31 janvier 2019

Au fil de Marc 4, 26sq - le grain planté en terre

Jésus disait aux foules :
« Il en est du règne de Dieu
comme d'un homme qui jette en terre la semence :
nuit et jour,
qu'il dorme ou qu'il se lève,
la semence germe et grandit,
il ne sait comment.
D'elle-même, la terre produit d'abord l'herbe,
puis l'épi, enfin du blé plein l'épi.
Et dès que le blé est mûr,
il y met la faucille,
puisque le temps de la moisson est arrivé
. » Marc 4, 26sq


Si nous poursuivons sur notre méditation des « larmes de Dieu », nous pouvons contempler Dieu qui arrose la terre de ses larmes pour faire pousser le grain...
Alors nous nous tiendrons comme une petite amphore au milieu du fleuve et boirons sans fin au fleuve de son amour....

"Dieu livré, 
Tu n'as plus d'autre Parole
Que ce corps partagé 
Dans le pain qui te porte à nos lèvres ; 
Tu dis seulement :  La coupe du sang  
Versé pour la nouvelle confiance.
Dieu blessé,  Tu n'as plus d'autre Parole  
Que cet homme humilié 
Sur le bois qui t'expose au calvaire ! 
Tu dis seulement :  L'appel déchirant  
D'un Dieu qui apprendrait la souffrance.
Dieu vaincu,  Tu n'as plus d'autre Parole  
Que ces corps décharnés 
Où la soif a tari la prière ; 
Tu dis seulement :  Je suis l'innocent, 
A qui tous les bourreaux font violence.
Dieu sans voix,  Tu n'as plus d'autre Parole  
Que ce signe levé, Edifié sur ta pierre angulaire ! 
Tu dis seulement :  Mon peuple est vivant,  
Debout, il signifie ma présence.
Dieu secret,  Tu n'as plus d'autre Parole  
Que ce livre scellé D'où l'Agneau fait jaillir ta lumière. 
Tu dis seulement  Ces mots fulgurants :  
Je viens! J'étonnerai vos patiences ! 
Explique-toi par ce lieu-dit :  
Que l'Esprit parle à notre esprit  Dans le silence ! "

Source AELF, Hymne de l’office des lectures 

30 janvier 2019

Au fil de Luc 2 - présentation au Temple - Homélie du 2/2/19

Frères et soeurs, 
Quel est l'enjeu de cette présentation au Temple ? Pourquoi Marie et Joseph accomplissent-ils ce rite ? Qu'est-ce que les prémisses ?

Vous allez me parler de tradition et vous n'aurez pas tort. 
C'est la thèse du Deutéronome... (2)
Et pourtant, il s'agit pour saint Luc de plus que cela. 
La clé de lecture se trouve dans le mot accomplissement. 
Savez vous combien de fois le mot accompli est cité dans l'évangile ?

En fait on le trouve une petite vingtaine de fois dans l'évangile, mais ce qui est frappant, c'est que c'est l'un des premiers mots de Jésus dans Luc et le dernier dans Jean. Tout est accompli. C'est peut-être cela que nous avons à contempler aujourd'hui. 

Ce sera notre premier point avant de méditer ce que cela implique pour nous aujourd'hui...

I - Contemplation 
 «J'ai un baptême à recevoir; comme cela me pèse qu'il soit accompli!» Selon Luc 12:50 NBS
Cette phrase nous pouvons la contempler. Car nous sommes nous aussi baptisés du même baptême.
écoutons ce que nous dit la tradition de l'Église : 
« Pour que l'homme soit un fils à son image, Dieu l'a travaillé au souffle de l'Esprit :
Lorsque nous n'avions ni forme ni visage, Son amour nous voyait libres comme lui."

Ce que reconnaît la prophétesse Anne et le vieux Simeon, c'est que dans l'enfant Jésus, Dieu va accomplir sa promesse. Anne le lit horizontalement, dans le temps : " «Elle louait Dieu et parlait de l'enfant à tous ceux qui attendaient la redemption de Jérusalem.» Luc 2:38 
Simeon le lit verticalement dans l'annonce à Marie de la mort.

Les deux forment une croix à contempler et ce n'est pas anodin si la liturgie nous met ce texte après celui de dimanche dernier.
L'accomplissement de la promesse c'est la venue du Messie crucifié.

II - Méditation 
Que faire, deux mille ans plus tard. La liturgie donne à lire ce texte à ses prêtres et religieux tous les soirs. Mais nous pouvons tous redire ce texte le soir en se couchant : Maintenant Seigneur tu peux laisser ton serviteur s'en aller dans la paix, parce que nous avons vu le salut qui se révèle aux nations".

Cette prière devrait être pour chacun le début de notre prière d'alliance, celle que le pape résume en trois mots : "Merci, pardon, s'il te plaît".
Merci parce que tu nous as dévoilé aujourd'hui le salut 
Pardon parce que je ne l'ai pas assez chanté aujourd'hui 
S'il te plaît de me donner un autre jour pour te louer, aide-moi Seigneur...




(1) Hymne de l'office des lectures, source AELF 
(2) Dt 26, 1-19) : "Lorsque tu seras entré dans le pays que te donne en héritage le Seigneur ton Dieu, quand tu le posséderas et y habiteras, tu prendras une part des prémices de tous les fruits de ton sol, les fruits que tu auras tirés de ce pays que te donne le Seigneur ton Dieu, et tu les mettras dans une corbeille. Tu te rendras au lieu que le Seigneur ton Dieu aura choisi pour y faire demeurer son nom. Tu iras trouver le prêtre en fonction ces jours-là et tu lui diras : « Je le déclare aujourd'hui au Seigneur ton Dieu : je suis entré dans le pays que le Seigneur a juré à nos pères de nous donner. »
Le prêtre recevra de tes mains la corbeille et la déposera devant l'autel du Seigneur ton Dieu."

Au fil de Marc 4, 1-20 - Le semeur et la bonne terre

« ceux qui ont reçu la semence dans la bonne terre :ceux- là entendent la Parole, ils l'accueillent, et ils portent du fruit : trente, soixante, cent, pour un. » (Marc 4, 20)

Aide nous Seigneur à creuser en nous un sillon pour recevoir ta Parole au fond de notre cœur. Débroussaille ce qui en nous empêche cette réception, libère nous de ce qui nous éloigne de toi, viens transformer nos vies, aide-nous à porter tes fruits....
Donne nous accès au sacrement de ta réconciliation....



Nous avons reçu l’accès au ciel (...) par une action et une grâce du Rédempteur “ (1)

(1) Hans Urs von Balthasar, ibid. p. 262

29 janvier 2019

Au fil de Marc 3, 31-35 - Qui est ta mère ?

« En ce temps-là,
comme Jésus était dans une maison,
arrivent sa mère et ses frères.
Restant au-dehors, ils le font appeler.
Une foule était assise autour de lui ;
et on lui dit :
« Voici que ta mère et tes frères sont là dehors :
ils te cherchent. »
Mais il leur répond :
« Qui est ma mère ? qui sont mes frères ? »
Et parcourant du regard
ceux qui étaient assis en cercle autour de lui,
il dit :
« Voici ma mère et mes frères.
Celui qui fait la volonté de Dieu,
celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. » (1)

Qui est ma mère ?
Il y a là une ouverture folle de Jésus. 
Qui peut être pour Lui maternelle, attentive, féconde, nourricière ?
Plutôt que de revendiquer un pouvoir ou un valoir, c'est une piste immense qui s'ouvre ici à la contemplation de la femme. 
Non seulement elle révèle l'humilité du Fils (kénose) mais elle contribue à ce double agenouillement de Dieu vers l'homme et de l'homme vers Dieu...



« Celui qui fait la volonté de Dieu »

commentaire de Saint François de Sales

La détermination de suivre la volonté de Dieu en toutes choses sans exception est contenue dans l'Oraison dominicale, en ces paroles que nous disons tous les jours : « Que votre volonté soit faite sur la terre comme au Ciel. » Au Ciel, il n'y a nulle résistance à la divine volonté, tout lui est soumis et lui obéit ; ainsi promettons-nous à Notre Seigneur de faire, n'y apportant jamais nulle résistance, mais demeurant toujours très soumis en toutes circonstances à cette divine volonté. Or la volonté de Dieu se peut entendre en deux façons : il y a la volonté de Dieu signifiée, et la volonté de son bon plaisir(2)

(1) Mc 3, 31-35, source AELF 
(2) Saint François de Sales, Entretiens spirituels (Sur le sujet de la condescendance - Entretiens publiés par la Visitation d'Annecy ; édition 1933 ; français modernisé ; rev.)

25 janvier 2019

Au fil de Lc 1, 1-4 ; 4, 14-21 - Accomplissement - Projet d’homélie du dimanche 27 janvier

Questions pour préparer Dimanche - messe des familles à St Martin de Nonancourt 

  1. Qu'est-ce qu'un jeu de Kapla  ?
  2. Que se passe-t-il si l'on retire une pièce dans une tour en Kapla
  3. Qui était Isaïe  ?
  4. Combien d'années entre Isaïe et Jésus (100, 200, plus de 600 ans)
  5. Combien d'étoiles dans l'univers (100, 1000, des milliards)
  6. Combien d'années entre la création du monde et Jésus (1 million, 1 milliard, plus de 10 milliards)
  7. Que veut dire le mot accompli (aux parents)

Homélie pour Dimanche 
Les textes que nous avons lu interpellent au lendemain de la semaine pour l’unité et posent à la fois plein de questions et pour mieux les comprendre et méditer sur les réponses nous avons demandé aux enfants de nous aider dans sa compréhension.

Question 1...
  1. Qu'est-ce qu'un jeu de Kapla  ? / ou 2 ateliers de construction par les enfants. les autres enfants cherchent Isaïe dans son livre de vie.
Réponse des enfants
Dans la 2eme lecture Paul (1 Co 12), nous parle de l'Eglise. C'est pour lui, un peu comme un jeu de Kapla, sauf que les pièces sont toutes différentes en taille.

Question 2
Que se passe-t-il si l'on retire une pièce dans une tour en Kapla ?

Réponse des enfants
Dans ce jeu, toutes les pieces se ressemble. Pour Dieu, chaque pièce est unique et c'est que nous dit saint Paul. Chacun à sa place, qu'il soit petit ou grand aux yeux des hommes. Et pourtant, malgré ces différences nous formons un grand corps qui, comme pour les Kapla ne tient que si chacun trouve sa place.
En fait, la tour que nous construisons reste fragile. S'il manque l'amour tout s'écroule. Il nous faut l'amour entre nous....

Question secrète
Or l'amour nous vient de qui ? Qui nous apprends à aimer ?
Réponse des enfants

Oui, c'est Jésus qui nous conduit à aimer. La grandeur de cet amour, il est difficile de la décrire. 
L'amour qui nous unit à Dieu nous dépasse. 
L'amour supporte tout ; l'amour est patient pour tout, il ne connaît pas la division, ne pousse pas à la révolte nous dit Paul. C'est à cause de son amour pour nous que Jésus Christ notre Seigneur a donné son sang pour nous, pour nos vies. 

C'est là où on en vient à l'évangile.

Reprise du récit...

Qu'est-ce qu'il décrit. Jésus ouvre un livre, lit un passage d'Isaīe qui dit « L'Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m'a consacré par l'onction »  puis il ajoute : c'est aujourd'hui que cela devient vrai, que cela s'accomplit.

Question 3 et 4
Qui était Isaïe  ? Combien d'années entre Isaïe et Jésus (100, 200, plus de 400 ans)
Qu'est-ce qu'il y a dans dans votre cahier de vie...
Réponse des enfants
Ce que nous dit l'évangile, c'est que ce qu'attendait les juifs, le messie, depuis plus de 700 ans, est accompli, c'est à dire est réalisé maintenant avec la venue de Jésus-Christ 
« L'Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m'a consacré par l'onction » cela veut dire, « je suis le messie !, l'oint de Dieu. 
La promesse de Dieu se réalise... Mais quelle promesse...?
Ce Dieu qui a créé le monde et les étoiles est celui que Jésus nous révèle. 

Combien y-a-t-il d'étoiles déjà dans le ciel  ? Des milliers des millions ou des milliards ,
Réponse des enfants
Plus de 10 milliards et pourtant c'est sur cette terre que Dieu a choisi de se montrer...

Combien d'années a-t-il attendu pour que son amour pour l'homme se révèle ?
Savez vous combien de temps il a mis pour créer le monde ?
Réponse des enfants
Dieu a attendu longtemps, plus de 12 milliards d'années nous dit la science et c'est avec le Christ que tout se révèle...

Voilà mes frères ce que nous avons à méditer aujourd'hui 
Ce que nous allons vivre aujourd'hui en célébrant la messe c'est la mémoire de tout cela

Un psaume nous invite à contempler cela. Qu'est-ce que l'homme pour que tu t'intéresse à lui ?
Pourquoi nous as tu donné ton Fils ?
Ce que nous pouvons contempler dans notre cœur aujourd'hui c'est le plan de Dieu dans sa.triple dimension : ce qu'il a fait pour nous, de l'univers et des étoiles à chacun de nous. Ce qu'il a fait en Jésus.


Une dernière question aux parents. Savez vous combien de fois le mot accompli est cité dans l'évangile ?
Réponse des parents ?
En fait on le trouve une petite vingtaine de fois dans l'évangile, mais ce qui est frappant, c'est que c'est l'un des premiers mots de Jésus dans Luc et le dernier dans Jean. Tout est accompli. C'est peut-être cela que nous avons à contempler aujourd'hui. En méditant cette phrase, qui nous concerne aussi :  «J'ai un baptême à recevoir; comme cela me pèse qu'il soit accompli!»
Selon Luc 12:50 NBS
Cette phrase nous pouvons aussi la contempler. Car nous sommes nous aussi baptisés du même baptême.
écoutons ce que nous dit la tradition de l'Église : 
« Pour que l'homme soit un fils à son image, 
Dieu l'a travaillé au souffle de l'Esprit :
Lorsque nous n'avions ni forme ni visage, 
Son amour nous voyait libres comme lui. (...)

Quand ce fut le jour, et l'heure favorable,
Dieu nous a donné Jésus, le Bien-Aimé :
L'arbre de la croix indique le passage
Vers un monde où toute chose est consacrée » (1)

(1) Hymne de l'office des lectures, source AELF 

23 janvier 2019

Au fil de Marc 3,1-6 - la main desséchée

 En ce temps-là, Jésus entra de nouveau dans la synagogue ; il y avait là un homme dont la main était atrophiée.  (...) il dit à l'homme : « Étends la main. » Il l'étendit, et sa main redevint normale.(Marc, 3, 1-6)

De quoi avons-nous peur ? Pourquoi restons-nous sans rien faire ? Seigneur viens nous habiter. Viens fortifier nos mains. Qu'elles soient les instruments de ton amour.

22 janvier 2019

Tension johannique - Hans Urs von Balthasar

Je poursuis ma lecture interrompue de La prière contemplative et tombe sur une longue relecture par Hans Urs von Balthasar des épisodes de révélations successives chez Jean. Au travers des rencontres de Jean-Baptiste, Nicodème, la Samaritaine et les autres personnages de l'Evangile, se succèdent, pour le théologien, toute une série de dévoilement qui forment autant de theophanies d'un Dieu qui se dévoile et se révèle comme la Vérité et la Vie. Cette succession prend sens et donne une étonnante clé de lecture de l'évangile, cohérente avec celle que j'ai entreprise dans « A genoux devant l'homme » mais éclairante à bien des aspects.
Quel est l'enjeu pour Balthasar et donc pour nous ? Toute rencontre est contemplatio et oratio. C'est pour moi aussi un agenouillement croisé entre l'homme et Dieu. Dieu trouve en l'homme une terre féconde dans lequel les semences du verbe peuvent germer. L'homme est invité à découvrir et contempler ce Dieu qui vient à nous et se révèle en nous tirant plus haut. 
Comme le disait un commentaire, la « hauteur, la profondeur, la largeur du mystère » évoqué par Paul est révélé en Christ et culmine en Croix.

A découvrir in La prière contemplative, ibid p. 224sq


20 janvier 2019

Au fil de Jean 2 - Cana ou La construction de Dieu

« Tu as gardé le bon vin jusqu'à maintenant » (Jean 2, 10)
La remarque du maître du repas, le troisième jour, à Cana, n'est pas anodine. Elle traduit une double contemplation symbolique de Jean.

C'est en effet le troisième jour, que Dieu relèvera l'innocence qui a versé son sang pour nous. Et c'est du cœur transpercé que le sang et l'eau jaillissent. C'est dans les épousailles de Dieu et de l'humanité que se révèle le plan de Dieu pour l'homme.

Que la révélation de l'amour divin soit une fête n'est pas anodine. Que Marie y participe à sa manière n'est pas anecdotique, que l'heure soit évoquée par Jésus n'est pas un détail. Tout participe à l'harmonie. 



C'est à nous de chanter cette gloire. 

« Il convient que vous rendiez gloire de toutes façons à Jésus Christ, lui qui vous a glorifiés, afin d'être rassemblés dans une même [unité] (...) Ainsi, dans la concorde de vos sentiments et l'harmonie de votre charité, vous [pouvez] chantez Jésus Christ. Chacun de vous, devenez un chœur de chant, afin que, dans l'harmonie de votre concorde, adoptant la mélodie de Dieu dans l'unité, vous chantiez pour le Père, d'une seule voix, par Jésus Christ. Alors le Père vous écoutera et reconnaîtra en vous, grâce à vos bonnes actions, les membres de son Fils. Il est donc utile pour vous que vous soyez dans une irréprochable unité, pour être toujours participants de Dieu.
[Notre unité et notre fidélité à] l'Église et à Jésus Christ et de Jésus Christ au Père, (...) tout [doit] s'harmoniser dans l'unité » (1)
 Le Seigneur cherche à rassembler ses enfants dispersés, il en fera une seule nation,
et un seul roi régnera sur eux.
L'harmonie que vise notre Dieu se fait en Jésus-Christ.
Il est la pierre d'angle du grand architecte, de notre Dieu...

Et il n'est pas anodin enfin que le mot grec de « Maitre du repas » soit architriklinos dont nous tirons le mot architecte. Car le grand ordonnateur de cette construction c'est notre Dieu.

(1) Saint Ignace d'Antioche, lettre aux Éphésiens

18 janvier 2019

Au fil de Marc 2,1-12 - le paralytique

« Qu'est-ce qui est le plus facile ? Dire à ce paralysé : "Tes péchés sont pardonnés", ou bien lui dire : "Lève-toi, prends ton brancard et marche" ?
Eh bien ! Pour que vous sachiez que le Fils de l'homme a autorité pour pardonner les péchés sur la terre… – Jésus s'adressa au paralysé –
je te le dis, lève-toi, prends ton brancard, et rentre dans ta maison. »
Il se leva, prit aussitôt son brancard, et sortit devant tout le monde. Tous étaient frappés de stupeur et rendaient gloire à Dieu, en disant : « Nous n'avons jamais rien vu de pareil. » (Marc 2, 10-12)

« Dans ce paralytique, c'est la totalité des païens qui est présentée au Christ pour être guérie. Mais les termes même de la guérison doivent être étudiés : ce qu'il dit au paralytique n'est pas : « Sois guéri », ni : « Lève-toi et marche », mais : « Sois ferme, mon fils, tes péchés te sont remis » (Mt 9,2). En un seul homme, Adam, les péchés avaient été transmis à toutes les nations. C'est pourquoi celui qui est appelé fils est présenté pour être guéri..., parce qu'il est la première œuvre de Dieu...; maintenant il reçoit la miséricorde qui vient du pardon de la première désobéissance. Nous ne voyons pas en effet que ce paralytique ait commis de péché ; et ailleurs le Seigneur a dit que la cécité de naissance n'avait pas été contractée à la suite d'un péché personnel ou héréditaire (Jn 9,3)...
Nul ne peut remettre les péchés hormis Dieu seul, donc celui qui les a remis est Dieu... Et pour que l'on puisse comprendre qu'il avait pris notre chair pour remettre aux âmes leurs péchés et pour procurer aux corps la résurrection, il dit : « Pour que vous sachiez que le Fils de l'homme a le pouvoir de remettre les péchés sur la terre, dit-il au paralytique : Lève-toi et prends ton lit ». Il aurait suffi de dire : « Lève-toi », mais...il a ajouté : « Prends ton lit et va-t-en chez toi ». D'abord, il a accordé la rémission des péchés, ensuite il a montré le pouvoir de la résurrection, puis il a enseigné, en faisant enlever le lit, que la faiblesse et la douleur n'atteindront plus les corps. Enfin, en renvoyant cet homme guéri à sa propre maison, il a montré que les croyants doivent retrouver le chemin conduisant au paradis, ce chemin qu'Adam, père de tous les hommes, avait quitté quand il a été brisé par la souillure du péché. » (1)

C'est nos propres enfermements qui sont ici guéris par Jésus. Sa grâce, c'est de nous libérer de nos adhérences au mal, de nous relever.

Mais cette conversion du cœur demande un effort de notre part, une contribution. Comme les porteurs du paralysé où les serviteurs qui remplissent d'eau les jarres à Cana nous devons nous prendre par la main, pour que Dieu nous relève et transforme en nous ce qui nous retient de courir vers lui. Nous laisser saisir pour être saisi (Ph 3).
Voir aussi https://prieenchemin.org/p/o/2263

(1) Saint Hilaire, Commentaire de l'évangile de Matthieu, 8,5 (trad. SC 254, p. 199 rev.), source Évangile au quotidien 


Danse et harmonie - Athanase

Dans la série de mes méditations sur la danse trinitaire, reprise dans plusieurs de mes ouvrages on pourrait glisser comme en écho ce texte d'Athanase, qui reprend les accents symphoniques de ma danse, tout en intégrant l'aspect polyèdrique de l'ordre divin :
« Il n'y a rien de ce qui existe et de ce qui prend naissance qui ne prenne naissance et ne subsiste dans le Verbe et par le Verbe, comme nous l'enseigne Jean le Théologien : Au commencement était le Verbe, et le Verbe était avec Dieu, et le Verbe était Dieu. Par lui tout s'est fait, et sans lui rien ne s'est fait.

Comme un musicien qui vient d'accorder sa lyre assemble par son art les notes graves avec les notes aiguës, les notes moyennes avec les autres, pour exécuter une seule mélodie : ainsi la Sagesse de Dieu, le Verbe, tenant l'univers comme une lyre, unit les êtres de l'air avec ceux de la terre, et les êtres du ciel avec ceux de l'air ; il combine l'ensemble avec les parties, il conduit tout par son commandement et sa volonté ; il produit ainsi, dans la beauté et l'harmonie, un seul monde et un seul ordre du monde. Lui-même reste immuable auprès du Père, tandis qu'il meut toutes choses par l'ordonnance qui vient de lui, selon ce que son Père a décidé. ~ Tous les êtres qui, selon leur nature, reçoivent de lui la vie et la subsistance, composent, grâce à lui, une harmonie admirable et vraiment divine.

Pour faire comprendre une si grande chose par un exemple, prenons l'image d'un chœur composé de nombreux chanteurs. Ce chœur comporte des exécutants variés : hommes, enfants, femmes, vieillards et jeunes gens ; sous la direction d'un seul chef, chacun chante selon sa nature et ses possibilités : l'homme comme un homme, l'enfant comme un enfant, le vieillard comme un vieillard, le jeune homme comme un jeune homme ; mais tous exécutent une seule harmonie. Ou encore, notre âme met en mouvement à la fois nos différents sens ; selon l'activité de chacun en présence d'un même objet, elle les incite tous en même temps : l'œil à voir, l'oreille à entendre, la main à toucher, l'odorat à sentir, le goût à savourer, et souvent d'autres membres encore à se mouvoir, comme les pieds à marcher. ~ C'est ainsi que tout se passe dans la création ; ces comparaisons sont imparfaites, mais il faut savoir les appliquer à des réalités plus hautes.

Oui, par une seule impulsion, par le commandement du Verbe qui est Dieu, toutes choses sont organisées, chacune agit selon ce qui lui appartient en propre, et toutes ensemble réalisent un ordre unique. » (1)
(1) Saint Athanase, traité contre les païens, source AELF 

17 janvier 2019

Au fil de Marc 1,40-45. - Guérison du lépreux

« En ce temps-là, un lépreux vint auprès de Jésus ; il le supplia et, tombant à ses genoux, lui dit : « Si tu le veux, tu peux me purifier. »
Saisi de compassion, Jésus étendit la main, le toucha et lui dit : « Je le veux, sois purifié. »
À l'instant même, la lèpre le quitta et il fut purifié » Marc 1, 40-41

Ce qui nous est donné à contempler, c'est d'abord la compassion du Christ. Le mot grec, splanchna, est la traduction d'un mot hébreu raham très maternel qui parle des entrailles. Jésus est pris aux entrailles comme l'est Dieu pour son peuple (Exode 33)
C'est en cela qu'il se laisse toucher, puis touche (on pourrait dire caresse) le lépreux qui en sort purifié, guéri.

C'est la miséricorde de Dieu qui se révèle pour lui, et encore pour nous-mêmes. 

16 janvier 2019

Au fil de Marc 1,29-39 - la mère de Simon

« La belle-mère de Simon était au lit, elle avait de la fièvre. Aussitôt, on parla à Jésus de la malade. Jésus s'approcha, la saisit par la main et la fit lever. La fièvre la quitta, et elle les servait. »

Quels sont les causes de nos faiblesses ? 
Pourquoi restons-nous sans force, malgré les dons de Dieu ? 
Notre maladie n'est-elle pas souvent tout intérieure ?
Dans son livre «  Je ne juge personne », Lytta Basset décrit bien cette culpabilité qui nous empêche d'avancer.
Il nous faut peu pour arrêter notre course. 
Laissons nous relever par le Christ.

Écoutons dans la même veine les mots de saint Jérôme : « Le médecin miséricordieux s'approche lui-même du lit. Celui qui avait porté une brebis malade sur ses épaules (Lc 15,5) s'avance à présent vers ce lit... Il approche toujours plus afin de guérir encore davantage. Remarquez bien ce qui est écrit ici... « Tu aurais dû sans aucun doute venir à ma rencontre, tu aurais dû venir m'accueillir au seuil de ta maison ; mais alors ta guérison résulterait non pas tant de ma miséricorde que de ta volonté. Puisqu'une fièvre si forte t'accable et t'empêche de te lever, je viens moi-même. »
« Et il la fit lever ». Comme elle ne pouvait pas se redresser d'elle-même, c'est le Seigneur qui la relève. « Il la prit par la main et il la fit lever. » Quand Pierre était en péril en mer, au moment où il allait se noyer, lui aussi a été saisi par la main, et il se releva... Quelle belle marque d'amitié et d'affection pour cette malade ! Il la relève en la tenant par la main ; sa main guérit la main de la malade. Il saisit cette main comme l'aurait fait un médecin, prend le pouls et évalue l'importance de la fièvre, lui qui est à la fois médecin et remède. Jésus la touche, et la fièvre disparaît.
Souhaitons qu'il touche notre main afin qu'ainsi nos actes soient purifiés. Qu'il entre dans notre maison : levons-nous enfin de notre lit, ne restons pas couchés. Jésus se tient à notre chevet et nous restons couchés ? Allons, debout ! ... « Au milieu de vous se tient quelqu'un que vous ne connaissez pas » (Jn 1,26) ; « le Royaume de Dieu est au milieu de vous » (Lc 17,21). Ayons la foi, et nous verrons Jésus présent au milieu de nous » (1)

Le Christ est notre salut. Confions lui notre vie...
Écoutons la Vierge qui nous montre la voie : « Faites tout ce qu'il vous dira » (Jn 2)



Chœur de la basilique d’Issoudun

«Il s’agit maintenant de le connaître, lui, ainsi que la puissance de sa résurrection et la communion de ses souffrances, en étant configurés à lui dans la mort, pour parvenir, si possible, à la résurrection d’entre les morts. Ce n’est pas que j’aie déjà obtenu tout cela ni que je sois déjà parvenu à l’accomplissement; mais je le poursuis, tâchant de le saisir, pour autant que moi-même j’ai été saisi par Jésus-Christ. En ce qui me concerne, mes frères, je n’estime pas moi-même l’avoir déjà saisi; mais une seule chose compte: oubliant ce qui est en arrière et tendant vers ce qui est en avant, je cours vers le but pour obtenir le prix de l’appel céleste de Dieu en Jésus-Christ. Si donc nous sommes des gens « accomplis », tenons-nous-en à cette pensée; et si sur quelque point vous pensez différemment, Dieu vous révélera aussi ce qu’il en est. Seulement, au point où nous sommes parvenus, avançons ensemble.»
‭‭Lettre aux Philippiens‬ ‭3:10-16‬ 

(1) Saint Jérôme, Commentaire sur l'évangile de Marc, 2 ; PLS 2, 125s (trad. DDB 1986, p. 52), source Évangile au quotidien 


14 janvier 2019

Eric Sadin - Intelligence artificielle - le nouvel esclavage

Intéressant article (1) sur le dernier livre d'Eric Sadin (2) Je souscrit en partie sa thèse sur l'effet possible de l'intelligence artificielle qui peut de fait être capable de calculer, orienter et mesurer la productivité au travail au point de pousser l'homme à perdre tout instinct et capacité de réflexion.
Une discussion jeudi dernier avec le responsable IT d'une grosse entreprise allait dans le même sens, quand il évoquait sa capacité de prédire les départs des salariés en observant la baisse de leur productivité. On peut voir facilement ce que la surveillance des tâches donnera dans celle des caissières, des ouvriers d'entrepôts voire des cases supérieurs. Big Brother is coming.

(1) L’intelligence artificielle engendre une mise au ban progressive de l’humain », propos recueilli par Loup Besmond de Senneville, La Croix du 12/1/19
(2) Eric Sadin. L’Intelligence artificielle ou l’enjeu du siècle, Anatomie d’un antihumanisme radical (L’échappée), Paris 2018

NB : On lira sur le même thème l’article de Benoît Georges : La ruée vers l’ethique de l’inteligence artificielle, in Les Echos du 16/1/19

Au fil de la première lettre aux Corinthiens 11 et 14 - La parole des femmes dans l’Église

Intéressante contradiction sur l'accès de la parole aux femmes dans l'Église qui implique et impose presque la nécessité d'une interprétation.
«Mais toute femme qui prie ou qui parle en prophétesse la tête non couverte d'un voile fait honte à sa tête: c'est comme si elle était rasée
1 Corinthiens 11:5
«Que les femmes se taisent dans les Eglises, car il ne leur est pas permis d'y parler; qu'elles soient soumises, comme le dit aussi la loi.»
1 Corinthiens 14:34

On le voit bien, dans la même lettre de Paul aux accents pourtant similaires, l'accès de la parole est donnée (sous conditions de voile) puis refusée. 

Comment aller plus loin, 2000 ans plus tard. L'interprétation du P. Morin dans son cours au Bernardins du 15/12/11 est éclairante à plusieurs titres. Pour lui, le verset 14,34 que l'on trouve à différents endroits selon les manuscrits serait une note latérale ajoutée par un disciple de Paul. 
Qu'est-ce à dire ? Selon lui, cela traduit surtout une évolution au sein de la société romaine et un durcissement sur la place des femmes dans la communauté, cohérent avec d'autres positions du même genre dans les lettres pastorales.

Comment se positionner maintenant. Ces textes sont marqués dans un contexte précis et une récupération littérale est exclue. A nous de comprendre que le dire est plus grand que le dit. Jamais Paul ne validerait un tel discours sur les femmes s'il vivait au XXeme siècle, tant le regard sur la femme a évolué. Il nous faut tout faire pour que ceux qui refuse cette évolution prennent conscience de la faiblesse de leurs arguments. La femme est un formidable atout pour l'Église. Ne le cachons pas sous un voile.

Il n'y a ni supériorité de l'un sur l'autre, ni soumission possible. L'enjeu est une réciprocité dans l'agenouillement, car l'homme comme la femme, dans leurs différences, leur humilité et leurs danses communes peuvent prendre pleinement leur dimension co-sacrementelle de porte-Christ.


Au fil de Marc 1, L’appel des frères

« Venez à ma suite.
Je vous ferai devenir pêcheurs d'hommes. »
Aussitôt, laissant leurs filets,
ils le suivirent. » Marc 1


Laissons résonner en nous l'appel. 
« Venez à ma suite... » qui vient en écho de l' « Où es-tu ? » Gn 2 au jardin et se termine dans le « j'ai soif » de toi....

Alors pourrons-nous dire « Me voici »

12 janvier 2019

Au fil de Jean 3,22-30, tressaillement et décentrement - Cana et Nicodème

*En ce temps-là, Jésus se rendit en Judée, ainsi que ses disciples ; il y séjourna avec eux, et il baptisait.
Jean, quant à lui, baptisait à Aïnone, près de Salim, où l'eau était abondante. On venait là pour se faire baptiser.
En effet, Jean n'avait pas encore été mis en prison.
Or, il y eut une discussion entre les disciples de Jean et un Juif au sujet des bains de purification.
Ils allèrent trouver Jean et lui dirent : « Rabbi, celui qui était avec toi de l'autre côté du Jourdain, celui à qui tu as rendu témoignage, le voilà qui baptise, et tous vont à lui ! »
Jean répondit : « Un homme ne peut rien s'attribuer, sinon ce qui lui est donné du Ciel.
Vous-mêmes pouvez témoigner que j'ai dit : Moi, je ne suis pas le Christ, mais j'ai été envoyé devant lui.
Celui à qui l'épouse appartient, c'est l'époux ; quant à l'ami de l'époux, il se tient là, il entend la voix de l'époux, et il en est tout joyeux. Telle est ma joie : elle est parfaite.
Lui, il faut qu'il grandisse ; et moi, que je diminue*. Jean 3,22-30 (1)

Ce petit épisode où l'on voit Jésus baptiser en « concurrence » avec Jean est très particulier. Pour l'exégète John Meyer il traduit et prépare à la coexistence de deux écoles différentes, celle des disciples de Jean qui perdurera encore après la mort du Christ. Et c'est justement au sein de cette école que l'évangéliste Jean va tenter deux déplacements et une tentative de réconciliation. Augustin nous y conforte en apportant deux exhortations : « le tressaillement » et le « décentrement » deux concepts déjà largement commentés dans nos pages.
*Écoutez, enfants de la lumière, vous qui avez été adoptés en vue du Royaume de Dieu ; écoutez, frères très chers ; écoutez et tressaillez de joie dans le Seigneur, vous les justes, puisqu' « à vos cœurs droits, la louange va bien » (Ps 33,1). Écoutez ce que vous savez déjà, méditez ce que vous avez entendu, aimez ce que vous croyez, proclamez ce que vous aimez ! ...
Le Christ est né, Dieu par son Père, homme par sa mère ; il est né de l'immortalité de son Père et de la virginité de sa mère. De son Père, sans le concours d'une mère ; de sa mère, sans celui d'un père. De son Père, sans le temps ; de sa mère, sans la semence. De son Père, il est principe de vie ; de sa mère, la fin de la mort. De son Père, il est né pour régler l'ordre des jours ; de sa mère, pour consacrer ce jour-ci.
Devant lui il a envoyé Jean Baptiste, qu'il a fait naître lorsque les jours se mettent à décroître, et lui-même est né lorsque les jours commencent à rallonger, préfigurant ainsi les paroles de ce même Jean : « Lui, il faut qu'il grandisse ; et moi, que je diminue ». En effet, la vie humaine doit s'affaiblir en elle-même et s'augmenter en Jésus Christ, « afin que les vivants n'aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes, mais sur lui, qui est mort et ressuscité pour eux » (2Co 5,15). Et afin que chacun de nous puisse répéter ces paroles de l'apôtre Paul : « Ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi » (Ga 2,20).(2)

Cette première place du Christ ne nie pas notre existence, elle constitue le lieu de notre déplacement. Diminuer pour qu'en nous (en Christo) nous devenions passeur de Dieu, Christophore, porte-Christ.

La phrase de Galates citée par Augustin résume tout.

Quelles sont les conditions de cette transformation en nous ? 
Elle se lit entre les lignes dans un autre passage des mêmes chapitres de Jean et rejoins notre commentaire de 1 Jn 4. 
« Le troisième jour, il y eut des noces. Que sont ces noces, sinon les vœux et les joies de l'humanité sauvée, célébrées le troisième jour, dans le mystère de ce chiffre qui désigne soit la confession de la Trinité, soit la foi en la résurrection.

Car, dans un autre passage de l'Évangile, c'est avec la musique et les danses et la robe des noces que l'on accueille le retour du fils cadet, c'est-à-dire la conversion du peuple païen.

Aussi, tel un époux sortant de la chambre nuptiale, le Verbe descend jusqu'à la terre, jusqu'à l'Église qui doit rassembler les nations ; en assumant l'incarnation, il va s'unir à celle qu'il a gratifiée d'un contrat de mariage et d'une dot. Un contrat, quand Dieu s'est uni à l'homme ; une dot, quand il a été immolé pour le salut de l'homme. Le contrat, c'est la rédemption présente ; par la dot, nous entendons la vie éternelle. ~ Aussi était-ce des miracles pour ceux qui voyaient, des mystères pour ceux qui comprenaient. C'est pourquoi, si nous regardons bien, on découvre d'une certaine manière, dans les eaux elles-mêmes, une ressemblance avec le baptême et la nouvelle naissance. En effet, lorsqu'une chose se transforme intérieurement en une autre, lorsque la créature inférieure, par un changement invisible, se transmue en une nature meilleure, le mystère de la seconde naissance s'accomplit. Les eaux, tout à coup, sont changées, elles qui plus tard doivent changer les hommes. ~

Par l'action du Christ en Galilée, voici du vin. C'est-à-dire que la loi touche à sa fin et la grâce lui succède : le reflet est écarté, la vérité est rendue présente ; les réalités charnelles conduisent aux spirituelles, l'observance ancienne se transforme en la Nouvelle alliance. Comme dit l'Apôtre : Ce qui est ancien a passé, voici que du nouveau est advenu. De même que l'eau contenue dans les cuves ne perd rien de ce qu'elle était, mais reçoit alors une existence qu'elle ne possédait pas auparavant, ainsi la loi ne disparaît pas, mais se perfectionne par l'avènement du Christ. ~

Le vin venant à manquer, un autre vin est procuré ; le vin de l'Ancienne alliance était bon, mais celui de la Nouvelle est meilleur. L'Ancienne alliance, celle que les Juifs observent, s'évapore dans la lettre. La Nouvelle alliance, celle qui nous concerne, restitue le goût de la vie en donnant la grâce.

Le bon vin, c'est-à-dire le bon commandement, est celui de la loi, lorsque tu entends : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Mais le vin de l'Évangile est meilleur et plus fort, lorsque tu entends : Eh bien moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent. » (3)

De Cana à Nicodème, Jean nous mène un pas plus loin

(1) Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris
(2) Saint Augustin, Sermon 194, onzième sermon sur la Nativité du Seigneur (trad. coll. Icthus, t.8, p. 98 rev.), source Evangile au quotidien 
(3) Fauste de Riez, Sermon sur l'eucharistie, source AELF


11 janvier 2019

Au fil de Luc 5, 12-14 - le lépreux

"Jésus était dans une ville quand survint un homme couvert de lèpre ;
voyant Jésus, il tomba face contre terre et le supplia :
« Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier. »
Jésus étendit la main et le toucha en disant :
« Je le veux, sois purifié. »
À l'instant même, la lèpre le quitta."

Quelle est notre lèpre ? Sommes-nous aujourd'hui capable de tomber face contre terre et de demander le pardon de Dieu ?

Ce mouvement intérieur d'introspection n'est pas inutile. Il nous fait prendre conscience de toutes nos addictions, nos paresses, nos adhérences au monde. 

Comme le psalmiste nous pourrions dire : “oui mes péchés me submergent, leur poids trop pesant m’ecrase. Mes plaies sont puanteur et pourriture, c’est la le prix de ma folie. Plus rien n’est sain dans ma chair (Ps 37, 5-8)

Nous sommes loin du Christ qui reste en permanence tourné vers le Père. Et pourtant c'est dans ce lien spirituel au Père qu'il se penche vers nous, s'agenouille probablement pour nous toucher, malgré nos infirmités. 

La première lecture (1 Jn 5) parle d'Esprit, d'eau et de sang. Qu'est-ce à dire ? Le don de Dieu, c'est d'abord l'Esprit, ce qui au fond de notre coeur vient nous tourner vers le Père et nous aide à crier Abba (ou vers le Christ en disant « Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier. »

C'est en ensuite l'eau vive, cette eau qui coule du coeur transpercé et qui nous inonde de consolation et de vie, nous purifie et nous relève comme Naaman au Jourdain. L’eau du Jourdain celle la même où Il s’est plongé pour nous inviter à faire de même...

C'est ensuite le sang, celui versé pour nous et devant qui notre coeur fond et devient sans repos. 
Le sang, c'est en effet cette conversion du coeur qui nous fait aller plus loin. 
Écoutons sur ce point Bonaventure : 
« Un jour que François priait dans la solitude et que, emporté par sa ferveur, il était tout absorbé en Dieu, le Christ en croix lui est apparu. À cette vue, « son âme s'est fondue » (Ct 5,6) et le souvenir de la Passion du Christ l'a percé si profondément qu'à partir de ce moment il pouvait difficilement se retenir de pleurer et de soupirer lorsqu'il venait à penser au Crucifié ; lui-même en a fait un jour l'aveu peu de temps avant sa mort. Et voilà comment il a compris que c'était à lui que s'adressait la parole de l'Évangile : « Si tu veux venir après moi, renonce à toi-même, prends ta croix et suis-moi » (Mt 16,24).
Il s'est abandonné dès lors à l'esprit de pauvreté, au goût de l'humilité et aux élans d'une piété profonde. Alors que jadis non seulement la compagnie, mais la vue d'un lépreux, même de loin, le secouait d'horreur, il se mettait dorénavant, avec une parfaite insouciance pour lui-même, à leur rendre tous les services possibles, toujours humble et très humain, à cause du Christ crucifié qui, selon la parole du prophète, a été considéré et « méprisé comme un lépreux » (Is 53,3).(1)

(1) Saint Bonaventure, Vie de Saint François, Legenda major, ch. 1 (trad. cf. Vorreux, Éds franciscaines 1951, p. 572), source Évangile au quotidien 


09 janvier 2019

Au fil de la première lettre de saint Jean 4, 11-18 et de Marc 6, 45-52- De bruissements en tressaillements

"Bien-aimés, puisque Dieu nous a tellement aimés, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres.
Dieu, personne ne l'a jamais vu.
Mais si nous nous aimons les uns les autres,
Dieu demeure en nous, et, en nous, son amour atteint la perfection.
Voici comment nous reconnaissons que nous demeurons en lui
et lui en nous :
il nous a donné part à son Esprit.
Quant à nous, nous avons vu et nous attestons que le Père a envoyé son Fils comme Sauveur du monde.
Celui qui proclame que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui, et lui en Dieu.
Et nous, nous avons reconnu l'amour que Dieu a pour nous,
et nous y avons cru.
Dieu est amour :
qui demeure dans l'amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui."

Il n'y a jamais pour nous de manifestation irréfutable de la présence de Dieu autre que celle de la nature ou que ce que Dieu consent à nous révéler.

Il y a par contre des bruissements et des tressaillements intérieurs. Car loin des trompettes et des cors du Sinaï, Dieu a choisi le silence du Crucifié pour clôturer sous forme d'apothéose sa pleine révélation aux hommes, ne la rappelant que par des traces et des soupirs. 

Et pourtant il serait faut de dire qu'il s'est tu. Le langage de Dieu est dans la voix d'un fin silence, dans le souffle ténu de l'Esprit, dans le bruissement des feuilles de la Bible et le tressaillement de nos coeurs.

Il vient nous visiter. Il demeure en nous. Saurons-nous l'entendre, sentir ses mots enfouis au plus profond de nos coeurs ou dans le cri de nos frères.

Comme Jésus après la multiplication des pains, repartons au désert et écoutons sa voix. Alors la tempête de nos vies laissera place au silence. 

« Confiance ! c'est moi ; n'ayez pas peur ! »
Il monta ensuite avec eux dans la barque
et le vent tomba ;
et en eux-mêmes
ils étaient au comble de la stupeur,
car ils n'avaient rien compris au sujet des pains :
leur cœur était endurci." (Marc 6, 50-52)