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06 juin 2016

Un avec lui

Dans une longue diatribe, Balthasar(1) critique cette pratique du baptême des tous petits qui date pourtant du troisième siècle. Il y a pour lui en effet un non sens d'appeler sacrement un acte où la personne ne peut consentir à s'unir avec son Dieu. A l'inverse, il souligne combien le sacrement de réconciliation est au coeur de la dynamique sacramentelle tant l'homme qui s'engage dans le chemin de la conversion, de l'humilité et de la miséricorde rejoint intérieurement le coeur de Dieu. 
On peut méditer dans ce sens cette réceptivité particulière de la Vierge, que l'Église fête le 4 juin.  Elle a fait de sa vie une offrande intérieure. 

Écoutons Justinien sur ce thème :"elle était comblée de joie, merveilleusement fécondée par l'Esprit, et elle s'élançait vers Dieu tout en demeurant dans l'humilité. De tels progrès dans la grâce divine élèvent jusqu'aux sommets et transfigurent de gloire en gloire, (...) habitée par l'Esprit et par son enseignement, elle obéissait toujours et en toutes choses aux ordres du Verbe. Elle n'était pas guidée par son sentiment personnel, pas sa propre décision ; mais ce que la sagesse suggérait intérieurement à sa foi, elle l'accomplissait extérieurement pas son corps. Il convenait bien à la divine Sagesse, qui bâtissait, pour y habiter, la demeure de l'Église, il lui convenait d'employer Marie la toute sainte pour procurer l'observance de la loi, la purification de l'âme, l'idéal de l'humilité et le sacrifice spirituel. Imite-la, âme fidèle. Pour te purifier spirituellement et pouvoir te délivrer de la maladie du péché, entre dans le temple de ton cœur. Dieu y regarde toute affection plus que notre ouvrage, en tout ce que nous faisons. Aussi nous pouvons, par le désir de la contemplation, nous jeter en Dieu pour ne penser qu'à lui ; ou bien nous pouvons chercher notre équilibre par le progrès des vertus et des activités profitables à notre prochain ; en tout cela n'ayons pas d'autre mobile que l'amour de Christ. Voilà quel est le sacrifice spirituel de purification qui est agréable à Dieu. Il ne s'accomplit pas dans un temple matériel, mais dans le temple de notre cœur où le Christ Seigneur fait avec joie son entrée." (2)

À sa suite,  cherchons à aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme et de toutes nos forces (Mc 12,30), a toujours voulu tout ce que Dieu veut, à mettre toute notre joie en  Dieu.  "Il est notre chef, notre tête, et nous sommes ses membres (Col 2,19) et par conséquent que nous ne sommes qu'un avec lui" (3)

( 1) Hans Urs von Balthasar, GC1,  op Cit p. 490ss
(2) Sermon de saint Laurent Justinien
(3) d'après une méditation de Jean Eudes, Le Cœur admirable, livre 9, ch. 4 


13 juin 2015

Un véritable décentrement

On se préoccupe trop de savoir si l'on est à la hauteur de la tâche.  Le véritable décentrement,  c'est de percevoir que l'on n'est ni homme,  ni femme, ni juif, ni esclave mais bien " serviteur de l'homme,  de la joie et du Verbe". (1)

Dans un sermon célèbre, repris aujourd'hui dans la liturgie des heures, saint Laurent Justiniien disait ainsi : "Heureuse, certes, l'âme de la bienheureuse Vierge : habitée par l'Esprit et par son enseignement, elle obéissait toujours et en toutes choses aux ordres du Verbe. Elle n'était pas guidée par son sentiment personnel, pas sa propre décision ; mais ce que la sagesse suggérait intérieurement à sa foi, elle l'accomplissait extérieurement pas son corps." (2)

De même le prêtre soulignait Joseph Ratzinger n'a pas besoin d'ajouter quelque chose de personnel à sa liturgie : "Dans la réalisation concrète du service ecclésial, [il doit] se livrer totalement à l'inclusion dans le Christ; non pas construire un être à côté de lui, mais seulement en lui ; et permettre ainsi que devienne enfin réalité cette exclusivité qui ne détruit pas mais libère toute chose en la faisant entrer dans sa propre immensité" (3).  Alors peut importe sa nature. "Cela donne aux paroles d'un prédicateur, fut-il minable, le poids des siècles" et cela inclut la liturgie, "si démunie soit-elle" dans une dynamique qui la dépasse. "En acc
eptant de devenir sans importance en lui-même, il pourra devenir vraiment important parce qu'il sera pour le Seigneur un lieu d'irruption dans ce monde" (4) En agissant in Persona Christi,  en lui se substitue Celui pour qui il vit.  La dynamique sacramentelle devient alors signe au delà du signe, creuset où le fleuve du Verbe prend son lit, pour arroser le monde,  depuis le coeur blessé du Christ jusqu'aux confins de l'humanité.

Alors peut-on contempler la parole d'Isaïe, également donnée dans la liturgie d'aujourd'hui : "Je tressaille de joie dans le Seigneur, mon âme exulte en mon Dieu. Car il m'a vêtue des vêtements du salut, il m'a couverte du manteau de la justice, comme le jeune marié orné du diadème, la jeune mariée que parent ses joyaux. Comme la terre fait éclore son germe, et le jardin, germer ses semences, le Seigneur Dieu fera germer la justice et la louange devant toutes les nations." (Isaïe 61, 10-11) 

(2) saint Laurent Justinien, source AELF,  bréviaire du 12 juin
(3) J. Ratzinger, Les principes de la théologie catholique, Paris, Téqui, 1982, p. 315
(4) ibid p. 318