31 octobre 2006

Image de Dieu

Pour Urs von Balthasar (1), le concept d'image de Dieu se décline en trois tensions complémentaires. Il y a d'abord la tension entre le corps et l'esprit, mais aussi entre l'homme et la femme (cf. Gn 2) et enfin celle qui touche l'individu et la communauté tout entière. Pour lui, ces trois images restent inachevables. Elles ne sont que des esquisses de projets fragmentaires. Peut-on dans ce cadre dire que seul le Christ achève la synthèse de ces trois tensions : Il est esprit et corps transfiguré. Mais il est aussi le lieu d'unité de l'homme et de la femme dans le sens symbolique que lui donne Ephésiens et si l'on considère que son coeur ouvert et transpercé abreuve l'Eglise. Cette deuxième notion est alors complétée par celle de l'unique médiateur, individu qui se fait corps du Christ...
Si nos tentatives humaines, que nous avions déjà commenté chez Bonaventure reste des esquisses partielles, il est alors important de ne pas absolutiser "un seul aspect de l'image de Dieu au détriment des autres qui sont aussi indispensables" (2)
On peut concevoir ainsi l'importance de l'union de l'esprit et du corps dans la sexualité, de l'homme et de la femme comme source de don mutuel, et insister sur le rapport entre l'individuel et l'universel pour défendre l'importance de l'envoi et de la fécondité de tout homme. Mais cela ne reste que des tensions. Je note cependant avec intérêt à ce stade, une théorie que je défends sur les trois aspects qui peuvent mieux approcher la notion d'image que la seule relation ? Cela rappelle en effet, ce que j'ai évoqué sur une sexualité qui doit reposer sur trois piliers : le plaisir (lieu de rencontre du corps et de l'esprit), la construction du couple (lieu de don et de différences assumées) et la fécondité (lieu d'ouverture à l'universel)... Ainsi ces trois aspects contribuent au sein même de la rencontre de l'homme et de la femme à exprimer l'étendue et la tension d'un chemin vers Dieu...
(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.199
(2) ibid. p. 200

30 octobre 2006

Un chemin...


Quelque soit le chemin que l'homme parcours il y a bien un seuil à franchir et nul ne peut forcer le passage de ce seuil si ce n'est Dieu par le don de sa grâce qui conduit comme un passeur l'homme à percevoir combien sa recherche est dans le plan de Dieu ou qui l'ouvre à voir un autre chemin au delà de l'impasse où il s'enferme. Alors il peut librement faire le saut de la foi et concevoir que l'objet de son désir n'est pas ailleurs. Le choix adulte et libre est une conversion, une métanoia, véritable fusion du coeur qui laisse l'homme ancien de l'autre côté du seuil. Est-ce là que le baptême de l'enfant devient véritablement sacramentel ?

28 octobre 2006

Bonté de Dieu et cadeau du Christ

La "bonté salvifique de Dieu pour le monde repose sur l'unique pivot de l'incarnation de son Verbe en Jésus Christ. Tout le reste, proche ou lointain va vers ce terme ou en émane" nous dit Balthasar (1) Si je reconnais ici l'idée qui m'est chère de l'unique médiateur (cf. Sesboué), je dois avouer que cette vision peut aussi laisser un arrière goût d'un Dieu vengeur si l'on retire le Christ du système. Dieu serait-il bon sans le Christ ? Je préférerai une idée plus vaste de la bonté de Dieu où le Christ n'apparaît que comme point focal ou sommet mais peut-être est-ce réduire le Christ à son incarnation alors qu'il était, est et vient...
A méditer...
(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.185
Voir sur ce thème : Christ Balthasar Médiateur

26 octobre 2006

Ancienne et nouvelle alliance.

Pour Balthasar, il faut éviter de tomber entre les deux extrêmes que sont

a) une théorie protestante qui met une opposition radicale entre la loi et l'Evangile et
b) la pensée de certains Pères selon laquelle ces "connaissants" de l'ancienne alliance auraient eu part anticipativement à la nouvelle.

Pour Urs von Balthasar on doit laisser subsister ce flottement, qui montre d'abord le coté extrèmement positif de la loi mosaïque puisqu'elle rend possible la proximité avec Dieu dans l'alliance mais révèle postérieurement (dans les évangiles et de manière plus radicale dans Paul) son côté dangereux pouvant conduire à l'orgueil.

J'aime bien aussi sur ce thème l'intéressant développement de Beauchamp dans "D'une montagne à l'autre"...

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.185
Voir sur ce thème : juif Balthasar Orgueil

22 octobre 2006

Toutes choses nouvelles...

Voilà que je fais toutes choses nouvelles Ap 21,5 "Cela ne signifie pas voilà que je fais du tout nouveau, mais bien : voici que je refonds à neuf tout ce qui est." (1)
Toute tentative (...) tout effort tenté par les religions extra-bibliques pour briser les structures contraignant l'existence terrestre, ne pouvait, si on les pousse à la dernière logique, qu'aboutir à une auto-dissolution de l'humain. Ni la faute, ni la souffrance ne peuvent, pour l'existence prise en son ensemble être éliminés, quelle que soit la façon dont on s'y prenne". En ce sens, pour Baltasar, "tous les projets conçus effectivement en vue d'une auto-rédemption ne pouvait consciemment ou non qu'enfoncer l'homme plus profondément dans la faute. Au lieu de cela, c'est un pathos tout autre qui doit intervenir dans le drame, celui de Dieu qui lui-même entre en scène (...). Et pour lui, c'est ainsi que la "finitude et la mort sont transcendés d'une manière inimaginable".
D'une certaine manière, c'est la faillite de la gnose, de toute tentative humaine d'auto-résolution du monde qui s'effondre. Et dans la toute faiblesse de Dieu, apparaît en filigrane, la faiblesse véritable de l'homme, non pas comme une violence à sa liberté, mais comme la tendre démonstration qu'il n'est rien sans la grâce...

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.178
(2) ibid, p. 179
Voir sur ce thème : Souffrance Balthasar

21 octobre 2006

Souffrance...

La souffrance est bien trop forte, trop innommable pour qu'on puisse l'ignorer. Pour certains, elle éloigne même de Dieu mais à cette incompréhensible somme de souffrance, Dieu n'a d'autres réponses que celle de la croix, l'homme élevé sur le bois de la croix. Tout est dit et rien ne peut être dit d'autres qui ne soit parole, vent. Pour Balthasar, "Dieu ne donne autre chose que la folie de la croix qui triomphe seule du non-sens de la souffrance du monde (...) Ce n'est que dans l'Apocalypse que l'agneau égorgé remporte la victoire (...) le Dieu de Job ne répond pas "car la réponse se trouve dans le Christ. Job est plus fort que le Dieu ancien "

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.172-3
Voir sur ce thème : Souffrance Balthasar

19 octobre 2006

Le cadeau de la liberté...

Il faut concevoir le péché, non comme une sanction, mais comme la conséquence du cadeau de notre liberté. Pour Balthasar, il faut concevoir ainsi le péché originel dans une perspective dialectique". Pour lui, "dans ce cadre au lieu de nous plaindre de la déchirure qui traverse la nature humaine ou de nous révolter à ce sujet (...) nous avons le droit et même le devoir d'être reconnaissants envers Dieu de ce qu'existe cette solidarité des hommes dans leur destin face à l'absolu. C'est en effet la perte de la justice qui orientait l'homme vers Dieu et sa grâce et qui l'a poussé à nous révèler une forme encore plus profonde et plus émouvante de son amour. Il a voulu nous montrer par là jusqu'à quels abîmes cet amour à décider de descendre, quand il s'est proposé une fois pour toutes à ses créatures (...) sans doute Dieu réclame plus à l'homme soumis au péché, la conversion est plus exigeante et la pédagogie plus austère (...) mais c'est une exigence de l'amour absolu" (1) Je compléterai en disant que c'est le prix à payer pour notre liberté véritable. Nous ne sommes pas dans une autonomie protégée qui nous conduit au bonheur mais bien sur les pentes escarpées d'une montagne au relief difficile et notre joie sera plus grande quand au delà du chemin parcouru nous verrons la gloire de Dieu dans sa totalité

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.169
Balises : Liberté Balthasar

Le mal et le bien

On ne peut distinguer Adam et le péché originel du Christ et de sa grâce car si l'un précède l'autre il n'existe qu'à travers le don de la grâce. Comme préfigurait déjà la protection donné à Caïn par Dieu malgré son crime, Dieu n'est pas éloigné du pécheur et l'entoure de sa grâce. Ainsi Urs von Balthasar rappelle qu'il faut toujours lire ensemble 1 Co 15 ("Tous meurent parce qu'ils sont liés à Adam, de même tous recevront la vie parce qu'ils sont liés au Christ") et Rom 5 ("le péché est entré dans le monde par la faute d'un seul homme..."). On ne peut se désespérer de l'absence de Dieu, car ce serait nier l'infini de son amour.

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.166
Balises : liberté Balthasar

18 octobre 2006

Saint Augustin : L'Eglise fondée sur le Christ

Pour Augustin, Pierre signifiait l'Eglise toute entière qui, en ce monde, est secouée par toutes sortes d'épreuves, comme par des pluies, des innondations, des ouragans, mais qui ne tombe pas parce qu'elle a été fondée sur la pierre, d'où l'Apôtre a reçu son nom.
Et si le Seigneur dit : "Sur cette pierre je bâtirai mon Eglise", c'est parce que Pierre a dit : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. Sur cette pierre que je viens de confesser, dit Jésus, je bâtirai mon Eglise. En effet, la pierre c'était le Christ. Et sur ce fondement, Pierre a son tour a été bâti. Les fondements, personne ne peut en poser d'autres que celles qui existent déjà : ces fondements, c'est Jésus Christ.
Donc l'Eglise, qui est fondée sur le Christ, a reçu de lui, en la personne de Pierre, les clefs du Royaume des cieux, c'est-à-dire le pouvoir de lier et de délier les péchés. Cette Eglise, en aimant et en suivant le Christ est libérée de tout mal. Mais elle le suit davantage chez ceux qui luttent jusqu'à la mort pour la vérité.

Saint Augustin d'Hippone, Sur l'Evangile de Jean, 124,5 (CCL 36, 684-685).

15 octobre 2006

Péché orignel



La notion de péché originel ne doit pas pour moi être conçue comme une punition, mais comme le cadeau d'une liberté. Que serions nous en effet si nous n'étions que des êtres de grâce, embrasés de la tête aux pieds par l'amour de Dieu au point de ne pouvoir que tendre vers cette communion spirituelle ? Certes nous serions dans la béatitude céleste, mais tels des pantins ou des robots dépendants de notre grand programmeur...
Non ! Dieu, parce qu'il est amour, nous a fait libre et cette absence de grâce est le prix à payer pour la trouver, à la fin, non comme un dû, mais comme le fruit de la longue pérégrination d'un désir qui en aspirant à ce qu'il n'a pas, trouve du prix à ce qu'il aura...
Notre liberté se trouve ainsi située antérieurement à toute décisions personnelle. Si nous sommes libre physiquement il n'en reste pas moins que nous sommes moralement incapable de déployer notre liberté (1). Et cette impossibilité originelle appelle à une médiation. En cela, notre impuissance va de pair avec le don qui nous est fait en Christ. Nous sommes imparfaits mais tachons "de le saisir" (cf. Phil 3), lui sans qui nous ne sommes.

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.162
Balises : Décentrement Balthasar

10 octobre 2006

Autonomie

Il y a pourtant pour Balthasar encore plus subtile que l'idolatrie, et c'est peut-être la tentation d'autonomie. (1) Nous avons déjà trouvé chez Ratzinger de long développement sur ce plan. N'est-ce pas encore le leitmotiv de ce blog. La mise en évidence de l'importance du décentrement.
(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.156
Balises : Décentrement Balthasar

09 octobre 2006

Le chemin de nos pères

Je ne cesse de mesurer à la fois la grandeur et la misère de ceux qui nous précédé dans la foi. Et si pour Balthasar "Israël s'est infatué de sa propre beauté, qui lui avait pourtant été donné que par Dieu et pour Dieu.", s'il est devenu un "rassasié" ce n'est peut-être que parce qu'il était pré-destiné à tracer devant nous les conséquences de nos propres actes. L'histoire du peuple de Dieu est comme un livre ouvert sur notre propre chemin. Et si "c'est de cet oubli coupable que jailli son idolatrie" (1) ce n'est peut-être pour nous qu'un rappel évident de nos propres idoles.


(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.154

08 octobre 2006

Les Tours - IV

La symbolique des tours que j'utilise depuis 1996 dans Bonheur dans le couple pour caractériser le non dialogue de deux personnes, trouve chez Balthasar un renfort inattendu.
Pour lui en effet, tout pécheur s'édifie une sorte de bastion contre la vérité authentique et il se retranche dans cette illusion "toujours inquiet de voir la vérité qu'il retient injustement (...) se lancer à l'assaut de ses défenses". ("ceux que la vérité rendait captive" Rm 1, 18). Cette allégorie vient en fait de saint Paul qui l'exploite longuement quand il dit que "ses armes à lui ont, pour la cause de Dieu, le pouvoir de renverser les forteresses. Nous détruisons les raisonnements prétentieux et la toute puissance hautaine qui se dresse contre la connaissance de Dieu" (2 Co 10, 4-5)
L'idée n'était pas de moi, mais je ne savais pas qu'elle remontait si loin.... Il est vrai qu'en 1990, j'écrivais un long essai resté inédit qui décrivait l'homme et la femme dans le jardin d'Eden comme deux arbres solitaires. Mais à l'époque, je n'avais pas pleinement compris que le second Adam n'était pas un "troisième arbre dans le jardin", mais plutôt le renversement de cette prétention. A l'opposé des tours de Babel, se tient la croix du serviteur, signe élevé d'une kénose. Le nouvel Adam n'est pas la toute puissance d'un Dieu, mais la toute faiblesse de celui qui refuse le "rang qui l'égalait à Dieu" pour se faire tout amour.

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.147

03 octobre 2006

La réponse...

A la tentation de dépasser seul la finitude, Dieu répond par un appel, une invitation discrète. Et pour cela, il se met parfois à genou, à nos pieds, prenant la place du serviteur pour implorer notre conversion.
Pour Balthasar, "il faut qu'à la liberté finie soit offert quelque chose de plus, nommèment la vocation effective adressée par la liberté divine ou l'appel à s'ouvrir en retour à l'ouverture que Dieu fait de lui-même" Interpellation qui va profondèment à l'essentiel.
Comment allons nous nous laisser interpeller ? Quelle place laisserons nous à notre table... ?
(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.146

Tentation

Nous ne sommes pas dépourvus de réflexion et notre intelligence nous conduit souvent à biaiser avec la vérité. Balthasar évoque à ce sujet l'enchevêtrement inextricable du mensonge originel et l'édification d'une hiérarchie de valeurs qui alimente notre désir spirituel d'être comme Dieu. C'est peut-être cela le péché d'orgueil à laquelle nous ne cessons de succomber
La tentation serait ce désir perpétuel de tout faire tout seul, de penser tout seul, d'être maître de la vérité. C'est le danger du chercheur.
A la différence, le bon chemin resterait celui de l'écoute, de la tempérance et plus intrinsèquement du décentrement...
(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.145
Balises ; Balthasar, décentrement

01 octobre 2006

Chemin de pauvreté

Je viens de perdre un vieil oncle, mort il y a 8 jours en Guinée après 30 ans de mission... Voici un extrait de son testament spirituel qui me touche particulièrement : J'ai voulu vivre assez pauvre pour être un peu plus près des pauvres, non pas seulement pour le paraître mais pour en subir les conséquences. Je pars vers le Seigneur que j'ai si mal servi? qu'il me montre sa miséricorde.

Je confie à votre prière, tous les germes de vie qu'il a semé sur les terres d'Afrique...