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29 mars 2022

L’eau et la danse 2.43

La liturgie met en lien aujourd’hui deux textes magnifiques autour du thème de l’eau. Ils sont chacun à contempler à la lumière de ce passage de Jean 19 où le cœur du Christ transpercé fait jaillir une source inépuisable qui n’est autre pour Jean que l’Esprit. C’est ainsi qu’il faut lire il me semble ce récit d’Ezéchiel 47 avec cette source immense jaillissante dont on ne peut plus évaluer la profondeur. 

Saint Bonaventure avait cette belle image dont j’ai fait le titre d’un de mes livres «  l’amphore et le fleuve (1)». Si nous contemplons avec bienveillance notre vie, nous pouvons apercevoir l’ampleur des dons de Dieu que notre amphore ne peut parvenir à recueillir tellement elle dépasse notre propre contenant. De la fleur fragile à l’amour reçu d’autrui le grand Donateur ne cesse de combler ses enfants. Encore faut-il ouvrir son cœur à cette source immense. Et c’est l’enjeu du discours de Jean, depuis la nouvelle naissance évoquée à Nicodème (Jn 3), en passant par le « j’ai soif de toi » que nous fait comprendre la question à la samaritaine (Jn 4) jusqu’au j’ai soif final, la question que pose Jésus au paralytique en Jean 5 est un écho de « l’où es tu ? » originel de Gn 3.

Veux-tu être guéri ? Le veux-tu vraiment ? Crois-tu à la bonté de Dieu ? Vais-je mourir en vain ? M’aimes-tu ? Veux-tu danser avec moi ? 

« J’ai joué de la flûte sur la place du marché », viendras tu jusqu’au bout ?


Écoutons saint Augustin sur ce thème… :

« Les miracles du Christ sont des symboles des différentes circonstances de notre salut éternel (...) ; cette piscine est le symbole du don précieux que nous fait le Verbe du Seigneur. En peu de mots, cette eau, c'est le peuple juif ; les cinq portiques, c'est la Loi écrite par Moïse en cinq livres. Cette eau était donc entourée par cinq portiques, comme le peuple par la Loi qui le contenait. L'eau qui s'agitait et se troublait, c'est la Passion du Sauveur au milieu de ce peuple. Celui qui descendait dans cette eau était guéri, mais un seul, pour figurer l'unité. Ceux qui ne peuvent pas supporter qu'on leur parle de la Passion du Christ sont des orgueilleux ; ils ne veulent pas descendre et ne sont pas guéris. « Quoi, dit cet homme hautain, croire qu'un Dieu s'est incarné, qu'un Dieu est né d'une femme, qu'un Dieu a été crucifié, flagellé, qu'il a été couvert de plaies, qu'il est mort et a été enseveli ? Non, jamais je ne croirais à ces humiliations d'un Dieu, elles sont indignes de lui ».

Laissez parler ici votre cœur plutôt que votre tête. Les humiliations d'un Dieu paraissent indignes aux arrogants, c'est pourquoi ils sont bien éloignés de la guérison. Gardez-vous donc de cet orgueil ; si vous désirez votre guérison, acceptez de descendre. Il y aurait de quoi s'alarmer, si on vous disait que le Christ a subi quelque changement en s'incarnant. Mais non (...) votre Dieu reste ce qu'il était, n'ayez aucune crainte ; il ne périt pas et il vous empêche vous-même de périr. Oui, il demeure ce qu'il est ; il naît d'une femme, mais c'est selon la chair. (...) C'est comme homme qu'il a été saisi, garrotté, flagellé, couvert d'outrages, enfin crucifié et mis à mort. Pourquoi vous effrayer ? Le Verbe du Seigneur demeure éternellement. Celui qui repousse ces humiliations d'un Dieu ne veut pas être guéri de l'enflure mortelle de son orgueil.

Par son incarnation, notre Seigneur Jésus Christ a donc rendu l'espérance à notre chair. Il a pris les fruits trop connus et si communs de cette terre, la naissance et la mort. La naissance et la mort, voilà, en effet, des biens que la terre possédait en abondance ; mais on n'y trouvait ni la résurrection, ni la vie éternelle. Il a trouvé ici les fruits malheureux de cette terre ingrate, et il nous a donné en échange les biens de son royaume céleste » (2)


Ses paroles sont puissantes, dérangeantes, mais comme Naaman, ne faut-il pas se laisser secouer, de temps en temps jusqu’à la jointure de l’âme. L’appel de Dieu est irrésistible à qui veut bien entrouvrir sa porte à l’indicible…


(1) Claude Heriard, l’amphore et le fleuve, gratuit sous ce lien : https://www.fnac.com/ia9587875/Claude-J-Heriard

(2) Saint Augustin  Sermon 124

11 novembre 2021

Danse fragile dans la nuit étoilée - 14

Méditation pour dimanche, v7

Ce 33eme dimanche qui vient, termine l’année liturgique avant le Christ-Roi. On ne doit pas pour autant entrer dans la noirceur d’un discours apocalyptique, mais trouver ensemble un chemin vers la joie, vers ces feuilles de figuier au vert tendre qu’évoque l’Evangile. Notre chemin est peut-être de contempler le passé avec distance, de se serrer les coudes et de tracer un chemin de charité partagée (en cette journée mondiale des pauvres), mais aussi d’espérance et de miséricorde.  Dieu ne veut pas la souffrance et la mort de personne disait Ezechiel, mais la vie… (cf. Ézékiel‬ ‭18:32‬ )


Quels sont les pas de danse que nous allons entreprendre pour mettre en nous et en nos frères des traces de cet amour et de cette espérance qui viennent de Dieu ?


J’ai joué de la flûte, allez-vous danser demande Jésus ? Mais quelle danse ? Une danse macabre où une danse fraternelle et joyeuse ? 


À leur manière, les textes de ce dimanche tracent ce sentier sinueux que l’on peut probablement mieux contempler à l’aune des pépites de la liturgie de cette semaine…


Nous avions notamment mardi un beau texte sur le temple d’où coule un torrent de vie…(Ez 47), ce torrent vient de Dieu, mais donne du fruit en se mêlant à la terre, il n’est pas une eau magique à regarder de loin, mais vient au contraire abreuver et donner de la force à notre agir. 

Dans notre nuit, sachons découvrir ce Dieu qui semble si loin et qui est pourtant si proche…


Nous pouvons rester dans la nuit, nous attacher à des étoiles et les lumières anciennes. Elles ont perdu de leur éclat, mais ne désespérons pas pour autant. Écoutons la première lecture.


« Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront (...)  pour la vie éternelle » nous dit-elle.

    Ceux qui comme nous se rassembleront pour recevoir et écouter la Parole ensemble pourront transpirer voire resplendire de la lumière qui vient d’en haut, à condition de s’évider d’eux-mêmes pour laisser place à l’amour véritable à « la splendeur du firmament » et redonner ainsi place à ce Dieu qui nous aime pour toujours et à jamais.


« Garde-moi, mon Dieu,

j’ai fait de toi mon refuge.

Seigneur, mon partage et ma coupe :

de toi dépend mon sort….

De toi dépend mon sort..


Je garde le Seigneur devant moi sans relâche ;

il est à ma droite : je suis inébranlable.

Mon cœur exulte, mon âme est en fête,

ma chair elle-même repose en confiance :

tu ne peux m’abandonner à la mort

ni laisser ton ami voir la corruption.

Tu m’apprends le chemin de la vie :

devant ta face, débordement de joie !

À ta droite, éternité de délices ! (Ps 15 (16), 5.8, 9-10, 11)


Nous avons vu, au bout de la nuit LA lumière, dressée sur le bois, seul signe de l’amour véritable, sacrifice unique, pour qu’à sa suite, un peuple se mette en marche, une communauté de priants, les pierres vivantes d’un monde à reconstruire se nourrissent des trois dons de Dieu : amour, foi et espérance.


Nous savons que Christ est notre victoire, alors marchons, courons vers le but (cf. Ph 3), auquel Dieu nous appelle.


Le pain rompu ensemble, la parole partagée*, ce don de Dieu caché en nous dans le silence, cette eau vive, ce fleuve immense nous appellent à devenir le signe d’un demain meilleur, la danse scintillante des pierres vivantes que nous sommes, appelés à aimer, espérance pour les souffrants, à condition de ne pas nous cacher sous le boisseau et de faire grandir les dons reçus…


Feux follets ou scintillements de lumière ? Quel est ce firmament qu’évoque le livre de Daniel. La lumière divine sera Lumière si nos bougies fragiles allument ensemble un nouveau buisson ardent. Ce feu de l’amour et de la fraternité ne vient pas de nous. Il s’est allumé dans nos nuits obscures, dans nos soupirs et nos peines, mais il a réchauffé en nous ce cœur brûlant qui est don de Dieu et déjà une joie nouvelle brille en nos cœurs. Laissons là nous embraser…


Seul l’amour reçu et partagé sera lumière. L’eucharistie n’est rien si elle ne fait pas de nous un Corps, une charité vivante et agissante.


* cf. la Maison d’Évangile - La Parole Partagée

12 avril 2021

Transfiguration et résurrection - danse 49.4

Pourquoi ont ils fuit ?

Aurions nous fait mieux ?

Au delà d’une interpellation personnelle, en ce dimanche de la miséricorde, Il faut plutôt se plonger dans l’histoire de la révélation, dans le jeu subtile et délicat des théophanies pour percevoir la lente pédagogie divine qui bouscule les frontières du déductible, démonte les stèles antiques, les dieux vengeurs ou ceux qui exigent des sacrifices (Gn 22), les dieux sacrificiels qu’évoquent le Ps 50 ou Os 6, les dieux triomphants du début de l’Exode 16 et 22, pour aboutir à la contemplation de dos d’Ex 34 ou le chant des anges, murmure léger d’un fin silence d’1 Rois 19, antichambres du mystère entrevu lors de la transfiguration où sont conviés les deux héritages, avant de réaliser que d’un galiléen venu de nulle part est seule et parfaite image et ressemblance du vrai Dieu. Que de chemins, que de déceptions chez Judas mais aussi chez Pierre avant de parvenir à concevoir que le Dieu dépouillé, déchiré est ce que nous cachait Dieu derrières les dorures, les diamants ou le rideau du Temple. Au lieu des ors, c’est un Dieu à genoux que nous révèle la Croix. 

Agenouillement, écartèlements d’un Dieu qui accepte de rompre Son Pain et verser Son Corps pour la multitude. 

Ici la multiplication des pains et le lavement des pieds dansent ensemble une symphonie légère, loin des rites trop chargés et des paroles figées pour nous conduire à l’essentiel. Dieu déchire de haut en bas le voile car tout est dit dans ce corps transpercé, que Thomas peut toucher du doigt car l’ouverture est totale, non refermable. De lui coulera toujours ce torrent joyeux (Ez 46) et ce souffle nouveau qui prépare une flamme encore légère mais bientôt radieuse - celle de l’Esprit répandu pour nous, afin que nos âmes assoiffées se brûlent en lumière et amour... 

Vœux pieux ? Poétique stérile ?

Cela ne dépend plus de Lui. Tout est donné car dans l’effacement du Verbe se glisse l’appel ténu d’une flûte qui continue son chant imperceptible et appelle à la danse. 

Si tu veux... Ego eimi  (Je suis) donné pour faire de toi un porte-Christ, le nouveau temple d’un Dieu dépouillé (2), pierre vivante d’un anti-royaume, appel du visage, et fruit du silence...



02 avril 2021

Homélie du vendredi saint... - La Croix 12.0 - la danse finale (n.45)

Projet 2

Qu’est-ce que nous contemplons ce soir ?

Peut-on épuiser le mystère ? Il y a au moins douze dimensions dans la Croix que notre entrée en semaine sainte nous permet de manduquer lentement :

  1. La dimension verticale et descendante qui est celle de l’abandon trinitaire. Triple kénose où :
    • Le Père renonce à toute puissance pour laisser l’homme Jésus révéler l’amour.
    • Le Fils renonce à toute divinité pour se dépouiller d’abord de son vêtement par le mime kénotique tout symbolique d’un lavement des pieds (Jn 13) puis « forcé » sur la croix pour prendre la condition finale d’un esclave, d’un rejeté...(1)
    • L’Esprit sera déposé au fond de nos cœurs de pierre pour faire danser en nous l’amour(2)
  2. La dimension horizontale où les bras ouverts d’un Dieu transpercé nous invitent à sa danse pour l’humanité toute entière 
  3. La dimension « inversée » où le serpent moqueur qui nous empêche d’aimer et nous pousse à la violence, la jalousie, l’orgueil ou la cupidité est transpercé et dressé (Nb 11) par le feu d’un amour qui se révèle derrière un rideau déchiré (3)
  4. L’appel mystique d’un fin silence qui pèse sur le bruit du monde avant que bruisse le chant des anges à la sortie de nos carêmes...(4). Chant discret qui apparaît au terme de nos chemins de désert (5) et se prépare à l’Alleluia pascal...
  5. Un homme au paroxysme de la souffrance, agneau innocent qui révèle l’amour d’un Dieu avec nous.
  6. La déréliction de celui qui va jusqu’à connaître l’abandon du Père et rejoint ainsi les assoiffés du monde qui crie leurs « où es-tu ? » solitaires et souffrant.(6)
  7. La nudité révélée de l’Epoux déchiré sur le bois et qui n’en a plus honte, nouvel Adam au sens transcendé de Gn 2,25 (7) 
  8. La soif d’un Dieu qui crie pour la énième fois un « où es-tu ? » à l’homme depuis l’appel du premier jardin, le « donne moi à boire » de Jean 4 au « j’ai soif » de toi final d’un Dieu mourant de son désir d’amour (8).
  9. La joie cachée d’un Dieu qui en criant « tout est accompli » révèle qu’au delà de la souffrance et de l’abandon du Père se cache le mystère d’un chemin trinitaire.(3)
  10. L’Alliance ultime de l’homme Dieu qui épouse l’humanité par une danse ultime 
  11. Le don inouï d’un Dieu qui meurt et entre dans le silence du samedi saint dans l’attente fragile que le murmure d’une femme, devenue fidèle par une danse aimante(9), révèle à des hommes incrédules le bruissement du ressuscité qui déjà les précède en Galilée 
  12. La petite espérance où la soif de l’homme-Dieu se change en don et transforme un corps transpercé et « livré pour nous » en source jaillissante d’eau et de sang mêlés(10)


Je suis sûr que j’en oublie. 

Le chiffre 12 est révélateur mais on pourrait parler aussi de  l’Église fondée par un « Mère voici ton Fils » ou d’un « m’aimes tu ? » qui encadre le mystère. Je vous laisse compléter ;-). On n’épuisa jamais la révélation de la Croix. 


Jean nous conduit aussi à une interrogation particulière. Nous l’avons vu, quand Jésus, au jardin, affirme par trois fois Je suis, c’est à la fois une révélation du mystère même de l’homme Dieu et un écho aux trois « je ne suis pas » de Pierre. 

Ego eimi / ouk eimi


Et nous qu’allons nous dire. Je suis ? Je te suis ? Ou je ne suis pas, je ne te suis pas.


Laissons la question résonner dans le silence. Est-ce que Jésus est mort en vain... est-ce que notre marche vers Pâques est stérile ou sommes-nous prêts à avancer, à répondre enfin à l’où es-tu de Dieu, aidé par la contemplation de la croix et sa miséricorde ? 



Pour aller plus loin :

(1) relire Philippiens 2 ou ma « danse trinitaire » et « Serviteur de l’homme » en téléchargement libre sur Kobo

(2) Ezechiel 36, 26 et mon « Dieu dépouillé »

(3) voir Marc 15, 38 ou mon « Rideau déchiré »

(4) 1 Rois 19

(5) cf. mon livre éponyme 

(6) voir Hans Urs von Balthasar - Dramatique divine.  les travaux d’Adrienne von Speyr, Jurgen Moltmann et son Dieu crucifié ou mes deux livres sur ce thème dont « où es-tu ? »

(7) cf. « Le Dieu est nu » d’Arnold longuement commenté dans mes billets précédents...

(8) cf. À genoux devant l’homme 

(9) cf mon billet précédent 

(10) Ezeckiel 47 ou mon  livre « L’amphore et le fleuve »


18 mars 2021

Homélie du 5eme dimanche de Carême - année B

Projet 5 (écrit à 4 mains)


Cette année encore, nous sommes bousculés dans nos habitudes, nous allons vivre cette grande fête de Pâques dans des conditions difficiles liées à la pandémie. Rejoignons dans la prière toutes celles et ceux qui en souffrent et tous ceux qui ne comptent pas leur énergie pour les soigner.

Associons nous à ce chemin qui passe par la Passion avant d’atteindre cette Résurrection où nous pourrons proclamer et redire l’essentiel de notre foi. 


Comment aujourd’hui l’Ecriture nous interpelle elle particulièrement,  que nous dit la Parole aujourd’hui ?

Écoutons à nouveau les paroles de Jeremie 31 : « Je mettrai ma Loi au plus profond d’eux-mêmes ; je l’inscrirai sur leur cœur. Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple. »

Notre carême s’inscrit dans cette direction : faire alliance, apprendre à connaître Dieu, voir le Sauveur dans ce mystère tout particulier de la mort et de la résurrection. Et le suivre. Il ne s’agit pas d’une conversion du bout des lèvres, non une anecdote dominicale dans le cours de la semaine mais une transformation de l’intérieur. Dieu nous fait miséricorde. Il nous invite surtout sur son chemin, a avoir un cœur nouveau, un esprit nouveau, comme le dira à son tour Ézékiel. Il s’agit d’une nouvelle naissance disait Jésus à Nicodème, c’est à dire ne plus se laisser emporter par le vent mais choisir au fond de notre cœur le Chemin, la Vérité et la Vie.

« Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. (...) Rends-moi la joie d’être sauvé ; que l’esprit généreux me soutienne », nous dit le psaume 50.


L’évangile insiste. « si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit.

Nous sommes tout proche de la Passion. Le chapitre 12 décrit la dernière méditation de Jésus avant de basculer vers ce qui sera son Heure...


Jésus est médiateur d’une alliance nouvelle 

Ce grain de blé tombé en terre qui doit mourir pour refleurir et porter du fruit, c’est bien sûr d’abord le Christ qui annonce par la sa mort prochaine sur la Croix. Comment ne pas être interpellé par cette parole même de Jésus saisi par la crainte : « mon âme est bouleversée, que vais-je dire ?, Père sauve moi de cette heure ?  et Jésus de conclure : « NON, c’est pour cela que je suis parvenu à cette heure-ci ! »


Faut-il s’arrêter là ?

Non,  ce chemin est aussi le nôtre.

Pour avoir un cœur nouveau il nous faut aussi mourir...

Mourir à quoi ?

Ce n’est pas à moi de vous dire ce qu’il faut laisser mourir en vous, c’est à vous de discerner ce qui en vous conduit à la vie et d’oublier l’inessentiel, de le faire mourir...

Quel est l’enjeu... ? Qui aime sa vie la perd ; qui s’en détache en ce monde la gardera pour la vie éternelle.poursuit saint Jean.

Jésus nous appelle au décentrement, à un déchirement intérieur...

Prenons le temps cette semaine de laisser résonner cela en nous, de le relire en silence, en goûtant, en manduquant ces mots comme on le ferait avec nos plats préférés, une façon comme une autre de les intérioriser, de les faire nôtres en acceptant qu’elles nous bousculent, qu’elles changent notre cap de vie..

Mourir pour revivre...

Une clé est donner dans la suite du texte....

Si quelqu’un veut me servir, qu’il me suive ; et là où moi je suis, là aussi sera mon serviteur.

Quelle exigence cela entraine-t-il pour nous ? Apprendre à sortir de nos chemins de certitude, de nos zones de confort, apprendre à se dépouiller comme le Christ l’a fait lui-même.Souvenons-nous de ce bel hymne aux Philippiens (2,7-9) : « ils’est dépouillé, s’est abaissé… » s’est fait serviteur...


Servir...

Qu’est ce que servir...?

Il ne s’agit pas de servitude, d’auto flagellation mais d’amour.

Si notre cœur ne meurt pas à ce qui n’est pas amour, si nous n’arrivons pas à l’amour, cela ne sert à rien.

« L’amour prend patience, ne cherche pas son intérêt. » (1Co 13). L’amour est vie.

Cette semaine nous méditions un beau texte d’Ezechiel 47 qui évoque cette eau abondante qui « vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède ». 



Qu’est ce qui nous vient de Dieu ? 

Prenons le temps de contempler le double don que Dieu nous fait... la Parole et le pain...

Et laissons notre cœur habité par celui qui veut nous visiter...


Nous sommes chacun selon nos capacités, dépositaires d’un trésor, d’un grain de blé enfoui qui ne demande qu’à éclore pour ressusciter en nouspar le souffle de l’Esprit, les forces de vie, « pour nous rendre la joie d’être sauvé ». (ps 50).

Faisons silence quelques instants pour demander au Seigneur d’apprendre à écouter sa Parole en nous laissant toucher au cœur..jusqu’à retrouver ce cœur sensible, ce cœur de chair dont parle Jérémie.


Le Christ est lumière sur ce chemin. Mettons nos pas derrière celui qui est amour.

Alors, nous comprendrons pourquoi vint une voix qui disait : « Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore. »

Qu’est ce que la gloire du Fils ? L’élévation...

« Quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes. »

Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir. » (Jn 12)...

La gloire du Christ s’est l’amour qui se révèle dans sa mort. C’est le grain qui meurt pour nous montrer que la mort est vie, que mourir à ce qui n’est pas amour est vie. Jean 12 précède Jean 13, le lavement des pieds et la Croix. Marchons nous aussi vers la vie...en choisissant l’essentiel...l’amour.


29 août 2020

Notes pour le Baptême de M

Chers A et E
Chère famille

Vous êtes réunis dans la maison de Dieu autour du petit M.. Et vous demandez son baptême
Je ne crois pas me tromper en disant que cet enfant est le fruit d'un amour que vous tenter de construire. Il va se nourrir de cet amour, s'y abreuver comme à une source.

En choisissant ces textes, vous inscrivez sa vie sur un chemin particulier celui de l'amour.

« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit.
Voilà le grand, le premier commandement. Et le second lui est semblable : tu aimeras ton prochain comme toi-même ».Mat. 22

Contempler l'interaction entre ces deux paroles de vie est le chemin d'une vie. Ce sera le chemin de M..
« Ce n'est pas un Dieu du rite, de l'obéissance, mais le débordement bouillonnant de l'amour qui va abreuver M. La première lecture tirée d'Ezechiel 47 parle de l'eau jaillit du Temple. l'Église depuis des siècles considère que cette eau est le signe de l'amour de Dieu qui innonde le monde. Pour elle c'est le premier signe visible de l'amour qui a jailli du cœur du Christ, de son cœur transpercé le jour de sa mort.
M. va être baptisé dans cette eau, à l'intersection entre cette eau jaillie de l'amour immense de Dieu et de cet amour immense qui vous unit. Votre tâche à vous parents, mais aussi parrains, marraines et famille est de lui faire goûter à cette eau, lui donner envie de s'y abreuver. L'amour de M, s'il prend sa source dans votre amour et ce que vous pourrez lui dire de l'amour de Dieu peut changer le monde.
Option 1 abandonnée suite commentaire

Le baptême s'inscrit dans cette dynamique. Ce n'est pas un simple passage, c'est un engagement de tout faire de votre côté pour que ce potentiel d'amour qui repose en lui échappe à toutes les tentations, à toutes les adhérences et toutes les addictions. En renonçant vous-mêmes à ces tentations qui empêchent d’aimer comme vous allez le faire tout à l’heure vous vous engagez à tout faire pour que M. devienne amour, soit signe de l’amour, soit amour. Vous n’avez pas encore célébré votre mariage, c’est votre droit. Sachez néanmoins que par le baptême de M., par ce que vous allez présenter à Dieu aujourd’hui vous avancez dans cette belle dynamique de l’amour. Dieu vous attends. Il respecte vos hésitations. Il vous veut libres, tous les deux, pour qu’un jour quand vous serez prêts il vienne scelller à jamais ce qu’avec M. vous venez de signifier. 

Quant à vous, parrain et marraine, si A et E. vous  ont choisis, c’est parce que quelque chose en vous dis l’amour, rayonne de l’amour. Soyez digne de cet appel. 

Option 2 - préférence 
Le baptême s'inscrit dans cette dynamique. Ce n'est pas un simple passage, c'est un engagement de tout faire de votre côté pour que ce potentiel d'amour qui repose en lui échappe à toutes les tentations, à toutes les adhérences et toutes les addictions. En renonçant vous-mêmes à ces tentations qui empêchent d’aimer comme vous allez le faire tout à l’heure vous vous engagez à tout faire pour que M. devienne amour, soit signe de l’amour, soit amour. M. va boire l’eau que vous lui donnerez. Philippe Julien dit de mémoire que le plus beau cadeau que vous pouvez faire à vos enfants c’est de vous aimer... il sera aimant si vous l’êtes, en le présentant à Dieu vous entrez dans cette belle dynamique de l’amour. Dieu vous y attends. Il vous veut libres, heureux, et sera là dès que vous l’invoquerez (et même quand vous ne le ferez pas...). 


Quant à vous, parrain et marraine, si À et E. vous  ont choisi, c’est parce que quelque chose en vous dis l’amour, rayonne de l’amour. Soyez conscients et portés par cet appel. 

27 février 2020

Homélie de baptême - 27 - à partir d’Ezechiel 47


Qui suis-je devant l'amour d'un homme et d'une femme qui viennent présenter à Dieu le fruit de leur amour ?

Les textes d'aujourd'hui et tout particulièrement la première lecture nous invitent à leur manière à contempler cela.
L'amour qui vous a réuni C et L est grand. Il vous dépasse.

Il est comme ce fleuve qui jaillit du Temple de Dieu dont nous parle la première lecture que vous avez choisie (Ez 47). Pour l'instant il semble fragile, comme cet enfant que vous présentez à Dieu.

Et pourtant vous pressentez que cette petite Alice peut vous surprendre, par ses sourires d'abord, sa tendresse, et plus tard par sa capacité à aimer.

Il vous reste à soigner cette croissance, la conduire, la rendre à son tour amour.

Le baptême s'inscrit dans cette dynamique. Ce n'est pas un simple passage, c'est un engagement de tout faire de votre côté pour que ce potentiel d'amour qui repose en elle échappe à toutes les tentations, à toutes les adhérences et toutes les addictions.

Alice va devoir choisir entre la vie pour aimer et la mort qui résulte d'un enfermement sur soi. Choisir la vie et non la mort auquel nous conduit toute forme de servitude. 

Alice est don de Dieu. N'oubliez pas cela. Prenez le temps, à votre manière, de l'introduire à cette contemplation de ce qu'est l'amour, du pourquoi de l'amour...

Alice va aujourd'hui être baptisée selon cette dynamique particulière du Christ. En la plongeant dans l'eau, elle va symboliquement mourir à ce qui l'empêche d'aimer pour vivre dans l'amour. Et vous parents, parrain et marraine en renonçant de même au mal, tout à l'heure vous allez signifier que pour elle vous choisissez l'amour plus que ce qui vous empêche d'aimer. Ce choix est un début, le début d'une conversion intérieure. Vous allez être les pierres vivantes de cette transformation d'Alice en fleuve d'amour. Vous allez être porteur de cette flamme qui va faire d'elle un feu de joie pour le monde...

Bien sûr ce chemin n'est pas simple. Le chemin du Christ l'a conduit à la croix. C'est pourquoi elle aura besoin de vous tous ici rassemblés, et notamment de vous parents parrain et marraine pour avancer. Nous allons exprimer cela, dans le rite qui va suivre...

09 novembre 2019

Notre Dame de Paris, une cathédrale vivante ? - Dédicace

Après avoir fêté hier les saints du diocèse le fait que nous fêtions la dédicace du Latran et à travers elle celle de nos églises interpelle à l'aune de ce que nous dit le pape François sur la dimension polyédrique de notre Église et en écho à l'expression petrinienne de "pierres vivantes".

"Vous-mêmes, comme des pierres vivantes, construisez-vous pour former une maison spirituelle, un saint sacerdoce, afin d'offrir des sacrifices spirituels, agréés de Dieu, par Jésus-Christ; car voici ce qu'on trouve dans l'Ecriture: Je vais poser en Sion une pierre angulaire, choisie, précieuse" (cf. 1P2, 4sq)

Une cathédrale est signe efficace de la présence du Christ incarné reposant sur sa pierre angulaire.



Du temple coule un fleuve immense nous dit Ezékiel 47.

Les propos du cardinal Newman nous invitent à entrer dans cette contemplation :
"Une cathédrale est-elle le fruit d'un désir passager ou quelque chose qu'on puisse réaliser à volonté ? À coup sûr, les églises dont nous héritons ne sont pas une simple affaire de capitaux, ni une pure création du génie ; elles sont le fruit du martyre, de hauts faits et de souffrances. Leurs fondations sont très profondes ; elles reposent sur la prédication des apôtres, sur la confession de la foi par les saints, et sur les premières conquêtes de l'Évangile dans notre pays. Tout ce qui est si noble dans leur architecture, qui captive l'œil et va au cœur, n'est pas le pur effet de l'imagination des hommes, c'est un don de Dieu, c'est une œuvre spirituelle.
La croix est toujours plantée dans le risque et dans la souffrance, arrosée de larmes et de sang. Nulle part elle ne prend racine et ne porte de fruit si sa prédication n'est accompagnée de renoncement. Les détenteurs du pouvoir peuvent porter un décret, favoriser une religion, mais ils ne peuvent pas la planter, ils ne peuvent que l'imposer. Seule l'Église peut planter l'Église. Personne d'autre que les saints, des hommes mortifiés, prédicateurs de la droiture, confesseurs de la vérité, ne peut créer une vraie maison pour la vérité.
C'est pourquoi les temples de Dieu sont aussi les monuments de ses saints. (...) Leur simplicité, leur grandeur, leur solidité, leur grâce et leur beauté ne font que rappeler la patience et la pureté, le courage et la douceur, la charité et la foi de ceux qui, eux, n'ont adoré Dieu que dans les montagnes et les déserts ; ils ont peiné, mais non en vain, puisque d'autres ont hérité des fruits de leur peine (cf Jn 4,38). À la longue, en effet, leur parole a porté fruit ; elle s'est faite Église, cette cathédrale où la Parole vit depuis si longtemps. Heureux ceux qui entrent dans ce lien de communion avec les saints du passé et avec l'Église universelle. Heureux ceux qui, en entrant dans cette église, pénètrent de cœur dans le ciel" (1)

C'est dans cet axe que nous pouvons alors entrer dans la dynamique donnée par Paul en 1 Cor 3 : "j'ai posé la pierre de fondation. Un autre construit dessus. Mais que chacun prenne garde à la façon dont il contribue à la construction.
La pierre de fondation, personne ne peut en poser d'autre que celle qui s'y trouve : Jésus Christ.
Ne savez-vous pas que vous êtes un sanctuaire de Dieu, et que l'Esprit de Dieu habite en vous ?
Si quelqu'un détruit le sanctuaire de Dieu, cet homme, Dieu le détruira, car le sanctuaire de Dieu est saint, et ce sanctuaire, c'est vous.(2)

(1) Bienheureux John Henry Newman PPS, vol 6, n° 19 , source : l'Évangile au Quotidien
(2) cf. 1 Co 3, 9c sq


Envoyé de mon iPhone

20 juillet 2019

Grâce et Gloire 2

Quand le Créateur, une fois son travail achevé, contemple son œuvre et la trouve très bonne (tob) - et dans le bon est inclus le beau - le caractère bon et beau du cosmos n'est certainement pas séparable de l'acte et de la vision du Créateur puisque c'est dans la lumière rayonnante que baigne le monde ; malgré tout, ces biens de la grâce sont réellement donnés par Dieu au monde et il peut les garder légitimement aussi longtemps qu'il les restitue au Créateur en le louant et en lui rendant hommage. Cette transcendance et cette immanence du bon et du beau sont  (...) [rayonnement et resplendissement ] divins. Ce ne serait pas la grâce si elle ne faisait que rayonner au-dehors sans affecter intérieurement l'être doué de grâce. Si la grâce est sans cesse comparée avec la source d'eau vive jaillissant de Dieu (Isaïe 12,3 ; 55,1 Jérémie 2,13, Ezéchiel 47, 1 ; Psaume 36,9-10 ;  46,5 ; Zacharie 14,8 ;  Jean 4,14 7,37 ; Apocalypse 7, 17 ; 22, 17), ce n'est pas seulement pour que l'homme s'y baigne extérieurement, mais pour qu'il la boive et étanche sa soif. La grâce avec sa suavité peut devenir intérieure et propre à la créature dans la mesure même où celle-ci est prête à restituer le don divin : Ainsi Abraham n'a jamais possédé plus intimement son fils qu'après avoir passé par le suprême renoncement. (1)

Que retenir de ce long passage ? Balthasar insiste beaucoup sur la restitution. A méditer à l'aune des dons que Dieu nous fait...

(1) Hans Urs von Balthasar, ibid p. 129

08 juin 2019

Baptêmes 10 à 14 - Homélie du 8/6/19 - Ezéchiel 36 et 47, Jn 9

Extrait

Quelle est la trame des trois textes que nous venons de lire ? C'est l'eau !
L'eau qui abreuve, nourrit, purifie.

Le baptême a, parmi ses principaux sens, une dimension double de purification et de vie.

Plonger dans l'eau c'est, symboliquement, se débarrasser de nos addictions et se relier à la vie qui vient de Dieu. Se dépouiller et se revêtir, mourir et renaître.

Quel est l'enjeu pour ces enfants que nous allons baptiser ?
Le baptême est le début d'un long chemin où ces enfants vont prendre conscience de l'amour inouï de Dieu pour l'homme, de ce fleuve jaillissant du coeur de Dieu, ce que Jean fait jaillir symboliquement du coeur transpercé de Jésus.

Le texte d'Ezechiel 47 évoque lui aussi tout particulièrement cette fontaine jaillissante et pour nous chrétiens il y a là comme une prophétie de ce cœur transpercé de Jésus mort pour nous sur la croix et source d'amour infini pour l'homme.

C'est dans cette correspondance que le baptême de Jésus prend sens.


07 juin 2019

Don de Dieu - Esprit de Pentecôte - Saint Hilaire - Amour en toi

« Quant au don qui réside dans le Christ, il est toujours le même pour tous ; et puisqu'il ne manque jamais, il est donné à chacun autant qu'il veut en profiter ; il réside en chacun autant qu'il veut l'obtenir. Ce don demeure avec nous jusqu'à la fin du monde, il nous réconforte dans notre attente ; il est un gage, par l'activité de ses bienfaits, de ce que nous espérons pour l'avenir, il éclaire les esprits, il illumine les cœurs. » (1)
Il est comme ce fleuve débordant du Temple auquel Ezéchiel fait mention dans son chapitre 47 : « 01 L'homme me fit revenir à l'entrée de la Maison, et voici : sous le seuil de la Maison, de l'eau jaillissait vers l'orient, puisque la façade de la Maison était du côté de l'orient. L'eau descendait de dessous le côté droit de la Maison, au sud de l'autel.
02 L'homme me fit sortir par la porte du nord et me fit faire le tour par l'extérieur, jusqu'à la porte qui fait face à l'orient, et là encore l'eau coulait du côté droit.
03 L'homme s'éloigna vers l'orient, un cordeau à la main, et il mesura une distance de mille coudées ; alors il me fit traverser l'eau : j'en avais jusqu'aux chevilles.
04 Il mesura encore mille coudées et me fit traverser l'eau : j'en avais jusqu'aux genoux. Il mesura encore mille coudées et me fit traverser : j'en avais jusqu'aux reins.
05 Il en mesura encore mille : c'était un torrent que je ne pouvais traverser ; l'eau avait grossi, il aurait fallu nager : c'était un torrent infranchissable.
06 Alors il me dit : « As-tu vu, fils d'homme ? » Puis il me ramena au bord du torrent.
07 Quand il m'eut ramené, voici qu'il y avait au bord du torrent, de chaque côté, des arbres en grand nombre.
08 Il me dit : « Cette eau coule vers la région de l'orient, elle descend dans la vallée du Jourdain, et se déverse dans la mer Morte, dont elle assainit les eaux.
09 En tout lieu où parviendra le torrent, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Le poisson sera très abondant, car cette eau assainit tout ce qu'elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent.
10 Alors des pêcheurs se tiendront sur la rive depuis Enn-Guèdi jusqu'à Enn-Églaïm ; on y fera sécher les filets. Les espèces de poissons seront aussi nombreuses que celles de la Méditerranée.
11 Mais ses marais et ses bassins ne seront pas assainis : ils seront réservés au sel.
12 Au bord du torrent, sur les deux rives, toutes sortes d'arbres fruitiers pousseront ; leur feuillage ne se flétrira pas et leurs fruits ne manqueront pas. Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède. »
(1) Saint Hilaire, Traité sur la Trinité, source office des lectures AELF, 7eme vendredi de Pâques 

18 décembre 2018

Le fleuve - Hans Urs von Balthasar

"Les trois manières dont la Parole se manifeste et se transforme : dans la vie humaine de Jésus, dans sa mort et sa résurrection, et dans les formes de la vie ecclésiale - comme sacrement, comme parole et comme amour ecclésiaux - ne forment ensemble qu'un unique fleuve dans lequel l'amour de Dieu devient pour nous manifeste et accessible." (1)

C'est en nous que cette plénitude prend chair, se déploie, prend une profondeur et pour reprendre l'image d'Ezéchiel (47,12) porte alors du fruit.



(1) Hans Urs von Balthasar, La prière contemplative op. cit. p. 193

18 août 2017

Des grandes eaux à la source : l'entonnoir ?

Des eaux du déluge en Gn 7, de la mer Rouge en Ex 14 ou du Jourdain à l'époque des moissons en Jos 3, 15, ne subsiste, en apparence, qu'un mince filet d'eau jaillissant du coeur du Christ (Jn 19, 34)  mais cette source fragile n'est autre que l'eau vive, évoquée en Jn 4, 11.
C'est un fleuve immense qui se cache derrière la source fragile (cf Ez 47, 1).
Tout cela est comparable à un grand entonnoir qui de l'abondance des dons ne conserve que l'essentiel.
Tenons nous, comme l'évoque Bonaventure, debout, l'amphore à la main pour recueillir le don de Dieu.
Venons nous abreuver à la source.

22 septembre 2016

Charis chez Pindare

Au delà d'Homère et d'Hésiode, qui nous enseignent les vertus de la mesure et de la vigilance, Pindare développe le concept d'humilité, mais surtout la "charis" dans le sens du don le plus abouti, le plus spontané. Le poète "se fait le gérant de la charis divine elle-même qu'il répand comme une coupe nuptiale écumante et débordante" (1).
Il ne manque à cela, ajoute Balthasar qu'un "homme-Dieu embrassant dans son triomphe la mort comme la vie" vers la "fête éternelle". (2) et peut être, ce fleuve jaillissant dont nous parle Ez 47, 1-12.

(1) Cf. GC6 p. 76
(2) p. 77

25 juin 2016

La figure de David -Vocation d'Israël

Une contemplation du premier livre de Samuel, au chapitre 26 nous laisse saisir la vocation d'Israël,  non comme quelque chose d'accessible, mais dans sa dimension eschatologique. On y voit David traverser le camp de son ennemi, saisir la lance et la cruche et ne pas tuer Saül. Acte de non violence par excellence,  c'est aussi un acte de respect pour l'oint de Dieu,  le roi Saül, que David se refuse de frapper.
Pourquoi ? Au nom de quoi ? Parce que David a pris conscience de l'inviolabilité de l'autre. A la différence du meurtre d'Abel (Gn 4),  il se refuse de frapper. Là est la vocation d'Israël.  Elle est inaccessible à l'homme (Mat 19)  possible grâce à Dieu,  qui cette nuit là endort le camp du roi.
Elle est aussi figure, car une lecture spirituelle verra dans la lance et la cruche deux allusions aux mystères de la Croix.  C'est par la lance que l'innocent sera transpercé (Jn 19), c'est avec la cruche que nous recueillons l'eau et le sang versés, source infinie (Ézékiel 47) de grâce pour ceux qui consentent à y voir le salut.

Heureux David, car ce jour là, il a eu le coeur pur. "Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu (...) celui qui a purifié son cœur de toute créature et de tout attachement déréglé voit l'image de la nature divine dans sa propre beauté. (...) « Hommes qui avez quelque désir de contempler le vrai Bien, vous avez entendu dire que la majesté divine est élevée au-dessus des cieux, que sa gloire est incompréhensible, sa beauté inexprimable et sa nature infinie. Mais ne désespérez pas de parvenir à contempler l'objet de votre désir. »~Si tu purifies, par un effort de vie parfaite, les souillures attachées à ton cœur, la beauté divine brillera de nouveau en toi. C'est ce qui arrive avec un morceau de fer, lorsque la meule le débarrasse de sa rouille. Auparavant il était noirci, et maintenant il brille et rayonne au soleil. De même l'homme intérieur, que le Seigneur appelle « le cœur », lorsqu'il aura enlevé les taches de rouille qui altéraient et détérioraient sa beauté, retrouvera la ressemblance de son modèle, et il sera bon. Car ce qui ressemble à la Bonté est nécessairement bon. Donc celui qui se voit lui-même découvre en soi l'objet de son désir. Et ainsi celui qui a le cœur pur devient heureux parce que, en découvrant sa propre pureté, il découvre, a travers cette image, son modèle. Ceux qui voient le soleil dans un miroir, même s'ils ne fixent pas le ciel, voient le soleil dans la lumière du miroir aussi bien que s'ils regardaient directement le disque solaire. De même vous, qui êtes trop faibles pour saisir la lumière, si vous vous retournez vers la grâce de l'image établie en vous dès le commencement, vous possédez en vous-mêmes ce que vous recherchez. La pureté, en effet, la paix de l'âme, l'éloignement de tout mal, voilà la divinité. Si tu possèdes tout cela, tu possèdes certainement Dieu. Si ton cœur est exempt de tout vice, libre de toute passion, pur de toute souillure, tu es heureux, car ton regard est clair. Purifié, tu contemples ce que les yeux non purifiés ne peuvent pas voir. L'obscurité qui vient de la matière a disparu de tes regards et, dans l'atmosphère très pure de ton cœur, tu distingues clairement la bienheureuse vision. Voici en quoi elle consiste : pureté, sainteté, simplicité, tous les rayons lumineux jaillis de la nature divine, qui nous font voir Dieu." (1)

(1) Saint Grégoire de Nysse,  Homélie sur les Béatitudes, source AELF.

19 juin 2016

La Croix, source de toute grâce

En ce jour,  contemplons la Croix,  buvons à cette source offerte. Comme nous y invite la première lecture par son "Ils regarderont vers moi. Celui qu’ils ont transpercé" (1), la liturgie nous invite à la fois à percevoir ce qui en nous a rendu possible la mort du Christ et ce qui, de cette mort peut nous sauver. Alors nous pourrons nous lamenter sur ce qui nous éloigne de Dieu : " Ils feront une lamentation sur lui, comme on se lamente sur un fils unique ; ils pleureront sur lui amèrement, comme on pleure sur un premier-né.
Ce jour-là, il y aura grande lamentation dans Jérusalem (...) Ce jour-là, il y aura une source qui jaillira pour la maison de David et pour les habitants de Jérusalem : elle les lavera de leur péché et de leur souillure" (1).
Cette lettre de Zacharie est la clé de notre soif vers Dieu.  Et le psaume du jour (63) n'est qu'une illustration de cette soif qui devrait nous habiter. Goûtons à cette prière,  faisons la nôtre :
"Dieu, tu es mon Dieu,
je te cherche dès l'aube :
mon âme a soif de toi ;
après toi languit ma chair,
terre aride, altérée, sans eau.
Je t'ai contemplé au sanctuaire,
j'ai vu ta force et ta gloire.
Ton amour vaut mieux que la vie :
tu seras la louange de mes lèvres !
Toute ma vie je vais te bénir,
lever les mains en invoquant ton nom.
Comme par un festin je serai rassasié ;
la joie sur les lèvres, je dirai ta louange.
Oui, tu es venu à mon secours :
je crie de joie à l'ombre de tes ailes.
Mon âme s'attache à toi,
ta main droite me soutient"(2)
Que nous apporte alors la deuxième lecture ?
"Frères, tous, dans le Christ Jésus, vous êtes fils de Dieu par la foi.
En effet, vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ;
il n’y a plus ni juif ni grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus.
Et si vous appartenez au Christ, vous êtes de la descendance d’Abraham : vous êtes héritiers selon la promesse".
Si nous buvons à la source du Christ,  ni nous croyons vraiment que le sang et l'eau versé est ce fleuve immense décrit par Ézékiel 47, alors nous pouvons réaliser ce à quoi nous sommes appelés : "appartenir au Christ,  non pas sous forme d'esclave,  mais dans la direction de Jean 15, 15, comme des "amis", c'est à dire en chemin vers un amour qui ne cherche pas "son intérêt" (1 Corinthiens 13).
Cette conversion intérieure nous permet d'affirmer à la suite de Pierre (Lc 9, 20) : tu es l'oint de Dieu, le messie. Non pas seulement comme David a été oint (1 Samuel 16) mais par cette double onction du Père et de l'Esprit qui fait de lui le fils unique et nous invite à entrer dans le cercle trinitaire
(1) Livre de Zacharie 12
(2) Psaume 63(62),2.3-4.5-6.8-9.
(3) Lettre de saint Paul Apôtre aux Galates 3,26-29.
Textez, source AELF

11 mars 2016

La vallée d'Achor - 2

Dans la foulée des posts précédents,  relisons Ézékiel 47, 8-12 : « Cette eau coule vers la région de l'orient, elle descend dans la vallée du Jourdain, et se déverse dans la mer Morte, dont elle assainit les eaux. En tout lieu où parviendra le torrent, tous les animaux pourront vivre et foisonner. Le poisson sera très abondant, car cette eau assainit tout ce qu'elle pénètre, et la vie apparaît en tout lieu où arrive le torrent. Au bord du torrent, sur les deux rives, toutes sortes d'arbres fruitiers pousseront ; leur feuillage ne se flétrira pas et leurs fruits ne manqueront pas. Chaque mois ils porteront des fruits nouveaux, car cette eau vient du sanctuaire. Les fruits seront une nourriture, et les feuilles un remède. »