31 décembre 2015

Dynamique sacramentelle - 6

La logique trinitaire en invitant l'homme le rend participant au mystère même de la mort. Ses souffrances, comme son agonie, ne sont pas étrangères à cel‎les du Christ. Avec lui nous mourons, avec lui nous ressusciterons. Dans ce sens, notre mort est unie elle-même à la joie du Christ comme à celle des anges, car elle n'est pas finitude mais danse. 

30 décembre 2015

La tentation du mystère

Irénée combat cette tentation du mystère en insistant beaucoup sur l'ostentatoire de la religion catholique qui révèle une vérité simple et accessible à la différence de l'hérésie gnostique. Cette dernière se complaît dans ce que l'on appellerait aujourd'hui le culte de l'inititiation (repris par la franc-maçonnerie). Dans ma quête sur l'humilité de Dieu et de l'Église, y a t-il opposition avec cet ostentatoire ? Oui s'il devient triomphalisme (au sens donné par le cardinal de Smedt dans l'aula de Vatican II), non s'il s'agit seulement de chanter la gloire d'un Christ crucifié, mort pour nous détourner de toute violence et de toute haine.
Notre tentation de l'enfouissement peut avoir cette limite d'oublier que l'essentiel n'est pas dans le fait de rejoindre l'homme où il en est, mais bien, in fine, de l'accompagner plus loin, dans sa quête intérieure d'infini. Difficile dosage entre l'humilité et la Parole, entre le respect et l'engendrement, entre le silence et le cri.
Il faut peut être sentir, à la manière de Jésus, quand l'heure vient où la lumière doit sortir du boisseau, la Parole doit pénétrer jusqu'au jointures du corps. Car alors peut se révéler Dieu. Parfois, il reste néanmoins important de sentir que ce n'est pas notre oeuvre, que cela nous dépassera, que les voies de Dieu sont insondables.



29 décembre 2015

Humilité de Dieu - 5

Intéressante perspective de saint Irénée qui explique que les limites dans la vision de Dieu et donc son invisibilité foncière est lieu de progression pour l'homme (1). Du coup on peut concevoir que l'humilité de Dieu soit un chemin dans la croissance du croire, car elle entretient le désir.

(1) Saint Irénée, AH 2, 219

28 décembre 2015

La miséricorde divine

Jusqu'où va la miséricorde divine ? Penser Dieu comme infini de l'amour c'est accepter que nos limites et nos justices humaines volent en éclat
 Or Dieu n'est-il pas au delà de nos calculs, au-delà de nos justices. Une méditation de Luc 15 peut nous conduire à contempler que "la résurrection du pécheur est la décision extrême, la plus éclatante, que Dieu peut prendre à l'égard d'un être humain. Elle n'est pas seulement victoire mais renversement radical de tout ce qui a existé, à été vécu et espéré."‎ (1)

(1) Adrienne von Speyr, Le mystère de la mort, Culture et Vérité, 1953, p. 53

27 décembre 2015

Face à la mort - chemin d'humilité

Intéressante analyse d'Adrienne von Speyr sur la condition humaine, ce monde fictif dans lequel on semble trouver sa raison d'être par nos oeuvres, cet "agir" dirait Bernard Pitaud. "Un monde qui reflète très fortement notre personnalité (...) un monde qui nous est conformé" jusqu'à ce que survienne l'inattendu qui ouvre à la reconnaissance qu'au dessus de notre jugement, "il y a une autre instance, une volonté qui influe sur lui. C'en est fait alors de [notre] monde fictif", nous devons faire tomber nos écailles et trouver le chemin du "vrai monde de Dieu". Cette expérience est une mort de ce qui nous est propre, mais surtout que l'on est "mûr pour le langage de Dieu" (...) " on devient libre pour lui" (1)

(1) Adrienne von Speyr, Le mystère de la mort, Culture et Vérité, 1953, p. 30-31

A l'école de Nazareth

On parle souvent de la Terre Sainte comme d'un cinquième évangile.  Elle l'est dans la mesure où elle nous fait entrer dans la contemplation des sources contemplatives de Jésus.  Elle l'est aussi comme école d'humilité,  comme l'est tout contact avec la nature brute et grandiose du désert,  de la montagne et de l'immensité.  Mais elle l'est aussi dans sa manière de nourrir notre prière,  de nous mettre en route dans les pas du Christ. 

Dans une homélie de 1964, Paul VI nous conduit sur cette voie : "Nazareth est l'école où l'on commence à comprendre la vie de Jésus : l'école de l'Évangile. Ici, on apprend à regarder, à écouter, à méditer et à pénétrer la signification, si profonde et si mystérieuse, de cette très simple, très humble et très belle manifestation du Fils de Dieu. Peut-être apprend-on même insensiblement à imiter. Ici, on apprend la méthode qui nous permettra de comprendre qui est le Christ. Ici, on découvre le besoin d'observer le cadre de son séjour parmi nous : les lieux, les temps, les coutumes, le langage, les pratiques religieuses, tout ce dont s'est servi Jésus pour se révéler au monde. Ici, tout parle, tout a un sens. Ici, à cette école, on comprend la nécessité d'avoir une discipline spirituelle, si l'on veut suivre l'enseignement de l'Évangile et devenir disciple du Christ. Oh, comme nous voudrions redevenir enfant et nous remettre à cette humble et sublime école de Nazareth, comme nous voudrions près de Marie recommencer à acquérir la vraie science de la vie et la sagesse supérieure des vérités divines !

Mais nous ne faisons que passer. Il nous faut laisser ce désir de poursuivre ici l'éducation, jamais achevée, à l'intelligence de l'Évangile. Nous ne partirons pas cependant sans avoir recueilli à la hâte, et comme à la dérobée, quelques brèves leçons de Nazareth.

Une leçon de silence d'abord. Que renaisse en nous l'estime du silence, cette admirable et indispensable condition de l'esprit, en nous qui sommes assaillis par tant de clameurs, de fracas et de cris dans notre vie moderne, bruyante et hyper sensibilisée. Ô silence de Nazareth, enseigne-nous le recueillement, l'intériorité, la disposition à écouter les bonnes inspirations et les paroles des vrais maîtres ; enseigne-nous le besoin et la valeur des préparations, de l'étude, de la méditation, de la vie personnelle et intérieure, de la prière que Dieu seul voit dans le secret.

Une leçon de vie familiale. Que Nazareth nous enseigne ce qu'est la famille, sa communion d'amour, son austère et simple beauté, son caractère sacré et inviolable ; apprenons de Nazareth comment la formation qu'on y reçoit est douce et irremplaçable ; apprenons quel est son rôle primordial sur le plan social.

Une leçon de travail. Nazareth, maison du fils du charpentier, c'est ici que nous voudrions comprendre et célébrer la loi sévère et rédemptrice du labeur humain ; ici, rétablir la conscience de la noblesse du travail ; ici, rappeler que le travail ne peut pas avoir une fin en lui-même, mais que sa liberté et sa noblesse lui viennent, en plus de sa valeur économique, des valeurs qui le finalisent ; comme nous voudrions enfin saluer ici tous les travailleurs du monde entier et leur montrer leur grand modèle, leur frère divin, le prophète de toutes leurs justes causes, le Christ notre Seigneur." (1)

(1) Paul VI,  Homélie du 5 janvier 1964 à Nazareth,  source AELF
  

26 décembre 2015

Te voir....

"Ne pas passer un jour sans désirer le voir" (1)
Tout un programme. Et pourtant, n'est-ce pas cela l'amour. Si je peux le dire à propos de ma femme pourquoi ne pourrais-je le dire à propos de Dieu ? Même si Exode 33 affirme que l'on ne peut voir sa face, il nous faut entrenir cette flamme de peur que le feu en nous se meure. 

(1) Paul Xardel, cité par Jacques Loew, Ce Dieu dont je suis sûr, p. 224

25 décembre 2015

Humilité de Dieu - 4

Ce n'était probablement pas ce à quoi la Vierge s'attendait après la visite de l'ange. On lui avait prédit l'arrivée d'un grand homme à qui l'on "donnera le trône de David" (Luc 1, 32) et la voilà rejetée de la salle commune,  obligée d'accoucher dans une mangeoire,  lieu impur dans le monde juif et pour cette femme que l'Église acclame comme immaculée. Paradoxe que cette naissance humble,  que ce Dieu qui se cache dans un homme dont la vie sera longtemps faite de fuite et de silence et qui finira dressé sur un gibet au milieu des malfaiteurs.  Il n'est pas venu pour les pharisiens mais les prostituées et les publicains (Mat 21, 30), qui nous précéderons dans le royaume.  

Le Fils de l'homme est né, Noël !
Jésus nous est donné.
Jour de notre grâce :
L'étable accueille un Dieu caché,
Rebut de notre race,
Il vient sauver le monde entier.





Joyeux Noël

Une crèche, mais aussi un mystère...

24 décembre 2015

Présence réelle

Je relis chez Chautard ses pages sur la vie intérieure et trouve ce que je considère comme une pépite : "La présence de Notre-Seigneur par cette Vie surnaturelle n'est pas la présence réelle propre à la sainte Communion, mais une présence d'action vitale comme l'action de la tête ou du coeur sur les membres ; Action intime que Dieu cache le plus ordinairement à mon âme pour augmenter le mérite de ma foi; Action donc insensible habituellement à mes facultés naturelles et que seule la foi m'oblige à croire formellement; Action divine qui laisse subsister mon libre arbitre et utilise toutes les causes secondes, évènements  personnes et choses, pour me faire connaître la volonté de Dieu et m'offrir l'occasion d'acquérir ou d'accroître ma participation à la vie divine." (1)

Ces propos pourraient être considérés comme Rahnériens, mais ont été écrits bien avant les grands développement du dit Karl‎. Ils reprennent cette distinction de l'agis et de l'agir déjà commenté dans ce blog et nourrissent à mon avis une introspection positive.

(1) Dom Chautard , L'âme de tout apostolat, op Cit  p. 13

23 décembre 2015

Le Verbe s'est fait chair

"Le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous". En ces derniers temps de l'avent il nous faut contempler l'immensité de ce qui se joue dans cette phrase de Jn 1 que l'on peut mettre en écho avec cette traduction particulière d'Exode 3 : " Je serai qui je serai". Si notre regard se porte depuis le commencement jusqu'au Royaume à venir, nous percevons ce buisson ardent donné à l'homme : un feu déposé en nous, qui nous brûle sans nous consommer, qui nous réchauffe sans nous perdre, qui éveille notre désir sans nous contraindre. Le Verbe s'est fait chair. A quel prix ? Son humilité et sa miséricorde nous emporte sur un chemin non désiré par notre être attaché au monde, mais tant désiré par ce qui élève en nous la vérité et la vie. Depuis l'incarnation dans la beauté du monde, première trace du Verbe, jusqu'à la venue de l'enfant et le don du Fils de l'homme, se révèle en nous l'immensité de ce pain partagé, rompu pour un monde nouveau.
A cela s'ajoute le cri, qui jaillit depuis Gn 3, 9, cette invitation qui résonne dans nos vallées. Où es-tu‎ ? J'ai besoin de toi pour être corps, non pas morceau mais membre de l'Église vivante, comme le précise de Lubac. (1)

Cf. Jacques Loew op. Cit p. 168ss

22 décembre 2015

Nuit - Saint Jean de la Croix

Pourquoi nous parle-t-il‎ de la nuit ? Qu'est-ce que cela dit de l'humilité de Dieu ? "Cette source éternelle bien cachée, pourtant je l'ai trouvée, mais c'est de nuit. (...) ne sais son origine, mais que de toute origine d'elle jaillit, je le sais, mais c'est de nuit." (1)

Prix de notre liberté que cette kénose divine, que cette lumière noire comme le disait Madeleine Delbrêl. 

(1) Saint Jean de la Croix, Poème écrit dans le cachot de Tolède, cité par Jacques Loew, Ce Dieu dont je suis sûr, op. Cit p. 152

21 décembre 2015

L'Église c'est vous

Un petit Chinois qui répond aux Gardes rouges qui avaient fermé l'église du lieu et lui disaient : "Va-t'en, il n'y a plus d'église": "De quelle Église parlez-vous ? L'Église c'est moi" (1) nous rappelle s'il en est besoin que l'Église ne vit que par nous. Une immense responsabilité jaillit de ce constat.

(1) Maurice Zundel, Retraite‎ au Vatican quel homme et quel Dieu ? p. 199


16 décembre 2015

Wacite - poète musulman

"Celui qui veut contempler la gloire de Dieu, qu'il contemple une rose rouge." (1) 
Cette citation de Jacques Loew en 1982 a plus de goût à mon oreille que les propos actuels véhiculées par certains médias. Nous n'avons pas le monopole de la contemplation, même si notre vision de la gloire de Dieu est clouée sur une Croix.

(1) Wacite, cité par Jacques Loew, Ce Dieu dont je suis sûr, p. 144


15 décembre 2015

Image et ressemblance - 2

"Comme moi et toi nous sommes uns, ainsi qu'eux aussi soient un avec nous". Comme le suggère Origène, cette phrase du discours d'adieu de Jésus est une invitation à progresser dans la ressemblance, pour que "semblable on devienne un" (1)

Elle rejoint les nombreuses concordances relevées dans ces lignes, depuis les Pères de l'Église jusqu'à Bonaventure et Balthasar...

(1) Origène, traité des Principes, III, 6, 1, cité par Jacques Loew, op Cit p. 88

Tendresse et miséricorde - Rahamin et hesed

Revenir à l'hébreu pour en saisir le sens. Hesed exprime l'amour et la miséricorde, la fidélité et la bienveillance. "Qu'elle est précieuse ta hesed, Seigneur, les fils de l'homme se réfugient à l'ombre de tes ailes" Ps 36, 8
Dieu comme refuge dans la souffrance Dieu de tendresse...
On en arrive à Rahamin que l'ont traduit par entrailles ou par sein. "J'ai été tissé dans le ventre [rehem]de ma mère" Ps 139, 13
"Rahamin est la tendresse de la femme pour le fruit que neuf mois elle a mûri"...(1)
J'ai déjà souvent évoqué les splanchna de Dieu qui ne sont autres que le mot grec qui lui correspond. En cette année de la miséricorde, contemplons le sens profond de cet amour ‎maternel de Dieu qui nous conduit aux verts pâturages du royaume. Laissons toucher par cette image de Rembrand sur le fils prodigue, à ces deux mains paternelles et maternelles de Dieu.

(1) Jacques Loew, ce Dieu dont je suis sûr, op Cit p. 129-131
Voir aussi mon "chemin de la miséricorde"...


Où es-tu ? Gn 3

Les lecteurs de ces pages savent combien j'attache de l'importance à cet "Où es-tu ? " de Gn 3. Jacques Loew résume bien, à sa manière la problématique : les deux milles pages de la Bible qui suivent sont pour lui celle d'un Dieu "qui cherche l'homme pour le combler au delà de tout ce qui peut se dire et comment l'homme en réponse se fait chercheur de Dieu ou se dérobe. La nudité que prétexte Adam signifie le refus de se présenter à Dieu tel que l'on est, sans défense" (1)

Saint Jérôme n'a pas tort de dire qu'il s'agit de notre histoire. Même s'il est parfois ridicule de se cacher devant Celui qui "nous sondes et nous connaîs" (Ps 139), il nous arrive de croire que l'on peut échapper à son regard. C'est peut être parce que l'on ne connaît pas l'ampleur de sa miséricorde et de sa tendresse... Ce n'est qu'en la contemplant qu'on sent l'amour...

La fausse image du Dieu vengeur n'est pas morte...


(1) Jacques Loew, Mon Dieu dont je suis sûr, Fayard / Mame, 1982 p. 109

14 décembre 2015

Chercheur d'humanité

Chercheur d'humanité : C'est un titre que j'ose me donner parfois, dans la lignée de cette contemplation de l'homme avec un grand H découverte chez Mounier, Maritain ou Jean-Paul II. Jacques Loew peut être assurément classé dans cette race là. A partir d'une réflexion du professeur Joyeux, il souligne que l'homme a sur l'animal cette supériorité d'être capable d'admirer. (1)

Cela fait résonner en moi le premier stade de l'Oraison précisée plus haut chez Jean-Jacques Olier : contempler.

L'homme est homme quand il contemple, c'est à dire quand il est capable d'humilité devant le Beau qui se révèle à lui. Et ce faisant, il se dépouille de sa puissance, de même que le Christ dépose son vêtement avant de s'agenouiller devant l'homme...

(1) op Cit p. 75

12 décembre 2015

La théologie du coquelicot

"Inviter l'homme a un certain type de regard (..) à regarder la nature dans son environnement premier" (1), telle est la théologie du coquelicot de Jacques Loew ‎parue dans un Fêtes et Saisons de 1953 sous le titre de "Dieu existe", récit d'une pastorale en milieu urbain et ouvrier. Le prêtre se justifie avec cette phrase de Vatican I, reprise dans Vatican II : "Dieu principe et fin de toutes choses peut être connu avec certitude par la lumière naturelle de la raison humaine à partir des choses créées : "depuis la création du monde, ses perfections invisibles se laissent voir à l'intelligence par ses oeuvres" (Rom 1, 20)" ..

On peut toujours objecter à cela l'imperfection de la nature, mais c'est peut être se cacher devant une évidence : derrière ce qui nous est donné de contempler se cache l'amour infini. Y résister est finalement faire preuve d'orgueil. Croire que l'on peut seul trouver une explication au mystère, se substituer à ce que Dieu a écrit entre les lignes et dont nous contemplerons in fine le but ultime (2)
Qui suis-je dit ? Job devant tant de mystère.

(1) Jacques Loew, ce Dieu dont je suis sûr, op. Cit p. ‎70
(2) cf. à ce sujet le post récent de saint Jean Chrysostome




11 décembre 2015

Dynamique sacramentelle - 4


Jean Paul II, dans une intervention à Rio de Janeiro en juillet 1980‎ nous invitait à ce que "notre personnalité disparaisse devant [celle du Seigneur], puisque c'est Lui qui agit par notre entremise". Dieu nous exhorte à faire de "notre vie une intime, progressive et ferme imitation du Christ Rédempteur" 

Ce texte entre pour moi en résonance ‎avec ce que je cherche à traduire dans la dynamique sacramentelle

10 décembre 2015

Le mal

Après une longue contemplation sur le coquelicot et la beauté du monde créé, sur les pas de François d'Assise, Loew nous conduit, comme en contraste à envisager le mal comme lancinant et pernicieux. "Le mal m'apparaît comme n'étant pas la réponse définitive (...) Dieu ne peut laisser le dernier mot au mal, Dieu est innocent du mal : la seule définitive certitude est là, mais elle ne peut être dite qu'avec une douloureuse humilité, à genoux en quelque sorte. (...) plus l'un s'abaisse dans les ténèbres, plus nous sommes obligés de placer l'autre dans la lumière. Alors je puis affronter cette idée (...) plus lucidement, plus humblement, sans demander des comptes à Dieu".

A genoux devant l'homme, y compris devant l'homme porteur du mal, comme ce Christ à genoux devant Judas, allant jusqu'à lui laver les pieds, allant jusqu'à chercher à communier avec lui. Tel semble être le chemin tracé par Dieu face au mal dont il reste innocent puisque face à nos pulsions de mort, il se tait et il souffre. Son discours s'arrête sur la Croix, ultime abaissement de Dieu devant le mal, ultime signe aussi du jusqu'au bout de sa miséricorde.

(1) Jacques Loew, Mon Dieu dont je suis sûr, Fayard Mame, 1982, p. 67-68

09 décembre 2015

Jacques Loew - chemin spirituel

Nous poursuivons notre quête avec la lecture de Mon Dieu dont je suis sûr, de Jacques Loew (1) prêtre déjà croisé, car proche de Madeleine Delbrêl‎. Ce livre est avant tout une contemplation de ses 50 ans de vie chrétienne. Les premières pages retracent sa conversion intérieurs ponctuée d\'un verbatim de saint Augustin que l'on peut citer comme un itinéraire : 
1) Tu nous a fait pour Toi mon Dieu ! Et notre coeur est inquiet jusqu'à ce qu'il ne repose en toi (2)
2) Les choses restent muettes pour l'un, tandis qu'elles répondent à l'autre. Ou, pour mieux dire, elles parlent à tous, mais ceux-là seuls qui comparent cette voix venue de dehors avec la vérité qu'ils portent en eux (3)
Maritain se glisse dans cet itinéraire avec cette phrase sublime qui invite à une réceptivité "où nous sommes devenus assez disponibles assez vacants, pour entendre ce que toutes choses murmurent et pour écouter au lieu de fabriquer des réponses" (4)
Viens alors cette dernière citation de Augustin que l'on n'a pas fini de déguster : 'tard je t'ai aimée, ô Beauté si ancienne et si nouvelle, tard je t'ai aimée ! Mais quoi ! Tu étais au dedans de moi, et j\'étais, moi, en dehors de moi-même ! Et c'est au dehors que je te cherchais (...) Tu m'as appelé, et ton cri a forcé ma surdité' (5)

Si l'on peut trouver dans la première phrase des accents rahnériens la dernière évoque pour moi Gn 3, ce cri de Dieu vers l'homme : 'où es-tu ?'. Ce cri que l'on ne veut pas entendre, quand nos adhérences nous conduisent loin du chemin, nous éloignent de Dieu.‎
‎(1) Jacques Loew, Mon Dieu dont je suis sûr,‎ fayard Mame 1982
(2) Cité p. 34‎
(3) Confessions X, 10‎
(4) Jacques Maritain, Sept leçons sur l'être. P. 56, 60‎, cité par Loew p. 45
(5) Confessions X, 27

Le voile du temple - Marc 15, 38 et Isaïe 25, 7-9

Une étude cursive de Marc souligne combien la révélation de la nature du Christ culmine dans la croix, avec ce verset qui précède le cri du centurion sur la nature divine du Christ : "Et le voile du sanctuaire se déchira en deux, depuis le haut jusqu'en bas." (1)
La lecture d'Isaïe 25 vient souligner ce trait :
"Et il déchirera sur cette montagne le voile qui voilait tous les peuples, et la couverture qui couvrait toutes les nations,  Il détruira la mort pour toujours. Le Seigneur Yahweh essuiera les larmes sur tous les visages il ôtera l'opprobre de son peuple de dessus toute la terre; car Yahweh a parlé.  On dira en ce jour-là : "Voici notre Dieu ; en qui nous espérions pour être sauvés; c'est Yahweh, en qui nous avons espéré; livrons-nous à l'allégresse et réjouissons-nous en son salut." (2)

Alors le cri du Christ que nous entendons dans l'évangile d'aujourd'hui prend sens : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos. Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour votre âme. 
Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger. » ( Mat 11, 29-30)

(1) Marc 15:38 BCC1923
(2) Isaïe 25:7-9 BCC1923




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07 décembre 2015

Création et économie trinitaire chez les Pères de l'Église.

Intéressante thèse de Pierre-Marie Hombert sur la Création chez les Pères de l'Église. Pour en résumé l'axe central c'est d'abord une longue insistance trouvée chez les Pères sur la création ex Nihilo qui tranche avec les discours grecs ou manichéistes de la préxistence de la matière et/ou du mal. Mais ce qui m'a le plus touché c'est probablement cette vision trinitaire de la création (peut-être parce qu'elle entre en résonance avec mes travaux sur la danse trinitaire (2). La création est pour lui une longue histoire dans laquelle les trois personnes divines ont leur rôle et qui a pour finalité la divinisation finale de l'homme en Christ (cf p. 93) dont le Christ en s incarnant trace le chemin et pré-dévoile une partie du plan divin. La citation de St Jean Chrysostome est pour moi la pointe du texte : "Oh homme, ne pose surtout pas de question à notre maître à tous, attends la fin des événements (...) dans la vie future. Le plan de Dieu est organisé en fonction (...) de notre salut et de notre gloire. S'il est fragmenté par le temps, le but lui donne son unité".
‎Suivre la distinction entre image et ressemblance faite notamment par Irénée, Clément d'Alexandrie, Origène, Basile et Maxime (cf. P. 67) c'est contempler notre chemin à accomplir, c'est entrer dans la danse Trinitaire qui nous invite à imiter Christ, passer comme le souligne Bonaventure(4) de la trace à l'image, de l'image à la ressemblance dont Christ en s incarnant dévoile lLa Gloire et la Croix, Styles, a gloire à venir.

(1) Pierre-Marie Hombert, La Création chez les Pères de l'Église‎, Parole et Silence, Collège des Bernardins, 2015
(2) ‎La danse trinitaire, in L'amphore et le fleuve. Voir aussi Où es-tu mon Dieu, kénose et création.
(3) St Jean Chrysostome ‎Sur la Providence IX, 5, cité par Hombert, op Cit p. 62
(4) cf. à ce sujet les éléments notés chez Hans Urs von Balthasar, dans La Gloire et la Croix, Styles, tome 2 (GC2), op. Cit p. 273ss. 


05 décembre 2015

Les trois étapes de l'Oraison

Jean-Jacques Olier nous invite à trois étapes. La première est une contemplation ou une adoration. "Jésus dans les yeux"(1), c'est à dire voir et méditer tous les dons qu'il nous fait à commencer par cette humilité même de Celui "qui enrichit les autres en s'appauvrissant, car Il adopte la pauvreté de ma chair pour que moi je m'enrichisse de sa divinité. Lui qui est plénitude s'anéantit, Il se dépouille de sa propre gloire pour un peu de temps, afin que moi, je participe à sa plénitude. : ‎" (2)

La deuxième étape est une étape de communion ‎: "Jésus dans le coeur". Personnellement je garde toujours ces images des saints représentés par la peinture médiévale, à genoux devant la Croix pour recueillir le précieux sang. Elle nous permet d'ouvrir nos coeurs à cette source immense, ce fleuve du don de Dieu qui se donne et nous embrase, sans compter.
Olier invite lui au silence "pour recevoir l'étendue des dons".

La troisième étape est une coopération à l'oeuvre divine : "Jésus dans mes mains" qui nous fait actualiser ces dons reçus, qui nous transforment en "instruments de Dieu" (3) dans cette dynamique sacramentelle (4) souvent évoquée dans ces pages.

Elle est aussi une manière de rendre Dieu présent dans nos vies, en faire le centre, la source et l'horizon...

(1) Cité par Gilles Chaillot, op Cit p. 20-21
(2) Homélie de Grégoire de Naziance, source AELF 
(3) cf Etty Hillesum. ‎"C'est par l'homme que l'homme doit connaître le chemin du salut" disait aussi Léon XIII en 1889, cité par Dom Chautard, L'âme de tout apostolat, 1915. p.5
(4) voir aussi mon livre éponyme



04 décembre 2015

Vivre en Christ

Faire toutes ses œuvres en esprit d'oraison, ‎dans une interaction régulière avec la sainte trinité avec lequel Olier nous invite à "entrer en la force du Père, en la splendeur du Fils et en l'ardeur du Saint-Esprit" (1) en commençant par nous vider de nous mêmes, dépouillés de ce qui nous encombre, faisant notre l'attitude kénotique par excellence (cf Ph 2, 7), afin d'avoir "notre Seigneur devant les yeux, dans le coeur et dans les mains" (2)


(1) Cité par Gilles Chaillot, op. Cit p. 17-18
(2) p. 19

03 décembre 2015

Devenir porte-Christ

Devenir porte-Christ ! Cette expression des premiers siècles rejoint bien l‎à spiritualité d'Olier. Il affirme en effet que nous devons le laisser agir le Christ en nous. L'Eucharistie n'est donc pas un moment de la vie mais un tout : "Dieu nous a donné son fils pour habiter en nous, non seulement dans le temps où nous communion à son corps et à son sang, mais encore dans tous les moments de la vie" (1)
Dieu habite en nous par la foi, disait Paul en Eph 3, 17.

Immense responsabilité que nous avons à contempler et vivre que cette inhabitation de Dieu en nous. Elle doit nous faire autre, engendrer en nous une metanoia, une conversion telle que Benoît XVI la décrivait : une fission nucléaire du coeur (2) pour effacer ce qui en nous n'est pas temple du Christ.

(1) cité par Gilles Chaillot ibid p. 16
(2) JMJ de Cologne

02 décembre 2015

Anéantissement

Qu'Olier introduise "l'anéantissement de soi" (1) comme une piste spirituelle semble abrupt pour Chaillot, comme probablement pour le lecteur d'aujourd'hui. Deux remarques sont à faire.
1) L'image qui évoque d'ailleurs le mystère de l'Eucharistie  rejoint ce que nous avons noté encore récemment chez Ignace d'Antioche comme ce "tout est rien" souligné chez Thérèse d'Avila et chez Saint Jean de la Croix.

2) le lien avec l'Eucharistie rapproche des théories kenotiques décrites notamment chez Balthasar et David Brown. On est donc au confluent de plusieurs écoles qui ne font que résonner avec la kénose décrite en Philippiens 2. On rejoint aussi l'image récemment citée chez Madeleine Delbrêl à propos du blé broyé, qui rappelle également le coeur brisé du Psaume 50.
Mais ce qui est en jeu est probablement cette venue en nous du Christ, au point qu'Olier nous appelle à devenir des "Jésus-Christ ‎vivants". (2)

‎(1) Gilles Chaillot, ibid p. 14
(2) p. 15