10 novembre 2018

Au fil de Luc 16,9-15. - l’amour de l’argent - Clément d’Alexandrie

« Faites-vous des amis avec l'argent malhonnête » Luc 16, 10
Il ne s'agit pas pour Luc de nous pousser à la malhonnêteté, mais bien à une générosité féconde, à nous servir pour autrui d'une mesure pleine et débordante.
Il ne s'agit pas d'acheter autrui et le royaume, mais de transformer notre cœur pour aimer au sens de l'agape. Un amour large, profond, élevé et durable. 

« Celui qui donnera à boire à l'un de mes disciples, même un simple verre d'eau fraîche, ne perdra pas sa récompense » (Mt 10,42)... 

 Écoutons saint Clément d'Alexandrie : « Les richesses dont nous disposons ne doivent pas ne servir qu'à nous ; avec des biens injustes on peut faire une œuvre juste et salutaire, et soulager l'un de ceux que le Père a destinés à ses demeures éternelles... Qu'elle est admirable, cette parole de l'apôtre Paul : « Dieu aime celui qui donne avec joie » (2 Co 9,7), celui qui fait l'aumône de bon cœur, qui sème sans compter afin de moissonner aussi abondamment, et qui partage sans murmure, hésitation ou réticence... Et il est encore plus grand, ce mot que le Seigneur dit ailleurs : « Donne à quiconque te demande » (Lc 6,30)... (...). 
Réfléchis alors à la récompense magnifique promise à ta générosité : les demeures éternelles. Quel beau commerce ! Quelle affaire extraordinaire ! On achète l'immortalité pour de l'argent ; on échange les biens caducs de ce monde contre une demeure éternelle dans les cieux ! Si donc, vous les riches, vous avez de la sagesse, appliquez-vous à ce commerce... Pourquoi vous laissez fasciner par des diamants et des émeraudes, par des maisons que le feu dévore, que le temps écroule, qu'un tremblement de terre renverse ? N'aspirez qu'à vivre dans les cieux et à régner avec Dieu. Un homme, un pauvre, vous donnera ce royaume... D'ailleurs, le Seigneur n'a pas dit : « Donnez, soyez généreux et larges, secourez vos frères », mais « Faites-vous des amis ». L'amitié ne naît pas d'un seul don, mais d'une longue familiarité. Ni la foi, ni la charité, ni la patience ne sont l'œuvre d'un jour : « mais celui qui aura persévéré jusqu'au bout sera sauvé » (Mt 10,22). (1)

L'agape n'est pas la simple philia de l'amitié des hommes. Même si Luc évoque la philia au verset 9, il vise l’agape au verset 13. On découvre la distinction dans l'échange de Pierre et de Jésus dans Jean 21. M'aimes-tu d'Agape, demande deux fois Jésus à Pierre, avant de passer à la philia. Là est l'enjeu final. 

Prenons de la distance et contemplons le chemin tracé par Luc : « Lorsque tu donnes un déjeuner ou un dîner, ne convie pas tes amis, ni tes frères, ni les gens de ta parenté, ni des voisins riches, de peur qu'ils ne te rendent ton invitation et qu'ainsi tu sois payé de retour. Mais lorsque tu donnes un banquet, invite des pauvres, des estropiés, des infirmes, des aveugles. Heureux seras-tu, parce qu'ils n'ont pas de quoi te payer de retour! En effet, tu seras payé de retour à la résurrection des justes.» Luc 14:12-14 NBS 

L'agape est déjà entre les lignes au chapitre 14. Elle se transforme en miséricorde au chapitre 15, prends de l'ampleur dans l'histoire du gérant malhonnête... (Luc 16, 1-8) et nous voici grimper une nouvelle marche, course en avant qui nous conduit dans la dynamique de Philippiens 3 (cf. Post de jeudi). Il y a là un chemin hyperbolique à contempler...
Le point ultime n'est-il pas Jésus sur la Croix ?

(1) Saint Clément d'Alexandrie, Sermon « Quel riche peut être sauvé ? », § 31 (trad. coll. Icthus, t. 6, p. 45 rev.), source Evangelizo 


La prière en actes - Hans Urs von Balthasar

Si simple et si humble soit-elle, la prière est indispensable, nous rappelle Hans Urs von Balthasar.  « Il ne suffit pas que le croyant écoute ; si son attention ne devient pas une réponse active et authentique à la Parole, il n'aura certainement rien entendu. Il ne suffit pas que le croyant laisse prier le Saint-Esprit au fond de son âme : c'est lui, l'homme qui doit prier ; de lui Dieu attend l'acte de la prière vocale comme de la prière contemplative, et ce passage de la possibilité à la réalité temporelle constitue son action » (1)

(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 87

09 novembre 2018

Au fil de Jean 2, 21 - Le temple des pierres vivantes - Augustin d’Hippone


« Le Temple dont il parlait, c'était son corps » Jn 2, 21

La fête de la basilique du Latran nous interpelle. Car l'enjeu n'est pas de contempler des pierres, mais l'Église. Et qu'est-ce que l'Église si ce n'est d'abord le Christ et à sa suite les pierres vivantes que nous sommes ?
L’Église n’est pas résumée par sa hiérarchie. Elle a, dans son essence, une dimension polyèdrique, faite d’hommes et de femmes, joyeux et souffrants, serviteurs et pècheurs.
Comme le souligne Augustin toute œuvre humaine est fragile et nous ne cessons d'en voir les limites.
« Le vrai temple, le corps du Seigneur, est tombé aussi, mais il s'est relevé, et si bien relevé qu'il ne pourra jamais plus tomber…
Et nos corps à nous ? Ils sont membres du Christ. Écoutez saint Paul : « Ne savez-vous pas que vos corps sont les membres du Christ ? » (1 Co 6,15) Lorsqu'il dit : « Vos corps sont les membres du Christ », qu'est-ce à dire, sinon que nos corps, joints à notre tête qui est le Christ (Col 1,18), font ensemble un temple unique, le temple de Dieu ? Avec le corps du Christ, nos corps sont ce temple… Laissez-vous construire dans l'unité, pour ne pas tomber en ruine en restant séparés ». (1)
Quelle est cette unité si ce n'est de se tourner à nouveau vers la source ?
A nous d'écouter le fleuve, cette eau silencieuse qui coule au milieu du brouhaha de nos vies. Qu'arrive-t-il alors, sinon le tressaillement ultime de l'homme qui a creusé en lui un lit pour la Parole, qui a transformé son coeur en amphore spirituelle, en éponge ou anémone qui vivre à la danse de Dieu et de son fleuve d'amour (2).
À nous d'effectuer cette plongée sous-marine dans les profondeurs secrètes de l'amour divin. Et nos pierres mortes tressailliront dans l'intase (3) d'un Dieu dont nous sommes temple.
« Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux,
car cette eau vient du sanctuaire.
Les fruits seront une nourriture,
et les feuilles un remède. » Ez 47, 12
L’intase dont nous parle le cappadocien est cet inhabitation de Dieu en nous, ce courant d’air dont nous sommes la demeure fugace.
Laissons le entrer en nous, illuminer nos temples, comme les bougies de nos églises.



(1) Saint Augustin, Sermon Morin n°3, 4 ; PLS 2, 664 (trad. Solesmes, Lectionnaire, t. 3, p. 916 rev.)
(2) cf. François Cassingena-Trévédy, Pour toi quand tu pries, p. 188ss, mais aussi ma "danse trinitaire" in l'Amphore et le fleuve.
(3) Cf. Grégoire de Nysse ou la course infinie, op. cit.


08 novembre 2018

Philippiens 3 et Luc 15 - La course infinie - Homélie du 8/11/18


Frères et sœurs,
La liturgie, en découpant la Parole en tranches, nous prive souvent d’une lecture cursive et donc d'une certaine façon de la dynamique de l’auteur.
Il faudrait ainsi, en théorie, prendre le temps de contempler le message de Luc. Tomber à genoux comme Dieu tombe à genoux devant l’homme (1). Dans l’ensemble du chapitre 15 et en particulier les paraboles sur la miséricorde, Luc nous dévoile l’amour infini de Dieu, son attention pour les pécheurs que nous sommes. Je vous invite ce soir à prendre le temps de les lire toutes ensemble et de vous laisser attendrir par l’amour de Dieu pour l’homme.
Qui sommes nous pour parler pour autant de l’amour Divin ?
J’aimerais vous partager ce matin une contemplation de la première lecture, qui tronque, elle aussi une invitation de Paul à se laisser saisir par le Christ.
Pharisien, chercheur de la loi, une « brebis perdue » dans l’étude stérile de la loi, il prend conscience que tout cela n’est rien, que ce ne sont que balayures. Il a été saisi par le Christ et s’élance, dit la suite du texte, pour saisir la bonne nouvelle du Christ et se laisser à nouveau saisir par Lui.
Qu’évoque pour nous ce saisissement ? Écoutons la suite du texte que nous aurions pu entendre demain si l’on ne fêtait pas la dédicace de Latran.
« Il s’agit maintenant de le connaître, Lui,
 ainsi que la puissance de sa résurrection
et la communion de ses souffrances, 
en étant configurés à lui dans la mort, 
pour parvenir, si possible, 
à la résurrection d’entre les morts. 
Ce n’est pas que j’aie déjà obtenu tout cela
ni que je sois déjà parvenu à l’accomplissement;
 mais je le poursuis, tâchant de le saisir, 
pour autant que moi-même j’ai été saisi par Jésus-Christ. (...) 
une seule chose compte: 
oubliant ce qui est en arrière 
et tout tendu vers ce qui est en avant, 
je cours vers le but....» (Philippiens‬ ‭3:10-14‬).
Quel est ce but ?
À nous de le trouver. 
Cet élan de Paul, cette course infinie, comme l’appelle Grégoire de Nysse à sa suite, est notre chemin. Le risque est de rester installé dans un confort illusoire. « de tomber dans une routine qui [nous] satisfait et qui [nous] tranquillise »(2),
de croire, comme le souligne le cappadocien qu’on a saisi le Christ (3)
Alors ne restons pas assis sans rien faire. Dieu nous appelle, il nous envoie et pour rejoindre Luc, il nous confie les brebis perdues…

Homélie du 8/11/18 à St P. du Roule

(1) cf. mon livre éponyme « À genoux devant l’homme », 2014
(2) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 81
(3) cf. C. Hériard, Grégoire de Nysse et la course infinie, Lulu, 2009

Au fil de Luc 15 - La brebis perdue - saint Pierre Chrysologue


Qui sommes nous pour parler de l'amour de Dieu ? Écoutons à ce sujet le commentaire de saint Pierre Chrysologue :
« La parabole de la brebis perdue parle davantage de la tendresse de Dieu que de la façon dont les hommes se comportent habituellement. Et elle exprime une vérité profonde. Délaisser ce qui a de l'importance pour l'amour de ce qu'il y a de plus humble est propre à la puissance divine, non à la convoitise humaine. Car Dieu fait même exister ce qui n'est pas ; il part à la recherche de ce qui est perdu tout en gardant ce qu'il a laissé sur place, et il retrouve ce qui était égaré sans perdre ce qu'il tient sous sa garde.
Voilà pourquoi ce berger n'est pas de la terre mais du ciel. La parabole n'est nullement la représentation d'œuvres humaines, mais elle cache des mystères divins, comme les nombres qu'elle mentionne le démontrent d'emblée : « Si l'un de vous, dit le Seigneur, a cent brebis et en perd une »... Vous le voyez, la perte d'une seule brebis a douloureusement éprouvé ce berger, comme si le troupeau tout entier, privé de sa protection, s'était engagé dans une mauvaise voie. C'est pourquoi, laissant là les quatre-vingt-dix-neuf autres, il part à la recherche d'une seule, il ne s'occupe que d'une seule, afin de les retrouver et de les sauver toutes en elle » (1)

(1) Saint Pierre Chrysologue, Sermon 168, 4-6 ; CCL 24B, 1032 (trad. Delhougne, p. 439), source Evangelizo 

07 novembre 2018

Tu es unique à mes yeux

Étonnante insistance de Balthasar : « c'est pour moi que le Christ est né, pour moi qu'il meurt sur la Croix. (...) tout recevoir la marque de cette unicité (...) tu es l'homme (...) tu tournes vers moi ton visage rayonnant ». (1)
Mais n'est-ce pas cela l'amour véritable, infini, d'un Dieu qui s'agenouille devant l'homme.

(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 84

Au fil de Luc 14,27, 33 - suivre Jésus


Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple. (...) Ainsi donc, celui d'entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple. »(1)

On peut toujours arguer et fuir devant l'exigence du Verbe. Et n'est-ce pas souvent notre cas ? Pourtant nos aînés dans la foi nous montre un chemin plus radical qui ne peut que nous interpeler. 
« Le père de François voulait le faire comparaître devant l'évêque pour qu'il renonce à tous ses droits d'héritier et lui restitue tout ce qu'il possédait encore. François, en véritable amant de la pauvreté, se prête volontiers à la cérémonie, se présente au tribunal de l'évêque et, sans attendre un moment ni hésiter en quoi que ce soit, sans attendre un ordre ni demander une explication, enlève aussitôt tous ses habits et les rend à son père... Rempli de ferveur, emporté par l'ivresse spirituelle, il quitte jusqu'à ses chausses et, complètement nu devant toute l'assistance, déclare à son père : « Jusqu'ici je t'ai appelé père sur la terre ; désormais, je puis dire avec assurance : 'Notre Père qui es aux cieux', puisque c'est à lui que j'ai confié mon trésor et donné ma foi. » L'évêque, un homme saint et très digne, pleurait d'admiration à voir les excès où le portait son amour de Dieu ; il s'est levé, a attiré le jeune homme dans ses bras, l'a couvert de son manteau et a fait apporter de quoi l'habiller. On lui a donné le pauvre manteau de bure d'un fermier au service de l'évêque. François l'a reçu avec reconnaissance et, ramassant ensuite sur le chemin un morceau de gypse, y a tracé une croix ; ce vêtement signifiait bien cet homme crucifié, ce pauvre à moitié nu. C'est ainsi que le serviteur du Grand Roi a été laissé nu pour marcher à la suite de son Seigneur attaché nu à la croix. » (2)

Hier nous écoutions l'hymne aux Philippiens qui a très probablement inspiré ce geste : méditons le : « lui qui était vraiment divin, il ne s'est pas prévalu d'un rang d'égalité avec Dieu, mais il s'est vidé de lui-même en se faisant vraiment esclave, en devenant semblable aux humains; reconnu à son aspect comme humain, il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu'à la mort – la mort sur la croix.» (3)

Il nous faut à notre tour « quitter nos vêtements » (cf. Ex 33, 5) pour retrouver la nudité originelle (Gn 2, 25)

1) Traduction Liturgique de la Bible - source AELF
(2) Saint Bonaventure, La Vie de saint François, Legenda major, ch. 2 (trad. Vorreux et Desbonnets, Documents, Eds. Franciscaines 1968, p. 576 rev.), source Evangelizo 
(3) Philippiens 2:6-8 NBS

Homélie de la Toussaint - P. Vital

Extrait d'une homélie de mon curé que j'ai trouvé très belle : "en cette fête de la Toussaint nous faisons mémoire de la Vie éternelle. La fête de la Toussaint est par essence la fête de l'Espérance. Nous croyons (...) que toute vie humaine est appelée à la Contemplation de Dieu, à vivre avec Dieu pour toujours. La fête de la Toussaint donne une perspective à notre vie terrestre. (...) L'espérance en la vie éternelle nous permet de prendre conscience que chacun de nos actes comptent pour l'éternité (...) que nous sommes faits pour la vie éternelle (...) ce qui nous permet de survivre à toutes choses, même aux moments difficiles.
Nous ne faisons pas table rase du passé (...) nous montons sur les épaules des saints, connus et inconnus pour voir plus loin (...) pour reconnaître Dieu. (...)
Vous l'avez entendu, la plupart des béatitudes sont au futur. Il y en a deux qui sont aux présents (...) :
1. Heureux les pauvres de coeur, le Royaume des Cieux est à eux.
2. Heureux les persécutés pour la justice, le Royaume des Cieux est à eux.
Il y a quelque chose de présent qui se joue dans ces béatitudes. Nous pouvons toucher du doigt, par la foi, quelque chose du Royaume de Dieu (...) Au font, pour avoir cette intimité avec Dieu (...) il faut avoir un coeur de pauvre, un coeur qui accepte la Parole de Dieu, un coeur qui accepte la Parole du Christ qui nous appelle à la Conversion. Au fond, ces béatitudes sont une invitation à la Conversion.
Avoir un coeur de pauvre, c'est accepter de ne pas tout contrôler, accepter nos fragilités, de ne pas les voir comme des menaces. C'est parfois accepter de dépendre aussi (...) reconnaître qu'il y a un Dieu qui vient nous éclairer par sa révélation.
Oui, le coeur de pauvre, c'est celui qui accepte de rentrer dans une intimité avec Dieu en sachant qu'il a besoin de Dieu pour tout. (...)
La fête de la Toussaint nous appelle à une plus grande confiance en Dieu, une plus grande dépendance avec Lui. (...)

À travers [la deuxième béatitude] on découvre que la vie éternelle (...) n'est pas faite pour les tièdes. Oui la vie éternelle appelle aussi à rentrer dans la Passion du Christ, d'accueillir toutes nos souffrances, non pas comme une désespérance, mais au contraire comme un appel à grandir dans la confiance (...) ce n'est pas le mal qui aura le dernier mot (...) la vie aura le dernier mot (1) ».

(1) P. Vital, fête de la Toussaint 2018, saint Rémy sur Avre

03 novembre 2018

Philippiens 1 - Vivre ou mourir

Soit que je vive, soit que je meure,
le Christ sera glorifié dans mon corps.
    En effet, pour moi, vivre c'est le Christ,
et mourir est un avantage.
    Mais si, en vivant en ce monde,
j'arrive à faire un travail utile,
je ne sais plus comment choisir.
    Je me sens pris entre les deux :
je désire partir pour être avec le Christ,
car c'est bien préférable ;
    mais, à cause de vous, demeurer en ce monde
est encore plus nécessaire.
    De cela, je suis convaincu.
Je sais donc que je resterai,
et que je continuerai à être avec vous tous,
pour votre progrès et votre joie dans la foi.
    Ainsi, à travers ce qui m'arrive,
vous aurez d'autant plus de fierté dans le Christ Jésus,
du fait de mon retour parmi vous. (1)
(1) Philippiens 1, 21-26

Au fil de Marc 12, les deux commandements - homélie du 3 et 4/11/18

Frères et sœurs,

La première lecture, tirée du Deutéronome n'est que le point final d'un long épisode où Moïse présente au peuple les 10 commandements révélés par Dieu. Il constitue le cœur de la Torah, le pentateuque de nos frères juifs. On ne peut écarter d'un geste ce qui nous est transmis ici.

Les dix commandements ont structuré la vie du peuple Juif. Ils ont façonnés à leur manière, Jésus et ses compatriotes. Pourquoi Marc, dans l'Evangile que nous venons de lire, n'en distingue que deux en racontant l'histoire du scribe ?

Il faut situer ce passage de l'Évangile de Marc au cœur d'une phase de conflits entre Jésus et ses compatriotes. Au début du chapitre, Jésus avait suscité une polémique en racontant la parabole du vigneron qui envoie ses serviteurs puis son fils. Comme vous en souvenez peut-être, les serviteurs, ne sont pas bien reçus et le fils est tué, nouvelle évocation chez Marc de la Passion. A ce parabole, mal reçue par les Juifs, suit une série de controverses entre Jésus, les scribes et les pharisiens.
C'est dans ce contexte que le passage que nous avons entendu est placé au centre des débats. Quel est le but visé par Marc ? Rappelons-nous ce qu'il tentait de nous dire dans les passages lus les semaines précédentes. Marc cherche à nous révéler l'amour infini de Dieu.
Comment se place cet épisode là-dedans ?
Il faut savoir que les juifs avaient multipliés rites, prescriptions et commandements, au point qu'on en comptait 613.
Cette explosion cherchait à mettre Dieu partout, mais oubliait parfois l'essentiel.
En distinguant ce scribe des autres, Marc invite ses compatriotes, à se centrer sur l'essentiel.
A sa suite, nous sommes invités à réaliser que les sacrifices, les rites, les attitudes extérieures ne servent à rien, si notre relation avec Dieu et nos frères ne sont pas centrales.
Pour cela, je vous propose de fermer les yeux pour entendre à nouveau le cœur du message :
Tu aimeras le Seigneur ton Dieu
de tout ton cœur, de toute ton âme,
de tout ton esprit et de toute ta force.
Et voici le second :
Tu aimeras ton prochain comme toi-même

Si l'on trace un triangle imaginaire qui met Dieu au sommet, nos frères à gauche et nous sur le côté, on peut s'interroger, intérieurement sur la place de chaque angle dans notre vie.
Quel temps consacrons nous à nous, à Dieu aux autres. Est-ce un triangle isocèle ?
Si nous ne nous aimons pas nous-mêmes, nous ne pouvons aimer Dieu et nos frères, si nous n'aimons pas nos frères, notre amour de Dieu n'est qu'apparence. Et aimer Dieu n'est rien sans la charité. A la différence des autres scribes, celui qui parle avec Jésus a compris cela. Il a atteint le cœur du message.
Laissons résonner en nous ces deux commandements, laissons agir en nous le Verbe, jusqu'aux jointures de l'âme.
Quelle place laissons-nous en vérité à Dieu et nos frères ?
Aimons-nous Dieu dans les quatre dimensions demandées : « de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit et de toute nos forces ?
Prenons-nous le temps de nous aimer nous-mêmes sans hypertrophie et sans dénigrement ? Et consacrons-nous autant d'intelligence, de force et d.ame à notre prochain ?

Parfois nos actes sont creux. N'accomplissons-nous pas, parfois, certaines de nos dévotions ou charité par routine, par habitude ? Sont-ils vraiment constitutifs de notre vie chrétienne ?
Sommes nous habités par ce triple essentiel : Dieu, nos frères autant que nous-mêmes ?

Quelle est la place de la Parole de Dieu dans nos vies ?

Que faisons-nous de cette Parole ? De ces chemins de vie à laquelle elle nous conduit.
Une des lectures de cette semaine évoquait la graine de moutarde. L'avons-nous planté en terre.
Cette graine est l'image de ce que Dieu met en nos cœurs. Elle entre en résonance avec cette phrase de Jean 12 : « Si le grain ne meurt pas, il ne portera pas de fruits ». Pour que la Parole de Dieu prenne vie en nous, il nous faut aller à l'essentiel. Suivre Jésus.
Lui seul présente un triangle parfait. Lui seul y met tout son cœur, jusqu'à se laisser transpercer, toute son âme, tout son esprit et toute sa force.

Dans le passage évoqué par Marc, Jésus se prépare à la Passion et ces commandements repris par le scribe résonne en lui. Car cet amour du Père et de ses frères, il va le porter à son paroxysme.
Tout chez lui est don.
Ouvrons les yeux maintenant et contemplons la Croix, ce que Marc veut nous dévoiler.
Tout se résume finalement dans ce triangle unique, dont Jésus est l'icône. C'est ce que suggère la 2eme lecture. L'unique sacrifice est celui du Christ.
C'est bien le grand prêtre qu'il nous fallait :
saint, innocent, immaculé ;
séparé maintenant des pécheurs,
il est désormais plus haut que les cieux.
Il n'a pas besoin, comme les autres grands prêtres,
d'offrir chaque jour des sacrifices,
d'abord pour ses péchés personnels,
puis pour ceux du peuple ;
cela, il l'a fait une fois pour toutes
en s'offrant lui-même.

Lui seul peut dire jusqu'au bout le psaume 39 (7-9) : Tu ne voulais ni offrande ni sacrifice, tu as ouvert mes oreilles ; tu ne demandais ni holocauste ni victime, alors j'ai dit : « Voici, je viens. « Dans le livre, est écrit pour moi ce que tu veux que je fasse. Mon Dieu, voilà ce que j'aime : ta loi me tient aux entrailles. »
Contemplons le chemin tracé par le Christ.
Que pouvons-nous de notre côté abandonner pour le suivre ? Qu'est-ce qui est essentiel ? Qu'est-ce qui nous empêche d'aller à l'essentiel ? Prenons le temps, un instant de méditer là-dessus.
Amen

01 novembre 2018

La danse des anges - 3 - saint Bernard - Toussaint - amour est en toi 24


Il viennent en chantant, le peuple des sauvés : immense fresque de joie, amour aux cent visages qui forment ensemble, dans la lumière, la seule icône de gloire : Jésus Christ ! Nous dit l'oraison finale de l'office des lectures. Alors que résonne dans nos églises l'hymne des Béatitudes (Luc 6, 26), contemplons la danse des anges (1)

« Pourquoi notre louange à l'égard des saints, pourquoi notre chant à leur gloire, pourquoi cette fête même que nous célébrons ? Que leur font ces honneurs terrestres, alors que le Père du ciel, en réalisant la promesse du Fils, les honore lui-même ? De nos honneurs les saints n'ont pas besoin, et rien dans notre culte ne peut leur être utile. De fait, si nous vénérons leur mémoire, c'est pour nous que cela importe, non pour eux. ~ Pour ma part, je l'avoue, je sens que leur souvenir allume en moi un violent désir. ~

Le premier désir, en effet, que la mémoire des saints éveille, ou plus encore stimule en nous, le voici : nous réjouir dans leur communion tellement désirable et obtenir d'être concitoyens et compagnons des esprits bienheureux, d'être mêlés à l'assemblée des patriarches, à la troupe des prophètes, au groupe des Apôtres, à la foule immense des martyrs, à la communauté des confesseurs ; au chœur des vierges, bref d'être associés à la joie et à la communion de tous les saints. Cette Église des premiers-nés nous attend, et nous n'en aurions cure ! Les saints nous désirent et nous n'en ferions aucun cas ! Les justes nous espèrent et nous nous déroberions !

Réveillons-nous enfin, frères ; ressuscitons avec le Christ, cherchons les réalités d'en haut ; ces réalités, savourons-les. Désirons ceux qui nous désirent, courons vers ceux qui nous attendent, et puisqu'ils comptent sur nous, accourons avec nos désirs spirituels. ~ Ce qu'il nous faut souhaiter, ce n'est pas seulement la compagnie des saints, mais leur bonheur, si bien qu'en désirant leur présence, nous ayons l'ambition aussi de partager leur gloire, avec toute l'ardeur et les efforts que cela suppose. Car cette ambition-là n'a rien de mauvais : nul danger à se passionner pour une telle gloire. ~

Et voici le second désir dont la commémoration des saints nous embrase : voir, comme eux, le Christ nous apparaître, lui qui est notre vie, et paraître, nous aussi, avec lui dans la gloire. Jusque-là, il ne se présente pas à nous comme il est en lui-même, mais tel qu'il s'est fait pour nous : notre Tête, non pas couronnée de gloire, mais ceinte par les épines de nos péchés. ~ Il serait honteux que, sous cette tête couronnée d'épines, un membre choisisse une vie facile, car toute la pourpre qui le couvre doit être encore non pas tant celle de l'honneur que celle de la dérision. Viendra le jour de l'avènement du Christ : alors on n'annoncera plus sa mort de manière à nous faire savoir que nous aussi sommes morts et que notre vie est cachée avec lui. La Tête apparaîtra dans la gloire, et avec elle les membres resplendiront de gloire, lorsque le Christ restaurera notre corps d'humilité pour le configurer à la gloire de la Tête, puisque c'est lui la Tête. » 

Cette gloire, il nous faut la convoiter d'une absolue et ferme ambition. ~ Et vraiment, pour qu'il nous soit permis de l'espérer, et d'aspirer à un tel bonheur, il nous faut rechercher aussi, avec le plus grand soin, l'aide et la prière des saints, afin que leur intercession nous obtienne ce qui demeure hors de nos propres possibilités.  (2)

Dans une belle contemplation du Paradis, Dante évoque cette danse des anges qui se réjouissent ensemble de la conversion d'une âme. Elle n'a de sens qu'au sein de la danse trinitaire, c'est à dire de cette communion polyédrique des âmes en Dieu, corps glorieux qui prends chair en nous. L'amour est en toi.. 


(1) voir mon livre éponyme 
(2) Saint Bernard, homélie pour la Toussaint source AELF 
(3) Fra Angelico, source https://goo.gl/images/skp5sA

L’amour est en toi 23 - l’étincelle - Sainte Thérèse de l’enfant Jésus

Même le plus petit des dons contribue à l'unité et la charité du corps. La dimension polyèdrique de l'Eglise est bien développée chez Thérèse : « Sœur Marie de l'Eucharistie voulait allumer les cierges pour une procession ; elle n'avait pas d'allumette, mais voyant la petite lampe qui brûle devant les reliques, elle s'en approche. Hélas, elle la trouve à demi éteinte ; il ne reste plus qu'une faible lueur sur la mèche carbonisée. Elle réussit cependant à allumer son cierge et, par ce cierge, tous ceux de la communauté se trouvèrent allumés. C'est donc cette petite lampe à demi éteinte qui a produit ces belles flammes qui, à leur tour, peuvent en produire une infinité d'autres et même embraser l'univers. Pourtant ce serait toujours à la petite lampe qu'on devrait la première cause de cet embrasement. Comment, sachant cela, les belles flammes pourraient-elles se glorifier d'avoir fait un incendie pareil, puisqu'elles n'ont été allumées que par correspondance avec la petite étincelle ?...
Il en est de même pour la communion des saints. Souvent, sans le savoir, les grâces et les lumières que nous recevons sont dues à une âme cachée, parce que le bon Dieu veut que les saints se communiquent les uns aux autres la grâce par la prière, afin qu'au ciel ils s'aiment d'un grand amour, d'un amour bien plus grand encore que celui de la famille, même la famille la plus idéale de la terre. Combien de fois ai-je pensé que je pouvais devoir toutes les grâces que j'ai reçues aux prières d'une âme qui m'aurait demandée au bon Dieu et que je ne connaîtrai qu'au ciel. Oui, une toute petite étincelle pourra faire naître de grandes lumières dans toute l'Église, comme des docteurs et des martyrs qui seront sans doute bien au-dessus d'elle au ciel ; mais comment pourrait-on penser que leur gloire ne deviendra pas la sienne ? Au ciel on ne rencontrera pas de regards indifférents, parce que tous les élus reconnaîtront qu'ils se doivent entre eux les grâces qui leur ont mérité la couronne.(1)

(1) Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus, Derniers entretiens, 15/07/1897, source Evangelizo 

30 octobre 2018

Au fil de Luc, 13, 18-21 - le grain - Maxime de Turin

« Un homme a pris une graine de moutarde et l'a jetée dans son jardin ; elle pousse et devient un arbre, et les oiseaux du ciel s'abritent dans ses branches. » 

Cherchons à qui s'applique tout cela... Je pense que la comparaison s'applique plus justement au Christ notre Seigneur qui, en naissant dans l'humilité de la condition humaine, comme une graine, monte finalement au ciel comme un arbre. Il est grain, le Christ broyé dans la Passion ; il devient un arbre dans la résurrection. Oui, il est une graine quand, affamé, il souffre de manquer de nourriture ; il est un arbre quand, avec cinq pains, il rassasie cinq mille personnes (Mt 14,13s). Là il subit le dénuement de sa condition d'homme, ici il répand le rassasiement par la force de sa divinité.
Je dirais que le Seigneur est grain lorsqu'il est frappé, méprisé, injurié ; il est arbre quand il rend aux aveugles la vue, qu'il ressuscite les morts et remet les péchés. Lui-même reconnaît qu'il est grain : « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas... » (Jn 12,24) (1)

Commentaire de saint Clément de Rome :
Remarquons, mes bien-aimés, comment le Seigneur ne cesse de nous montrer la résurrection future dont il nous a fourni les prémices en ressuscitant d'entre les morts le Seigneur Jésus Christ. Observons, mes bien-aimés, la résurrection qui s'accomplit périodiquement. Le jour et la nuit nous font voir une résurrection. La nuit se couche, le jour se lève, le jour s'en va, la nuit survient. Prenons les fruits : comment se font les semailles, et de quelle manière ? Le semeur sort, jette dans la terre chacune des semences. Celles-ci, tombant, sèches et nues, sur la terre, se désagrègent. Puis, à partir de cette désagrégation même, la magnifique providence du Maître les fait ressusciter et un seul grain en fait pousser une quantité, qui portent du fruit.(2)

Comme le suggère aussi Ignace d'Antioche, je voudrais être à son tour le froment de Dieu


(1) Saint Maxime de Turin, CC Sermon 25 ; PL 57, 509s (trad. coll. Pères dans la foi, Migne 1996, p. 123), source Evangelizo 
(2) saint Clément de Rome, lettre aux corinthiens, source AELF 
Sur le sujet voire aussi mes développements in Le troisième arbre

29 octobre 2018

Au fil de Marc 10 - Bartimée - Homélie du pape François

En regard de mes propres balbutiements, extrait de l’homélie du pape :

« Regardons Bartimée : son nom signifie "fils de Timée". Et le texte le précise : « le fils de Timée, Bartimée » (Mc 10, 46). Mais, alors que l'Évangile le réaffirme, émerge un paradoxe : le père est absent. Bartimée se trouve seul le long de la route, hors de sa maison et sans père : il n'est pas aimé, mais abandonné. Il est aveugle et il n'a personne pour l'écouter ; et quand il a voulu parler, ils l'ont fait taire. Jésus entend son cri. Et quand il le rencontre, il le laisse parler. Il n'était pas difficile de deviner ce que Bartimée demanderait : il est évident qu'un aveugle veut avoir ou retrouver la vue. Mais Jésus n'est pas expéditif, il prend le temps de l'écoute. Voilà la première étape pour faciliter le cheminement de foi : écouter. C'est l'apostolat de l'oreille : écouter, avant de parler. »

(...)

«  Il lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » (v. 51). Que veux-tu ? Jésus s'identifie à Bartimée, il ne fait pas abstraction de ses attentes ; que je fasse : faire, pas seulement parler ; pour toi : non pas selon des idées préétablies pour n'importe qui, mais pour toi, dans ta situation. Voilà comment fait Dieu, en s'impliquant en personne, avec un amour de prédilection pour chacun. Dans sa manière de faire passe déjà son message : la foi germe ainsi dans la vie. »

(...)

« Regardons les disciples qui appellent Bartimée : ils ne vont pas à lui, qui mendiait, avec une petite pièce pour l'apaiser ou pour dispenser des conseils. Ils vont à lui au nom de Jésus. En effet, ils lui adressent trois paroles seulement, toutes de Jésus : « Courage ! Lève-toi. Il t'appelle » (v. 49). Seul Jésus dans le reste de l'Évangile dit courage !, parce que lui seul ressuscite le cœur. Seul Jésus dans l'Évangile dit lève-toi, pour guérir l'esprit et le corps. Seul Jésus appelle, en changeant la vie de celui qui le suit, en remettant sur pied celui qui est à terre, en portant la lumière de Dieu dans les ténèbres de la vie. Tant d'enfants, tant de jeunes, comme Bartimée, cherchent une lumière dans la vie. Ils cherchent un amour vrai. Et comme Bartimée, malgré la nombreuse foule, appelle seulement Jésus, de même eux aussi cherchent la vie, mais souvent ils ne trouvent que de fausses promesses et peu de personnes qui s'intéressent vraiment à eux. »

Au fil de Luc 13, 10 - Chemins de liberté

« En ce temps-là, Jésus était en train d'enseigner dans une synagogue, le jour du sabbat. Voici qu'il y avait là une femme, possédée par un esprit qui la rendait infirme depuis dix-huit ans ; elle était toute courbée et absolument incapable de se redresser.
Quand Jésus la vit, il l'interpella et lui dit : « Femme, te voici délivrée de ton infirmité. »
Et il lui imposa les mains. À l'instant même elle redevint droite et rendait gloire à Dieu » (Luc 13, 10-12) TL

Commentaire :
Une lecture spirituelle pourrait voir l'Église pécheresse dans les bras de Dieu et notre méditation devient prière. Seigneur, vois nos addictions et nos adhérences au mal, redresse nous de ce qui nous conduit au mal, aide-nous à nous libérer de ce qui nous éloigne de toi.
« C'est pour la liberté que le Christ nous a libérés » (Ga 5,1). En lui, nous communions à « la vérité qui nous rend libres » (Jn 8,32). L'Esprit Saint nous a été donné et, comme l'enseigne l'apôtre Paul, « là où est l'Esprit, là est la liberté » (2Co 3,17). Dès maintenant, nous nous glorifions de la « liberté des enfants de Dieu » (Rm 8,21).(1)

« L'Église, il faut s'acharner à la rendre aimable. L'Église, il faut s'acharner à la rendre aimante.

L'Église, société de pécheurs, m'entraîne dans le mouvement de sa vie.
Je ne peux dire ni "elle" ni "moi", mais seulement "nous".
Dire ce "nous", c'est dire l'Église.

Parce que nous rêvons d'un Christ-Église triomphant aux yeux des hommes, nous ne savons pas toujours nous souvenir que le mystère du Christ est le mystère de l'Église et que jusqu'à la fin des temps il sera le sauveur humilié, camouflé sous des hommes limités et pécheurs, et que c'est en eux qu'il nous faudra le reconnaître.

Nous avons quelquefois vis-à-vis de l'Église, l'attitude de quelqu'un qui veut un certificat de bonne conduite. L'Église ne conduit pas, elle est et nous sommes en elle. Elle est le Corps du Christ et nous sommes membres de ce Corps.
Notre dépendance, notre dévouement vis-à-vis d'elle, s'ils exigent des actes extérieurs, des signes, sont avant tout une dépendance et un dévouement interne, vital. Notre dépendance, vis-à-vis de ce Corps qu'elle est, est considérable.
Mais notre initiative, notre responsabilité, notre fonction sont, elles aussi, considérables. Nous y sommes providentiellement irremplaçables. Nos soumissions et nos initiatives y sont à égalité : obéissance, comme pour les cellules d'un corps qui seraient à la fois intelligentes et aimantes.
Une seule cellule peut infecter tout l'organisme; une seule cellule peut laisser passer l'aiguille qui le sauve.

J'appartiens à Jésus-Christ dans l'Église catholique.
L'Église, je suis dedans comme un membre dans le corps, comme une cellule dans un organisme vivant. Elle me transmet la vie des enfants de Dieu.

C'est dans l'Église que je suis en Jésus-Christ, que je vis Jésus-Christ; dans l'Église comme un membre dans un corps, comme une cellule dans une matière vivante.
Ma vie personnelle chrétienne est la conséquence de cette vie commune de l'Église. »(2)

«Soyez bons les uns envers les autres, pleins d’une tendre bienveillance; faites-vous grâce, comme Dieu vous a fait grâce dans le Christ.» Ephésiens‬ ‭4:32‬


(1) citations reprises du CAC n.1739-1742, source Evangelizo
(2) Madeleine Delbrêl in "Nous autres, gens des rues", "Indivisible Amour" et "La Joie de croire")

28 octobre 2018

Au fil de Marc 10, 42 - Bartimée - Homélie du 28/10/18

Les textes que nous avons lu aujourd’hui nous parlent d’espérance.
Jérémie et les psaumes évoquent le retour d’exil avec cette belle phrase « qui sèment dans les larmes récolte en chantant ». Le récit de Bartimée transpire aussi tellement l’espérance que je voudrais vous inviter à contempler ce que vise cette espérance.
Il y a un risque, quand on lit un évangile, c’est d’oublier le contexte, l’enchaînement voulu par l’auteur. La seule lecture de l’histoire de Bartimée n’est finalement qu’un épisode du projet de l’évangéliste, de ce vers quoi il veut nous conduire. Il n'est pas neutre de voir que Marc place au chapitre 10 trois récits ; nous avons entendu, il y a quinze jours, celui du jeune homme riche qui refuse de tout quitter et de suivre Jésus, mais que Jésus aime avec les yeux du du cœur, puis celui des deux frères qui veulent la première place et que Jésus a pris pourtant pour disciples.
Ce matin, nous contemplons Bartimée qui abandonne même son manteau pour courir derrière Jésus.
Notons juste qu’entre les deux premiers récits et celui de Bartimée, Marc place une allusion à la Croix. Cela fait du chapitre 10 une sorte de résumé de l’Évangile de Marc.
Précisons qu’il n’y pas de béatitudes chez Marc, mais il y a ce regard de Jésus qui donne la vie.
En voyant le regard de Jésus sur Bartimée, celui qui croit, on voit que Marc a sa manière nous redit « Heureux les petits car ils ont accès au mystère » comme il le suggérait au chapitre précédent .
Revenons à l’évangile, lu il y a quinze jours. Le jeune homme riche voyait avec les yeux de l’intelligence, pensait commandements, mais n’avait pas la force d'aller plus loin, mais pourtant Jésus le regarda et l’aima. Pourquoi?
Bartimée, celui qui pourtant restait au bord du chemin, qui ne connaissait et ne pratiquait pas tout ça, a vu, au delà de l'ombre de ses yeux de chair, ce que les voyants ne voyaient pas. Il en laisse son manteau, son seul bien, pour courir et suivre Jésus.

D'un côté, celui qui croit savoir et voir mais ne peut aller à l’essentiel.
De l'autre, Bartimée, l’aveugle qui ne voit pas mais qui croit, qui espère et quitte tout…
Et au milieu Jésus qui avance vers la Croix avec le regard aimant.

A dire vrai, l'histoire de Marc ne s’arrête pas là. En Marc 14, 51, le soir de la Passion, un jeune homme suit Jésus, « vêtu seulement d'un drap. On l'arrête, mais lui, lâchant le drap, s'enfuit tout nu.». Pour certains commentateurs, il s'agit du même jeune homme riche, et plus encore, il s’agirait de Marc l'évangéliste lui-même. Quel chemin ? Que faire, que penser de  tout cela ?

Suivre Marc, c'est découvrir sa propre conversion, comment il a découvert les yeux du coeur. Pour lui, Jésus est notre chemin. Il est la vérité et la vie. Ce que l’aveugle voit, il veut nous le faire découvrir, au-delà de ce qui cache l’essentiel.

La première chose à faire, c'est peut-être de se retourner vers le passé et contempler les dons de Dieu, fermer ses yeux de chair et écouter notre cœur, voir Dieu qui se donne et s'efface. Qui aime à en mourir. Sentir la caresse de Dieu dans nos vies. Alors nous pourrons, comme Bartimée courir derrière Jésus et dire "fait que je vois".

Contempler l’histoire de Bartimée nous ouvre le chemin du cœur. Et le chemin du coeur est un chemin de guérison, il ouvre nos yeux à l'essentiel. Nous voyons trop par les yeux du corps ou par les yeux de l’intelligence.
Les yeux du coeur nous ouvre à autre chose. Il nous transforme, y compris dans le regard porté à nos frères.
Voir avec les yeux du cœur c’est avoir le regard aimant de Jésus.
Au bout du chemin que va suivre Bartimée à la suite de Jésus, en quittant le monde des aveugles vers la vie, il y a le Golgotha, le lieu où le grand prêtre éternel (l’heritier de Melchisédek de la 2eme lecture) va donner le sacrifice unique : sa vie. Saint Marc comme je l’ai dit, y fait déjà une allusion, entre le récit du jeune homme riche et celui de Bartimée. Pourquoi ?
Que cherche-t-il à dire ?
Pour Marc, le peuple juif ne voyait pas l'amour de Dieu. Il était derrière un voile. Au Golgotha, nous dit Marc, Dieu va déchirer le voile du haut en bas. L’aveuglement va laisser place à la lumière. Et qu’est-ce qui se révèle ?  : Un Christ qui nous aime. Un Christ qui se donne. Ce que nous refusons parfois de voir se dévoile sur la Croix.
Marc, non sans ironie, précise que ce ne sont pas les Juifs qui vont comprendre cela, mais un centurion romain, un autre Bartimée, rejeté des Juifs. « Vraiment cet homme est le fils de Dieu » dit-il. La Croix révèle que Dieu est don. Dieu est amour. Elle ouvre les yeux du cœur sur l'essentiel.
Le chemin de Bartimée, c’est regarder avec les yeux du coeur, voir l’essentiel, voire que l’amour est don. C’est aussi le chemin de Marc. Il avait des biens, il se retrouve nu, le jour de la Passion. Il est nu, mais il voit que l’essentiel est sur la Croix. Dieu est amour. Il change notre regard. Alors tournons nous vers nos frères et regardons les, à la suite de Jésus, avec les yeux du cœur.

Homélie du 28/10/2018 à St Lubin des Joncherets

27 octobre 2018

L'amour est en toi - 22 - saint Augustin

"Elles me retenaient, mes vieilles idées amies, ces bagatelles de bagatelles, ces vanités de vanités ! À petits coups elles me tiraient par ma robe de chair et murmuraient à mi-voix : « Tu nous congédies ? Fini pour jamais ! À partir du moment qui vient nous ne serons plus avec toi, il ne te sera plus permis de faire ceci, de faire cela. » Oh ! ce qu'elles suggéraient, mon Dieu ! J'hésitais à me débarrasser d'elles, à bondir où j'étais appelé ; l'habitude me disait, tyrannique : « Crois-tu que tu pourras vivre sans elles ? » Mais déjà sa voix était molle, car du côté où je tournais mon visage et où je tremblais de passer, la chaste dignité de la continence m'invitait noblement et gracieusement à venir sans plus balancer, me montrant une foule de bons exemples : « C'est le Seigneur leur Dieu qui m'a donnée à eux. Pourquoi t'appuyer sur toi-même alors que tu ne te tiens pas debout ? Jette-toi en lui, n'aie pas peur. Il ne va pas se dérober pour que tu tombes. Jette-toi sans crainte ; il te recevra et te guérira ».
Cette dispute dans mon cœur n'était qu'une lutte de moi-même contre moi-même. Quand mon regard avait enfin tiré du fond de mon cœur toutes mes misères, il s'est levé une grosse tempête de larmes. Pour laisser crever l'orage, je me suis levé et suis sorti. Sans trop savoir comment, je me suis étendu sous un figuier, je lâchais complètement mes larmes, elles ont jailli à flots, sacrifice digne de toi, mon Dieu. Et je t'ai dit sans retenue : « Et toi, Seigneur, jusques à quand ? Jusques à quand seras-tu irrité ? Ne garde pas le souvenir de nos vieilles iniquités » (Ps 6,4 ;78,5). Je poussais des cris pitoyables : « Dans combien de temps ? Combien de temps ? Demain, toujours demain. Pourquoi pas tout de suite ?

Et voici que j'entendais une voix venant d'une maison voisine, voix d'enfant ou de jeune fille, qui chantait et répétait : « Prends et lis ! Prends et lis ! » À l'instant, je me suis repris et cherchais à me rappeler si c'était le refrain habituel d'un jeu d'enfant ; rien de tel ne me venait en mémoire. Refoulant mes larmes, je me suis levé dans l'idée que le ciel m'ordonnait d'ouvrir le livre de l'apôtre Paul et de lire le premier passage sur lequel je tomberais. Je suis rentré en hâte et j'ai pris le livre et j'ai lu ce que j'ai vu en premier : « Non, pas de ripailles et de soûleries, pas de coucheries et d'impudicités, pas de disputes et de jalousies, mais revêtez-vous du Seigneur Jésus Christ. Ne cherchez plus à contenter la chair dans ses convoitises » (Rm 13,13s). Ce n'était pas la peine d'en lire davantage ; je n'en avais plus besoin. Ces lignes à peine achevées, une lumière de sécurité s'est déversée dans mon cœur et toutes les ténèbres de mon incertitude ont été dissipées." (1)

Une belle approche de ce que j’appelle les adhérences au mal, constitutives de ce que l’Église appelle péché

 (1) Saint Augustin,  Confessions,  livre 8, source Évangile au quotidien

25 octobre 2018

Au fil de Luc 12 - division - Suite




Commentaire de saint Jérôme : 
L'ordre est nécessaire en toute affection. Aime ton père, aime ta mère, aime tes fils après Dieu. S'il devient inévitable de mettre en balance l'amour de ses parents et de ses enfants avec l'amour de Dieu sans qu'il soit possible de les conserver tous les deux, alors, ne pas préférer les siens est piété envers Dieu.
Saint Jérôme, Commentaire sur Matthieu I, 34-37 ; SC 242 (trad. SC p 207-209 rev.)

24 octobre 2018

Au fil de luc 12 - Paix et division - Homélie du 25/10/18

Les textes d’aujourd’hui ne sont pas simples. Il y a une apparente contradiction entre ces deux lectures. D’un côté nous avons l’Épître aux Éphésiens qui déjà, comme nous l’avons entendu mardi, dans le chapitre 2, nous annonçait «La bonne nouvelle de la paix » (Éphésiens‬ ‭2:17‬) ‭et qui nous invite aujourd’hui à une des plus belles contemplations de l’amour de Dieu en Christ. De l’autre, nous avons Jésus qui nous parle de division. Il y a là ce qui s’appelle une tension. Un terme qui en théologie est toujours constructif. Prenons le temps de contempler d’abord la première lecture avant de saisir l’enjeu de cette tension apparente.

Goûtons d'abord aux métaphores vives : « Restez enracinés dans l'amour, établis dans l'amour. Alors vous serez comblés jusqu’à entrer dans toute la plénitude de Dieu »

L’auteur nous appelle même à  « tomber à genoux devant le Père » (...) à contempler le don que Dieu nous fait et surtout à  saisir l’immensité de ce don (...) « la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur… ».

Quand on se tourne en arrière et contemple le don de Dieu, il y a bien, en effet, de quoi tomber à genoux. C’est peut-être la première étape. La contemplation...
Bonaventure avait sur ce point une image très belle : nous sommes comme un homme à genoux dans le fleuve de l’amour et muni d’une petite amphore. Un récipient qui reste bien menu par rapport « au don de Dieu ». Quel est ce don ? C’est « l’amour du Christ » nous précise l’auteur. Un amour sans limite.

« Toute la terre, Seigneur, est remplie de ton amour. (cf. Ps 32, 5b) avons nous répété dans l’antienne du psaume.

Mais voilà que saint Luc nous parle de division. Que veut-il nous dire ? Un premier indice est qu’il évoque le feu. Qu’est-ce que le feu ?
Dès les premiers livres du premier testament, comme en Exode 3, dans le récit du buisson ardent, le feu est marqué comme signe de Dieu. Il est d’origine divine. Et Moïse entends le même appel que celui de la première lecture. Enlève tes sandales. Contemple le feu. C’est une première piste. Il est intéressant de noter à ce stade que pour certains commentateurs de cet épisode du buisson ardent (1) le feu est déjà une évocation de la Croix.
Quand Jésus dit à ses disciples :  « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ! » il parle clairement de sa Croix. Et c’est bien cela que nous devons contempler dans la foulée de notre première lecture (Éphésiens 3).
Prenons le temps d’en voir la hauteur, la profondeur. La Croix est l’amour jusqu’au bout. Il ne fait plus de concessions. Le choix de l’amour est sans retour. Et c’est là où Jésus nous interpelle.
Aimons nous au point de lui préférer nos attaches humaines ?
Sommes-nous prêts à tout abandonner pour le suivre ?

Une première piste de lecture est de mettre l'affirmation de Luc au contexte de l’époque. On se situe en 80. Dans le contexte historique d’une scission entre juifs et chrétien, la division devait être à son comble : «  cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront : le père contre le fil et le fils contre le père. » (2).  Luc décrit probablement une réalité de son temps, mais aussi celle des temps derniers.

Mais peut-on s'arrêter là ?
Que dire aujourd’hui ? Ne sommes nous pas aussi divisés ?
On peut avoir trois autres lectures. La première est d’ordre morale.
Si nous restons tranquilles dans nos habitudes, dans le confort d’une foi personnelle, nous pouvons éteindre le feu de l’amour.
S’il brûle en nous, il nous faut affronter le monde, y compris nos plus proches pour mettre Dieu au centre, pour mettre l’amour au centre. Et c’est peut-être là que Dieu nous attend. Si l’on sort le feu de Dieu du boisseau où nous le cachons trop souvent, il doit nous embraser… Mais le danger est de sombrer dans la morale, d’être source de division. Ce n’est pas le chemin de la Croix.

La dernière lecture est plus intérieure. Elle est liée. C’est celle du combat spirituel. Le feu va être alors le moyen de purifier ce qui, en nous, reste divisé.
Au bout du chemin, nous le sentons, l’enjeu est de ne pas fuire dans la contemplation. Il est plutôt de se laisser mouvoir par l’amour. Les deux textes sont là pour nous inviter à avancer, même s’il faut pour cela déranger nos proches, aller à l’essentiel, quitter notre confort, cesser d’être immobiles.

La troisième piste de lecture est probablement la plus intéressante. Elle est cursive. C’est à dire qu’elle reprend la direction donnée par Luc dans son Evangile.

« Soyez sans crainte », Lc 12, 7 disait déjà Luc au début du chapitre. C’est nos paralysies qui freinent sans cesse la diffusion de la bonne nouvelle. Nul n’échappe à ces enfermements intérieurs, à cette peur du jugement des autres et des divisions qu’il génère. Seigneur donne nous ton Esprit. Allume en nous le feu. À l’image de celui qui a saisi les apôtres, du feu qui les a fait sortir de leur tanière et proclamez la bonne nouvelle.

Le feu qui brûle en nous est celui du buisson ardent. Il ne nous détruit pas. Il nous conduit à genoux devant la Croix. Il est amour. En étant amour, nous entrons dans les pas de Dieu. La tension du départ prend sens. Nous sommes porteurs de la bonne nouvelle de la Paix. Les divisions viennent de ceux qui ne reconnaissent pas la Croix. Notre feu c’est l’amour.
« Sois sans crainte » glissait déjà l'ange à Marie, selon les premiers versets de Luc, [qu'il dit aussi à Zacharie et aux anges](1). « L'esprit te couvrira de son ombre » (...) et si « un glaive te transperce » (Lc 1, 35) et te divise jusqu'aux « jointures de l'âme » (Heb 4, 12), Dieu sera avec toi. 

Le feu trinitaire est dans La Croix. Il est plus que le feu des prêtres de l'ancienne Alliance (cf. notamment 1R18). Il est plus que la Croix. Il en est le fruit. Il est don de Dieu, c'est l'Esprit de Dieu lui même qui vient nous visiter. C'est l'Esprit de Paix, la bonne nouvelle de la Paix dont parle Éphésiens 2.
La tension prend sens...


  1. Cf. Benoit XVI, in  Jésus de Nazareth
  2. Eph 3 et Luc 11, source Textes liturgiques AELF

23 octobre 2018

L’amour est en toi 21 - la source vide - Hans Urs von Balthasar

"Celui qui connaît au centre de son être la source toujours vide de la vérité et de l'amour de Dieu se sent pressé d'y revenir sans cesse pour y purifier, y renouveler, y reposer tout son être" (1)

Je note avec intérêt cette notion de source vide. Est-ce une erreur de traduction ? Je ne le crois pas. Car à la différence de mes propos sur l'amphore et le fleuve qui témoigne de l'immensité des dons de Dieu (Eph 3), il y a là une constatation: Dieu fait germer en nous un désir inépuisable. Une source vive est celle qui creuse en nous jusqu'au jointures de l'âme le désir éternel d'une rencontre inassouvie. Cela résonne avec le vers de Jean de La Ville de Mirmont in L'Horizon chimérique ... "Car j'ai de grands départs inassouvis en moi."

(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 70

Au fil de Luc, 12, 35-38 - servir

« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
  « Restez en tenue de service, votre ceinture autour des reins, et vos lampes allumées. Soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces, pour lui ouvrir dès qu'il arrivera et frappera à la porte.
    Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller.
Amen, je vous le dis : c'est lui qui, la ceinture autour des reins, les fera prendre place à table et passera pour les servir.
    S'il revient vers minuit ou vers trois heures du matin et qu'il les trouve ainsi,heureux sont-ils ! » (1)
A contempler 
(1) Luc 12, 35-38, source AELF