique ces offrandes rejoignent l'oblation du corps du Seigneur pour être offertes en toute dévotion au Père » (LG 34)…       La participation à la fonction prophétique du Christ…habilite et engage les fidèles laïcs à recevoir l'Évangile dans la foi, et à l'annoncer par la parole et par les actes… Ils vivent la royauté chrétienne tout d'abord par le combat spirituel qu'ils mènent pour détruire en eux le règne du péché (Rm 6,12), ensuite par le don de soi pour servir…Jésus lui-même, présent en tous ses frères, surtout dans les plus petits (Mt 25,40). Mais les fidèles laïcs sont appelés en particulier à redonner à la création toute sa valeur originelle. En liant la création au bien véritable de l'homme par une activité soutenue par la grâce, ils participent à l'exercice du pouvoir par lequel Jésus ressuscité attire à lui toutes choses et les soumet…au Père, « afin que Dieu soit tout en tous » (Jn 12,32; 1Co 15,28). ****"

* source : CTI, Il, III, op. Cit.
** L'Évangile sauvera l'Église, op. Cit. p. 88ss
***  CTI, ibid. III, I
**** Christi fideles Laici § 13 et 14




11 août 2014

Diaconie - II

Saint Justin décrit fort bien le rôle des diacres dans la liturgie : "Quand le président de l'assemblée a achevé la prière de l'action de grâces (eucharistie) et que tout le peuple a donné sa réponse ceux que chez nous nous appelons les diacres (oi kaloumenoi par'emin diakonoi) donnent à chacun des assistants d'avoir part au pain et au vin mélangé d'eau sur lesquels a été dite la prière de l'action de grâces (eucharistie), et ils en portent aux absents."*
Plus qu'une action "figurative" dans le temps de la messe,  c'est peut être cette deuxième partie de la phrase qu'il faut souligner,  d'autant qu'elle rejoint la mention d'Actes 6, 2 oú "le service des tables" était la première raison.  
Personnellement je suis sensible à cette phrase prononcée, dans le temps, dans mon église du dimanche : "portez l'eucharistie à vos frères,  assurez les de notre prière et demandez leur de prier pour nous". En effet, elle nous fait prendre conscience de la dimension collective de l'eucharistie et de ce que c'est que de vivre "en Christo" dans le sens donné par Paul dans ses lettres,  si bien commenté par Hans Urs von Balthasar, d'un peuple de Dieu en marche.

Plus loin, cependant,  notre texte de référence souligne à nouveau la double fonction liturgique du diacre : "apporter les offrandes et de les distribuer."

Apporter les offrandes n'est pas neutre non plus. Cela touche en effet, pour moi à cette phrase si souvent soulignée par Varillon   "Dieu sanctifie ce que nous humanisons"
 Or, la mission des diacres, comme de tous baptisés,  n'est elle pas cette humanisation à parfaire ?Comment ? En commençant par l'habiter, par la transformer de l'intérieur, tendre à faire de chacun de nos actes un chemin sacramentel. Là aussi la route est longue. 


* Apol. 1,65,3-5. Saint Justin, Apologies. Introduction, texte critique, traduction, commentaire et index par A. Wartelle, Paris 1987, 188-191.

Source principale : CTI, Il, II, op. Cit. 

04 août 2014

Diaconie - I

Nous nous proposons de commencer ici la lecture cursive et annotée d'un texte de la Commission théologique internationale* (ci après CTI), en parallèle et en complément  d'autres lectures dont
1) L'Évangile sauvera l'Église,  de Joseph Moingt (ESE),
2) Théologie du Laïcat (TDL), de Yves-Marie Congar,
3) les articles d'Étienne Grieu sur la diaconie (EG)
4) certains textes de Vatican II,  dont GS et LG.

Commençons par le texte de la CTI :
"On peut saisir, dans une perspective christologique, ce qu'est l'essence du chrétien. L'existence chrétienne est participation à la diakonia, que Dieu lui-même a accomplie pour les hommes (...) Être chrétien signifie, à l'exemple du Christ, se mettre au service des autres jusqu'au renoncement et don de soi, par l'amour. Le baptême confère le diakonein à tout chrétien, qui, en vertu de sa participation à la diakonia, leiturgia et martyria de l'Église, coopère au service du Christ pour le salut des hommes. En effet, étant membres du Corps du Christ, tous doivent devenir serviteurs les uns des autres avec les charismes qu'ils ont reçus pour l'édification de l'Église, et celle des frères dans la foi et l'amour: "Si quelqu'un assure le service, que ce soit comme par un mandat reçu de Dieu"  (1P 4,11-12; cf. Rm 12,8; 1 Co 12,5)."
Après avoir insisté sur Christ serviteur,  le texte poursuit ainsi : "De manière radicalement opposée aux seigneurs et puissants de ce monde qui abusent de leur pouvoir, oppriment et exploitent les hommes, le disciple doit être prêt à devenir diakonos et doulos de tous (Mc 10,42-43)*."

Le terme même de diakonos, poursuit le texte est peu utilisé dans l'AT et à une acception large dans le NT. 

Selon P. Audet, c'est simplement "un serviteur susceptible de remplir diverses fonctions suivant les circonstances particulières de son service*".

NB : ce texte étant  cité à partir de la version numérique nous ne pourrons donner de numéros de page,  nous nous contenterons, dans notre lecture cursive d'indiquer les nouveaux chapitres.

Abbréviations utilisées dans les posts suivants :
CTI : Commission théologique internationale

ESE : Évangile sauvera l'Église
TDL : Théologie du Laïcat (TDL), de Yves-Marie Congar,
EG : Étienne Grieu
GS : Gaudium et Spes
LG : Lumen Gentium