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23 décembre 2019

Noël - Homélie de la messe du jour - au fil de Jean 1 - kénose 148

Notes pour l'homélie - version 4

Quel est l'enjeu de Noël ?
Il n'est pas uniquement la fête des familles que notre société de consommation entretien, non sans un certain intérêt.
Il n'est pas non plus uniquement dans la naissance d'un enfant il y a deux mille ans. Il nous révèle quelque chose d'immense : le plan de Dieu sur l'homme. C'est ce que les textes d'aujourd'hui nous dévoile et je voudrais prendre le temps de les relire et les commenter avec vous...

Isaïe 52 nous parle d'une annonce toute particulière, de cette joie du salut qui vient. Avons nous cela à cœur, porter la joie d'un Dieu sauveur ?

Dans le début de sa lettre aux hébreux Paul insiste à son tour sur ce chemin de Dieu vers l'homme et il n'est pas anodin de le rapprocher d'une parabole que vous connaissez bien, celle de la vigne (à développer)

Dieu se livre mais il ne le fait pas avec trompette et tremblement de terre, comme le croyait les. Générations passées. Il se livre dans la faiblesse et la fragilité d’un enfant...

C'est dans ce contexte que le début de l'évangile de Jean peut être lu...

« Le Verbe s'est fait chair, une chair que nous puissions voir, afin que soit guéri en nous ce qui pourrait voir le Verbe » nous dit saint Augustin dans son commentaire sur la première lettre de Jean [source AELF]

L'amour vient nous visiter ainsi de l'intérieur et c'est dans la faiblesse et la dépendance de l'Enfant que se révèle en nous ce qu'il y a corriger, ce qui n'est pas digne d'être enfant, ce qui n'est pas empli de confiance et d'amour. 

Qu'est-ce que le Verbe ?
Le logos grec [la raison ou la logique du monde) n'est qu'une partie de la réponse. Est-ce la Sagesse de Dieu ? Non, pas uniquement. N'est-il pas à la fois amour et créateur, désir et action, danse et silence, cercle et triangle, inaccessible et proximité ?
Le mot théologique le plus interpellant est tension.
Car c'est au sein de cette tension entre les opposés égrenés plus haut que se révèle le Dieu chrétien.
Ce que nous dévoile Noël c'est l'amour de Dieu en actes.
Il faut entendre Dieu à la fois comme créateur et amour pour saisir qu'il est infini, mais aussi retenue, silence et humilité (1).

Le grec des premiers versets de Jean 1 reprend et conjugue le mot « pros ». Le Verbe, ce désir de Dieu en actes, ce « dire » qui devient « dit » (2) sans se perdre est tension, tourné vers, pro-jection, pro-position, pro-action de Dieu vers l'homme (3).

Dans ce "pro" se souligne à la fois l'amour in-transitif et ex-tourné de Dieu. Les pères de l'Église parlent de circumincession c'est-à-dire de danse(4) entre les personnes divines. En se "tournant vers", elles ne cessent de se pro-jeter au devant de l'autre et en cela d'être amour.

Que nous dit Noël ?
Alors que Dieu pourrait être pouvoir et gloire, il se fait faiblesse et humilité. « Il n'a pas retenu le rang qui l'égalait à Dieu, mais il s'est dépouillé, prenant la condition de serviteur » (Philippiens 2).

Dans sa faiblesse l'enfant Jésus conjugue grandeur et humilité, pureté et simplicité. Le Verbe qui se fait chair danse pour l'homme sa plus belle création. Il se dévoile amour.

Dans son dépouillement (kénose) (1) le dire devient dit (2) sans perdre son intention. Il est agenouillement (3).

Noël nous révèle le projet de Dieu : « Ce projet de la création de l'univers, non sous forme d'un plan d'organisation de toutes choses, mais d'une semence de liberté et d'amour jetée dans l'univers en formation pour que naisse en son sein une créature spirituelle avec qui Dieu pourrait entrer en communication intime, semence que Dieu confiait au monde (...) un appel, un souhait, une parole, un logos, l'invitation à naître adressée à un Premier-né destiné à ramener à Dieu toute sa famille humaine" (5) tout cela donne du sens à notre aujourd'hui. 

Le don de Dieu est appel... Il s'origine dans un don (Gn 1 et 2) et l'appel d'un "où es-tu ?" (Gn 3) qui est plus qu'un cri, une plainte d'un Dieu qui aime sa création et n'a pour but que de le ramener à lui... 

Et notre chemin ?
Il est aussi agenouillement (3). Non pas avilissement ou négation de nous mêmes mais décentrement et don, imitation et humilité, miséricorde et simplicité.

Ce petit homme, cet enfant fragile est chemin de vérité et d’amour.

Aujourd’hui nous est né un sauveur, verbe et gloire de notre Dieu et pourtant faible semence qui nous invite à aimer.
Que cette lumière et cette vie confiée par le Seigneur vienne inonder vos vies de grâce et de paix.

(1) cf. mon livre Kénose, humilité et miséricorde
(2) cf. Emmanuel Lévinas, Autrement qu'être 
(3) cf. À genoux devant l'homme
(4) cf. La danse trinitaire in L'amphore et le fleuve
(5) Joseph Moingt, L’esprit du christianisme, Paris, Temps présent, 2018, pages finales

13 novembre 2017

Recevabilité de l’Évangile

Il faut que Christoph Théobald insiste trois fois sur ce mot (1) pour que je prenne conscience de son importance. Et pourtant c'est bien pour moi une question essentielle de pastorale, mais plus largement de tout le christianisme. À quel point ouvrons-nous notre porte à l'Evangile ?
Comment creuser en l'homme ce désir, ce tressaillement intérieur qui rend sa terre féconde à la semence du Verbe ?
Notre mission d'évangélisation ne doit-elle pas s' auto-réguler pour accueillir et entendre ces freins à l'évangile ? C'est l'enjeu d'une pastorale du seuil (2).

Que nous dit Christoph Théobald ? Il reprend les termes mêmes du pape François dans EG 39 : «  L’Évangile nous invite avant tout à répondre au Dieu qui nous aime et nous sauve, le reconnaissant dans les autres et sortant de nous -mêmes pour chercher le bien de tous ». Soulignant cette reconnaissance de Dieu en autrui, Christoph Théobald note aussi l’importance pour François de la force et de l’attrait de l’annonce comme sa notion de « parfum de l’Évangile ».

Rien ne sert de servir une morale si on ne la fonde sur un désir profond d’adhérer à la personne de Jésus-Christ et de croire en sa force.

(1) Christoph Théobald, Urgences Pastorales, Paris, Bayard, 2017, p. 94ss, 175ss et 208ss
(2) cf. mon essai éponyme

07 octobre 2007

Esprit hors église

Ce que j'écrivais plus haut n’exclut pas ceux qui sont hors de l’Église. Pour Hans Urs von Balthasar, l’Esprit se manifeste dans tous les peuples : « de même qu’il y a chez eux un logos spermatikos, il faudrait postuler en eux quelque chose comme un pneuma spermatikon » (1)

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, III – L’Esprit de Vérité p. 15

18 juin 2007

Pépites - II

Il a fallu toute la réaction moderne contre le poids de la tradition augustinienne pour dégager des restrictions qui la contraignent encore chez saint Thomas, l’idée que l’on puisse espérer pour les autres, quels qu’ils soient. Thérèse de Lisieux y arrive au prix d’un geste héroïque de consécration totale de la miséricorde divine : cette espérance sans limites, elle ne pensait pas pouvoir l’acheter pour moins cher que par cette substitution en faveur des pécheurs ».

« L’espérance ne peut qu’attendre dans l’obscurité le miracle qui s’est déjà accompli à la mort du Christ. » (1)

Pour Hans Urs von Balthasar, il est étonnant que l’on n’ait pas rapproché la phrase d’Heidegger : « La mort est la possibilité qui appartient le plus à l’existence. (...) Il s’agit là de l’être du Dasein pur et simple. » (2) de celle de Grégoire de Nysse « c’est à cause de la mort que Dieu a pris sur lui de naître ». (3)

(1) Balthsar, ibid p. 291-293
(2) Sein und Zeit 1927, p. 263
(3) Discours catéchétique 32,3

17 juin 2007

Pépites

Au bout de vingt ans de culture des âmes, au chevet des couples en naissance, je m’aperçois qu’il y a en chacun une petite pépite enfouie. A partir d’une histoire très humaine, dans l’aléa des rencontres et de la vie qui bouillonne en l’homme, Dieu trouve des germes de vie et n’a de cesse de les faire grandir. Certes la tâche est souvent ardue, mais toute histoire à son espérance, inscrite au cœur même de son humanité la plus primitive. Chaque histoire d’amour dispose d’un potentiel divin qu’il ignore.

Et dans une certaine mesure, comme pour beaucoup d’histoires, l’enjeu est celui de la parabole du semeur. Laisserons nous pousser la graine ?

Ce qui est certain, c’est qu’il y a toujours une espérance pour le croyant (...) car disait saint Paul, « l’espérance ne déçoit pas » (Rm 5,15).