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14 septembre 2021

Surnaturel ou incarnation - 4

Le choix des textes que nous propose la liturgie d’aujourd’hui sur la Croix glorieuse est cornélien.

 

1. Soit nous optons pour le livre des Nombres qui nous conduit à une méditation sur le cycle mimétique de la violence qu’un serpent dressé vient guérir et suivons la piste de René Girard. Nous avançons alors sur le discernement tout intérieur de ce qui nous conduit à la violence et de ce qui peut nous en sauver.

 

2. Soit nous contemplons le don de Dieu dans la triple kénose : 

- d’un Père qui donne un Fils et s’efface, 

- d’un Fils qui se vide par amour 

- et de la musique ténue de l’Esprit en nous… Danse trinitaire (1) ?


Dilemme ?

Non, il faudrait au contraire faire danser les deux, mesurer la distance entre le don de Dieu et notre petite amphore bien faible au milieu du fleuve (2) comme l’évoquait Bonaventure.


Je te reçois et je me donne à toi. 

Ce n’est pas qu’un échange matrimonial mais la danse à laquelle Dieu nous invite.


Le don de Dieu précède toujours notre réponse.


Jn 3, proposé comme Évangile, récapitule les deux, mais la profondeur théologique qui se joue dans ces trois textes d’aujourd’hui est abyssale. 


Elle est prélude à la contemplation de cette danse divine qui ne cesse d’engendrer des tressaillements intérieurs et de multiples interpellations (3)


(1) cf. mon livre éponyme gratuit sur fnac.com

(2) voir L’amphore et le fleuve

(3) cf, le rideau déchiré ou À genoux devant l’homme 


Illustration : crypte de la cathédrale de Bayeux ?

12 septembre 2021

Foi, surnaturel et danse - 3

Où est le vrai Dieu ? 

Est-il visible grâce aux miracles, fruit de nos intuition, imagination, concepts ou un rêve, une projection ? 

Notre raison et notre psychologie nous jouent sans cesse des tours, dans notre capacité à cerner, percevoir Dieu. 

Depuis plus de 2500 ans on croit le cerner, le définir et il nous échappe et nous « précède en Galilée », lui l’insaisissable.


Après les tâtonnements Juifs, l’apologie des premiers siècles, la réduction thomiste et organisée du divin, de concepts en définitions, à force de fausses théologies, l’idée même de Dieu s’est effritée dans des philosophies successives jusqu’à se réduire à une projection morale et idolâtre du divin, dernière statue que Nietzsche viendra déboulonner. 


Que reste-il ? 


Peut-être Dieu lui-même, irréductible par nature. Et Jean-Luc Marion de conclure sa deuxième partie par une question : « Dieu peut-il devenir accessible autrement qu’en venant d’ailleurs ? »(1)


Il nous reste en effet, souvent, dans nos nuits obscures, que la Parole à méditer. C’est dans la danse symphonique de ce Verbe aux couleurs multiples, que vient nous interpeller « l’ailleurs », jusqu’aux « jointures de l’âme », sans qu’on puisse pour autant l’enfermer dans des interprétations littérales ou trop anthropologiques.


La Parole en effet nous échappe loin d’une lecture littérale et figée elle est dire, loin du dit, pointait Lévinas (2) et reste chemin d’Ailleurs. (3) « Elle est sur nos lèvres et dans nos cœurs [mais pourtant] dans le secret de l’Esprit, qui est le Seigneur » (4)


Elle est énonciation ou Annonciation/ tressaillements qui nous surprennent.

Elle s’accomplit ou nous transforme dans le processus très rahnérien de l’auto-communication intérieure, tout en restant secrète (5) car il demeure toujours une distance entre la trace et l’accomplissement en nous de notre metanoia/conversion, tant le saisissement reste un devenir, une « course infinie »….(6)


Secret qui nous invite néanmoins à sortir du boisseau pour que la lumière intérieure se transforme en buisson ardent, contagion et joie, danse…


Quand elle nous parle, enfin, nous vient la joie profonde du « Tu étais là et je l’avais pas senti, tu m’aimes et je l’ai pas cru, tu m’as appelé et je n’ai pas répondu… »


Nous sommes de ces Zachee qui grimpent aux arbres sans entendre parfois le « je veux demeurer chez toi » d’un Dieu qui nous guette chaque dimanche sur la place de l’Église et qui pleure de voir son morceau de flûte rester une invitation à la danse qui résonne dans le silence…


Me voici est là musique que rêve d’entendre un Dieu à genoux devant l’homme….


(1) D’ailleurs la Révélation, op.cit. p. 149

(2) cf, Autrerment qu’être 

(3) Karl Barth, kirchliche dogmatik, 1/1, p. 194, cité par JLM, p. 163

(4) Maison d’Évangile - La Parole Partagée

(5) je résume ici encore Marion, ibid. p. 163sq.

(6) voir Ph. 3, Gregoire de Nysse, la vie de Moise, et mon livre éponyme 


Vitrail de Saint Martin de Nonancourt, détail

05 septembre 2021

Foi et surnaturel - 2

Miracle, intuition, sensation, détermination, logique, certitudes, dogmes, révélation.

La juxtaposition de ces termes traduisent ils l’ampleur de l’inconnaissable ?

En lisant Jean-Luc Marion (1) on perçoit tout l’enjeu de ces nuances entre ce qui vient de Dieu et ce qui est propre à l’homme, entre raison et révélation, psychologie et certitudes. 

Face à ces « mouvements » une introspection est nécessaire ! Il nous faut discerner entre nature et surnaturel.


Suis-je en train d’inventer Dieu au sens décrit par Tomas Römer (2) ou m’est il révélé d’Ailleurs.

Comment Dieu me parle-t-il ? 

Quels sont les traces de sa présence ?

Y suis-je à l’écoute ?

S’impose-t-il ?

Vient-il quand je l’appelle ou me surprend-t-il ?

Et pourquoi son silence, mes nuits ?(3)


Certains textes nous ouvrent à la question de cette présence particulière à côté de laquelle nous passons sans Le voir. Je repense notamment à ce poème d’Ademar de Barros qui conclut que Dieu nous porte dans ses bras (4) ou ce cri d’Augustin « tu étais là et je ne le savais pas » (5)


Passons-nous à côté de la Présence sans ouvrir notre porte intérieure à la brise…à ce que François Cassingena-Trévedy appelle avec humour le « courant d’air ». (6)


On rejoint la question que je posais récemment à propos d’Effata…

Écouter vraiment demande le silence… sentir sa présence demande de partir au désert…

Chemin du désert (7)


(1) D’ailleurs la Révélation, op.cit. pages 130-150

(2) cf. l’invention de Dieu, Seuil 2014-2017

(3) François Marxer, Au péril de la Nuit, Femmes mystiques du XXeme siècle, Paris, Cerf, 2017

(4) cf. ci dessous 

(5) confessions VIII

(6) François Cassingena-Trévedy, pour toi quand tu pries…

(7) voir mon essai gratuit sur https://www.fnac.com/livre-numerique/a14819117/Claude-J-Heriard-Le-chemin-du-desert


« J'ai rêvé que je cheminais sur la plage en compagnie du Seigneur, et que, dans la toile de ma vie, se réfléchissaient tous les jours de ma vie. J'ai regardé en arrière, et j'ai vu qu'à ce jour où passait le film de ma vie surgissaient des traces sur le sable ; l'une était mienne, l'autre celle du Seigneur. Ainsi nous continuions à marcher jusqu'à ce que tous mes jours fussent achevés. Alors, je me suis arrêté, j'ai regardé en arrière. J'ai retrouvé alors qu'en certains endroits, il y avait seulement une empreinte de pied. Et ces lieux coïncidaient justement avec les jours les plus difficiles de ma vie, les jours de plus grande angoisse, de plus grande peur et de plus grandes douleurs. J'ai donc interrogé : Seigneur, Tu as dit que Tu étais avec moi, tous les jours de ma vie, et j'ai accepté de vivre avec Toi. Mais, pourquoi m'as-Tu laissé seul, dans les pires moments de ma vie ? Et le Seigneur me répondit : Mon Fils, je t'aime, j'ai dit que je serai avec toi durant la promenade, et que je ne te laisserai pas une seule minute. Je ne t'ai pas abandonné : les jours où tu n'as vu qu'une trace sur le sable sont les jours où je t'ai porté ! Amen. »