31 août 2018

Les mains vides - Sainte Thérèse de Lisieux

« Depuis longtemps elle a compris que Dieu n'a besoin de personne pour faire du bien sur la terre »(1)
Comme l'indique la note de l'édition des œuvres complètes c'est à lire en négatif chez Thérèse de son désir de faire du bien au ciel.
Cette position est confirmée plus loin (cf. 9r : « si Jésus ne l’emportait bien vite au Ciel, le sort de la petit colombe de Noë serait le mien ; qu’un jour le Seigneur ouvrirait la fenêtre de l’arche et me dirait de voler bien loin, bien loin vers des rivages infidèles portant avec moi la petite branche d’oliver (Gn 8,11-12) ».
Pour autant ce sentiment d’inutilité reste une approche intéressante  des « Mains vides (2) » (sic, note 25). Elle entre aussi dans la dynamique kénotique de la jeune fille et interpelle notre propre illusion d'utilité sans Dieu. La charité n'est pas notre fait. Elle est théologale...

On peut entendre en tension néanmoins l'affirmation d'Etty Hillesum : « Dieu a besoin de nos mains ».

Il nous faut tricoter entre les deux.

(1) Thérèse de Lisieux, Manuscrit C, 3 verso, ibid p. 238
(2) cf. aussi mon livre éponyme

28 août 2018

La lumière de Dieu - Augustin d’Hippone- Dieu est en toi 16

« Averti de revenir à moi-même, je suis entré au fond de mon cœur, sous ta conduite, Seigneur, et j'ai pu le faire, parce que tu es venu à mon secours. Je suis entré, et avec le regard de mon âme, quel que fût son état, au-dessus de ce même regard, au-dessus de mon intelligence, j'ai vu la lumière immuable. Ce n'était pas cette lumière ordinaire que tout le monde peut voir ; ce n'était pas non plus une lumière de même nature, mais plus puissante, qui aurait brillé de plus en plus et aurait tout rempli par son éclat. Non, cette lumière n'était pas cela, elle était autre chose, tout autre chose. Elle n'était pas au-dessus de mon esprit comme l'huile flotte à la surface de l'eau, ni comme le ciel s'étend au-dessus de la terre. Elle était au-dessus de moi parce qu'elle m'a créé ; j'étais au-dessous d'elle parce que créé par elle. Celui qui connaît la vérité la connaît, et celui qui la connaît, connaît l'éternité. C'est l'amour qui la connaît !
O éternelle vérité, ô véritable charité, ô chère éternité ! Tu es mon Dieu, je soupire après toi jour et nuit. Quand je t'ai connu pour la première fois, tu m'as soulevé vers toi pour me faire voir l'existence de quelque chose que je devrais voir, mais que je ne pourrais pas encore voir moi-même. Tu as ébloui la faiblesse de mon regard par la puissance de ton rayonnement, et je frissonnais d'amour et d'effroi. J'ai découvert que j'étais loin de toi, dans le pays de l'exil et de la dissemblance, et il me semblait que j'entendais ta voix, venant du haut du ciel : « Je suis la nourriture des forts : grandis et tu me mangeras. Tu ne me changeras pas en toi, comme la nourriture de ton corps, c'est toi qui seras changé en moi. » (...)
Je cherchais le moyen d'acquérir la force qui me rendrait capable de vivre uni à toi, et je ne la trouvais pas. Enfin, j'ai embrassé le Médiateur entre Dieu et les hommes, l'homme Jésus Christ, lui qui est au-dessus de tout, Dieu béni éternellement. C'est lui qui nous appelle et nous dit : Moi, je suis le chemin, la vérité et la vie
. Il unit à la chair — puisque le Verbe s'est fait chair ; la nourriture que j'étais incapable de prendre, afin que ta sagesse, par laquelle tu as tout créé, se transforme en lait pour s'adapter à notre condition d'enfants. (...)
Je t'ai aimée bien tard, Beauté si ancienne et si nouvelle, t'ai aimée bien tard ! Mais voilà : tu étais au-dedans de moi quand j'étais au-dehors, et c'est dehors que je te cherchais ; dans ma laideur, je me précipitais sur la grâce de tes créatures. Tu étais avec moi, et je n'étais pas avec toi. Elles me retenaient loin de toi, ces choses qui n'existeraient pas si elles n'existaient en toi. Tu m'as appelé, tu as crié, tu as vaincu ma surdité ; tu as brillé, tu as resplendi, et tu as dissipé mon aveuglement ; tu as répandu ton parfum, je l'ai respiré et je soupire maintenant pour toi ; je t'ai goûtée, et j'ai faim et soif de toi ; tu m'as touché et je me suis enflammé pour obtenir la paix qui est en toi. »

Saint Augustin d'Hippone, Confessions, Source : Bréviaire, AELF, 28/8.

25 août 2018

Agir et Diaconie - Saint Antoine de Padoue

"Celui qui est rempli du Saint-Esprit parle diverses langues (Ac 2,4). Ces diverses langues sont les divers témoignages rendus au Christ, comme l'humilité, la pauvreté, la patience et l'obéissance. Nous les parlons quand, en les pratiquant nous-mêmes, nous les montrons aux autres. La parole est vivante lorsque ce sont les actions qui parlent.
Je vous en prie, que les paroles se taisent et que les actions parlent. Nous sommes pleins de paroles mais vides d'actions ; à cause de cela le Seigneur nous maudit, lui qui a maudit le figuier où il n'a pas trouvé de fruits mais seulement des feuilles (Mc 11,13s). « La loi, dit saint Grégoire, a été présentée au prédicateur pour qu'il pratique ce qu'il prêche. » Il perd son temps à répandre la connaissance de la loi, celui qui détruit son enseignement par ses actions.Mais les apôtres parlaient selon le don de l'Esprit. Heureux celui qui parle selon le don de l'Esprit, et non selon son propre sentiment... Parlons donc selon ce que l'Esprit Saint nous donnera de dire. Demandons-lui humblement et pieusement de répandre en nous sa grâce." (1)

On rejoint la ce que notait Hamman en 1968 :  « dans sa signification primitive, le diaconat met en garde l'Église contre un double danger qui la menace toujours : la liturgie qui ne s'achève pas en charité trahit le mystère qu'elle proclame, l'action qui ne s'alimente pas dans l'Eucharistie se dégrade en politique.  Au moment où l'Église réfléchit sur la restauration du diaconat et sur l'orientation de sa fonction, une question se pose : le diacre ne pourrait-il pas redevenir ce qu'il a été aux origines, le prophète et l'homme de la charité, en découvrant à la liturgie et à l'action sociale leur nécessaire fonction et leur unité d'inspiration ? Ne sont-elles pas l'une et l'autre services de la même agapé ? Le diaconat ferait comprendre que toute célébration liturgique est une provocation à une charité vécue, et aussi que toute action sociale ou politique se protège contre toute dégradation dans la mesure où elle communie à la tendresse de Dieu ».

À méditer à l'aune de nos actes.

(1) Saint Antoine de Padoue, Sermons, Source  : Évangile au quotidien
(2) A. Hamman, Vie liturgique et vie sociale, Desclée, 1968, p. 150.

24 août 2018

Au fil de Luc - 7, 37 - Lavement des pieds 1

"Et voici qu'une femme qui menait dans la ville une vie déréglée, ayant su qu'il était à table dans la maison du Pharisien, apporta un vase d'albâtre plein de parfum; et se tenant derrière lui, à ses pieds, tout en pleurs, elle se mit à les arroser de ses larmes et à les essuyer avec les cheveux de sa tête, et elle les baisait et les oignait de parfum." (Luc 7:37‭-‬38 BCC1923)

Commentaire :
Il nous faut prendre le temps de contempler ce qui chez nous reste déréglé pour apprécier la scène dans toute la profondeur du mystère qui nous fait passer de la mort à la vie en Dieu 

Ne sommes nous pas englués dans nos enfermements, nos échecs,  nos adhérences à la violence.  Chaos originel pourrait-on dire pour ne pas employer les mots trop historiquement marqués de péché originel.

Ce monde qui nous caractérise si bien, ces addictions diverses sont ce que le P. Moingt appelle le temps du tombeau vide. Pourquoi ?

Parce qu'il nous rapproche de l'homme sans dieu. Le marécage où nous restons sans cesse embourbé est celui de nos vies sans espérance.

Bienheureux celui qui ne chute pas à la première pierre. Il doit être protégé par le Seigneur,  parce que trop faible et fragile (1)?

 

Notre réalité est moins idéale et il nous faut souvent,  à la suite du pape lui - même affirmer que nous sommes des pécheurs pardonnés.

Pardonnés ? Pourquoi ?

Parce que, dès l'origine,  l'esprit plane sur les eaux (Gn 1, 1).

Autant nous sommes incapables du bien,  autant Dieu nous rends bon par sa grâce. Ce qui est bon en nous vient de Dieu. L'amour n'est pas notre nature,  il est insufflé en nous (Gn 2, 7) pour animer la glaise qui nous caractèrise. C'est le don de Dieu à tout homme.


En confessant notre incapacité et notre faiblesse , comme le fait cette femme aux pieds de Jesus, les arrosant de ses larmes, nous témoignons de la foi en Dieu qui sauve de la mort.
En lavant ces pieds qui vont être transpercé par nos aveuglements nous decouvrons l'essentiel,  le chemin de l'humilité et du pardon. 

Ce temps de la prise de conscience est essentiel. Dans une lettre à ses frères,  François Xavier les exhortait à ne pas donner l'absolution trop vite aux pénitents. Il faut leur laisser ruminer deux ou trois jours leurs fautes, pour qu'un véritable chemin de conversion s' enclanche. Dans sa miséricorde,  le Seigneur m'a laissé personnellement près de 40 ans, comme son peuple au désert,  avant de m'appeler à passer sur l'autre rive. En suis-je digne ? Moïse n'a pas eu ce privilège.  Il a contemplé la terre promise depuis le mont Nebo. 

 (1) Thérèse de Lisieux,  Manuscrit A, 38 vers, oeuvres complètes p. 131



Au fil de Luc - 6, 13 - faiblesse de l'Église

"Quand il fut jour, il appela ses disciples, et choisit douze d'entre eux, qu'il nomma apôtres: Simon, auquel il donna le nom de Pierre, et André son frère, Jacques et Jean, Philippe et Barthélemy" (Luc 6:13‭-‬14 BCC1923)

Commentaire de St Jean Chrysostome :

Comment douze hommes, des ignorants, ont-ils pu avoir l'idée d'une pareille entreprise, eux qui vivaient auprès des lacs et des fleuves, et dans le désert ? Eux qui n'avaient jamais fréquenté les villes et leurs assemblées, comment ont-ils pu songer à se mobiliser contre la terre entière ? Ils étaient craintifs et sans courage : celui qui a écrit sur eux le montre bien, lui qui n'a voulu ni excuser ni cacher leurs défauts. C'est là une preuve très forte de vérité. Que dit-il donc à leur sujet ? Quand le Christ fut arrêté, après avoir fait d'innombrables miracles, la plupart s'enfuirent, et celui qui était leur chef de file ne resta que pour le renier.

Ces hommes étaient incapables de soutenir l'assaut des Juifs quand le Christ était vivant. Et lorsqu'il fut mort et enseveli, alors qu'il n'était pas ressuscité, qu'il ne leur avait donc pas adressé la parole pour leur rendre courage, d'où croyez-vous qu'ils se seraient mobilisés contre la terre entière ? Est-ce qu'ils n'auraient pas dû se dire : « Qu'est-ce que cela ? Il n'a pas été capable de se sauver lui-même, et il nous protégerait ? Quand il était vivant, il n'a pas pu se défendre, et maintenant qu'il est mort il nous tendrait la main ? Quand il était vivant, il n'a pu se soumettre aucune nation, et nous allons convaincre la terre entière en proclamant son nom ? Comment ne serait-il pas déraisonnable, non pas même de le faire, mais seulement d'y penser ? »

La chose est donc évidente : s'ils ne l'avaient pas vu ressuscité et s'ils n'avaient pas eu la preuve de sa toute-puissance, ils n'auraient pas pris un risque pareil.(1)

Commentaire 2 : 

Cette faiblesse originelle est à contempler dans l'espérance,  alors que notre Église est plus que jamais decriée par certains scandales. À la lumière de ce que nous avons vu chez Michée 4 et 1 Rois 19, il faut croire en toute humilité qu'un petit reste peut sauver le monde.

Dans sa visite à Rome sainte Thérèse de Lisieux découvre que les prêtres restent des hommes(2).  C'est dans sa faiblesse que l'Esprit agi.

(1) St Jean Chrysostome, Homélie sur la première lettre aux Corinthiens, source Bréviaire,  AELF,  vendredi 17eme semaine

(2) Ms A, ibid.






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23 août 2018

Abandon - Thérèse de Lisieux

"C'est l'amour seul qui m'attire. (..) C'est l'abandon seul qui me guide, je n'ai point d'autres boussole.(1)

À méditer

(1) Sainte Thérèse de Lisieux,  Ms A 83r, ibid p. 210

Au fil de Luc - 7, 28 - Kénose du baptiste

"Parmi ceux qui sont nés d'une femme,  aucun n'est plus grand que Jean ; et cependant le plus petit du Royaume de Dieu est plus grand que lui" (Luc 7, 28 Tob 88)

Commentaire :
"Il sera grand devant le Seigneur" disait déjà Lc 1, 15. Que pensez de cette limite ? Peut-on dire que la sagesse humaine du Baptiste n'est pas complète ? Elle reste conditionnée à la révélation du Tiduum pascal. Jean va au plus loin du Premier Testament,  pourtant cette sagesse partiellement révélée n'est rien par rapport à ce que va révèler la vie et la mort de Jésus.  La kénose du cousin de Jésus précède celle de ce dernier et l'introduit.  C'est dans la kénose du Fils que Dieu révélera "le Nom qui est au dessus de tout nom". (Ph. 2, 9).

Commentaire 2 :
Certains commentaires donnent au diacre un parallélisme intéressant avec le Baptiste. Comme Jean il est appelé à être signe et instrument (LG1) de la fonction de l'évêque, prologeant la fonction de serviteur de l'évêque(1)  Cette fonction prépare et s'efface devant le maître dont il n'est pas digne d'exercer les fonctions. Appelé à être ordonné diacre à Chartres le 22/9/18 je fais mémoire de mon futur saint patron Guildin, diacre appelé à être évêque et qui va jusqu'à Rome pour refuser cette fonction. Le diacre n'est pas appelé à gouverner, sauf dans des cas extrêmes de suppléance. Sa fonction n'est pas un monopole.  Il est signe, instrument et "passeur" d'une église serviteur de l'homme (2)

( 1) cf. Tournier
(2) cf. mon livre éponyme

Ordination diaconale

Quels sont les pas indiscibles de Dieu vers l'homme ?
Face à nos balbutiements et nos hésitations Dieu se fait silence et amour.
L'amour est-il autre chose que le silence d'un regard ?
La caresse d'un sourire ?
La chaleur d'une présence ?
La brise qui fait tressaillir.
Le 22 septembre à 10h30 je serai ordonné diacre en la cathédrale de Chartres.
Visiteur anonyme ou régulier,  que vous ayez senti ou ignoré ce pas fragile d'un homme vers son Dieu,
Que ces dix ans de lectures commentées ai touché ou non votre coeur, vous êtes conviés à ce "passage".


Dieu vient vers toi -15 - Thérèse de Lisieux

Une expression purement kénotique chez Thérèse mérite notre contemplation :
"Ce n'est pas pour rester dans le ciboire d'or qu'Il descend chaque jour du Ciel, c'est afin de trouver un autre Ciel qui lui est infiniment plus cher que le premier,  le Ciel de notre âme,  faite à son image,  le temple vivant de l'adorable Trinité" (1)
Elle la complète quelques lignes plus loin : "Il s' abaissait vers moi, il m'instruisait en secret des choses de son amour (...) secrets que toute (...) science ne peut découvrir,  puisque que pour les posséder il faut être pauvre d'esprit ! Comme le dit St Jean de la Croix en son cantique :" je n'avais ni guide ni lumière,  excepté celle qui brillait dans mon cœur" (2).
Ce chemin kénotique prend de l'ampleur après son entrée au carmel :"la vraie sagesse consiste à "vouloir être ignorée et comptée pour rien" (3) (...) Je voulais que mon visage soit vraiment caché,  que sur la terre personne ne me reconnaisse. (Ibid).

(1) Sainte Thérèse de Lisieux,  Manuscrit A,  48v○ , ibid p. 148
(2) 49 r, p. 149 citant Saint Jean de la Croix,  Nuit obscure,  str. 3 et 4.
(3) Ms A, 71r, ibid p. 189, citant l'imitation 1, 2, 3 et III, 49, 7.

J'ai soif - Sainte Thérèse de Lisieux

Une des contemplations de Thérèse mérite un arrêt sur image tant elle est charnière de sa vocation :
"Je fus frappée par le sang qui tombait de ses mains Divines (...) et je me résolus de me tenir en esprit au pied de la Croix pour recevoir la Divine Rosée,  comprenant qu'il me faudrait ensuite la répandre sur les âmes.  Le cri de Jésus retentissait aussi continuellement dans mon coeur.... "J'ai soif !" (Jn 19, 28). Ces paroles allumaient en moi une ardeur inconnue et très vive... Je voulais donner à boire à mon Bien-Aimé et je me sentais moi-même dévorée de la soif des âmes". (1)

Il y a la chez Thérèse une contemplation qui rejoint l'axe de lecture de Jn 4 à 19 (2) alliant la soif de la Samaritaine à celle de Jésus.

On retrouve ce thème dans le début du manuscrit B : "Il n'a pas craint de mendier un peu d'eau à la Samaritaine.  Il avait soif... Mais en disant "donne moi à boire" c'était l'amour de sa pauvre créature que l'univers réclamait. Il avait soif d'amour. Ah je le sens plus que jamais,  Jésus est Altéré" (3)

(1) Manuscrit A,  46 recto, ibid p. 143
(2) cf. "Sur les pas de Jean"
(3) Thérèse de Lisieux,  Manuscrit B, 1v, ibid. p. 221

Au fil de Luc - 6, 20 - Les pauvres

"Heureux vous les pauvres,  le royaume des cieux est à eux" Luc 6, 20

Commentaire :
Il faudrait un livre entier pour traiter du sujet et le hasard me conduit vers "le visage des pauvres" publié en 2016 par l'AES (1).

Dans un premier colloque Emmanuel Aumônier y reprend les propos du cardinal Saliège en 1938 sur les "installés".  Une tentation qui nous guette,  à nous qui avons tout.  La porte est étroite (Mat, 19, 24) pour ceux qui amassent et jouissent de richesse sans entendre le cri du pauvre. Il ne suffit pas d'évoquer Lévinas ou Madeleine Delbrel.  Le visage du souffrant doit rester cette épine dans la chair de tout homme. La réponse au cri n'est pas écrite. Elle est aussi infinie que le cri.

(1) François Xavier de Guilbert, Le visage des pauvres, annales de l'AES, 2016

21 août 2018

Au fil de luc - 6, 8 - la main desséchée

La main desséchée, Lc 6, 8
Commentaire 1 :
Pourquoi sommes nous sec pour le royaume. Si notre coeur n'est plus lié à la source notre main sera paralysée et nos actes stériles.
Seul Dieu nous rend fécond par sa grâce.

20 août 2018

Au fil de Luc - 6, 1 - Liberté

Nous reprenons chez Luc une lecture cursive (1) à partir de Luc 6. Quelques notes au fil de l'eau.

« Ses disciples arrachaient des épis, les frottaient dans leurs mains et les mangeaient » Lc 6, 1b

Commentaire 1 : il y a là une liberté essentielle des disciples de Jésus qui interpelle notre propre liberté. Comment agissons nous ? Quelle est notre liberté véritable ? Sommes nous libres des rites et des usages pour le royaume ou pour nos propres besoins ?

Commentaire 2 :
Sainte Thérèse de Lisieux le jour de sa première communion : « Ce jour là, ce n'était plus un regard, mais une fusion, il n'était plus deux, Thérèse avait disparu, comme la goutte d'eau qui se perd au sein de l'océan. Jésus restait seul, Il était le Maître et le Roi. Thérèse ne lui avait pas demandé de lui ôter sa liberté, car sa liberté lui faisait peur, elle se sentait si faible, si fragile que pour jamais elle voulait s'unir à la Force Divine »(2).
Notre liberté se limite à cette acceptation de la volonté de Dieu. Ouvrons nos mains à cet Amour qui nous guide.

Commentaire 3 : relire Ignace d'Antioche : je veux être la farine de Dieu (cf. Tag)

(1) cf. mon livre « Chemins de miséricorde »
(2) Manuscrit A, 35 verso, ibid p. 125

17 août 2018

Déréliction de Marie

« La déréliction dans laquelle elle vit (...) est sans attache aucune. C'est un délaissement absolu. La mère ne sent plus rien que l'impuissance et la solitude, au point que ce sentiment occupe toute son âme, et que le cri du Fils la saisit tout entière et fait d'elle une partie même de ce cri. Et alors qu'elle s'enfonce ainsi dans la plainte du Fils, son premier oui reprend vie (...) surexigence pure » (...) Ce qu'elle a à donner n'est plus force mais faiblesse. (1)

« C'est Dieu lui-même qui conduit par delà le seuil de l'activité d'obéissance dans la passivité consistant à ne plus être que celui dont on dispose »(2)

Il y a la le sommet du décentrement...

(1) La servante du Seigneur - Adrienne von Speyr, ibid. p. 162
(2) p. 163

Don et obéissance - La servante du Seigneur - Adrienne von Speyr

A propos du mariage la lecture mystique d'Adrienne va très loin à partir d'une contemplation de Jean et Marie au pied de la Croix : « Le véritable amour doit donner à la personne aimée la possibilité d'obéir à Dieu, de sorte qu'il est lui-même disposé à obéir (...) ultime obéissance envers Dieu. (...) le regard est tourné vers Dieu (...) changement de direction total » (1)

Depuis le oui originel jusqu'au oui de la Croix, « jaillit en une effusion pure et eucharistique, ouverte et féconde à l'infini » (2) toute la dynamique sacramentelle d'une vie.

(1) Adrienne von Speyr, La servante du Seigneur, Johannes Verlag, 1948/79, p.173
(2) ibid p. 177

16 août 2018

Un petit reste - Michée 4 - Espérance

En écho à 1 Rois 19, ce petit texte de Michée trace un chemin d'espérance :
« En ce jour-là, – oracle de Yahweh, je recueillerai celles qui boitent, je rassemblerai celles qui étaient dispersées, et auxquelles j'avais fait du mal. Et je ferai de celles qui boitent un reste, et de celles qui sont éloignées une nation puissante. Et Yahweh régnera sur eux, sur la montagne de Sion, dès lors et à jamais. » (1)

Il entre en résonance avec d.autres textes comme 1 Rois 19, 18, Jr 31, 7, ou Sophonie 3 : « «En ce jour-là, tu n’auras plus honte de tous les agissements par lesquels tu t’es révoltée contre moi; car alors j’écarterai de toi ceux qui exultent de ton triomphe, et tu ne seras plus hautaine dans ma montagne sacrée. Je laisserai en ton sein un peuple pauvre et faible, qui trouvera un abri dans le nom du S EIGNEUR. Le reste d’Israël n’agira plus injustement. Ils ne diront plus de mensonges, et il ne se trouvera plus dans leur bouche une langue trompeuse, quand ils se coucheront dans leur pâturage et qu’il n’y aura personne pour les troubler.»
‭‭
(1) Michée 4:6‭-‬7, traduction BCC1923
(2) Sophonie‬ ‭3:11-13‬ ‭NBS‬‬



14 août 2018

Kolbe - Dieu est tout

"Dieu est tout. Tout ce qui existe en dehors de Dieu n'a de valeur qu'en référence à lui, qui est Créateur de toutes choses et Rédempteur des hommes. C'est donc lui qui nous manifeste sa volonté adorable par ses représentants sur terre et nous attire ainsi à lui, dans le but d'attirer aussi à lui par nous d'autres âmes et de les unir à lui par une plus grande charité.
Tu vois, frère, quelle est la dignité de notre condition, grâce à la miséricorde de Dieu. Par l'obéissance, nous dépassons pour ainsi dire les limites de notre petitesse, et nous nous conformons à la volonté divine qui nous guide par sa sagesse et sa prudence infinie pour que notre action soit bonne. Bien plus, en adhérant à sa divine volonté, à laquelle aucune chose créée ne peut résister, nous devenons plus forts que tout." (1)

(1) Lettre de saint Maximilien Marie Kolbe



10 août 2018

Polyèdre 3 - Saint Augustin - diacre Laurent

On trouve aujourd'hui une autre déclinaison kénotique du Polyèdre chez Augustin d'Hippone :

"Aujourd'hui, l'Église de Rome nous invite à fêter le jour où le bienheureux Laurent a triomphé, jour où il a terrassé le monde furieux, où il a dédaigné le monde flatteur et ainsi a doublement vaincu le démon persécuteur. ~ Dans l'Église de Rome, vous le savez bien, il exerçait les fonctions de diacre. C'est là qu'il présentait le sang sacré du Christ, et c'est là qu'il répandit son propre sang pour le nom du Christ. ~ L'Apôtre saint Jean a mis en pleine clarté le mystère de la Cène du Seigneur lorsqu'il a dit : Jésus a donné sa vie pour nous ; nous aussi, nous devons donner notre vie pour nos frères. Saint Laurent a compris cela, mes frères, il l'a compris et il l'a fait ; et ce qu'il avait consommé à cette table, c'est cela qu'il a voulu apprêter. Il a aimé le Christ par sa vie, il l'a aimé par sa mort.

Et nous, mes frères, si nous aimons vraiment, nous devons imiter. Car nous ne pourrons pas produire un meilleur fruit de notre amour qu'en nous montrant nous aussi des imitateurs. Le Christ a souffert pour nous et nous a laissé son exemple pour que nous suivions ses traces. Par cette phrase, il semble que, pour l'Apôtre Pierre, le Christ a souffert seulement pour ceux qui suivent ses traces, que la passion du Christ ne sert à rien, sinon à ceux qui suivent ses traces. En effet, les saints martyrs l'ont suivi jusqu'à répandre leur sang, jusqu'à imiter sa passion ; les martyrs l'ont suivi, mais ils ne sont pas les seuls. Après leur passage, le pont n'a pas été coupé ; après qu'ils ont bu, la source n'a pas tari. ~

Le jardin du Seigneur, mes frères, ce jardin a toutes sortes de fleurs : non seulement les roses des martyrs, mais aussi les lis des vierges, le lierre des gens mariés, les violettes des veuves. Absolument aucune catégorie de gens, mes bien-aimés, ne doit désespérer de sa vocation : c'est pour nous que le Seigneur a souffert. C'est très véritablement qu'il est écrit de lui : Il veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître pleinement la vérité.

Il faut donc comprendre comment, en dehors de l'effusion du sang et du risque de subir la passion, le chrétien doit suivre le Christ. L'Apôtre dit, au sujet du Christ Seigneur : Lui qui était dans la condition de Dieu, il n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu. Que lle majesté ! Mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur, devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement. Quel abaissement !

Le Christ s'est abaissé : voilà, chrétien, ce qui est à ta disposition. Le Christ s'est fait obéissant. Alors pourquoi es-tu orgueilleux ? ~ Ensuite, après être allé jusqu'au bout de cet abaissement et avoir terrassé la mort, le Christ est monté au ciel : suivons-le. Écoutons l'Apôtre qui nous dit : Si vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d'en haut : c'est là qu'est le Christ, assis à la droite de Dieu.

Pour demeurer fidèle au Christ,
tu n'as pas craint la haine des hommes !
Ardente est la braise de ton supplice !
Plus ardente la flamme de la charité
qui te consume en holocauste !"

(1) Saint Augustin, Homélie pour la fête de Saint Laurent, source AELF,  Bréviaire du 10/8

09 août 2018

Les deux verres - Sainte Thérèse - vision polyédrique 2

Gf« Pauline me dit d'aller chercher le grand verre à papa et de le mettre à côté de mon petit dé, puis de les remplir d'eau et ensuite elle me demanda de lequel était le plus plein. (...) ma Mère Chérie me fit alors comprendre qu'au Ciel le Bon Dieu donnerait à ses élus autant de gloire qu'ils pourraient en contenir » (1)

Une autre insistance sur le polyèdre...

(1) Ste Thérèse de Lisieux, oeuvres complètes, ibid p. 99

05 août 2018

Contemplation polyèdrique - Sainte Thérèse de l’enfant Jésus

Pour ceux qui connaissent l'image souvent évoquée par le pape François du polyèdre, ils trouveront dans cette méditation de la petite Thérèse un écho aux accents kénotique : « j'ai compris que toutes les fleurs qu'il a créées sont belles, que l'éclat de la rose et la blancheur du Lys n'enlèvent pas le parfum de la violette (...) l'amour de Notre Seigneur se révèle aussi bien dans l'âme la plus simple qui ne résiste en rien à sa grâce que dans l'âme la plus sublime, en effet le propre de l'amour étant de s'abaisser (...) il a créé l'enfant qui ne sait rien [pour y descendre (...)] et montrer sa grâce infinie. »(1)

(1) Manuscrit A, ibid. p. 72

Élection et miséricorde - Sainte Thérèse de l’enfant Jésus

« Dieu n'appelle pas ceux qui en sont dignes, mais ceux qu'il lui plaît » nous dit la petite Thérèse. On n'est pas pour autant dans un arbitraire de Dieu, mais bien dans une contemplation des voies insondables de Dieu qui appellent même les pêcheurs à son service. On retrouve la même idée chez François dans sa devise. Thérèse précise : « Ce n'est donc pas l'ouvrage de celui qui veut ni celui qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde »(1)

À contempler

(1) Thérèse de Lisieux, Oeuvres complètes, Manuscrit A, p. 71