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19 juin 2020

La revanche de Dieu - 2 - saint Bonaventure

En guise de corrigé sur mon homélie de dimanche

« Considère attentivement, toi qui as été racheté, quel est celui qui, pour toi, est suspendu à la Croix, quelle est sa grandeur, quelle est sa sainteté, lui dont la mort rend la vie à ceux qui sont morts, lui dont le trépas met en deuil le ciel et la terre, et fait se briser les pierres les plus dures.

Pour que, du côté du Christ endormi sur la Croix, surgisse l'Église, et pour que soit accomplie la parole de l'Écriture : Ils contempleront celui qu'ils ont transpercé, la sagesse divine a bien voulu que la lance d'un soldat ouvre et transperce ce côté. Il en sortit du sang et de l'eau, et c'était le prix de notre salut qui s'écoulait ainsi. Jailli de sa source, c'est-à-dire du plus profond du cœur du Christ, il donne aux sacrements de l'Église le pouvoir de conférer la vie de la grâce et, à ceux qui ont déjà en eux la vie du Christ, il donne à boire de cette eau vive qui jaillit jusque dans la vie éternelle.

Debout ! toi qui es aimé du Christ, sois donc comme la colombe qui fait son nid sur le bord de l'abîme. Et là, comme l'oiseau qui a trouvé un nid, ne te relâche pas de ta vigilance ; là, comme la tourterelle, viens cacher les enfants de ton amour chaste, et de cette plaie approche tes lèvres pour puiser de l'eau à la source du Sauveur. C'est là qu'on trouve la source qui jaillissait au milieu du Paradis et qui, se partageant en quatre bras puis répandue dans les cœurs aimants, arrose et féconde la terre tout entière.

À cette source de vie et de lumière, accours donc, animé d'un brûlant désir, qui que tu sois, toi qui es donné à Dieu, et de toute ta force, du plus profond de ton cœur, crie vers lui : Ô beauté ineffable du Dieu très-haut, éclat très pur de l'éternelle lumière, vie qui communique la vie à tous les vivants, lumière qui donne son éclat à toute lumière, toi qui conserves dans leur immuable splendeur et leur diversité les astres qui brillent, depuis la première aurore, devant le trône de ta divinité !

Ô jaillissement éternel et inaccessible, plein de lumière et de douceur, de cette source cachée à tous les regards humains ! profondeur sans fond, hauteur sans limite, grandeur incommensurable et pureté inviolable !

C'est de toi que coule ce fleuve qui réjouit la cité de Dieu et c'est grâce à toi qu'aux accents des acclamations et des actions de grâce, nous pouvons te chanter le cantique de louange, car nous pouvons témoigner, par expérience, qu'en toi est la source de la vie, et que par ta lumière, nous verrons la lumière.(1)


J'ai vu la source
devenir un fleuve immense, alléluia !
Les fils de Dieu rassemblés
chantaient leur joie d'être sauvés, alléluia !

℟Alléluia, alléluia, alléluia.

(1) saint Bonaventure, l'arbre de vie, source office des lectures, AELF - fête du sacré cœur

08 juin 2019

Baptêmes 10 à 14 - Homélie du 8/6/19 - Ezéchiel 36 et 47, Jn 9

Extrait

Quelle est la trame des trois textes que nous venons de lire ? C'est l'eau !
L'eau qui abreuve, nourrit, purifie.

Le baptême a, parmi ses principaux sens, une dimension double de purification et de vie.

Plonger dans l'eau c'est, symboliquement, se débarrasser de nos addictions et se relier à la vie qui vient de Dieu. Se dépouiller et se revêtir, mourir et renaître.

Quel est l'enjeu pour ces enfants que nous allons baptiser ?
Le baptême est le début d'un long chemin où ces enfants vont prendre conscience de l'amour inouï de Dieu pour l'homme, de ce fleuve jaillissant du coeur de Dieu, ce que Jean fait jaillir symboliquement du coeur transpercé de Jésus.

Le texte d'Ezechiel 47 évoque lui aussi tout particulièrement cette fontaine jaillissante et pour nous chrétiens il y a là comme une prophétie de ce cœur transpercé de Jésus mort pour nous sur la croix et source d'amour infini pour l'homme.

C'est dans cette correspondance que le baptême de Jésus prend sens.


07 juin 2019

Don de Dieu - Esprit de Pentecôte - Saint Hilaire - Amour en toi

« Quant au don qui réside dans le Christ, il est toujours le même pour tous ; et puisqu'il ne manque jamais, il est donné à chacun autant qu'il veut en profiter ; il réside en chacun autant qu'il veut l'obtenir. Ce don demeure avec nous jusqu'à la fin du monde, il nous réconforte dans notre attente ; il est un gage, par l'activité de ses bienfaits, de ce que nous espérons pour l'avenir, il éclaire les esprits, il illumine les cœurs. » (1)
Il est comme ce fleuve débordant du Temple auquel Ezéchiel fait mention dans son chapitre 47 : « 01 L'homme me fit revenir à l'entrée de la Maison, et voici : sous le seuil de la Maison, de l'eau jaillissait vers l'orient, puisque la façade de la Maison était du côté de l'orient. L'eau descendait de dessous le côté droit de la Maison, au sud de l'autel.
02 L'homme me fit sortir par la porte du nord et me fit faire le tour par l'extérieur, jusqu'à la porte qui fait face à l'orient, et là encore l'eau coulait du côté droit.
03 L'homme s'éloigna vers l'orient, un cordeau à la main, et il mesura une distance de mille coudées ; alors il me fit traverser l'eau : j'en avais jusqu'aux chevilles.
04 Il mesura encore mille coudées et me fit traverser l'eau : j'en avais jusqu'aux genoux. Il mesura encore mille coudées et me fit traverser : j'en avais jusqu'aux reins.
05 Il en mesura encore mille : c'était un torrent que je ne pouvais traverser ; l'eau avait grossi, il aurait fallu nager : c'était un torrent infranchissable.
06 Alors il me dit : « As-tu vu, fils d'homme ? » Puis il me ramena au bord du torrent.
07 Quand il m'eut ramené, voici qu'il y avait au bord du torrent, de chaque côté, des arbres en grand nombre.
08 Il me dit : « Cette eau coule vers la région de l'orient, elle descend dans la vallée du Jourdain, et se déverse dans la mer Morte, dont elle assainit les eaux.
09 En tout lieu où parviendra le torrent, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Le poisson sera très abondant, car cette eau assainit tout ce qu'elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent.
10 Alors des pêcheurs se tiendront sur la rive depuis Enn-Guèdi jusqu'à Enn-Églaïm ; on y fera sécher les filets. Les espèces de poissons seront aussi nombreuses que celles de la Méditerranée.
11 Mais ses marais et ses bassins ne seront pas assainis : ils seront réservés au sel.
12 Au bord du torrent, sur les deux rives, toutes sortes d'arbres fruitiers pousseront ; leur feuillage ne se flétrira pas et leurs fruits ne manqueront pas. Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède. »
(1) Saint Hilaire, Traité sur la Trinité, source office des lectures AELF, 7eme vendredi de Pâques 

18 avril 2019

La grâce d’être libres - Jean Duchesne


Je découvre dans le dernier livre de mon ami Jean Duchesne un point de vue qui mérite d'être approfondi : "La liberté [des chrétiens], héritée de Dieu selon la gratuité qui le caractérise, est une grâce - un don gracieux qui ne se conquiert pas, parce que c'est une dynamique dans laquelle on est emporté et qui dope littéralement les ressources naturelles. On peut dire que, si la liberté est une grâce, elle n'est pas le fruit du désir et de la volonté, mais qu'à l'inverse cette grâce aiguise le désir et fortifie la volonté"(1)


Au delà de mes travaux sur le don de Dieu in l'Amphore et le Fleuve(2), percevoir la liberté comme une grâce divine a bien des atouts. Elle ouvre une piste pastorale au delà d'une morale excessive. 
Cela rejoint la tension kénotique exprimée dans ma courbe en V (Dieu se fait chair pour nous conduire à lui) (3). 

Au cœur de l'incarnation, contempler un Dieu qui s'agenouille pour nous emporter sur son chemin fait du  "Me voici" que l'on prononce à la suite de "l'où es-tu ?" (Gn 3) et du psaume 39 un acte libre. Choisir la vie. 
En suivant Duchesne, ce choix devient une grâce, c'est-à-dire que Dieu nous fait ce don, nous y conduit et nous y accompagne. A nous de nous laisser porter par ce fleuve...

(1) Jean Duchesne, Chrétiens, La Grâce d'être libre, Par delà les conformismes et les peurs, Paris, Artege, 2019, p. 9
(2) cf. mon livre éponyme
(3) cf. Au fil de Jn 18 et 19, homélie du vendredi Saint

01 février 2019

Les larmes du Père - 3

Si j'avais du temps et de l'énergie je reprendrais la plume sur ce thème.
Même si l'expression est anthropomorphique, il y a sur ce sujet beaucoup à contempler, depuis un Dieu qui se lamente sur Adam, trompé par le serpent, qui pleure la mort d'Abel le Juste et la folie de Caïn, d'un Père qui déplore la violence humaine et sa folie des grandeurs.
Combien de larmes ne cessent-ils de verser depuis qu'il a conçu le monde ? Quand on comprend le temps qu'il a mis pour ciseler une plante, un oiseau ou la fragile rondeur d'une épaule d'enfant, on doit percevoir que ses larmes salées ont remplis déjà les océans et que la neige de ses silences couvrent les hauteurs des monts. Il est souffrance, parce qu'il est amour. Et ses entrailles se serrent encore à chaque fois que la création détourne le projet il y avait du monde.
Si le Christ nous raconte l'histoire du Vigneron et de sa vigne, il nous cache par pudeur les larmes du Père, sans ignorer celle qu'il versera quand il sera en Croix.
On peut même aller jusqu'à contempler dans le sang et l'eau qui jaillit du cœur blessé du Christ, l'excès de larmes que verse le Père malgré le silence qu'il s'impose devant cette amour donné et abandonné.

La tradition n'a pas tort de considérer que cette eau jaillissant n'est autre que le don de l'esprit fait au monde. Mais je me rêve à croire qu'il y a plus qu'un don. Le fleuve jaillissant du cœur du Christ est infini à la hauteur de l'amour du père.

Que dire des larmes qu'Il verse encore à chaque fois que nous refusons d'entendre son cri, que nous passons à côté de sa Parole, que nous négligeons nos frères, que nous oublions d'être amour, à la mesure de son Amour.

Passer à côté de la souffrance de Dieu, c'est négliger une part essentielle de son amour, c'est refuser de voir à quel point il souffre de nos hésitations, de nos renoncements et de tout nos silences.

18 décembre 2018

Le fleuve - Hans Urs von Balthasar

"Les trois manières dont la Parole se manifeste et se transforme : dans la vie humaine de Jésus, dans sa mort et sa résurrection, et dans les formes de la vie ecclésiale - comme sacrement, comme parole et comme amour ecclésiaux - ne forment ensemble qu'un unique fleuve dans lequel l'amour de Dieu devient pour nous manifeste et accessible." (1)

C'est en nous que cette plénitude prend chair, se déploie, prend une profondeur et pour reprendre l'image d'Ezéchiel (47,12) porte alors du fruit.



(1) Hans Urs von Balthasar, La prière contemplative op. cit. p. 193

14 décembre 2018

L’ocean de l’amour - contemplation - Hans Urs von Balthasar

Après avoir emmené l'homme à se plonger dans « l'océan de l'amour », le théologien nous emporte vers une prière plus entière et plus contemplative qui n'est pas sans rejoindre ses propos sur Bonaventure déjà longuement cité dans mon livre sur l'amphore et le fleuve.
Mais écoutons le, à nouveau : « Celui qui aime de se détournera pas de la contemplation, au contraire c'est lui seul qui aspirera vraiment à cette source. Ici, dans la prière, Dieu se donne à lui (...) et, grâce à cet accomplissement par Dieu, il devient capable d'un nouvel amour joyeux et désintéressé pour ses frères. Par l'amour, la contemplation est entraîné elle-même dans le mystère de la métamorphose. Elle n'est plus le point neutre, duquel les métamorphoses de l'amour sont regardées. Elle est emportée dans le courant de l'amour toujours le même, et pourtant toujours nouveau, toujours se transformant. » (1)

Un texte qui n'est pas sans influencer mon homélie à paraître dimanche...

C'est ce que j'appelle mes résonances :-)

(1) Hans Urs von Balthasar, La prière contemplative, op. cit. p. 191

22 mars 2018

Christ mystère - Albert Rouet

A partir de l'expression de Heb 2,2 : "Christ mystère" écoutons le commentaire de Mgr Rouet  ; "Le mystère désigne donc l'inépuisable générosité de Dieu, ce fleuve surabondant qui, du Père et à travers le cœur transpercé du Fils vivifie l'humanité. L'Église vit de cette eau. Elle la reçoit pour la répandre. Elle est ainsi dépassée, en amont par la largesse de Dieu qui se donne, l'infini de son amour ; en aval vers l'indéfini de l'humanité toujours multiple, nouvelle et ancienne, repliée et novatrice" (1)

Un écho à mon livre éponyme " l'amphore et le fleuve". Mais plus encore un hymne à la réalité du Dieu amour... Il nous abreuve et nous inonde de sa grâce. À contempler.

(1) Mgr Albert Rouet, Diacres une Église en tenue de service, Paris, Mediaspaul, 2016, p. 56-7

23 septembre 2017

Le silence du fleuve

Après nous avoir vanté la bernique, l'éponge et l'anémone comme autant de symbolique d'orants, après nous avoir invité à être Ichtus (poisson/chrétiens) mettant Christus au centre (cf. AbCBA), voici que François Cassingena-Trévédy(1) nous exhorte à écouter le fleuve, cette eau silencieuse qui coule au milieu du brouhaha de nos vies. Qu'arrive-t-il alors, sinon le tressaillement ultime de l'homme qui a creusé en lui un lit pour la Parole, qui a transformé son coeur en amphore spirituelle, éponge et anémone qui vivre à la danse de Dieu et de son fleuve d'amour (2)

vitrail de la basilique d’Issoudun


(1) op. cit. p. 188ss
(2) cf. là encore ma "danse trinitaire" in l'Amphore et le fleuve.

02 septembre 2017

La porte et le vase

Fermer la porte aux bruits du monde, pour ne plus l'entrebailler que pour guetter la venue du Très-haut, creuser le vase intérieur de notre coeur, pour recevoir le vin spirituel qui n'est autre que le fleuve de la grâce (Ez 47). (1)
Courir ensuite, l'amphore à la main, pour recueillir le précieux don.
Danser en suite, au clair de lune, dans la joie des noces éternelles.

(1) D'après François Cassingena-Tréverdy, ibid. p. 84ss

18 août 2017

Des grandes eaux à la source : l'entonnoir ?

Des eaux du déluge en Gn 7, de la mer Rouge en Ex 14 ou du Jourdain à l'époque des moissons en Jos 3, 15, ne subsiste, en apparence, qu'un mince filet d'eau jaillissant du coeur du Christ (Jn 19, 34)  mais cette source fragile n'est autre que l'eau vive, évoquée en Jn 4, 11.
C'est un fleuve immense qui se cache derrière la source fragile (cf Ez 47, 1).
Tout cela est comparable à un grand entonnoir qui de l'abondance des dons ne conserve que l'essentiel.
Tenons nous, comme l'évoque Bonaventure, debout, l'amphore à la main pour recueillir le don de Dieu.
Venons nous abreuver à la source.

12 novembre 2016

Une théologie de l'excès - Bonaventure

Pourquoi la première lecture de ce tome 2 de la Gloire et la Croix d'Hans Urs von Balthasar avait fait germer chez moi le titre de l'Amphore et le Fleuve. Ce n'est pas seulement la mention de la cruche et de la Seine de la page 244 mais probablement cette insistance de Balthasar sur la "théologie de l'excessus" de Bonaventure et cette phrase qui est tout un programme : "l'excès d'amour dans le Crucifié requiert la pure humilité et le don de soi, et même (...) la pauvreté totale qui, en tant que geste humain de renoncement à tout, est la réponse exacte, autant que l'homme peut la donner, au don total de Dieu jusqu'à la mort de la Croix". (1)

C'est peut-être là qu'une juste interprétation de ce que nous disions plus haut chez Anselme prend du sens. Devant l'amour infini de Dieu nous sommes comme un homme debout dans le fleuve, une petite amphore à la main, et notre réponse n'est peut-être pas dans le désir de retenir le don mais de se laisser porter par l'amour qui vient.

(1) Hans Urs von Balthasar, GC2 p. 256

09 novembre 2016

Les 4 fleuves du Paradis - saint Bonaventure

Revenons sur cette image du fleuve chez Bonaventure qui m'a inspiré le titre de l'amphore et le fleuve (1). Pour le franciscain, les quatre fleuves du Paradis résonnent comme l'éternel mouvement de Dieu vers l'homme, ce que j'appelle la danse trinitaire :"Le premier, c'est l'éternel épanchement trinitaire de Dieu lui-même ; le second, c'est la création vaste et profonde comme la mer, dans l'abîme de laquelle habite le dragon ; le troisième, c'est l'incarnation de Dieu qui, dans le Christ sort de lui et y retourne ; (...) le quatrième, ce sont les Sacrements, ce "torrent d'eau vive, claire comme le cristal, qui jaillit du trône de Dieu et de l'Agneau".(2)

Ils résonnent aussi pour Bonaventure avec les 4 mystères cachés : l'essence divine, la sagesse, la puissance et la miséricorde(3).

(1) cf. le livre éponyme dont le titre est une libre adaptation d'un texte parlant de la Seine et d'une cruche, cité par Hans Urs von Balthasar in GC2 p. 244
(2) ibid. p. 241
(3) p. 244

22 septembre 2016

Charis chez Pindare

Au delà d'Homère et d'Hésiode, qui nous enseignent les vertus de la mesure et de la vigilance, Pindare développe le concept d'humilité, mais surtout la "charis" dans le sens du don le plus abouti, le plus spontané. Le poète "se fait le gérant de la charis divine elle-même qu'il répand comme une coupe nuptiale écumante et débordante" (1).
Il ne manque à cela, ajoute Balthasar qu'un "homme-Dieu embrassant dans son triomphe la mort comme la vie" vers la "fête éternelle". (2) et peut être, ce fleuve jaillissant dont nous parle Ez 47, 1-12.

(1) Cf. GC6 p. 76
(2) p. 77

09 novembre 2014

Service et édification - Christ serviteur


La diaconie est aussi une manière d'entrer dans l'édification du "temple"

A cet égard, Ephésiens 2 nous invitent à la méditation :
"Vous n'êtes plus des étrangers ni des gens de passage, vous êtes citoyens du peuple saint, membres de la famille de Dieu, car vous avez été intégrés dans la construction qui a pour fondations les Apôtres et les prophètes ; et la pierre angulaire, c'est le Christ Jésus lui-même. En lui, toute la construction s'élève harmonieusement pour devenir un temple saint dans le Seigneur. En lui, vous êtes, vous aussi, des éléments de la construction pour devenir par l'Esprit Saint la demeure de Dieu"  (Ep 2, 19-22)

De même, la liturgie nous fait entrer dans cette contemplation  :

Jésus Christ, pierre angulaire
Méprisée des bâtisseurs,
Mais unique aux yeux du Père,
Nous chantons notre bonheur
D'être, en toi, pierres vivantes
Édifiées dans ta maison :
Mystérieuse communion,
Que l'amour fonde et cimente.

De ces vies que la souffrance
A taillées et martelées,
De ces pierres où l'espérance
A gravé sa nouveauté,
Tu construis le sanctuaire,
Où réside l'Esprit Saint,
Et l'Église est le témoin
Du salut pour notre terre.

Jésus Christ, pierre de faite,
Où convergent à l'infini
Et s'embrassent tous les êtres,
Que déjà l'amour unit,
L'Esprit Saint à ta louange
De ces pierres tire un chant
Qui jaillit secrètement
Et s'accorde aux voix des anges.

Le texte de saint Césaire d'Arles (1) va aussi dans ce sens :

"Tous, frères très chers avant le baptême, nous avons été des temples du diable ; après le baptême, nous sommes devenus des temples de Dieu ; et si nous réfléchissons attentivement au salut de notre âme, nous savons que nous sommes le temple véritable et vivant de Dieu. Dieu n'habite pas seulement dans des temples faits de la main de l'homme, ni dans une demeure de bois et de pierres, mais principalement dans l'âme créée à l'image de Dieu, par la main du Créateur lui-même. C'est ainsi que saint Paul a dit : Le temple de Dieu est saint, et ce temple, c'est vous."  (2)


Ajoutons,  à ce commentaire, les textes que proposent la liturgie pour la fête de la Dédicace de la basilique du Latran.

Livre d'Ézéchiel 47,1-2.8-9.12.

Au cours d'une vision reçue du Seigneur, l'homme qui me guidait me fit revenir à l'entrée du Temple, et voici : sous le seuil du Temple, de l'eau jaillissait en direction de l'orient, puisque la façade du Temple était du côté de l'orient. L'eau descendait du côté droit de la façade du Temple, et passait au sud de l'autel.
L'homme me fit sortir par la porte du nord et me fit faire le tour par l'extérieur, jusqu'à la porte qui regarde vers l'orient, et là encore l'eau coulait du côté droit.
Il me dit : « Cette eau coule vers la région de l'orient, elle descend dans la vallée du Jourdain, et se déverse dans la mer Morte, dont elle assainit les eaux.
En tout lieu où parviendra le torrent, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Le poisson sera très abondant, car cette eau assainit tout ce qu'elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent.
Au bord du torrent, sur les deux rives, toutes sortes d'arbres fruitiers pousseront ; leur feuillage ne se flétrira pas et leurs fruits ne manqueront pas. Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède. "

Le psaume 46 évoqué le même jour nous invite aussi a percevoir que dans cette course, Dieu est pour nous "refuge et force, secours dans la détresse, toujours offert." Il continue d'ailleurs en ajoutant cette belle image vue chez Ézéchiel

"Fleuve, ses bras réjouissent la ville de Dieu,
la plus sainte des demeures du Très-Haut.
Dieu s'y tient : elle est inébranlable ;
quand renaît le matin, Dieu la secourt.

Il est avec nous, le Seigneur de l'univers ;
citadelle pour nous, le Dieu de Jacob !
Venez et voyez les actes du Seigneur,
Il détruit la guerre jusqu'au bout du monde."

C'est fort de ces deux textes que nous pouvons saisir l'enjeu "personnel" du récit tiré de l'Evangile.
On perçoit alors mieux l'enjeu de ce que de demande Paul.

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 2,13-22.

Comme la Pâque des Juifs approchait, Jésus monta à Jérusalem.
Il trouva installés dans le Temple les marchands de bœufs, de brebis et de colombes, et les changeurs.
Il fit un fouet avec des cordes, et les chassa tous du Temple ainsi que leurs brebis et leurs bœufs ; il jeta par terre la monnaie des changeurs, renversa leurs comptoirs,
et dit aux marchands de colombes : « Enlevez cela d'ici. Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. »
Ses disciples se rappelèrent cette parole de l'Écriture : L'amour de ta maison fera mon tourment.
Les Juifs l'interpellèrent : « Quel signe peux-tu nous donner pour justifier ce que tu fais là ? »
Jésus leur répondit : « Détruisez ce Temple, et en trois jours je le relèverai. »
Les Juifs lui répliquèrent : « Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce Temple, et toi, en trois jours tu le relèverais ! »
Mais le Temple dont il parlait, c'était son corps.
Aussi, quand il ressuscita d'entre les morts, ses disciples se rappelèrent qu'il avait dit cela ; ils crurent aux prophéties de l'Écriture et à la parole que Jésus avait dite".

Nous pouvons en effet rester en dehors du conflit qui oppose le Christ aux marchands du temple.

Mais une lecture selon les "4 sens" (3)  nous éveillera peut être plus loin. Lorsque  que nous percevrons soudain que le conflit est aussi intérieur.  C'est en nous que Jésus veut chasser les marchands.

 Saint Augustin va aussi dans ce sens :

"Salomon, parce qu'il était prophète, a fait un temple de pierre et de bois…pour le Dieu vivant qui a fait le ciel et la terre, et dont la demeure est aux cieux… Pourquoi Dieu a-t-il demandé qu'un temple soit bâti ? Était-il privé de demeure ? Écoutez le discours d'Étienne, au moment de sa Passion : « Salomon, dit-il, lui construisit une maison, mais le Très-Haut n'habite pas les temples faits de main d'homme » (Ac 7,48). Pourquoi dès lors a-t-il bâti ou fait bâtir un temple ? Pour préfigurer le corps du Christ. Le premier temple n'était qu'une ombre (Col 2,17) : quand la lumière vient, l'ombre s'enfuit. Cherches-tu maintenant le temple construit par Salomon ? C'est une ruine que tu trouves. Pourquoi ce temple n'est-il que ruine ? Parce que la réalité qu'il annonçait s'est accomplie. Le vrai temple, le corps du Seigneur, est tombé aussi, mais il s'est relevé, et si bien relevé qu'il ne pourra jamais plus tomber…      Et nos corps à nous ? Ils sont membres du Christ. Écoutez saint Paul : « Ne savez-vous pas que vos corps sont les membres du Christ ? » (1 Co 6,15) Lorsqu'il dit : « Vos corps sont les membres du Christ », qu'est-ce à dire, sinon que nos corps, joints à notre tête qui est le Christ (Col 1,18), font ensemble un temple unique, le temple de Dieu ? Avec le corps du Christ, nos corps sont ce temple… Laissez-vous construire dans l'unité, pour ne pas tomber en ruine en restant séparés." (4)


(1) Homélie de saint Césaire d'Arles pour l'anniversaire d'une dédicace
(2) 1 Corinthiens 3, 17
(3) Henri de Lubac, op. cit.
(4) Saint Augustin, Sermon Morin n°3, 4 ; PLS 2, 664 (trad. Solesmes, Lectionnaire, t. 3, p. 916 rev.)



05 décembre 2009

Le Dernier Pont


Voici le fruit d'une longue méditation sur la Passion chez Jean. "Le Dernier Pont" est celui tracé par l'Evangéliste entre le lavement des pieds et la croix, une invitation à l'homme qui révèle, au delà de l'élévation, l'amour infini de Dieu pour l'homme. Ce livre, qui reprend les méthodes de lecture narrative de l'exégèse moderne, intègre aussi notre dernière méditation "Dieu de Faiblesse" et en annexe l'intégralité du blog de Lectio Divina - Selon Saint Jean avec la plupart de ses commentaires. Ce blog, créé avec quelques amis de 2006 à 2007 avait pour objet de méditer l'Evangile, au jour le jour.

Le dernier pont est un livre à offrir à ceux qui veulent partir sur les pas de l'évangéliste et méditer sur la mélodie de l'auteur au sein de la symphonie pastorale des 4 évangiles.

Publié au profit d'une oeuvre d'évangélisation, Le Dernier Pont est la 6ème contemplation publiée par Claude Hériard.

11 novembre 2009

Lavement des pieds... quatrième relecture

Une première lecture d'un des sommets de la théologie johannique passe par la double contemplation qui résulte de la structure même du récit en narrativité. La première partie du texte, au sein même du dialogue entre Jésus et Pierre (Jn 13, 6-10) nous invite à nous laisser purifier par le Christ et donc à recevoir le pardon de Dieu, avec une pointe donnée dans le verset 8 : "Si je ne te lave pas les pieds, tu n'auras point part avec moi" (*). La deuxième, donnée par la deuxième partie (12-20) est une invitation à l'amour communautaire et réciproque. Mais au sein même de l'ensemble de l'attitude de Jésus, nous entrons également en résonance avec le propre chemin de Dieu vers l'homme, cet abaissement de Dieu qui depuis la Shékinah (Gloire du Verbe) qui cherche l'homme dans le jardin (Targum de Gn 3) ne va cesser d'exprimer le "j'ai soif" crié par Dieu à l'humanité... Ce cri trinitaire ne cesse de se conjuguer dans l'Ecriture. On le trouvera dans l'entre-deux de la visite à Mambré, entre-les lignes de l'échange entre Moïse et Dieu en Ex 33, dans la voix d'un fin silence où la tendresse de Dieu vient chercher l'homme juste et lui fait entendre le chant des autres chercheurs de Dieu, le coeur des 7000 (cf. 1 R 19). Dans l'Evangile de Jean, nous l'avons déjà entendu dans le "donne moi à boire" prononcé à la Samaritaine (Jn 4), il sera interprété dans la danse du Fils, au pied de la femme adultère et résonnera dans le cri final prononcé sur la Croix. Au j'ai soif de ton humanité, viendra répondre, comme en écho, la symphonie du don trinitaire, jaillissement infini du fleuve d'amour, face auquel notre amphore reste bien petite...

Plus je médite ce texte plus sa portée, ce sommet théologique, ressemble à cette échelle de médiation présentée en Jn 1,51 où le Christ apparaît à la fois comme l'échelle et le nouveau Jacob (**)... L'échelle est accrochée au sommet du ciel. Ce Dieu de faiblesse révélée dans la kénose du Fils, résonnera chez Paul dans l'affirmation "Dieu lui a donné le nom" (Ph 2)... Jésus est le Christ... (***)


* cf. Y-M Blanchard, Saint Jean, Edit° de l'Atelier, p. 27
** cf. Targum néofiti de Gn 28
*** cf. W. Kasper, Jésus le Christ, Edit° du Cerf...

07 février 2009

L'amphore et le fleuve


Face à ce fleuve d'amour qui se déverse sur l'homme, saint Bonaventure avait cette image fabuleuse d'un homme, tenant une amphore, debout dans le fleuve et incapable d'en saisir le flot.
C'est donc "L'amphore et le Fleuve" que j'ai choisi pour réunir en un seul tome mes trois dernières contemplations :
- "Retire tes sandales", une contemplation écrite suite à la lecture de l'œuvre d'Urs von Balthasar,
- "La voix d'un fin silence" une analyse transversale des théophanies de Dieu dans l'ancien et le Nouveau Testament
- "Les mains vides", une relecture philosophique de l'amour-don...

Rappel : Vous trouverez sous ce lien l'ensemble de mes publications y compris une contribution à un ouvrage collectif, Chemin vers le mariage, publié récemment chez Bayard sous la direction de S. Kerrien.

Les mains vides


Toute fécondité de l'homme vient de Dieu. Prendre conscience que nous ne sommes rien que des passeurs d'un amour infini qui nous vient d'ailleurs, c'est amorcer un chemin nouveau, aride et dérangeant. C'est avancer sur une terre inconnue, celle de la réalisation soudaine que si nous sommes les sarments d'une vigne, nous ne faisons que passer la sève qui vient d'ailleurs et qui coule en nous, nous irrigue et nous fait vivre.

Je vous annonce la naissance de ma troisième contemplation, "Les mains vides", qui reprend et médite sur ce thème.

01 octobre 2007

Sang et eau

Le témoignage de l’Esprit n’est rendu qu’en commun avec l’eau et le sang. Si l’Esprit apparaît comme eau vive, il faut aussi, affirme Hans Urs von Balthasar, que le sang du Christ soit bu en même temps. Cela implique un sens plus large qui met l’Esprit dans l’Eglise. (1) Coïncidence, mais je trouve le même discours dans Jésus de Nazareth de Benoît XVI, p.265 à 267…

Et en effet, c’est le cœur de l’incarnation qui est en jeu. A la source idéale se joint l’exigence de la terre : aimer non l’être iréel mais l’être incarné, celui qui se révèle dans son frère. « Quand vous avez servi un verre d’eau… , c’est à moi que vous l’avez fait »

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, III – L’Esprit de Vérité p. 13