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26 août 2022

En route vers la Galilée - vers une conclusion

 

Je viens de terminer un premier jet de cette nouvelle réédition des deux premiers tomes de ma trilogie (1) que j’avais prévu d’écrire cet été. 

À quoi suis-je arrivé ? A partir de "Dieu dépouillé", ce livre fleuve de 1700 pages publié en numérique, il y a quelques années, j’ai écrémé l’essentiel en 450 pages, et, ce faisant, retraversé une fois encore cette Écriture,  ces textes fondateurs qui ne cessent de m’interpeller depuis 20 ans, dans cette lente manducation que je voudrais partager de la « pédagogie divine » qui court d’Osée à Jean.

Un écrémage douloureux vers l’essentiel… qui méritera encore une nouvelle passe pour être « grand public », mais que je considère déjà plus accessible.

Ce travail s’inscrit en préparation dans une réflexion plus large à laquelle j’ai été convié sur une refonte de l’approche catéchuménale.

Relire l’Écriture, manduquer encore ces textes, c’est s’exposer au risque d’être à nouveau touché jusqu’aux jointures de l’âme par la Parole.

Il m’aurait fallu plus de temps. Et pourtant, sur ma route, quelques graines ont germé.

Mercredi je reprends ma vie plus agitée entre travail et pastorale. Il ne me restera que quelques nuits d’insomnie pour avancer.

La conclusion du livre pourrait être ce texte magnifique de saint Colomban que m’offre l’office des lectures d’aujourd’hui 


LE CHRIST, SOURCE DE VIE,  PAR SAINT COLOMBAN

« L'eau vive qui jaillit pour la vie éternelle » Frères, suivons notre vocation : à la source de la vie nous sommes appelés par la vie cette source est non seulement source de l'eau vive, mais de la vie éternelle, source de lumière et de clarté. D'elle en effet viennent toutes choses: sagesse, vie et lumière éternelle. L'auteur de la vie est la source de la vie, le créateur de la lumière est la source de la clarté. Aussi, sans regard pour les réalités visibles, cherchons par-delà le monde présent, au plus haut des cieux, la source de l'eau vive, comme des poissons intelligents et bien perspicaces. Là nous pourrons boire l'eau vive qui jaillit pour la vie éternelle. Veuille me faire parvenir jusqu'à cette source, Dieu de miséricorde, Seigneur de bonté, et que là je puisse boire, moi aussi, avec ceux qui ont soif de toi, au courant vivant de la source vive de l'eau vive. Qu'alors, comblé de bonheur par cette grande fraîcheur, je me surpasse et demeure toujours près d'elle, en disant : « Qu'elle est bonne, la source de l'eau vive; elle ne manque jamais de l'eau qui jaillit pour la vie éternelle ! » Ô Seigneur, tu es, toi, cette source qui est toujours et toujours à désirer, et à laquelle il nous est toujours permis et toujours nécessaire de puiser. Donne-nous toujours, Seigneur Jésus, cette eau, pour qu'en nous aussi elle devienne source d'eau qui jaillit pour la vie éternelle. C'est vrai : je te demande beaucoup, qui le nierait ? Mais toi, Roi de gloire, tu sais donner de grandes choses, et tu les as promises. Rien de plus grand que toi, et c'est toi-même que tu nous donnes ; c'est toi qui t'es donné pour nous. Aussi est-ce toi que nous demandons, afin de connaître ce que nous aimons, car nous ne désirons rien recevoir d'autre que toi. Tu es notre tout : notre vie, notre lumière et notre salut, notre nourriture et notre boisson, notre Dieu. Inspire nos cœurs, je t'en prie, ô notre Jésus, par le souffle de ton Esprit, blesse nos âmes de ton amour, afin que chacun de nous puisse dire en vérité : Montre-moi celui que mon cœur aime, car j'ai été blessé de ton amour. Je souhaite que ces blessures soient en moi, Seigneur. Heureuse l'âme que l'amour blesse de la sorte : celle qui recherche la source, celle qui boit et qui pourtant ne cesse d'avoir toujours soif tout en buvant, ni de toujours puiser par son désir, ni de toujours boire dans sa soif. C'est ainsi que toujours elle cherche en aimant, car elle trouve la guérison dans sa blessure. De cette blessure salutaire, que Jésus Christ, notre Dieu et notre Seigneur, bon médecin de notre salut, veuille nous blesser jusqu'au fond de l'âme. À lui, comme au Père et à l'Esprit Saint, appartient l'unité pour les siècles des siècles. Amen.


Répons

Nous marchons vers toi, source de vie, alléluia ! Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi, qu'il boive, celui qui croit en moi : de mon sein couleront pour lui des fleuves d'eau vive. Qui boira l'eau que je lui donnerai n'aura plus jamais soif : cette eau deviendra en lui source jaillissant en vie éternelle.

 

Oraison

Dieu puissant, de qui vient tout don parfait, enracine en nos cœurs l'amour de ton nom ; resserre nos liens avec toi, pour développer ce qui est bon en nous ; veille sur nous avec sollicitude, pour protéger ce que tu as fait grandir.


(1) « Pédagogie divine » et « À genoux devant l’homme » sont disponibles à prix coutant sur le vilain Amazon au format papier et gratuits sur Kobo/Fnac.

"Dieu dépouillé" est en téléchargement gratuit sur Kobo


PS : ceux qui veulent m’aider à relire ce premier jet d’ "en route vers la Galilée" peuvent me le réclamer par MP ( format epub ou pdf) ou le trouver en version bêta sur Kobo

20 avril 2022

Sur les chemins d’Emmaüs

Nous sommes invités à le toucher, à le rencontrer, à le manger, à nous nourrir de lui et à entrer dans son mouvement pascal d’effacement rappellait C.Théobald, et pourtant, au moment même où l’on croit le saisir, nous savons qu’il s’effacera, comme il nous invite aussi à le faire. Car, quand bien même nous aurons cru le saisir, il disparaîtra dans un « ne me touche pas » (Jn 20, 17), paradoxe d’un Dieu qui cherche à nous maintenir dans une course infinie, pour que, loin de planter, comme Pierre, une tente sur le mont Thabor, nous restions des coureurs, cherchant sans fin « à le saisir » (cf. Ph. 3) et surtout à en vivre, dans un amour contemplé, reçu puis partagé. 

Le Verbe n’a plus de mots, mais qu’un geste, signe de sa mort, où le Christ se révèle par le don de son corps et disparaît dans le silence pour nous laisser creuser en nous son absence et reprendre son chemin. 

Il nous invite dans le monde, en Galilée….

Extrait de mon « Dieu depouillé »

22 décembre 2021

Noël autrement, les limites du rite ? 2 - 22


Qu’allons nous célébrer à Noël ? 

Une fête païenne ou la Parole fragile, le silence ténu, le cri d’un enfant ? Prendre le temps de ruminer lentement Luc 2,1-18 (*), nous conduit « Ailleurs ». Noël est bien autre chose. C’est surtout, dans l’axe du cri de Marie [« il relève les humbles »] une semence d’espérance pour les pauvres, loin de nos excès et probablement de nos suffisances ? 


La liturgie a trop découpé le sens donné par Luc 2.

Il faut peut-être aller plus loin… 

Nos rites désuets ne remplaceront jamais ce que révèle la paille rêche d’une crèche. 

Dans le silence de la nuit se murmure à nouveau en effet le psaume dit de David : « tu n'as demandé ni holocauste ni sacrifice. Alors j'ai dit: Je viens / [Me voici ] avec le livre-rouleau écrit pour moi. (...) Moi, je suis pauvre et déshérité; mais le Seigneur pense à moi. Tu es mon secours et mon libérateur: mon Dieu, ne tarde pas! » Psaumes‬ ‭40:7-8, 18‬ ‭

Le dépouillement de Noël est d’une certaine manière le même que celui de Jésus lors du dernier repas.

Avant d’ouvrir des yeux faussement béa sur l’enfant né, n’oublions pas ce qu’il ouvre dans l’espace temps. N’oublions pas de tracer dans nos cœurs la ligne qui va du bois de la mangeoire à celui de la Croix jusqu’à un geyser, signe du fleuve immense des dons de Dieu.

Noël est le prélude discret de la Passion. 

Luc prépare Jean dans la même danse spirituelle.

Quand le fils de l’homme retire son vêtement en Jn 13, il redevient l’enfant pauvre, au milieu des pauvres. Noël n’est pas un simple rituel, mais d’une certaine manière le premier « signe efficace », un sacrement de l'amour de Dieu et de l'amour des hommes au sein d'une communauté vivante, car il nous révèle l’essentiel : ce qui prime est l'attention aux frères, aux plus petits et aux plus pauvres, aux migrants, aux nouveaux esclaves à qui Jésus s'identifie ici. 

Et cette direction est celle là même qui est évoquée par l’appel des bergers, de ces parias du judaisme de l’époque, rejetés car impurs, [au contact des animaux]. 


Que célébrons-nous ? Et avec qui ?

Noël n’est pas le confinement familial qu’il est devenu, mais le lieu même du don.

On se souvient de la remarque de Paul (cf. notamment 1 Co 11, 33) qui déjà notait l'absence de communion véritable dans la jeune église, où les derniers arrivés, les esclaves, n'avaient pas le même traitement que les premiers, les hôtes du repas. En inversant les rôles, Luc nous conduit aux mêmes conclusions que Jean par son évangile de l’enfance. Il est peu historique mais très spirituel.


Cette tension reste un point sur lequel nous ne devrions pas cesser d'attacher de l'importance. Il est au cœur de ce à quoi nous appelle le message de l'eucharistie : une double tension vers Dieu et vers autrui… 

Notre communion est stérile si elle se contente de satisfaire notre entre soi.

Comme Luc en introduction, Jean dans sa conclusion nous conduit au même décentrement, mais ajoute une dimension différente. Le rite de l'eucharistie est depassé par une dynamique sacramentelle (cf. mon livre éponyme) qui n'est pas centré sur un mime du dernier repas, mais sur l'agenouillement kénotique et la croix, exhortation finale de Jean. 

Entre les lignes, on peut lire une injonction qui prend aujourd'hui une dimension plus urgente et fait écho avec ce que nous dit entre les lignes le pape François : Ne fermons pas la porte. Ne soyons pas "une église fermée" dans laquelle " les gens qui passent devant ne peuvent entrer" et d'où " le Seigneur qui est à l'intérieur, ne peut sortir" ou pire avec des Chrétiens qui ferment à clé et "restent devant la porte‎" et "ne laissent entrer personne"[3] comme cette auberge de Béthleem chez Luc.

« Allez à la périphérie », sous entendu (mais je force volontairement le trait) ne restez pas dans vos églises à mimer le premier  Noel ou le dernier repas, mais agenouillez vous devant l'homme blessé (Jn 1), criez votre soif (Jn 4), agenouillez vous devant les souffrants (Jn 5), partagez et donnez (Jn 6), agenouillez vous devant les pècheurs (Jn 8 et Jn 13), ou courrez vers eux (Luc 15), comme vers les étrangers (Mat 11), pleurez avec les souffrants (Jn 11). Vivez dans l'agapè.


Je rejoins là d’une certaine manière la belle l'injonction de François Cassingena-Trévedy qui nous a longuement préparé au désert par la contemplation des terres froides de son pays avant de nous offrir ses roses de Noël… https://www.facebook.com/100006435460424/posts/3746631415561337/ Elles font écho aux danses fragiles de mes « tulipes » trinitaires développés dans les 75 billets précédents :-)


[1] Pape François, messe à Sainte Marthe du 17/10 (2013 ?), cité par Spadaro, p. 93 »

Voir aussi François Cassingena-Trévédy De la fabrique du sacré à la révolution eucharistique - Quelques propos sur le retour à la messe. Publication sur FB du 23/5/20

* Cf. nos essais fragiles dans la Maison d’Évangile - La Parole Partagée




[1] Pape François, messe à Sainte Marthe du 17/10 (2013 ?), cité par Spadaro, p. 93 »

Voir aussi François Cassingena-Trévédy De la fabrique du sacré à la révolution eucharistique - Quelques propos sur le retour à la messe. Publication sur FB du 23/5/20

27 avril 2021

Lectures pastorales - livres en téléchargement libre


Comme annoncé je bascule progressivement toutes mes « lectures pastorales » en téléchargement gratuit sur kobo (cf.lien) et  sur Fnac.com.

Sont déjà disponibles plus de 5000 pages en dix-huit volumes très différents :
  1. La réédition de « danse trinitaire », un petit essai d’une cinquantaine de pages publié il y a 10 ans et que je ne cesse de considérer comme central dans une réconciliation entre théologie et pastorale - dire avec des mots simples l'indicible des mouvements de Dieu...
  2. « Retire tes sandales", une petite contemplation (93 pages) rédigée à la suite de ma lecture des 18 tomes de la trilogie d’ Hans Urs von Balthasar
  3. Dieu dépouillé - la compilation de Pédagogie divine et Chemins d'Évangile (1886 pages selon le calcul de Kobo) qui reprend en un volume le coeur de ma contemplation de la dynamique de la révélation qui va jusqu’à « l'agenouillement » de Dieu devant l'homme.(Jn 13 et Ph 2) et intègre notamment les livres publiés sous les titres  « Le rideau déchiré », « Dieu de miséricorde » , « À genoux devant l’homme »
  4.  Serviteur de l’homme - kénose et diaconie, la suite directe de Dieu dépouillé qui poursuit la lectio divina du nouveau Testament et nous conduit au travers des actes des apôtres jusque dans une lecture chronologique des lettres de Paul (dans l’ordre présumé de leur parution) nous permettant de suivre la progression pastorale de l’auteur.
  5. Chemins de miséricorde - une lecture cursive et pastorale de l’évangile de Luc
  6. "KénoseHumilité et miséricorde", Une version en un seul volume (1093 pages) de ma trilogie parue il y a trois ans.
  7. La dynamique sacramentelle, un document présynodal sur l’ouverture de la notion de sacrement à la vie des baptisés 
  8. Le chemin du désert, lecture spirituelle qui accompagne le lecteur sur le chemin ardu d’un dépouillement intérieur à la suite de Luc et Matthieu 4 et des grands mystiques.
  9. Aimer pour la vie, un chemin de spiritualité conjugale, un des premiers écrits de l’auteur sur le thème où il est le plus qualifié (Ancien représentant permanent pour la France de la FICPM), mais aussi le plus démuni - avec 33 ans de vie conjugale au compteur)
  10. Quelle espérance pour l’homme souffrant ? Le mémoire revisité de sa licence de théologie - un travail qui reste fragile tant l’est la question...
  11. L’amphore et le fleuve, un recueil qui développe les thèmes de la liberté de l’homme devant l’amour divin, à la suite de Retire tes sandales et danse trinitaire.
  12. Où es-tu mon Dieu ? - une méditation sur la souffrance 
  13. Dieu n’est pas violent  - une relecture spirituelle des textes de violence dans la Bible
  14. Cette Église que je cherche à aimer - un texte publié il y a quelques années sur les grandeurs et faiblesses de l’Église 
  15. À genoux devant l’homme, la troisième édition de notre lecture de l’évangile selon saint Jean
  16. Pastorale du Seuil, le texte d’une série de conférences données de Beauvais à Gap. 
  17. Pédagogie divine - une relecture pastorale des pas de Dieu dans l’Ancien Testament 
  18. Silo le berger - un conte de Noël écrit pour mon neveu, sur la base de chemins de miséricorde 



Progressivement, l'ensemble de mes lectures pastorales seront mises en ligne gratuitement par ce biais.
A suivre.

Et bien sûr mes romans plus accessibles et notamment, également en téléchargement libre : 
  1. « D’une perle à l’autre (2 tomes) et « le mendiant et la brise » (80 pages au centre des 800)
  2. Le collier de Blanche - un pseudo roman historique à fort contenu théologique...
  3. La danse des anges
  4. Une dernière valse - mon best seller, petite nouvelle de 30 pages... 
  5. etc.







27 mars 2021

La Croix 12.0 - danse finale ? (Billet n.45)


Peut-on épuiser le mystère ? Il y a au moins douze dimensions dans la Croix que notre entrée en semaine sainte nous permet de manduquer lentement :

 1. La dimension verticale et descendante qui est celle de l’abandon trinitaire. Triple kénose où :

 • Le Père renonce à toute puissance pour laisser l’homme Jésus révéler l’amour.

 • Le Fils renonce à toute divinité pour se dépouiller d’abord de son vêtement par le mime kénotique tout symbolique d’un lavement des pieds (Jn 13) puis « forcé » sur la croix pour prendre la condition finale d’un esclave, d’un rejeté...(1)

 • L’Esprit sera déposé au fond de nos cœurs de pierre pour faire danser en nous l’amour(2)

 2. La dimension horizontale où les bras ouverts d’un Dieu transpercé nous invitent à sa danse pour l’humanité toute entière 

 3. La dimension « inversée » où le serpent moqueur qui nous empêche d’aimer et nous pousse à la violence, la jalousie, l’orgueil ou la cupidité est transpercé et dressé (Nb 11) par le feu d’un amour qui se révèle derrière un rideau déchiré (3)

 4. L’appel mystique d’un fin silence qui pèse sur le bruit du monde avant que bruisse le chant des anges à la sortie de nos carêmes...(4). Chant discret qui apparaît au terme de nos chemins de désert (5) et se prépare à l’Alleluia pascal...

 5. Un homme au paroxysme de la souffrance, agneau innocent qui révèle l’amour d’un Dieu avec nous.

 6. La déréliction de celui qui va jusqu’à connaître l’abandon du Père et rejoint ainsi les assoiffés du monde qui crie leurs « où es-tu ? » solitaires et souffrant.(6)

 7. La nudité révélée de l’Epoux déchiré sur le bois et qui n’en a plus honte, nouvel Adam au sens transcendé de Gn 2,25 (7) 

 8. La soif d’un Dieu qui crie pour la énième fois un « où es-tu ? » à l’homme depuis l’appel du premier jardin, le « donne moi à boire » de Jean 4 au « j’ai soif » de toi final d’un Dieu mourant de son désir d’amour (8).

 9. La joie cachée d’un Dieu qui en criant « tout est accompli » révèle qu’au delà de la souffrance et de l’abandon du Père se cache le mystère d’un chemin trinitaire.(3)

 10. L’Alliance ultime de l’homme Dieu qui épouse l’humanité par une danse ultime 

 11. Le don inouï d’un Dieu qui meurt et entre dans le silence du samedi saint dans l’attente fragile que le murmure d’une femme, devenue fidèle par une danse aimante(9), révèle à des hommes incrédules le bruissement du ressuscité qui déjà les précèdes en Galilée 

 12. La petite espérance où la soif de l’homme-Dieu se change en don et transforme un corps transpercé et « livré pour nous » en source jaillissante d’eau et de sang mêlés(10)


Je suis sûr que j’en oublie. 

Le chiffre 12 est révélateur mais on pourrait parler aussi de  l’Église fondée par un « Mère voici ton Fils » ou d’un « m’aimes tu ? » qui encadre le mystère. Je vous laisse compléter 😉. On n’épuisa jamais la révélation dans un billet sur FB ni d’ailleurs dans les milliers de pages citées ci-dessous.


Pour aller plus loin :

(1) relire Philippiens 2 ou ma « danse trinitaire » et « Serviteur de l’homme » en téléchargement libre sur Kobo

(2) Ezechiel 36, 26 et mon « Dieu dépouillé »

(3) voir Marc 15, 38 ou mon « Rideau déchiré »

(4) 1 Rois 19

(5) cf. mon livre éponyme 

(6) voir Hans Urs von Balthasar - Dramatique divine.  les travaux d’Adrienne von Speyr, Jurgen Moltmann et son Dieu crucifié ou mes deux livres sur ce thème dont « où es-tu ? »

(7) cf. « Le Dieu est nu » d’Arnold longuement commenté dans mes billets précédents...

(8) cf. À genoux devant l’homme 

(9) cf mon billet précédent 

(10) Ezeckiel 47 ou mon  livre « L’amphore et le fleuve »

06 mars 2021

Théophanies 37.2 - la danse du feu...

Je vous avais promis une suite sur la transfiguration. Elle risque d’être un peu longue. Après Gn 22 déjà longuement commenté en septembre je voudrais revenir sur Exode 3 et ce fameux buisson ardent, qui prépare à leur manière la transfiguration, au point que certains commentaires pensent qu’il est première révélation du Christ lui même.


Les flammes de feu, qui ne consument pas le buisson, introduisent en effet une double symbolique.


Le feu

1. Parlons d’abord du feu. Pour Hans Urs von Balthasar, « la Gloire de Dieu se manifeste ici avant la parole », comme ce sera le cas au Mont Thabor. Le feu précède le discours pour susciter l’écoute… La gloire qui s’y révèle rend attentif au message.

C’est aussi l’interprétation du Targum(1), qui par ses commentaires ajoutés au texte, insiste sur « la présence de Dieu » (la Shékinah) dès le verset 1 : « La montagne, sur laquelle apparut la Gloire de la Shékinah de Yahvé, l’Horeb  ». Au lieu de dire seulement : « il arriva à la montagne de Dieu, à Horeb », le targum y place déjà la Gloire.

La Mischna introduit ce même concept à propos de l’ange : « Et la gloire de la Shékinah de Yhwh lui (apparut) dans les flammes du feu ». Le targum va d’ailleurs jusqu’à donner un nom : Zagnuagaél à cet émissaire de Dieu au v. 2 : « Et Zagnugaél, l’ange de Yahvé, lui apparut. »

Quel est alors le sens du feu ? Dans la Bible, il a une connotation positive ou négative. Selon Greenberg, il évoque autant la furie (Jr 4, 4, Ps 79, 5), que la destruction (Dt 4, 24 ; 9, 31), la pureté (Nb 31, 23 et Mal 3, 2), l’illumination (Ex 13, 21) et le guide (Ex 13, 21)…

Pour le Pseudo Denys(2), le feu est « à la fois totalement lumineux et comme secret, inconnaissable en-soi (...) insoutenable et impossible à regarder (...) revivifiant par sa chaleur vitale, éclairant par ses illuminations sans écran, impossible à maîtriser, sans mélange, dissociateur, inaltérable, tendant vers le haut, agissant vite, sublime et exempte de toute faiblesse (...) saisissant et insaisissable, n'ayant besoin de rien d'autre, s'accroissant en secret et révélant sa propre grandeur selon les matières qui l'accueillent, actif, puissant, invisiblement présent à tout être (...) se manifestant de manière soudaine ». Même si cette description est générique, elle pourrait presque s'adapter à ce passage d'Exode 3.

Dans la ligne de notre recherche, nous pouvons aussi probablement évoquer cette flamme qui brule en nous, tout ce qui nous retient vers la terre, ce que nous appelons nos adhérences. Ce feu nous libère de nos liens au mal, nous ouvre à la contemplation. Mais il est plus que cela et la mention de la Gloire nous ouvre à une tension. Le feu purifie et éclaire, illumine et libère…


Le buisson

Le buisson a aussi fait l’objet de nombreux commentaires. Il est interprété par les Pères de l’Église comme l’Égypte, contenant la flamme d’Israël prisonnière, ou encore comme le Sinaï, réceptacle de Dieu. On y voit aussi une lampe à 7 branches, signifiant la révélation perpétuelle de Dieu. Certains le comparent aussi à Marie, restée vierge malgré la naissance de l’enfant.

L’interprétation du texte est ainsi très vaste, ce qui rend difficile une cohérence.

Et pour nous ? Qu’évoque-t-il ? Peut-on parler du tabernacle ou à l’inverse du mystère du monde, dans lequel Dieu vient faire irruption ? Dieu est-il cantonné dans un espace où apparait-il partout ?


La non-combustion

Notons enfin le paradoxe de la non-combustion, qui peut conduire à interpréter la visite comme celle d’une tendresse. Ici le feu met en valeur, mais ne détruit pas.

Pourquoi le feu ne brûle-t-il pas le buisson ? Qu’est-ce que cela nous dit sur Dieu ?

Alors que nous nous préparons à méditer demain l’apparente colère de Dieu, prenons de la distance sur ce feu.

Au respect que Moïse porte à Dieu ne faut-il pas y voir un autre respect, celui de Dieu pour l'homme ? Un respect qui se manifestera seulement dans « la voix d'un fin silence » (1 Rois 19) ou qui, à travers Jésus, se révèlera dans son tact et son attention. Le respect, nous dit J.M. Carrière, est « la manière de recevoir humblement l'autre, du plus petit au plus grand, et dans son dévoilement et dans le projet qui le porte à son accomplissement ».

Comme l’échelle de Jacob, il y a là « une représentation symbolique de la nature paradoxale de l’expérience théophanique*. Elle combine des forces hostiles – la flamme et le buisson – dans une relation apparemment symbiotique dans laquelle les deux sont maintenus en vie. »

Dieu réveille en nous le feu de désir et en même temps nous laisse intact, respecte notre personne. Et ce paradoxe souligne pour moi, à la fois la puissance et la tendresse de Dieu.

Benoît XVI fait déjà, à ce sujet un parallèle éclairant entre le buisson-ardent et la Croix. Est-ce à mettre en lien avec ce qu’il évoquait sur la « fission nucléaire » du cœur au JMJ de Cologne, c’est-à-dire ce déchirement intérieur, soudain et violent qui nous brûle et fait exploser ce qui nous retient de l’amour ?

La contemplation du buisson ardent porte une symbolique puissante de la réalité de Dieu, même si elle n’est qu’un aperçu imparfait d’une réalité indicible.

Quelle que soit notre vision unique et personnelle de la rencontre, quel que soit la forme prise par le buisson et la flamme, nous devons accueillir ici l’inouï d’un Dieu qui vient à nous.


Le nom de Dieu

On doit souligner les difficultés de traduction du verset 14 : « Je suis celui qui suis ».

Pour Maître Eckhart, « la répétition qu’il y a dans : « Je suis celui qui suis » indique la pureté de l’affirmation, toute négation étant exclue de Dieu lui-même (...) un certain bouillonnement ou parturition de soi, s’échauffant en soi et se liquéfiant et bouillonnant par soi-même, lumière de la lumière et vers la lumière (...). C’est pourquoi il est dit en Jn 1 : « En lui était la vie », car la vie signifie un certain jaillissement par lequel une chose, s’enflant intérieurement par soi-même, se répand en elle-même totalement, toutes ses parties en toutes ses parties, avant de se déverser et déborder à l’extérieur  ».

Pour T. Römer on devrait plutôt traduire l’hébreu  « ehyèh asher ehyèh », comme le fait la Tob : « je serai qui je serai » puisque c’est un verbe « à l’inaccompli ». De plus, souligne C. Wiener, le verbe être n’est pas employé en hébreu sauf pour insister sur une présence particulière, signifiante. Le « Je serai » introduit une révélation à venir. Dans cette révélation du nom, que l’on peut mettre en parallèle à celle faite à Abraham sur le mont Moriyâh, Moïse apprend le nom de Yhwh.

Entre la vision d’Eckhart et ce que nous dit Römer se construit une tension. Le bouillonnement de l’être qui se révèle et ce mystère qui demeure est propre au caché/dévoilé de Dieu.

D’ailleurs, comme le rappelle Benoît XVI, cette affirmation de Dieu au buisson-ardent a donné en Jésus une affirmation plus courte et plus ferme : « Je suis » (ani hu = ego eimi). C’est dans cette direction que nous retrouvons probablement notre fil rouge. En Exode 3 se confirme, entre les lignes, la lente tendresse d’un Dieu qui se dévoile à peine, mais prépare la révélation du Christ.

Enfin, selon Grégoire de Nysse : « c’est celui dont jadis Moïse s’est approché, dont aujourd’hui s’approche tout homme qui comme lui se dépouille de son enveloppe terrestre et se tourne vers la lumière qui vient du Buisson, vers le rayon issu du buisson d’épines, figure de la chair qui a brillé pour nous et qui est, nous dit l’Évangile, la vraie lumière et la vraie vérité ».

L’enjeu de cette quête n’est pas dans l’affirmation d’un être palpable, quantifiable, définissable, mais l’humble révélation d’un Dieu à venir dont la Croix sera la gloire fugace et fragile. Dans sa quête, Moïse approche du mystère…

Mais n’anticipons pas trop et laissons au fil du texte sa propre direction.

À suivre



PS : Ces commentaires reprennent et complètent les recherches déjà publiées dans plusieurs de mes travaux précédents dont « J’ai soif », « La voix d’un fin silence », « L’amphore et le fleuve », « Humilité et miséricorde ». Leur reprise ici, extraite de Dieu depouillé, s’inscrit dans une étude plus linéaire qui trouve ici son sens.


[1] Le targum est un texte contemporain de Jésus, écrit en araméen, sorte de commentaire imagé destiné à aider à la compréhension du texte (cf. notre glossaire pour tous les mots accompagnés d’un astérisque).

[2] Denys l'Aéropagite, CH XV, 2 (239 AC, Hiér. Cél. p. 168-171, cité par Hans Urs von Balthasar in GC2 p. 165

22 juillet 2020

Dépouillement 27 - Détachement et nudité (18eme Dimanche - Année C revisité)

Quel est notre attachement aux biens de ce monde ?

L'insistance de la Parole est presque abusive. Elle est comme un cri de Dieu lancé dans le désert et qui retentit depuis le premier cri de Dieu au jardin.

Où es-tu ? Que cherches -tu ? Où es-ta priorité ?

On peut passer à côté, refuser de l'entendre.

Mais c'est se détourner de l'essentiel. Se détourner de la croix qui crie encore ce « Que cherches -tu ? »

Le matin de Pâques les disciples entendront encore ce qui cherchez-vous qui nous ramène à notre quête.

L'essentiel n'est pas dans l'avoir, la vanité ou la puissance. Il est dans le dépouillement, la nudité, le don...

L'inversion à laquelle nous conduit ce texte c'est le don....

Chez Marc, au jeune homme riche, Jésus redit, comme il le fait à sa manière viens et suis moi.
Donne...
Donne sans compter
Donne sans attendre de retour
Donne jusqu'au bout

Donne jusqu'au bout de ta vie
Car donner c'est aimer.

Le mariage, dis-je souvent à ce que je marie est signe de ce don.
Je me donne à toi..... et je ne le reprendrai pas.
Il est signe seulement de l'indicible don qui jaillit du cœur du Christ et continue de se donner à chaque eucharistie...

L'amour est don
L'amour est dépouillement
L'amour ne cherche pas son intérêt
L'amour prend patience
L'amour c'est donner sans retour

Dieu est amour.

Paul nous fait aller, comme souvent, un pas de plus...
« vous vous êtes revêtus de l'homme nouveau
qui, pour se conformer à l'image de son Créateur,
se renouvelle sans cesse en vue de la pleine connaissance"
.
Tout est rien, pourrait il dire comme l'a fait la grande Thérèse tout est rien, tout est vanité
« mais il y a le Christ :  il est tout, et en tous. »

Quand nous communions avec lui, il ne s'agit pas de recevoir, mais d'entrer dans la dynamique de Dieu, dans le don...

Porter le Christ c'est être nu, à genoux devant l'homme et donner le meilleur de soi-même. Le dépouillement du Christ qui enlève ses vêtements en Jn 13 pour s'agenouiller devant l'homme et laver les pieds devient le signe du don ultime, du dépouillement d'un Dieu nu, exposé sur la Croix. C'est là où Dieu se révèle, c'est là où Dieu apparaît derrière le déchirement du voile...

19 juillet 2020

Dépouillement 22 - le bon grain, l’ivraie et La Croix


Il y a une lecture pascale et johannique du texte de Matthieu 13 en Jean 13. Elle illustre et complète la parabole du bon grain et de l'ivraie, dans l'agenouillement du Christ devant Pierre et Judas.
C'est « l'où es-tu ? » final de Dieu devant l'homme, lancé depuis Gn 3....Le Christ a vécu dans sa chair, ce dépouillement. Il s'est mis à genoux devant les deux « graines » qu'était Judas et Pierre, il a lavé les pieds des deux apôtres.
Judas a refusé l'amour et s'est pendu dans la géhenne, la vallée maudite qui jouxte Jérusalem
Pierre a renié le Christ jusqu'au bout, par trois fois, mais le Verbe semé en lui a étouffé l'ivraie de la discorde, le germe de violence qui cohabitait en lui. Pierre n'a pas pris pas l'épée, il accepte de se laisser laver tout entier par les larmes... Au lieu de choisir la mort, il a choisi douloureusement le repentir puis la vie.


Dans la mort du Christ Pierre a entamé son dépouillement ultime. Aux triple questions du Christ qui répondent à son triple reniement, s'amorce la naissance de la plante fragile et immense qui sera l'Eglise (Jn 21).
« Pierre m'aimes-tu ? »
De Jean 13 à  Jean 21 s'étend la clé qui ouvre et met à jour l'amour de Dieu pour l'homme.
Je l'ai compris dans la chair le jour où j'ai senti le Christ à genoux devant moi. Cette révélation, à Penboc'h un jour de retraite ignatienne il y a une dizaine d'années est le germe ultime de ma vocation de diacre.
Ne soyons pas source de discorde, laissons l'Église entamer le dépouillement final...poussé par l'Esprit qui travaille sans cesse en l'homme pour faire jaillir les semences du Verbe.

Nos cathédrales peuvent être réduites en cendres... le germe divin ne sera pas atteint. La moisson vient, le grain semé germe au fond de l'homme. l'Église est le creuset, le Corps de l'espérance de Dieu, le fruit ultime de son agenouillement et de son dépouillement 
Le dépouillement et l'agenouillement de Dieu est la clé cachée de la parabole. Écoutons le Christ à genoux nous demander « m'aimes-tu ? ». « Supportez-vous les uns les autres avec amour. Ayez à cœur de garder l'unité dans l'Esprit par le lien de la paix » (Ep 4,2-3). N'y a-t-il rien en toi qu'un autre n'ait à supporter ? (1)

(1) Saint Augustin Commentaire sur le psaume Ps 99, 8-9, PL 37, 1275-1276 (Saint Augustin, maître de vie spirituelle; trad. A. Tissot, S.J.; Éd. X. Mappus 1960, p. 115-116 rev.), source  : l'Évangile au Quotidien 




17 juillet 2020

Nudité ultime - Dépouillement 21

Il y a un verset du chapitre 33 d'Exode que je ne cesse te contempler et méditer. Il suit Ex 32, et l'épisode du veau d'or et prépare Ex 34 et la révélation lumineuse du Dieu de tendresse à Moïse, dernière marche des épiphanies avant la Transfiguration.
Ce verset invite à « enlever ses vêtements de fête » (Ex 33,5) (1).
Qu'est-ce à dire ? Si ce n'est entrer dans ce dépouillement qui permet d'aller jusqu'à la vision de Dieu. Quel est le point ultime de ce mouvement, si ce n'est contempler la nudité du Christ dans son premier dépouillement, celui de l'enfant donné, dans le vêtement retiré du laveur de pieds, jusqu'à son dernier dépouillement, un Christ défiguré de l'amour versé, un Christ transpercé par nos violences et nos abandons, un Christ révélé derrière le rideau déchiré du Temple, un Christ lumineux de la grâce jaillissante d'un cœur brisé ?

Le dépouillement de Dieu est le prélude musical de la kénose de l'Église qui ne fait que commencer.
Il s'inscrit dans la dynamique même de la « séparation » entre ciel et terre de Gn 1 ou du « quitter » de Gn 2 où l'homme quitte père et mère pour ne faire qu'une seule chair avec l'aimé(e), et parvenir à cette nudité sans honte de l'être dépouillé qui danse avec autrui et y découvre une autre danse plus essentielle, celle qui le fait parvenir à l'en Christo(2), l'en Christ où le don danse avec son Donateur et devient co-createur de l'amour, passeur, engendrement de l'autre (3) à qui il insuffle l'amour reçu d'ailleurs et qu'il ne peut conserver sans perdre. La manne ne dure pas. Le pain reçu ne persiste que partagé...
La dynamique sacramentelle part de l'aride liturgie pour nous propulser de dépouillement en dépouillement jusqu'au don de soi, l'ultime diaconie...

La danse nuptiale du Christ et de son Église va de dépouillement en dépouillement(4).



(1) cf. L'amphore et le fleuve
(2) Hans Urs von Balthasar développe abondamment ce thème dans la deuxième partie de sa trilogie.
(3) au sens charnel mais surtout au sens spirituel donné par P. Bacq et C. Théobald dans leur Pastorale de l'engendrement...
(4) « Dépouillement » est la web série qui complète la publication récente de « Dieu dépouillé », une exclusivité gratuite de 1200 pages sur fnac.com

Aride liturgie - dépouillement 20

Aride liturgie - dépouillement 20

Combien de fois la liturgie nous rebute, les symboles nous échappent, les gestes passent à côté de nos réalités humaines.

Je suis un des premiers à la décrier et la conspuer, à avoir en horreur ses fastes et ses excès. Et en même temps je dois avouer que parfois l'aridité de ces répétitions, la profondeur de sens de ce qui est prononcé, la face cachée des gestes et des symboles révèlent autre chose que l'apparence et le rideau se déchire (1). Arrière Satan...!

Dans l'aridité d'un chemin du désert (2), dans le dépouillement attendu d'un carême, dans la symbolique d'une misérable hostie offerte, Dieu se fait signe.

Paradoxe et oxymore que cette liturgie que nous détestons souvent sans en chercher le sens caché. Benoît XVI, avant d'être pape avait cette phrase assassine qui interpelle dans l'esprit du christianisme : « le prêtre peut-être un imbécile, le sacrement reste valide » (3) ce qui tempère nos ardeurs jalouses et notre aptitude fréquente à jeter le cœur du symbole avec l'eau du bain.

« Si ce que tu admires est une ombre, une préfiguration, combien grande est la réalité dont l'ombre excite déjà ton admiration. Écoute bien : ce qui s'est réalisé pour nos ancêtres n'était que l'ombre de la réalité à venir. Ils buvaient à un rocher qui les accompagnait, et ce rocher, c'était le Christ. Cependant la plupart n'ont fait que déplaire à Dieu, et ils sont tombés au désert. Ces événements se sont réalisés en figure à notre intention. Tu sais maintenant ce qui a le plus de valeur: la lumière l'emporte sur les ténèbres, la vérité sur la figure, le corps du Créateur sur la manne venue du ciel.(4)

Je dois reconnaître qu'il m'a fallu près de 50 ans de pratique brouillonne et revêche avant de découvrir à travers l'enseignement lumineux d'un moine de Lérins à l'ICP (5) le sens caché de cette échange entre les fidèles et le prêtre qui ouvre la consécration et donne à ce dernier le droit temporaire et fragile de monter à l'autel pour célébrer le mystère eucharistique. (6)

Nous passons bien souvent à côté de l'essentiel. Et pourtant, combien de fois, au cœur d'une assemblée brouillonne, malgré mes réticences et mes distractions Dieu soudain m'a fait signe et s'est révélé soudain dans sa fragilité me faisant tomber à genoux devant lui, en dépit de mon orgueil et de ma suffisance.

« Tu étais là et je ne le savais pas » (7) résonne alors en nous les phrases d'Augustin, alors qu'un « Seigneur je ne suis pas digne » traverse notre esprit et nous découvre l'amour et notre faiblesse mêlée.

Le cléricalisme est-il le prix à payer, la pilule amère de ce mystère qui se cache derrière des années de tradition accumulées...?

L’eucharistie est le sommet d’une dynamique qui commence et rejoint l’agir. Elle cristallise en un temps et un lieu un double mouvement de Dieu vers l’homme, agenouillement sans fin et de l’homme vers Dieu, agenouillement rare et fragile, comme celui auquel Etty Hillesum s’est retrouvée conduite à adopter (8) suite au long travail intérieur de Dieu.


L’Esprit Saint vient au secours de notre faiblesse,
car nous ne savons pas prier comme il faut. » (Rom 8, 26)

(1) cf. Le rideau déchiré ou mon livre fleuve « pédagogie divine » in « Dieu dépouillé » gratuit sur Fnac.com
(2) cf. Le chemin du désert ibid.
(3) je cite de mémoire
(4) Ambroise de Milan, traité sur les mystères, source office des lectures du 16/7, 15ème semaine du temps ordinaire
(7) confessions, chap. VIII
(8) cf. Une vie bouleversée

Le titre de cet article m’a été partiellement inspiré par la méditation de François Cassingena-Trévédy sur l’aridité in « La voix contagieuse »

15 juillet 2020

Dépouillement 18 - baptême du Christ (Matthieu 3, Mc 1, Luc 3)

 S'il y a un dépouillement à contempler, c'est peut-être celui du baptême du Christ. Le voici en effet qui s'avance, se met à nu pour se plonger dans l'eau du monde, se plonger dans le monde. Dénuement total (Kénose) que celui d'un Dieu qui accepte de plonger dans l'eau du Jourdain jusqu'à nous rejoindre dans ce qu'il y a de plus humain. Dénuement premier et symbolique de Celui qui a accepté de mourir à sa nature divine pour rejoindre notre humanité dans ces eaux usées, dans ces eaux de la mort, pour nous permettre de renaître dans l'Esprit (cf. Jn 3) jusqu'au déchirement des cieux...

Plongée jusqu'à l'homme, agenouillement sublime de celui qui préfigure l'agenouillement final qui le portera à la croix.

Il y a dans le déchirement du ciel, la même symbolique que le déchirement du voile du Temple (cf. Mc 15, 38) et le cri divin qui reconnaît dans le nouveau baptisé la filiation première « Celui ci est mon Fils bien aimé en qui j'ai mis tout mon amour » est celui qui annoncera la résurrection et résonne dans le « c'est pourquoi » de l'hymne au Philippiens (cf. 2, 12 sq).

Le baptême du Christ est le prélude symphonique de la Croix. Et la colombe qui étend ses ailes est la symbolique synoptique du jaillissement de l'eau et du sang qui inonde encore le monde de sa grâce.

Symphonie de l'Évangile que cette révélation multiple qui rime avec ce que nous perpétuons dans le baptême de nos enfants.

Entrer dans le Jourdain à la suite du Christ c'est accepter de venir laver ce qui nous empêche d'aimer, c'est renoncer à tout ce qui fait obstacle à notre vocation originelle, c'est nous laisser modeler dans la forme originale et nue de l'homme créé par Dieu et pour Dieu.

Se laisser baptiser à nouveau dans chacun des lavement des pieds que le Christ nous propose au travers du sacrement de la réconciliation c'est accepter de laisser laver « tout entier »(cf. Jn 13), nous séparer de ce qui nous retient par le péché à ce qu'il y a de plus humain pour rentrer enfin dans la danse symphonique de Dieu avec l'homme, pour rentrer dans la vie en Christ, dans l'Esprit.

Renaître est à ce prix...

PS : méditation à la suite de « la voix contagieuse », chapitre 4, de François Cassingena-Trévédy, op. cit.
Dans la foulée et en 17ème complément de mon livre « Dieu dépouillé »

13 juin 2020

Dépouillement et danse - Saint Sacrement - Marie Noēlle Tabut

Projet 2

Que cherchez vous quand vous vous présentez à la table du Christ ?

La contemplation de cette fête particulière du Saint Sacrement n'est pas dans la quête d'un remède magique à tous nos maux, ni dans la vénération d'une idole. Elle rejoint bien au contraire une dynamique (*) particulière, toute intérieure, proche de cette entrée dans la danse que j'évoquais dimanche dernier.

Il y a, pour cela plusieurs mouvements.

Notre quête passe, d’abord,  par « la reconnaissance de notre pauvreté fondamentale (...) préalable à toute rencontre de Dieu en vérité : quand nous nous abandonnons à son action, alors il peut nous combler. Si nous cessons de croire que nous avons des forces par nous-mêmes, alors nous découvrons des forces insoupçonnées, qui sont les siennes. L'Esprit Saint nous a été donné pour cela. Et la fête du Corps et du Sang du Christ nous rappelle que Jésus nous propose beaucoup mieux, c'est d'habiter en nous.(1) ».

Que veut dire manger le corps ?
C’est peut-être entrer dans le mystère qui nous unit à ce mouvement particulier qui vient de Dieu et y retourne, comme ce Verbe qui ne descend pas en nous sans le faire vibrer intérieurement. De même qu’un micro ondes fait entrer en résonance les atomes pour les réchauffer, Christ vient faire vibrer en nous ce qu’il a déposé en nous, l’Esprit de Charité.

Il faut donc entrer dans cette danse particulière où nos mouvements se laisse conduire par la musique de l'Esprit, chercher avant tout cette harmonie et cette unité qui fait de nous un Corps.
« La coupe d'action de grâce que nous bénissons est communion au sang du Christ ; le pain que nous rompons est communion au corps du Christ. 1 Co 10, 16 »

« Le mot que Paul emploie, « koinônia » en grec, évoque un lien d'intimité, d'appartenance, une solidarité profonde. »(2)

Entrer dans cette danse particulière où tout est don. Se dépouiller de nous-mêmes, de ce qui nous retient au monde (au sens paulinien) pour contempler et s’inscrire dans la dynamique trinitaire d'un Père qui s'efface derrière son Fils, d'un Fils qui se donne pour nous laisser parvenir à la musique de Dieu que l’on appelle Esprit.

Contempler « le mystère de Jésus à la fois homme et Dieu : en Lui, Dieu propose son amour, en lui, l'humanité répond par l'action de grâce. En Lui Dieu parle, se révèle (il est le Verbe, la Parole du Père) ; en Lui l'humanité répond à la Parole. En Lui, Dieu se donne ; en Lui l'humanité accueille le don de Dieu. » (,,,) C'est là que Pierre a répondu « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as des paroles de vie éternelle ».

Voilà le paradoxe de la foi : ces paroles sont humainement incompréhensibles et pourtant elles nous font vivre. Il nous faut suivre le chemin de Pierre : vivre de ces paroles, les laisser nous nourrir et nous pénétrer, sans prétendre les expliquer. Il y a là déjà une grande leçon : ce n'est pas dans les livres qu'il faut chercher l'explication de l'Eucharistie ; mieux vaut y participer, laisser le Christ nous entraîner dans son mystère de vie.
Le mot qui revient le plus souvent dans ce texte, c'est la vie : « Le pain que je donnerai, c'est ma chair, (c'est-à-dire ma vie) donnée pour que le monde ait la vie. »

Comprendre cela c'est aussi percevoir le sens nouveau donné par le Christ au mot sacrifice. Entrer dans la « pédagogie des prophètes : pour eux, l'important, bien plus que l'offrande elle-même, c'est le coeur de celui qui offre, un coeur qui aime. Et ils n'ont pas de mots trop sévères pour ceux qui maltraitent leurs frères et se présentent devant Dieu, les mains chargées d'offrandes. « Vos mains sont pleines de sang » dit Isaïe (sous-entendu « le sang des animaux sacrifiés ne cache pas aux yeux de Dieu le sang de vos frères maltraités ») (Is 1,15). Et Osée a cette phrase superbe que Jésus lui-même a rappelée « C'est la miséricorde que je veux et non les sacrifices » (Os 6,6). Michée résume magnifiquement cette leçon : « On t'a fait savoir, ô homme, ce qui est bien, ce que le SEIGNEUR réclame de toi. Rien d'autre que de respecter le droit et la justice et de marcher humblement avec ton Dieu » (Mi 6,8).j

L'étape finale de cette pédagogie(**), ce sont les fameux chants du Serviteur du deuxième Isaïe : à travers ces quatre textes, on découvre ce qu'est le véritable sacrifice que Dieu attend de nous ; sacrifier (faire du sacré), entrer en communion avec le Dieu de la vie, ce n'est pas tuer ; c'est faire vivre les autres, c'est-à-dire mettre nos vies au service de nos frères. Le Nouveau Testament présente souvent Jésus comme ce Serviteur annoncé par Isaïe ; sa vie est tout entière donnée pour les hommes. Elle est le sacrifice parfait tel que la Bible a essayé de l'inculquer à l'humanité. « Le pain que je donnerai ; c'est ma chair donnée pour que le monde ait la vie ». Et désormais, dans la vie donnée du Christ, nous accueillons la vie même de Dieu : « De même que le Père qui est vivant m'a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même aussi celui qui me mangera vivra par moi ».(4)

Entrer dans la danse de Dieu, c'est se dépouiller de tout ce qui n'est pas don. Loin d'un sacrifice stérile ou d'une réponse forcée il y a là un pas différent à faire, une docilité à Dieu, un laisser faire, un décentrement qui laisse Dieu agir, jusqu’à devenir ce que saint Ignace d’Antioche appelle le « froment de Dieu »(5)

Nous sommes corps, lorsque notre être tout entier est don, que notre vie est don, que nous nous laissons saisir (Ph 3) par le Christ dans ce don pour autrui, loin de toute introspection stérile. 

Et pour cela il nous faut contempler ce dépouillement même de Dieu, dans dynamique même de Philippiens 2 et 3, comprendre que le don du corps est l’ultime humilité de Dieu à laquelle Dieu nous invite. Se laisser saisir par cette danse du don ( danse kénotique des personnes divines) pour ne plus faire qu’un avec cet amour donné et devenir amour. « Devenez ce que vous recevez », nous suggère saint Augustin. Chemin inaccessible et en même temps unique et essentiel auquel nous sommes invités, banquet ultime, danse des anges...



(1 à 4) Marie Noëlle Tabut, commentaires des textes de la fête du Saint Sacrement cité dans l'application liturgie sur iOS cf. https://eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/la-celebration-de-la-foi/le-dimanche-jour-du-seigneur/commentaires-de-marie-noelle-thabut/500513-commentaires-du-dimanche-14-juin-2/

(*) cf, aussi la dynamique sacramentelle, mon livre éponyme 

(**) voir aussi danse trinitaire et pédagogie divine, in Dieu dépouillé sur Fnac.com
(5) cf. le texte intégral dans mon billet de cette semaine 

Rappel : l'interêt de ce blog, désormais vieux de 15 ans, réside surtout dans l'interactivité des balises (tags) qui comptent maintenant près de 2.500 billets 

11 juin 2020

François Cassingena-Trévédy - réflexion sur l’Eucharistie

S'il y a un auteur qui a traversé ma vie et m'enchante et que je voudrais vous faire découvrir, c'est bien François Cassingena-Trévédy. Je l'ai découvert dans « pour toi quand tu pries » un livre que je considère comme une révélation de la spiritualité du XXIeme siècle et que j'ai savouré délicatement pendant plus de six mois. J'en ai déjà publié quelques verbatim sur mon blog il y a deux ou trois ans. Il m'a inspiré dans l'écriture de plusieurs billets sur ce que j'appelle maladroitement « l'amour en toi » - contemplation d'un Dieu caché au fond de nous et qui nous appelle à aimer.
Il reste parfois difficile à lire, tant ses propos sont denses (j'aimerais le traduire pour le rendre plus accessible à la « périphérie »).
Je lui dois aussi le titre de mon dernier recueil « Dieu depouillé » à la suite d'un article paru dans Etudes.
Il vient de faire paraître une série de méditations qui m'enchante, notamment celle-ci, bien en phase avec mon livre sur « la dynamique sacramentelle » - où je cherchais à développer l'idée portée par Theobald d'une dimension plus large et dynamique des Sacrements - loin du seul rite et ancré dans l'éthique d'une responsabilité. Sa clairvoyance et la pertinence de son analyse mérite le détour. Je vous laisse suivre le lien.

https://m.facebook.com/notes/fran%C3%A7ois-cassingena-tr%C3%A9vedy/de-la-fabrique-du-sacr%C3%A9-%C3%A0-la-r%C3%A9volution-eucharistique-quelques-propos-sur-le-ret/3198309117060239/

23 mai 2020

Gloire et dépouillement - 9 - homélie du 7eme dimanche de Pâques année A

Projet 5 pour mon homélie du 7eme dimanche de Pâques - Année A



Nous sortons d’un long confinement et cette première messe semi publique s’inscrit dans la prière portée par les disciples évoquée en première lecture.

Une question se pose :
Quelle est cette gloire dont nous parle Jésus et qu'il semble demander ?

Dans notre star système contemporain le mot « gloire » accroche et il faut un sacré travail intérieur pour remettre ce texte de Jean 17 dans son contexte.

Une première lecture pourrait nous permettre de dire que la gloire du Christ est la lumière de l'amour qui devient enfin visible au cœur même de son dépouillement le plus total.


La gloire du Christ c'est la lumière du ressuscité qui transparaît dans la Croix.
La gloire du Christ c'est l'amour qui se dévoile derrière le rideau déchiré du Temple.
La gloire du Christ c'est le fleuve qui jaillit de son cœur transpercé.
La gloire du Christ c'est l'amour visible dans la charité active en ce monde.
La gloire du Christ c'est le chrétien qui se penche vers le faible et le démuni.
La gloire du Christ c'est l'espérance qui jaillit après la nuit...
La gloire du Fils c’est de révéler l’amour du Père

« Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie.   Ainsi, comme tu lui as donné pouvoir sur tout être de chair, il donnera la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés. (Jn 17)

Cet amour qu’il dévoile est source de vie éternelle et en nous transmettant ce souci de l’amour, il nous enlève le poids de la mort. En nous donnant foi, espérance et charité il nous donne accès à la vie.

Qu’est-ce donc que cette gloire ?

La lettre de Pierre, notre deuxième lecture aujourd’hui nous donne une autre clé de lecture qui n’est pas contradictoire mais complémentaire :  « quand sa gloire se révélera. Si l’on vous insulte pour le nom du Christ, heureux êtes-vous, parce que l’Esprit de gloire, l’Esprit de Dieu, repose sur vous. »

La gloire de Dieu, n’est-ce pas l’Esprit Saint (1) qui jaillit du dépouillement total du Fils. Pour Jean, en effet la Pentecôte est déjà là. 
L’Esprit fait jaillir en nous l’amour.
L’Esprit donne vie. 

    Or, la vie éternelle,
c'est qu'ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu,
et celui que tu as envoyé,
Jésus Christ.
    Moi, je t'ai glorifié sur la terre
en accomplissant l'œuvre que tu m'avais donnée à faire.
    Et maintenant, glorifie-moi auprès de toi, Père,
de la gloire que j'avais auprès de toi avant que le monde existe.
    J'ai manifesté ton nom
aux hommes que tu as pris dans le monde pour me les donner.
Ils étaient à toi, tu me les as donnés,
et ils ont gardé ta parole.
    Maintenant, ils ont reconnu
que tout ce que tu m'as donné vient de toi,
    car je leur ai donné les paroles que tu m'avais données :
ils les ont reçues,
ils ont vraiment reconnu que je suis sorti de toi,
et ils ont cru que tu m'as envoyé.
    Moi, je prie pour eux ;
ce n'est pas pour le monde que je prie,
mais pour ceux que tu m'as donnés,
car ils sont à toi.
    Tout ce qui est à moi est à toi,
et ce qui est à toi est à moi ;
et je suis glorifié en eux.
    Désormais, je ne suis plus dans le monde ;
eux, ils sont dans le monde,
et moi, je viens vers toi. » Jean 17

À travers ce discours transparaît cette relation filiale particulière qui est aussi dépouillement :
tout ce que tu m'as donné vient de toi, (...) Tout ce qui est à moi est à toi,
et ce qui est à toi est à moi ;

On parvient là à ce que les Pères de l’Église  appellent la périchorèse des personnes divines, puisque du dépouillement du Père, puis du Fils jaillit la gloire de L’esprit. C’est ce que j’appelle la danse trinitaire (2) qui n’est qu’amour et effacement.

Dans le mouvement de Dieu vers l’homme nous découvrons ce souci de venir jusqu’à nous pour porter la lumière. La gloire de Dieu, c’est finalement le don que Dieu de nous fait du Fils et de l’Esprit, loin de la gloire humaine, c’est une invitation à la danse que la communion eucharistique va nous permettre de rejoindre. Au terme d’un long jeûne vous allez pouvoir vivre aujourd’hui de cette gloire, participer à cette danse, non pas pour la mettre sous le boisseau mais pour qu’elle rayonne par votre charité et votre foi. En entrant dans la danse vous «  reconn[aissez] que tout ce que [le Père a donné au Fils] vient de [lui] puisqu’il affirme avoir  « donné les paroles que tu m'avais données :
ils les ont reçues, ils ont vraiment reconnu que je suis sorti de toi, et ils ont cru que tu m'as envoyé » (Jn 17).

Que cette reconnaissance soit pour tous, foi, espérance et charité

(1) cf. la citation complète de Grégoire de Nysse dans le billet suivant.
(2) voir plus haut Dieu dépouillé et danse trinitaire.

21 mai 2020

Dieu dépouillé - 8 - Méditation sur l’ascension

Version 2
La clé de lecture de mes lectures pastorales se trouve dans l'humilité de Dieu (la kénose des théologiens). D'où le titre un peu provocateur de Dieu dépouillé de mon dernier opus (1)  - inspiré par un texte de François Cassingena-Trévédy publié récemment dans Etudes (cf. billet récent) sur le dépouillement. Cette humilité est le cœur du kérygme, inaccessible pour l'homme que je suis, et pourtant but à saisir (au sens de Ph. 3) et ligne de conduite bien difficile.

Elle est aussi une clé de l'ascension que nous fêtons aujourd'hui, comme le montre ce petit extrait du docteur angélique découvert ce matin sur l'Évangile au Quotidien alors que je me trouvais bien sec sur l'ascension : « le Christ méritait d'être au ciel à cause de son humilité. En effet, aucune humilité n'est aussi grande que celle du Christ, car alors qu'il était Dieu, il voulut devenir homme ; alors qu'il était Seigneur, il voulut prendre la condition de l'esclave, se rendant obéissant jusqu'à la mort (cf. Ph 2,7) et il descendit jusqu'en enfer : aussi mérita-t-il d'être exalté jusqu'au ciel, au trône de Dieu. L'humilité en effet est la voie qui conduit à l'exaltation. « Celui qui s'abaisse, dit le Seigneur, (Lc 14, 11) sera élevé, et saint Paul écrit aux Éphésiens (4, 10) : « Celui qui est descendu, c'est le même qui est aussi monté par-delà tous les cieux. »(2).
Pour comprendre cette affirmation il faut remonter un peu plus haut dans le texte cité «  Les saints aussi montent au ciel, cependant ils n'y montent pas de la même manière que le Christ ; le Christ en effet s'est élevé aux cieux de sa propre puissance, mais les saints s'y élèvent comme entraînés par le Christ. Aussi lui disons-nous avec l'épouse du Cantique (1, 3) : « Seigneur, entraîne-nous à ta suite. » On peut dire également que personne ne monte au ciel si ce n'est le Christ. Le Christ en effet est la Tête de l'Église, et les saints ne montent au ciel que parce qu'ils sont ses membres. »(3).
Le mystère de l'ascension s'inscrit dans la tradition hébraïque de l'ascension d'Élie (4) et dans la méditation des anges qui montent et descendent de l'échelle de Jacob (5) et notamment de l'interprétation donnée par le targum (6).
Cette dimension verticale est soulignée par Thomas d'Acquin dans le même texte « le Christ tire son origine de Dieu, qui est au-dessus de tout. Jésus dit en effet à ses Apôtres (Jn 16, 28) : « Je suis sorti du Père et je suis venu au monde : maintenant je quitte le monde et je vais au Père. » (7)
Cet axe vertical est surtout à contempler pour moi dans cet axe particulier de la kénose c'est pourquoi il faut relire Thomas dans le bon sens, pour percevoir in fine l'insistance sur le dépouillement comme clé d'interprétation de l'ensemble.
Paul le dit très bien dans Ph. 2, c'est parce qu'il c'est abaissé que Dieu lui a donné le nom (de Jésus c'est-à-dire de Dieu sauveur).
Il nous reste aujourd'hui à méditer la dernière phrase du Christ qui est notre espérance : « je serai avec vous » et contempler le triple don qu'il nous fait dans l'Écriture, l'eucharistie partagée et l'Esprit déposé en nous par les sacrements reçus du baptême et de la confirmation.

Alors, dans la dynamique même de son dépouillement, pourrons-nous le laisser « transformer notre corps humilié, en le configurant à son corps glorieux par l’opération qui le rend capable de tout s’assujettir.» Philippiens‬ ‭3:21‬

(1) cf. sur Fnac.com en téléchargement gratuit
(2) Saint Thomas d'Aquin, Commentaire du Credo (Le Credo; trad. par un moine de Fontgombault; collection Docteur Commun; Nouv. éd. latines, 1969; p. 137.139; rev.)
(3) ibid.
(4, 5, 6) Dieu dépouillé
(7) St Thomas, op. cit.

19 mai 2020

Un Dieu dépouillé - chemins de révélation

Pourquoi ?
Comment ?
Pourquoi ce mal qui déferle sur le monde ?
Où es-tu mon Dieu ?

Ces questions nous ne cessons de les poser à la suite de Job...

Et la seule réponse qui nous est vraiment donnée reste le silence, un Dieu dépouillé de toute puissance et crucifié sur la Croix et un livre immense et bien difficile d'accès que l'on nomme Bible...

Comment Dieu se révèle à nous ?

Cette nouvelle édition numérique gratuite de 1279 pages rassemble en un seul jet deux autres gros recueils publiés sous les titres de Pédagogie divine et Chemins d'Evangile. Elle rassemble une contemplation de la Bible où transparaît le chemin d'une révélation silencieuse d'un Dieu qui s'agenouille et se dépouille devant l'homme pour l'appeler à aimer.

Dieu dépouillé est le sommet des 18 lectures pastorales de l'auteur. Ces méditations de l'auteur viennent en écho avec les nombreuses lectures en équipe de terrain, mais aussi les commentaires des pères de l'Église et de théologiens plus modernes qu'il a découvert et commenté notamment depuis 15 ans dans son carnet spirituel intitulé « chemins de lecture ».



Le but recherché par cette publication n'est pas tant d'apporter des réponses mais d'accompagner ceux qui cherchent à travers la lectio divina (lecture de la Parole) une voie de méditation et de conversion intérieure qui est l'histoire d'une vie.

Elle permet aussi d'insister sur cette facette particulière de l'humilité de Dieu (pour reprendre le titre d'un essai de François Varillon) qui semble la réponse adéquate à toutes ces questions actuelles, dans la dynamique même de Philippiens 2 et de ce que l'on appelle la kénose ou le dépouillement de Dieu.

Parce que ce chemin n'appartient à personne, il est ici disponible gratuitement au format ebook (et à prix coutant en deux volumes sur d'autres plateformes comme Amazon,... etc.).

Il se complète et s'entrecroise avec d'autres volumes de lectures pastorales, cette longue série de manducation très personnelles de la parole, sans prétention, écrites surtout à la lumière des éclairages des pères de l'Église et de mes lectures diverses, notamment de J. Moingt, W. Kasper, J. Moltmann, J. Meier, B. Sesboué, K. Rahner, C. Theobald ou l'incontournable Hans Urs von Balthasar.
Ces tomes intègrent un certain nombre de redondances mais constituent chaque fois des approches particulières de la Bible. Voici l'enchaînement chronologique de ses essais :

  1. A genoux devant l'homme, (Jean) 2012
  2. Chemins de miséricorde, (Luc) 2013
  3. Chemins d'Eglise (actes des apôtres)
  4. Serviteur de l'homme, kénose et diaconie (lettres de Paul) 2014
  5. Sur les pas de Marc, 2015
  6. Sur les pas de Jean, 2015
  7. Chemins croisés (Matthieu), 2015
  8. Chemins d'Évangile (Les 4), 2015
  9. Le chemin du désert (de Gn et Ex à Mat 4 et Jn 21)
  10. Nouveau Testament, tome 3 - autres lettres)
  11. L'humilité de Dieu, tome 11 - Humilité et miséricorde (tome 1)
  12. Décentrement et communion, - Humilité et miséricorde (tome 2)
  13. Miséricorde, un chemin en Église, - Humilité et miséricorde (tome 3)
  14. Lire l'Ancien Testament, tome 1 - une lecture pastorale des livres d'Osée et de la Genèse, 2016
  15. Dieu n'est pas violent, lire l'Ancien Testament, tome 2 (à partir des tomes 10,11 et 19)
  16. Chemins de prière, nouvelle édition - lire l'Ancien Testament, tome 3 (les psaumes)
  17. Pédagogie divine - Chemin de lecture pastorale (614 p.)
  18. Le rideau déchiré - nouvelle édition revue de Sur les pas de Marc (extrait du tome 17)
En lisant Dieu agenouillé puis les tomes 3, 4, 10, 11, 12, 13, 9, 15, 16 vous avez plus ou moins l'intégrale. Mais l'ordre de lecture est volontairement non imposé...Vous pouvez aussi commencer par le 5, le 9, le 14 ou le 18 et voir ensuite...

Pour mémoire d'autres titres plus anciens nourrissent ces contemplations :
  • Le troisième arbre
  • Retire tes sandales
  • La danse trinitaire
  • Le bruit d'un fin silence
  • Dieu de faiblesse
  • Chemins de liberté
  • Cette église que je cherche à aimer
  • L'amphore et le fleuve...
  • Quelle espérance pour l'homme souffrant
  • Où es-tu mon Dieu
Dieu dépouillé est aussi une contemplation sur l'Église, sa façon d'être dans le monde. Elle rejoint l'attitude du Christ qui retire son vêtement au lavement des pieds.


PS : Tous mes essais théologiques ont vocation à être mis en ligne gratuitement  (il me faut juste du temps éditorial). Vous pouvez néanmoins manifester votre soutien en faisant un don en ligne à ma paroisse, sainte Thérèse en vallée d’Avre (Diocèse de Chartres), petite paroisse bien pauvre en ce moment du fait du confinement en cliquant ici : https://donner.catholique.fr/quete/~mon-don?_cv=1