Affichage des articles dont le libellé est John P. Meier. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est John P. Meier. Afficher tous les articles

17 octobre 2021

Danse avec le Verbe - 10

L’humilité de Dieu va jusqu’à pousser son abaissement à la limite de ce que nous pouvons saisir sans mettre à mal, pour autant notre liberté. 

On pourrait en effet, comme nous le faisions à propos des miracles s’interroger sur le pourquoi de leurs limites, de leur rareté…

C’est ce que j’apprécie à nouveau chez Jean Luc Marion (1). Après sa lecture cursive de Jean 4 où Jésus commence par demander à boire à la Samaritaine avant de parler d’eau vive (une interprétation est très classique (2), mais qui s’intègre bien dans son développement, Marion a cette phrase qui m’interpelle, peut-être parce qu’elle fait écho à mes travaux sur la pédagogie divine : « Dans le décèlement [du mystère], ce qui se donne à voir reste à niveau avec celui qui le voit » (1)


On a là déjà une piste, mais Marion distingue pourtant plus loin décèlement (ou vérité) et découvrement (apokalupsis) qu’il faudrait comprendre, par contre (2), comme le début d’une interaction, de notre capacité à recevoir ou rejeter… à réagir, voire à mettre en actes.

Le decouvrement de Dieu appelle une réponse, un mouvement, une danse… comme cette semence fragile qui fait germer en nous ce que Dieu nous révèle.


On a bien là une trace des enjeux de cet agenouillement de Dieu que je cherche à thématiser depuis des années (3). 

Ce que la théologie appelle kénose est bien cette attitude pastorale de Dieu qui ne nous invite pas à un saut dans l’insissable qu’Il est, mais cherche toujours à rejoindre l’homme jusque dans ses impasses culturelles et les méandres de sa quête, jusqu’à réveiller sans forcer sa conscience.


C’est pour moi ce qui distingue les théophanies de l’Ancien Testament des révélations du NT(4), mais aussi peut justifier que les apparitions de Fatima ou de Lourdes puissent avoir pour nous des colorations culturelles vieillottes alors qu’elles parlaient aux petits bergers de là bas, les rejoignant, comme dit Marion, « à leur niveau » de compréhension. Cela ne dénature ni la profondeur de la rencontre, ni la personne, respectée pour ce qu’elle est.


Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous. Il s’est fait homme.


En contemplant cet abaissement on peut comprendre toute la tendresse de Dieu qui ne mésestime pas l’homme mais au contraire l’aide à grandir, depuis son état, dans cette logique « vectorielle » que j’évoque souvent.


A cela s’ajoute ce que le regretté B. Sesboué disait dans sa « Pédagogie du Christ », la réalisation par le Christ de l’étendue de sa mission est progressive, ce qui pour nous le rend plus humain.


John P. Meier(5) le soulignait aussi. Il n’est pas sûr que le Christ ait perçu, au début du moins, la dimension universelle de sa venue, ce qui explique l’épisode des petits chiens avec la Syro-Phénicienne , ce qui laisse dire, avec raison, à nos amies, que Jésus avait besoin d’un regard féminin, pour ouvrir son cœur aux dimensions du monde. Elles n’ont pas tort. La dimension ecclésiale doit s’ouvrir au fait que la danse du Verbe est Kononia et non interprétation figée d’un savant ou d’un mystique solitaire. C’est ensemble que nous progressons doucement vers la Révélation. C’est notre espérance…


Les temps actuels, nous rappellent que les frasques de l’Ancien Testament sont aussi nos horreurs présentes comme le soulignait G. Hamman : « c’est notre histoire ! » (6) et que nos églises ont encore besoin de travailler ensemble vers une sainteté toujours inaccessible à l’homme hormis quelques étincelles fragiles. Le grand Pierre pouvait affirmer à la fois à Césarée la réalité du Christ et juste après se planter magistralement sur le sens de la Croix. 

Humilité donc. Nous sommes tous à la fois proches et loins de la Vérité.

Mais celle ci n’est pas lumière vive et aveuglante mais au contraire buisson ardent d’un amour fragile qui se donne dans la nuit et réveille chez nous un feu de braise, pour qu’ensemble brille ce que Dieu veut nous signifier dans le silence.


« Parce que le phénomène se manifeste à fond et se donne en soi à fond, il ne peut pas précisément s’imposer à moi sans moi ; il ne peut que se pro-poser en face de moi, qui peut ne pas en recevoir la survenue, donc décider de ne pas le voir. » (ibid p. 248)


« J’ai joué de la flûte et vous n’avez pas dansé » laisse transparaître le drame du danseur repoussé, de l’amant trahi, les larmes de Dieu qui entend les pleurs de Rama… 


(1) Jean Luc Marion, « D’ailleurs la Révélation », op. cit p. 236

(2) p. 239sq

(3) cf. aussi mon « À genoux devant l’homme », troisième édition.

(4) cf. Dieu dépouillé

(5) John P. Meier, Un certain juif nommé Jésus, tome 1 à 5.

(6) cité par Hans Urs von Balthasar dans le tome 2 ou 3 de sa trilogie

06 mai 2020

Lectures pastorales - récapitulatif et accès en téléchargement gratuit sur kindle

Texte révisé le 13/4 cf plus bas puis le 15/5

Profitant de mes soirées de confinement et du bouclage d’une première version de Pédagogie Divine qui attend vos commentaires, j’ai remis à jour quatre des 18 tomes de mes lectures pastorales, cette longue série de manducation de la parole sans prétention à la lumière des éclairages des pères de l’Église et de mes lectures diverses, notamment de J. Moingt, Kasper, J. Meier, B.  Sesboué, K. Rahner, C. Theobald ou l’incontournable Hans Urs von Balthasar.
Ces tomes intègrent un certain nombre de redondances mais constituent chaque fois des approches particulières de la Bible. Je rappelle ici l’enchaînement chronologique de mes essais :

  1. A genoux devant l'homme, (Jean) 2012
  2. Chemins de miséricorde, (Luc) 2013
  3. Chemins d'Eglise (actes des apôtres)
  4. Serviteur de l'homme, kénose et diaconie (lettres de Paul) 2014
  5. Sur les pas de Marc, 2015
  6. Sur les pas de Jean, 2015
  7. Chemins croisés (Matthieu), 2015
  8. Chemins d’Évangile (Les 4), 2015
  9. Le chemin du désert (de Gn et Ex à Mat 4 et Jn 21)
  10. Nouveau Testament, tome 3 - autres lettres)
  11. L'humilité de Dieu, tome 11 - Humilité et miséricorde (tome 1)
  12. Décentrement et communion, - Humilité et miséricorde (tome 2)
  13.  Miséricorde, un chemin en Église, - Humilité et miséricorde (tome 3)
  14. Lire l'Ancien Testament, tome 1 - une lecture pastorale des livres d'Osée et de la Genèse, 2016
  15. Dieu n'est pas violent,  lire l'Ancien Testament, tome 2 (à partir des tomes 10,11 et 19)
  16. Chemins de prière, nouvelle édition - lire l'Ancien Testament, tome 3 (les psaumes)
  17. Pédagogie divine - Chemin de lecture  pastorale (614 p.)
  18. Le rideau déchiré - nouvelle édition revue de Sur les pas de Marc (extrait du tome 17)

En lisant les tomes 17, 8, 3, 4, 10, 11, 12, 13, 9, 15, 16 vous avez plus ou moins l’intégrale.Mais l’ordre est volontairement non imposé...Vous pouvez aussi commencer par le 5, le 9, le 14 ou le 18 et voir ensuite... 

Je précise  qu’à l’occasion de la parution de Pédagogie divine j’avais rendu 4 tomes de mes lectures pastorales offerts en téléchargement gratuits sur Kindle jusqu’au vendredi saint..(une promotion spéciale d’Amazon, au lieu des 0,99 euro, que je ne peut malheureusement renouveler avant deux mois - limitation imposée par l’éditeur**).
Cela donnait un autre accès à mes livres depuis quelques années publiés à prix coûtant...(*)
Même si je trouve qu’un bon livre se lit surtout sur du papier, l’édition sur Kindle qui respecte les notes est un bon ersatz...

(*) pour des raisons probablement liées à la situation actuelle les versions brochées ne sont plus accessibles via Amazon.fr mais le sont encore via ce lien sous amazon.co.uk
** du coup j’ai mis en ligne gratuitement à genoux devant l’homme et mardi de Pâques la dynamique sacramentelle...Cf. le lien et je continue de mettre en ligne d’autres tomes.
Au 20 avril étaient disponibles gratuitement les numéros 9 et 11 à 16 (cf. plus haut) de la série sur Amazon/Kindle et « cette église que je cherche à aimer »
Depuis le 15 mai, retrouvez les tomes 17 et 8 disponibles gratuitement en un seul volume chez kobo.com et Fnac.com sous le titre « Dieu dépouillé »

04 février 2019

Au fil de Marc 5 - légion

La guérison du possédé est racontée avec de grandes différences chez les évangélistes synoptiques, ce qui pour l’exegète John P. Meier suscite une difficulté historique et classe le texte dans l’ordre de la méditation spirituelle. Raison de plus pour prendre de la distance et vorace que cela dit pour nous.
Ne sommes nous pas, nous aussi, enchaînés au monde, tiraillés par ces milliers d'adhérences et d'addiction ?
Et pourtant Seigneur, Tu t'agenouilles pour nous relever. Tu t'abaisses pour nous redresser, tu te penches vers nous, nous libère et fait de nous des témoins.
Louange au Dieu sauveur.

08 décembre 2016

Langue vernaculaire

Poursuite de la lecture de la Gloire et La Croix tome 2 (GC2) de Hans Urs von Balthasar qui nous conduit sur les pas de Dante. Il y a, je trouve, dans le choix d'écrire en italien le même mouvement qui a emballé l'après Vatican II : une kénose véritable qui cherche à rejoindre l'homme jusque dans sa langue. Après tout, comme le note John P. Meier, Jesus appelait son Père Papa... La proximité est celle de l'amour vrai et nos ornements liturgiques, dont je ne nie pas l'esthétique et l'universalité oublie ce principe de proximité...

16 juin 2016

De la trace à la grâce

Ce qui compte, in fine, est de comprendre l'Ancien Testament comme un écrin qui prépare à la grâce.‎
Cet écrin n'est pas qu'une histoire humaine, c'est aussi les premiers pas d'un chemin entre Dieu et l'homme, un sentier où Dieu est apparu par petites touches successives, théophanies fragiles voir silencieuses (1)‎, mais a aussi lancé un cadre, ce que l'on traduit maladroitement par loi(2), dont le sens final sera révélé in fine dans un seul mot : amour.
Comme l'a si bien montré C. Gripon, à la suite d'Aletti, le chemin de l'AT se résume en Pr. 8, 27 dans un "j'étais là" sublime entre Dieu et l'homme, où la Sagesse se penche vers l'humain (3).

Cette présence du Verbe dans l'AT n'est pas fortuite, même si elle reste marquée par ce cacher / dévoiler qui prépare le déchirement final.

Dans la figure qui émerge, souffrante, humble et décriée se révèle, en effet, comme le souligne si bien Marc 15,38, l'au-delà du voile, le Christ, sacrement unique de la révélation divine.‎ C'est cette dynamique que nous poursuivons dans ces lignes.


(1) voir mes études des théophanies in l'Amphore et le fleuve
(2) cf. John P. Meier, Un certain juif Jésus, Les données de l'histoire, IV La loi et l'amour, Paris, Cerf, 2009, p. 34
(3) Christophe Gripon, Éros, un chemin vers Christ-Sophia, Paris, Médiaspaul 2016, ch. 3.

13 septembre 2015

Signes et miracles - Cohérence 2


"Pour le croyant qui se tient au centre (1), les miracles du Christ ne sont pas d'abord ce qui rend subjectivement la foi plus facile (car il en a à peine besoin), mais le rayonnement, sur le domaine sensible, de la gloire divine déjà vue spirituellement" (2).

Là encore la finesse de l'analyse de Balthasar nous conduit dans l'axe de ce que nous contemplons dans ce qu'il appelle (à la suite de nombreux exégètes) la "théologie des signes" chez Jean.

Depuis Cana, la guérison du fils, le relèvement (même mot grec que résurrection) du malade de Bethesda , Jean nous conduit en effet à la contemplation de la Passion et de la résurrection...

Toute la vie de Jésus est alors symboliquement organisée vers la révélation du Père. On retrouve ce que je notais plus haut à propos de la cohérence sacramentelle...

Saint Augustin l'exprimait ainsi : "ce que notre Seigneur a fait corporellement, il voulait le savoir compris spirituellement. Il n'acomplissait‎ pas de miracles pour le plaisir d'en faire, mais afin que le fait accompli apparaisse à ceux qui le voyait comme merveilleux, à ceux qui le comprenaient comme vrai. (....) celui qui ne sait pas lire (...) admire la beauté des lettres, mais ce que les lettres veulent dire, il ne sait pas. (...) un autre, au contraire, célèbre l'oeuvre d'art et en comprend le sens (...) c'est de tels disciples que nous devons être à l'école du Christ (3)

On perçoit, à la différence des balbutiements de l'analyse historico-critique que nous avons commenté chez John P. Meier (4), qu'il y a là ce que Jean de Lubac appelle véritablement une lecture spirituelle (5)‎ rejoignant l'esthétique de la gloire que cherche à démontrer Balthasar.

‎(1) cf. le livre éponyme de Balthasar : retour au centre
(2) Hans Urs von Balthasar, GC1 p. 172
(3) Serm. 98, 3 (PL. 38. 592), cité ibid
(4) cf par ailleurs nos travaux sur John P. Meier, Un certain juif...
(5) Henri de Lubac, Exégèse Médiévale, Les quatre sens de l'Écriture. 1, Cerf, DDB, 1993, p. 110ss



13 mars 2015

Marc 12, 18-27 - Résurrection : la preuve par Jésus

John P. Meier nous précise que Jésus nous donne (1) une démonstration très originale de la résurrection des morts. Son analyse du "sitz im Leben" qui nous place dans le contexte historique et intellectuel de Jésus au 1er siècle, nous montre que dans la controverse de Marc 12, 18-27 (3) , l'allusion faite par Jésus  à Exode‎ 3,6 est à comprendre en effet comme l'allusion d'un Dieu des vivants. Le Dieu ne peut être le Dieu des morts, dit il en substance (en lien avec Isaie 38, 18-19 et les Psaumes 6, 6; 30, 8-10; 88, 4-12) mais bien celui des vivants (2)

(1) John P. Meier ‎, op cit. Tome 3, p. 286 et ss.
(2) ibid p. 297
(3)
18 Des Sadducéens, qui nient la résurrection, l'abordèrent ensuite et lui firent cette question :19 " Maître, Moïse nous a prescrit que, si un frère meurt, laissant une femme sans enfants, son frère doit prendre sa femme, et susciter des enfants à son frère.20 Or, il y avait sept frères ; le premier prit une femme, et mourut sans laisser d'enfants.21 Le second la prit ensuite, et mourut aussi sans laisser d'enfants. Il en arriva de même au troisième,22 et chacun des sept la prit, et ne laissa pas d'enfants. Après eux tous, mourut aussi la femme.23 Eh bien, dans la résurrection, lorsqu'ils seront ressuscités, duquel d'entre eux sera-t-elle la femme ? car les sept l'ont eue pour femme. "24 Jésus leur répondit : " N'êtes-vous pas dans l'erreur, parce que vous ne comprenez ni les Ecritures, ni la puissance de Dieu ?25 Car, une fois ressuscités des morts, les hommes ne prennent point de femmes, ni les femmes de maris ; mais ils sont comme les anges dans le ciel.26 Et touchant la résurrection des morts, n'avez-vous pas lu dans le livre de Moïse, au passage du Buisson, ce que Dieu lui dit : Je suis le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac, et le Dieu de Jacob ?27 Il n'est pas le Dieu des morts, mais des vivants. Vous êtes donc grandement dans l'erreur. "


31 janvier 2015

Théologie des remplacements

Il y a chez Jean une succession de remplacements, nous suggère Meier*, entre :
- l'eau changée en vin (Jn 2),
- le temple changé en corps du Christ (Jn 2, 13-22),
- [le puits changé en source (Jn 4)...]**
- les sanctuaires en adoration en Esprit et en vérité (Jn 4, 20-26)
- le sabbat 5, 1-18
- la Pâques et sa manne en Eucharistie (Jn 6)
- la fête des tentes (7, 1-9, 41)
- Hannoukkah ( 10, 22-39)
- [la mort en vie éternelle] (Jn 11)
- [Le messie tout-puissant en messie humilié] Jn 12
- [Le maître en esclave/serviteur] (Jn 13)
- [Le serviteur en ami (Jn 15,15)]
Une clé de lecture cursive intéressante que je vous laisse découvrir...

Elle s'inscrit dans la série des ponts que je décris dans "A genoux devant l'homme"

* op. cit. p. 724
** Les crochets ne sont pas cités par Meier....

28 janvier 2015

La colère de Dieu

‎On a beaucoup écrit sur la colère du Christ vis à vis des marchands du temple en faisant un argument qui permet de justifier ses propres colères. A partir de l'analyse de John P. Meier*, je propose une interprétation différente. Selon lui, le récit qui s'enchasse dans la malédiction du figuier n'est pas une remise en cause du fonctionnement du Temple mais juste une annonce de sa fin, souligné non sans ironie par Marc dans d'autres récits de la Passion. 
J'avais déjà remarqué combien Jésus ne faisait que simuler pendant l'épisode puisqu'il se contentait de renverser la table des changeurs mais n'ouvrait pas les cages des colombes. 

De fait sa colère n'est pas dirigée spécifiquement sur eux mais sur l'ensemble du système qui n'a rien compris des enjeux.
A méditer sur le sens des cultes dépourvus de diaconie.

* Tome 2, op. cit., p. 649ss

Christologie ascendante

‎Le kénoticien qui dort en moi (dort-il vraiment?) trouve chez Meier un soutien inattendu dans la note 143 de la page 692 du tome 2 d'un juif marginal. Selon Martin Hengel dans The Son of God de 1976 et À. Fitzmeyer in The Aramaic Background of Phillipians 2, 6-11, CBQ 50 (1988) p. 470-483, le passage qui révèle la kénose serait de facture ancienne et "pourrait remonter à la première ou à la deuxième décennie du christianisme". 

En clair, ce thème qui sous tend ma thèse sur l'humilité du Christ comme pivot de la théologie de Paul, cf. "Le serviteur de l'homme" serait plus ancien encore et remonterait aux tous premiers chrétiens. 

27 janvier 2015

Contre un Jésus raisonnable ?


La conclusion de John P. Meier sur son étude des miracles de guérison est interpellante. Il commence par passer Matthieu 11, 5 et parallèles au critère de l'embarras. Que l'on rapporte que Jean Baptiste est pu douter du Christ est par l'embarras qu'il produit probablement historique et que Jésus lui réponde "les aveugles voient et les morts ressuscitent" n'est pas anodin et valide selon lui tout son travail sur l'historicité probable d'un certain nombre de miracles. Sa conclusion est amusante : ne tente t'on pas ‎de faire de lui un homme raisonnable pour évacuer le fait qu'il fait des choses que seul Dieu peut faire. Cette approche universitaire n'est pas cohérente avec notre foi dans le fait qu'il est fils de Dieu.

John P. Meier, op. cit. Tome 2 p. 634-636

22 janvier 2015

La loi du trop tard

Je reprend mes commentaires de Un certain juif Jésus, tome 2, ou John P. Meier après un long passage de recherche sur les miracles "historiques" commente la résurrection de Lazare. Il a un commentaire qui m'interpelle sur "la loi du trop tard" (p. 601) où il défend, à la lumière de Jn 12, 35-36, qu'à "chaque individu est accordée un temps de grâce déterminé"‎ à l'issue duquel il est trop tard. Une interprétation à mettre en tension avec la parabole des ouvriers de la dernière heure de Mat 20, 1-15 ?
Je pense que ce discours ne peut s'appliquer qu'à nous mêmes. On ne peut juger du travail intérieur d'autrui. Par contre, notre mouvement est toujours trop lent.

23 décembre 2014

Miracle - suite


L'analyse de Meier est pertinente quand il établit une opposition entre le type idéal du miracle et celui de la magie. Dans le deuxième cas, on a affaire à une utilisation du nom de Dieu à son profit, jusqu'à oser dire : "A cause de ton nom que je possède, donne moi la santé, (...) les biens en abondance" (2)
A l'inverse les miracles de Jésus s'en repose à la volonté de Dieu et sont signes pour le royaume.

(1)‎ p. 420ss
(2) PGM XIII 760-821"


18 décembre 2014

Croyons nous au Miracle ?

‎L'introduction du chapitre XVII du tome 2 d'un certain juif Jésus nous plonge dans un dilemne qui agite tout chrétien "raisonnant" depuis les Lumières. Son aparté(1) nous met au coeur de la question qui sépare :
- un Bultmann " universitaire" et septique qui refuse toute idée de miracle
- et 82 % des américains(2) qui osent encore y croire.

Et nous, de quel côté sommes-nous ?

La question méritait d'être posée. Je vous laisse y répondre, elle interpelle en effet l'idée même de la toute-puissance de Dieu. Varillon contournait le problème en parlant de la toute-puissance de l'amour. Il n'avait peut-être pas tort.

Meier nous conduit sur une voie plus ardue, celle de s'interroger sur le sens même du miracle. Pour quoi, à qui sert-il, est-il crédible ? Un chemin qui laisse probablement des traces en nous, mais peut aussi nous conduire à l'essentiel.



(1) Op. Cit. Tome 2, p. 400
(2) institut Gallup, 1989

11 décembre 2014

Le royaume est parmi vous

L'interprétation brillante que John P. Meier fait de Luc 17, 20-21 (1) nous ramène à notre propre foi. On peut en effet attendre la fin du monde qui réglerait tous nos problèmes et punirait les impies. Ce serait passer à côté de ce que nous dit Jésus. Le royaume de Dieu est au milieu de vous. A l'époque où la phrase est prononcée, après la guérison des dix lépreux, c'est bien sûr Jésus. Mais aujourd'hui encore, n'est-il pas présent dans le regard aimant d'un frère, dans le service rendu, dans les gestes réellement gratuits échangés, bref dans la charité active qui manifestent encore sa présence ?

(1) op cit P. 344 ss

03 décembre 2014

Jésus l'exorciste

‎Que Jésus soit un exorciste parmi d'autres en son temps, voir directement en concurrence, John P. Meier ne le nie pas. Par contre, il insiste sur "la configuration particulière des différentes composantes de son activité ministérielle qui forment un tout." (1)
Et c'est peut-être là qu'il nous faut chercher les traces d'un homme, serviteur de l'humain dans son contexte particulier du monde juif du premier siècle. Car ce n'est pas pour un fait particulier mais pour l'ensemble de sa vie et de sa mort qu'il est l'unique médiateur.


(1) op. Cit., tome 2, p. 322

24 novembre 2014

Renversement kénotique



Je me réjouis de constater que John P. Meier finit par conclure sur l'historicité‎ probable des 3 premières béatitudes de Matthieu et de Luc (1)
Elle conforte l'idée de ce que j'appelle le renversement ou l'inversion kénotique c'est à dire le fruit de la kénose. Si Jésus peut affirmer heureux les pauvres, les affligés et les affamés c'est probablement parce que l'essentiel de son incarnation se joue là : Dieu vient visiter les affligés, il a entendu leur souffrance et se fait serviteur.

(1) ibid p. 283

19 novembre 2014

Abba - Notre Père


Selon John P. Meier (1), la version originelle du Notre Père en araméen devait commencer par abba, qu'il traduit par "notre père chéri". Même si la notion de père est parfois difficile à porter pour certains enfants de nos générations blessées, je me plais à contempler le Christ appeler son père ainsi. Cela dit beaucoup de la relation intra-trinitaire.

Plus encore, Meier (2) souligne le contraste entre :
-  cette appellation familiale :  (Abba)
-  et l'idée de royaume qui suit dans les deux versets suivants : (qui est aux cieux / Que ton règne vienne)

Le contraste est pour lui saisissant.
Dans notre contemplation d'un Christ serviteur, il y a peut être un biais à étudier, celui du serviteur qui devient fils ou ami. On a là en effet une tension qui s'ouvre entre distance et proximité, entre puissance et faiblesse, volonté et renoncement.

(1) tome 2, p. 238
(2) ibid p. 244

18 novembre 2014

Un banquet de la Parole : Jn 2, 1-11, Jn 17 de Cana au dernier repas...

‎Suivant le lien donné par John P. Meier (1) j'ai expérimenté avec mon groupe de Saint Philippe la mise en perspective des deux textes suivants :
A - Jn 2, 1-11 : le récit de Cana,
B - Jn 17 : Le dernier discours.

Cette lecture en parallèle renforce la perception théologique de Cana, pour qui "le troisième jour" (Jn 2, 1) n'est finalement qu'une illustration de cette éclosion progressive de la gloire, qui s'étend de la vie à la mort et de la croix à la glorification du Père par le Fils.

A cela, nos 6 jarres incomplètes sont invitées à la noce, et comme le disait Varillon, il ne reste plus à Dieu qu'à " diviniser ce que nous avons [tenté] d humaniser ". Le rêve d'unité qui transparaît de Jn 17 ne souligne que mieux la vision à la fois eucharistique et eschatologique du récit de Jn 2.

(1) op. Cit. Tome 2, p. 725ss

17 novembre 2014

Mt 11, 16-19 - danse trinitaire

‎Les lecteurs de Danse trinitaire (1) se rappelleront peut être de mon utilisation osée de Mt 11, 16-19 (//Lc 7) pour justifier le fait que Jésus nous appelle à la danse.


A qui comparerai-je cette génération? Elle ressemble à des enfants assis dans des places publiques, et qui, s'adressant à d'autres enfants, disent: 

A Nous vous avons joué de la flûte, et vous n'avez pas dansé;
B nous avons chanté des complaintes, et vous ne vous êtes pas lamentés.
B' Car Jean est venu, ne mangeant ni ne buvant, et ils disent: Il a un démon.
A' Le Fils de l'homme est venu, mangeant et buvant, et ils disent: C'est un mangeur et un buveur, un ami des publicains et des gens de mauvaise vie. 



La lecture de John P Meier qui voit dans ce texte un chiasme antithétique admirable (cf. A BB' A') en particulier dans la version de Matthieu me conforte dans mon analyse. Pour lui, c'est bien Jésus qui nous invite ici à une danse joyeuse, par opposition au chant funèbre de Jean (2).

Ce qui me réjouit aussi est que ce texte est considéré par lui, a la suite de E. P. Sanders, comme très certainement authentique et non comme un ajout de l'Église primitive, tant la citation qui suit et s'y accorde présentant Jésus comme "un glouton et un ivrogne" ‎ne peut être un ajout de l'Église primitive. (3)


(1) La danse trinitaire in A genoux devant l'homme
(2) John P. Meier, tome 2, op. Cit. p. 143
(3) ibid. p. 144-146