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30 novembre 2018

Tressaillement 9 - Hans Urs von Balthasar

Dans la série de mes réflexions sur le tressaillement, une petite résonance avec Hans Urs von Balthasar : « celui qui n'éprouverait pas jusqu'au racines de son être le frisson devant l'être de Dieu (...) ne serait pas préparé à la contemplation de Jésus-Christ (...) Que l'être absolu de Dieu ait résolu de se présenter dans une existence humaine (...) voilà ce qui doit surprendre sans cesse et toujours plus profondément celui qui contemple l'existence de Jésus, comme quelque chose d'impossible, d'absolument stupéfiant. Devant cette existence, il ne peut que perdre contenance, sentir le sol se dérober sous ses pieds, il doit au moins tomber dans cette « extase » d'incompréhension dans laquelle les contemporains de Jésus furent jetés »(1)

Balthasar invite pour cela à une initiation à ce mystère par l'Ancien Testament. On retrouve probablement à sa suite ce que j'ai tenté de contempler dans « retire tes sandales »...

(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 140

28 novembre 2018

Les dangers de l’apocalyptique extrême - Hans Urs von Balthasar

Alors que la liturgie de cette fin d'année nous plonge dans la contemplation de l'apocalypse, il est bon d'entendre les avertissements d'Hans Urs von Balthasar : le danger dit-il en substance est un penchant toujours plus fort vers « la mystique sous la forme des apocalypses » (...) « d'une science secrète (...) appuyée à des formes prophétiques » (...) , d'oublier le présent et de contempler la gloire du Christ dans le temps, comme le reflet du Seigneur céleste sur la terre »(1)
L'enjeu est de se diriger non pas dans une fuite du réel mais plutôt vers une « veille comme prière, comme ouverture du coeur à Dieu qui peut venir et surprendre en tout temps (...) qui ne fait pas disparaître l'eschatologie ds la mystique » (2)

Toute contemplation n’a de sens que lorsqu’elle trace un chemin dans nos vies, met le Christ au centre, lui donne une place aujourd’hui.
Descente de croix, Vert en Drouais, (c) CHD


(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative op. cit. p. 128sq
(2) ibid p. 131

24 novembre 2018

Passé et futur - une tension théologique

Je souligne une tension intéressante entre mes nombreux propos sur la course infinie du chrétien à la suite de Paul dans Philippiens 3 et l'attitude contemplative décrite par Hans Urs von Balthasar : « le Saint-Esprit qui nous introduit dans la plénitude du Christ et nous l'explique jusqu'à la fin du monde, d'une manière toujours plus riche et plus profonde, puise dans une source qui (...) se situe dans le passé. Et le contemplatif lui aussi ne peut faire autrement que de tourner son regard vers le passé. De ce fait, le chrétien va contrairement à la poussée de l'histoire qui court torrentueusement vers l'avant, et sa tendance contemplative ne peut que constituer un scandale pour l'homme qui reste enfermé dans l'histoire » (1)

Cette tension trouve son dénuement dans cette triple composition entre contemplation, méditation et agir.

(1) ibid p. 127

22 novembre 2018

Parvenir à toucher Dieu ?

La contemplation ne doit pas rester intellectuelle. La science enfle mais le coeur édifie. L'enjeu nous dit Ignace est de « parvenir au toucher (1 Jn 2, 2), au contact avec Dieu (Exercices n. 20), il faut être saisi par ce que les Divines Personnes font (Ex 108). » (1)

Cette quête est d'abord contemplative et méditative avons nous souligné déjà plus haut à la suite d'Hans Urs von Balthasar.

Le risque constant de tout discours est de se complaire dans les mots et le discours et d'oublier d'agir.

« Assurément la flamme de l'amour jaillira normalement du bois de la connaissance, et souvent elle jaillira d'autant plus fortement que la connaissance sera plus existentielle. Mais il ne faut pas sous ce prétexte, s'attarder si longtemps dans l'intellectualité que l'amour n'ait plus sa place et que même l'attitude foncière d'adoration s'évanouisse, parce qu'on est tombé dans les subtilités et dans les fumées de la science » (2)

Pouvons nous toucher Dieu ? La contemplation d'Exode 33 et 34 nous montre qu'on ne peut le voir que de dos. Pour le toucher, il faudrait que notre agir, poussé par l'Esprit et la grâce se transforme en graines et que, dans le coeur de Dieu, elles germent alors sur les rives du grand fleuve amoureux.

(1) cité par Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 119
(2) Hans Urs von Balthasar, ibid.

Contemplatio et meditatio - Ignace de Loyola

« Contemplatio ignacienne  exercices n. 106sq d'Ignace de Loyola :  d'abord voir la scène d'Évangile et les personnes qui y paraissent, ensuite entendre leurs paroles, enfin considérer leurs actions. Ou bien, en se plaçant plutôt au point de vue du sujet, pour la mediatio : d'abord se représenter par la mémoire l'événement objectif, ensuite en découvrir le contenu par l'entendement, enfin appréhender ce qui a été découvert par la volonté et l'affectivité, se l'approprier et l'introduire dans sa propre vie. (...) [L'enjeu est] l'action, un agir de la part de Dieu ; action qui en exigeant de moi une réponse et en me conférant la grâce, me saisit et me transforme. » (1)

« Ce qui est visé est ma vie, non pas mes spéculations, mes imaginations, mes rêveries religieuses et théologiques, mais réellement ma vie » (2)

Ce qui est visé est la « béance du coeur », cet ouverture à l'Esprit qui peut agir en moi, me saisir (Ph 3), et me conduire toujours plus loin dans cette course infinie(3) vers le but qui m'est assigné...

(1) cf. Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 117sq
(2) ibid. p. 154
(3) cf. mon livre éponyme déjà cité 

17 novembre 2018

Au fil de Luc 18, 8 - la foi

« Le Fils de l'homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » (Luc 18,8)

Cette question de Jésus m’interpelle jusqu'au jointures de l'âme. Elle n'a pas pour visée première mon voisin que Dieu seul « sonde et connaît » (Ps 139,1), mais bien notre foi propre, celle qui n'a pas souvent la taille d'un « grain de moutarde »....

Au delà du désert de nos vies intérieures, dans notre tentation de ritualisme et nos automatismes se trouve en question notre ouverture réelle à la Parole. Est-ce qu’elle est pour moi tranchante et interpellante. Vient-elle me réveiller de mes insuffisances et de mes petitesses  ?

Suis-je  vraiment « en Christo », c'est à dire décentré de toute auto référence et animé par une confiance totale en la miséricorde du Père ?

Hans Urs von Balthasar, dans son commentaire sur la prière, suggère avec justesse que les laïcs n'ont pas [forcément] à prendre la liturgie des heures mais doivent chercher par eux-mêmes une rencontre plus naturelle avec leur Dieu, « plus de compréhension et de liberté spirituelle » (1). Quel est l'enjeu de cette remarque ? Probablement une double crainte, celle de les voir rentrer dans un ritualisme de plus : «  j'ai fait ma prière ! » et celle de couper ce lien particulier entre le laïc et le monde qui lui donne une sensibilité des souffrances et des joies et au sein duquel Dieu « avise »(2).

Cette interpellation de Balthasar ne vise probablement pas que les laïcs. Il n'y a pas de chasse gardée. La prière des heures est un cri de l'Église. Elle éveille l'homme mais ne le comble pas comme une véritable oraison silencieuse.

Alors laissons-nous peut-être interpeller. Quelle est la nature de ma relation avec Dieu ?

(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 105
(2) allusion à la phrase bien connue citée par le curé d'Ars : «  je l'avise et il m'avise »

16 novembre 2018

Le moi et la Parole - Hans Urs von Balthasar

« Il arrivera (...) que dans la méditation de ce que Dieu dit, l'homme aussi, son je et son moi, surgisse et prenne de la réalité en réfléchissant sur lui-même, il l'obtient en écoutant la parole de Dieu, dans le miroir de laquelle il verra ce qu'il est lui-même en vérité (...). Celui qui fait de son moi le plus profond un moi attentif à la parole de Dieu et adorateur est sûr d'être compris dans la transcendance décisive » (1)

Un peu d'autocritique ne fait pas de mal. La Parole est un miroir qui nous renvoie notre réalité d'homme, fragile, englué dans nos insuffisances et dans les adhérences qui nous rattachent au monde. 

Et néanmoins cette autocritique rejoint ce que disait Paul en Ph 3. Tout n'est que « balayure ». Laissons nous porter par ce désir tout intérieur qui nous conduit au Seigneur.


(1) Hans Urs von Balthasar op. cit. p. 102

15 novembre 2018

Au fil de Luc 17,20 - le règne de Dieu est au milieu de vous - 27

C’est « dans le miroir de la Parole que l’homme voit qu’il est en vérité ». (1)
Ce passage de Luc nous livre deux trésors. Le premier c'est qu'il nous faut arrêter de chercher des signes extérieurs, mais contempler ce souffle intérieur déposé en nous dans le silence et qui conduit notre âme. 
« Le règne de Dieu est au milieu de nous et au-dedans de nous ». Lc 17, 10

« Elle est tout près de nous, cette Parole, elle est dans notre bouche et dans notre cœur » (Dt 30,14). Écoutons Origène : « celui qui prie pour que vienne le règne de Dieu a raison de prier pour que ce règne de Dieu germe, porte du fruit et s'accomplisse en lui-même. Chez tous les saints en lesquels Dieu règne et qui obéissent à ses lois spirituelles, il habite comme dans une cité bien organisée. Le Père est présent en lui et le Christ règne avec le Père dans cette âme parfaite, selon sa parole : « Nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui. » (Jn 14,23). (2)

Que nous le précise Origène, cette paix intérieure nécessite d'avoir combattu ce qui en nous résiste. Une « cité bien organisée » est cette chambre intérieure, nettoyée du superflu, attentive aux tentations qui l'attaque à nouveau (Lc 11, 24-26) à laquelle nous devons veiller.
Luc nous met en garde sur le retour des 7 démons furieux. Comme le dit Grégoire 
« Il arrive souvent (...) que, lorsque l'âme vient à s'enorgueillir de ses premiers pas dans la perfection, et veut en être louée comme de véritables vertus, elle donne entrée à son ennemi furieux contre elle, et qui s'acharne avec d'autant plus de violence à sa ruine, qu'il a éprouvé de douleur d'en avoir été chassé, ne fût-ce que pour quelque temps. »(3)

Une homélie du 2eme siècle le précise : « lorsque les païens entendent de notre bouche les paroles de Dieu, ils admirent leur beauté et leur noblesse. Mais ensuite, lorsqu'ils découvrent que notre conduite n'est pas en accord avec les paroles que nous disons, ils passent au blasphème en disant qu'il n'y a là que fable et folie.

En effet, lorsqu'ils nous entendent dire, comme une parole de Dieu : Quelle reconnaissance pouvez-vous attendre, si vous aimez ceux qui vous aiment ? Mais on vous sera reconnaissant si vous aimez vos ennemis et ceux qui vous détestent. Oui, lorsqu'ils entendent ces paroles, ils admirent cette extrême bonté. Mais lorsqu'ils voient que nous n'aimons pas ceux qui nous détestent et même pas ceux qui nous aiment, ils se moquent de nous, et le nom de Dieu est blasphémé.
Ainsi donc, mes frères, si nous faisons la volonté de Dieu notre Père, nous appartiendrons à l'Église primordiale, à l'Église spirituelle, qui fut créée avant le soleil et la lune. Mais si nous ne faisons pas la volonté du Seigneur, nous relèverons de ce passage de l'Écriture : Ma maison est devenue une caverne de bandits. Préférons donc appartenir à l'Église de la vie, afin d'être sauvés. »(4)

Reconnaissons le, c'est donc le chemin d'une vie, qui est en jeu ici. Passer de la parole aux actes. Notre lutte contre nos adhérences au mal qui nous entravent et nous lient de l'intérieur est une lutte sans fin ? Peut-on y arriver seul ? Non ! 
N'est-ce pas « impossible à l'homme ? » (Mat 19, 26).

Comment y parvenir ? 
C'est la contemplation de la Croix qui nous libère. « Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé » (Za 12, 10 - Jn 19, 37). Le daqar hébreu (percé au travers) exprime ici un double déchirement. Celui qui libère l'Esprit de Dieu jaillissant du cœur transpercé et celui intérieur en nous, qui ouvre nos yeux du cœur (5) et nous conduit à une « nouvelle naissance » (cf. Jn 3, 7)
« Le règne de Dieu qui est en nous (...) parviendra à sa perfection lorsque la parole de l'apôtre Paul s'accomplira : le Christ « après avoir soumis » tous ses ennemis, « remettra son pouvoir royal à Dieu le Père pour que Dieu soit tout en tous » (1Co 15,28). C'est pourquoi, priant sans relâche, avec des dispositions divinisées par le Verbe, disons : « Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne » (Mt 6,9). (6)
Alors, « comme l'éclair qui jaillit illumine l'horizon d'un bout à l'autre, ainsi le Fils de l'homme, quand son jour sera là.» Luc 17, 23

Qu'est-ce que cette lumière ? Benoît XVI évoquait au JMJ de Cologne une fission nucléaire. On peut y voir à notre tour un déchirement intérieur comme celui du voile qui cachait Dieu au temple. Alors à la suite de Marc nous entendrons le centurion nous dire « celui-ci était vraiment le fils de Dieu. Marc 14, 39

L'éclair qui illumine est le feu allumé par le Ressuscité, buisson ardent qui nous sauve.
(1) Hans Urs von Balthasar, op. cit. p. 101
(2) Origène, Traité sur la prière, 25 ; GCS 3, 356 (trad. bréviaire, 34e dimanche)
(3) S. Grég. (Moral. 7, 7.) 
(4) source office des lectures du 15/11/18, AELF 
(5) cf. notre commentaire de Bartimée Mc 12
(6) Origène, ibid.

14 novembre 2018

Un seul pain - Hans Urs von Balthasar - 1 Co 10

Trois mots de Balthasar suscite ma méditation : « la manducation d'un seul pain, comme participation au Corps du Christ (1 Co 10,17) » (1)
Relisons la référence chez Paul : «La coupe de bénédiction, sur laquelle nous prononçons la bénédiction, n'est-ce pas une communion au sang du Christ? Le pain que nous rompons, n'est-ce pas une communion au corps du Christ? Puisqu'il y a un seul pain, nous, la multitude, nous sommes un seul corps; car nous partageons tous le même pain
‭‭(Première aux Corinthiens‬ ‭10:16-17‬) ‭

Dans nos églises nous mangeons des hosties bien rondes et bien lisses en oubliant qu'il s'agit d'un seul pain et surtout d'un seul corps. L'unité se joue déjà dans cette contemplation de ce qui est pourtant une évidence. Nos individualismes nous font oublier cette invitation à l'unité. 

On entend comme en écho le premier chapitre de la même lettre : « «J'entends par là que chacun de vous dit: « Moi, j'appartiens à Paul! » – « Et moi, à Apollos! » – « Et moi, à Céphas! » – « Et moi, au Christ! » Le Christ est-il divisé? Est-ce Paul qui a été crucifié pour vous, ou bien est-ce pour le nom de Paul que vous avez reçu le baptême?»
‭‭Première aux Corinthiens‬ ‭1:12-13‬.

Il nous faut sans cesse prier pour que l'unité se fasse en nous et entre nous, deux dimensions d'une même danse en Christo.

Hans Urs von Balthasar va plus loin : «  l’Esprit [conduit] (...) a une unité indivisible [au point que] la contemplation et le sacrement forment une unité ecclésiale première et indissociable » (ibid. p. 99)


(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 97

Photo : Détail de Fra Angelico, la danse des anges.

13 novembre 2018

La prière des humbles - le cyclone spirituel

« Entre la grande prière (...) de l'Église et la prière tâtonnante, trébuchante des individus, il y a un lien indestructible. Il y a dans le monde des millions d'êtres qui prient, mais toutes les prières sont rassemblées dans l'unique prière résumant tout de l'Église, de l'Épouse, qui déverse la multiplicité des prières (...) devant le Père »(1)

S'il nous était donné de contempler physiquement cette prière elle aurait la forme d'une dépression cyclonique avec au centre la Croix glorieuse...

Comme un souffle fragile venant rejoindre le vent de l'Esprit pour remonter au Père et redescendre comme la pluie qui féconde au cœur de chacun l'espérance du Royaume...

Serviteurs inutiles (lc 17, 10) mais membre d'un corps dont nous sommes les pierres vivantes.

Sable immense d'une plage que Dieu caresse de ses vagues amoureuses.



(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 88

10 novembre 2018

La prière en actes - Hans Urs von Balthasar

Si simple et si humble soit-elle, la prière est indispensable, nous rappelle Hans Urs von Balthasar.  « Il ne suffit pas que le croyant écoute ; si son attention ne devient pas une réponse active et authentique à la Parole, il n'aura certainement rien entendu. Il ne suffit pas que le croyant laisse prier le Saint-Esprit au fond de son âme : c'est lui, l'homme qui doit prier ; de lui Dieu attend l'acte de la prière vocale comme de la prière contemplative, et ce passage de la possibilité à la réalité temporelle constitue son action » (1)

(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 87

08 novembre 2018

Philippiens 3 et Luc 15 - La course infinie - Homélie du 8/11/18


Frères et sœurs,
La liturgie, en découpant la Parole en tranches, nous prive souvent d’une lecture cursive et donc d'une certaine façon de la dynamique de l’auteur.
Il faudrait ainsi, en théorie, prendre le temps de contempler le message de Luc. Tomber à genoux comme Dieu tombe à genoux devant l’homme (1). Dans l’ensemble du chapitre 15 et en particulier les paraboles sur la miséricorde, Luc nous dévoile l’amour infini de Dieu, son attention pour les pécheurs que nous sommes. Je vous invite ce soir à prendre le temps de les lire toutes ensemble et de vous laisser attendrir par l’amour de Dieu pour l’homme.
Qui sommes nous pour parler pour autant de l’amour Divin ?
J’aimerais vous partager ce matin une contemplation de la première lecture, qui tronque, elle aussi une invitation de Paul à se laisser saisir par le Christ.
Pharisien, chercheur de la loi, une « brebis perdue » dans l’étude stérile de la loi, il prend conscience que tout cela n’est rien, que ce ne sont que balayures. Il a été saisi par le Christ et s’élance, dit la suite du texte, pour saisir la bonne nouvelle du Christ et se laisser à nouveau saisir par Lui.
Qu’évoque pour nous ce saisissement ? Écoutons la suite du texte que nous aurions pu entendre demain si l’on ne fêtait pas la dédicace de Latran.
« Il s’agit maintenant de le connaître, Lui,
 ainsi que la puissance de sa résurrection
et la communion de ses souffrances, 
en étant configurés à lui dans la mort, 
pour parvenir, si possible, 
à la résurrection d’entre les morts. 
Ce n’est pas que j’aie déjà obtenu tout cela
ni que je sois déjà parvenu à l’accomplissement;
 mais je le poursuis, tâchant de le saisir, 
pour autant que moi-même j’ai été saisi par Jésus-Christ. (...) 
une seule chose compte: 
oubliant ce qui est en arrière 
et tout tendu vers ce qui est en avant, 
je cours vers le but....» (Philippiens‬ ‭3:10-14‬).
Quel est ce but ?
À nous de le trouver. 
Cet élan de Paul, cette course infinie, comme l’appelle Grégoire de Nysse à sa suite, est notre chemin. Le risque est de rester installé dans un confort illusoire. « de tomber dans une routine qui [nous] satisfait et qui [nous] tranquillise »(2),
de croire, comme le souligne le cappadocien qu’on a saisi le Christ (3)
Alors ne restons pas assis sans rien faire. Dieu nous appelle, il nous envoie et pour rejoindre Luc, il nous confie les brebis perdues…

Homélie du 8/11/18 à St P. du Roule

(1) cf. mon livre éponyme « À genoux devant l’homme », 2014
(2) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 81
(3) cf. C. Hériard, Grégoire de Nysse et la course infinie, Lulu, 2009

07 novembre 2018

Tu es unique à mes yeux

Étonnante insistance de Balthasar : « c'est pour moi que le Christ est né, pour moi qu'il meurt sur la Croix. (...) tout recevoir la marque de cette unicité (...) tu es l'homme (...) tu tournes vers moi ton visage rayonnant ». (1)
Mais n'est-ce pas cela l'amour véritable, infini, d'un Dieu qui s'agenouille devant l'homme.

(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 84

23 octobre 2018

L’amour est en toi 21 - la source vide - Hans Urs von Balthasar

"Celui qui connaît au centre de son être la source toujours vide de la vérité et de l'amour de Dieu se sent pressé d'y revenir sans cesse pour y purifier, y renouveler, y reposer tout son être" (1)

Je note avec intérêt cette notion de source vide. Est-ce une erreur de traduction ? Je ne le crois pas. Car à la différence de mes propos sur l'amphore et le fleuve qui témoigne de l'immensité des dons de Dieu (Eph 3), il y a là une constatation: Dieu fait germer en nous un désir inépuisable. Une source vive est celle qui creuse en nous jusqu'au jointures de l'âme le désir éternel d'une rencontre inassouvie. Cela résonne avec le vers de Jean de La Ville de Mirmont in L'Horizon chimérique ... "Car j'ai de grands départs inassouvis en moi."

(1) Hans Urs von Balthasar, la prière contemplative, op. cit. p. 70

22 octobre 2018

L’amour est en toi 20 - Circumincession - Hans Urs von Balthasar

Alors que "partout ailleurs, l'idée prise au sérieux d'une inhabitation du moi fini par le Moi infini conduit inévitablement à une conclusion panthéistique : le dépassement qui va du moi fini (empirique) à l'absolu devient donc, aussi nécessairement, une sorte d'abandon de soi à la fois mortel et bienheureux (cf. Fichte). Dans le christianisme, une telle inhabitation est au contraire concevable de la façon la plus sérieuse et la plus radicale, sans qu'elle entraîne l'éclatement et l'anéantissement du moi fini; celui ci s'achève plutôt de la manière la plus mystérieuse au dessus de lui-même en Dieu. Ici aussi il y a une mort mystique de l'amour mais cette mort est une véritable résurrection, bien mieux une résurrection corporelle en Dieu. Une telle inhabitation par l'Esprit de Dieu, "que Dieu nous donne" (1 Th 4,8) suppose le mystère trinitaire dans l'être absolu lui même, c'est à dire le miracle de l'immanence mutuelle (circumincessio) des Personnes divines, sans danger pour leur originalité personnelle" (1).

Un thème qui rejoint mes recherches sur la danse trinitaire.

Plus loin, Balthasar va plus loin, évoquant non l'extase mystique, mais celle du service, c'est-à-dire la joie des serviteurs qui n'ont fait que leur devoir... A méditer à l’aune du post suivant.


(1) Hans Urs von Balthasar, La prière contemplative, op. cit p.66

17 octobre 2018

Union et déréliction - Saint Jean de la Croix

La nuit de Jean de La Croix interpelle toujours nos vies. « L'Union ne consiste donc point dans les jouissances, dans les consolations, dans les sentiments spirituels, mais dans la mort réelle de la Croix au point de vue sensitif et spirituel, intérieur et extérieur » (1)
Le silence intérieur et l’abandon sont-ils les préludes d’une disponibilité véritable aux souffrants ?
Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Styles 2, De Jean de la Croix à Péguy, Paris, Aubier, 1972 p.60

11 octobre 2018

Une argile dans la main de Dieu

« Une argile dans la main de Dieu ». Cette expression d'Hans Urs von Balthasar (1) me laisse rêveur. Son propos vient d'une médiation de l'œuvre de la Parole en nous et de cette interaction salvatrice du Verbe qui nous empêche toujours de sombrer dans l'autosuffisance.
Elle est en nous et n'est pas nous. Plus intérieure que notre raison et nos émotions, plus essentielle et libre aussi. Elle réveille en nous le coeur, frappe à notre porte dans le silence, courant d'air disait François Cassingena-Trévédy. Nous ne pouvons l'enfermer dans nos concepts. Et en même temps elle nous modèle, nous malaxe à la mesure de notre manducation.

(1) in La prière contemplative, op. cit. p. 35

10 octobre 2018

A la suite de Marie - l’amour est en toi 19

« Marie est l'archétype de l'Église, parce qu'elle est originellement les deux choses en même temps : lieu de l'habitation réelle et corporelle du Verbe jusqu'à l'intimité de l'unique chair de la mère et de l'enfant, mais ceci [à] partir de la condition spirituelle de servante de toute sa personne corporelle et psychique (...) parce qu'elle est vierge, c'est à dire auditrice exclusive de la Parole, elle devient mère, lieu de l'incarnation du Verbe (...) toute contemplation doit prendre Marie comme modèle pour se prémunir d'un double danger : considérer la Parole comme quelque chose d'extérieur, au lieu de la considérer comme le plus profond mystère au centre de nous-mêmes, comme ce en quoi nous vivons, nous nous mouvons et nous sommes. Et considérer la Parole comme une parole si intérieure que nous la confondons finalement avec notre propre être, avec une sagesse disponible à notre gré et nous ayant été donnée en partage une fois pour toutes » (1)

(1) Hans Urs von Balthasar, La prière contemplative, Parole et Silence, 2002, 2018, p. 23

03 juillet 2018

Esthétique pascalienne

La contemplation de l'univers est source d'un saut transcendantal. C'est ce que nous dit Hans Urs von Balthasar dans sa lecture de Pascal : « Toutes les grandeurs charnelles ou spirituelles n'ont nul rapport avec l'empire de la sainteté ». (1)
« La figure finie ne peut exister et être compréhensible qu'au sein d'un infini » (2)
Cette découverte à l'heure de celle des pandoravirus et des voyages intergalactiques nous emmène un pas plus loin. L'homme est fini mais Dieu est amour...

19 juin 2018

L’amour est en toi - 9 - la solitude

L'Amour est en toi et cependant t'échappe. Par un petit croquis sur le Christ en croix, saint Jean de la croix nous indique « avec un poids presque écrasant, une troisième idée : celle de la solitude de celui qui marche à la suite du Christ et de l'impossibilité de placer cette œuvre d'imitation sur la même ligne que celle du Christ »(1)

(1) Urs von Balthasar,  GC2.2 ibid. p. 63