31 juillet 2007

Anthropomorphisme



« On a le choix. Ou l’on n’a pas d’anthropomorphisme ou un anthropomorphisme sans restriction, qui est alors une réduction humaine, générale et totale de Dieu (…) s’il a voulu être humain, qui pourrait objecter quoi que ce soit ? S’il descend lui-même de cette hauteur et fait cause commune avec la créature, pourquoi devrais-je moi, le retenir de force, sur cette hauteur ? Comment serait-ce moi qui l’abaisserais par la représentation de son humanité s’il s’abaisse de lui-même ? » (1) Pour moi cette kénose est un dialogue de sourds sans un décentrement de l’écoutant qui ne peut à défaut atteindre « une attitude d’écoute purement réceptive » (2)
Il y a donc un cheminement intérieur pour quitter ce qui peut être exaltant dans une vision de Dieu sur-homme et inaccessible, projection de tous nos phantasmes et le passage au réel, l'invitation à l'amour du prochain, l'action...

(1) Schelling, F.W. Brief an Eschermayer, 1812 dans Werke I,8 167-168 cité par Hans Urs von Balthasar, La Th. II, p. 74
(2), Hans Urs von Balthasar, ibid p. 75

30 juillet 2007

Suivre le Christ

Le Christ n’est pas un surhomme. "C’est justement ce côté inimitable qui doit être imité par ceux qui en connaissent le sens". (1)
A nous d'en décrypter le chemin par la manducation de la Parole, par la contemplation de la vie, mais aussi en réveillant en nous ce qui nous conduit vers lui.

(1) Balthasar, ibid p. 73

28 juillet 2007

Dévoilement - IV (le mystère)

"Le mystère n’est pas une sorte d’au-delà de la vérité mais il en est la propriété permanente" (1)
C'est pour compléter le billet précédent, parce qu'il demeure un mystère dans la vérité révélée que subsiste notre désir, que nous sommes en chemin vers ce qui reste "la joie des bienheureux".

(1) Ibid p.71

27 juillet 2007

Dévoilement - III


Pour Saint Irénée : « le dévoilement n’est pas une totale mise en évidence » (1). A ce jour où nous contemplons ce merveilleux texte sur la rencontre de Moïse avec Dieu, on perçoit la subtilité de la révélation, progressive jusqu'à celle de l'homme-Dieu. Mais là encore, le Christ en croix n'est pas la Lumière infini de Dieu. Il est la pierre angulaire, l'unique médiateur de la lumière divine, tout en laissant l'homme libre du saut de la foi. En cela il reste pour moi chemin...

(1) Cité par Balthasar, ibid p. 70

26 juillet 2007

Dilection diffère de condilection

« il y a condilection à proprement parler lorsque deux amis en aiment un troisième dans une concorde de la dilection, dans une communauté de l’amour et que les affections des deux premiers s’unifient dans l’incendie de ce troisième amour » (1)
Pour Hans Urs von Balthasar, c’est seulement de cette manière que Richard dépasse la forme de l’amour déjà connue dans l’Antiquité et qu’il atteint celle du total oubli de soi, qui est la charité chrétienne, dont la perfection se trouve en Dieu. Dans cet amour, il voit aussi la plénitude de la Gloire.

(1) Richard de Saint Victor, De Trin. III, 19 cité par Hans Urs von Balthasar, Th II, p.40
cf. ibid II, 4 Hans Urs von Balthasar, Th II, p.40

25 juillet 2007

Pesée relative

"Une once d'action vaut mieux qu'une tonne de théories...".(1) Cela renvoie à Pascal, qui après avoir publié ses pensées s'est retiré du monde pour vivre la charité auprès des plus pauvres. Ce blogue ne vaut rien s'il ne suscite en moi (ou en vous) de passer à l'action...

(1) Friedrich Engels

24 juillet 2007

Fécondité


La fécondité n’est pas seulement la loi propre de la vie organique mais également – idée reprise par Scheeben – celle de la vie spirituelle. Elle peut être, pour lui, engendrement dans le beau et par là même production d’un fruit (1).

On retrouve ce débordement de l'Esprit que je commentais dans la structure économique trinitaire. Je ne peux concevoir que le don du Père dans le Fils ne donne pas lieu à un débordement plus grand, qui reste intra-trinitaire. Il est fécond par essence, et nous en percevons les fruits, miettes d'un pain partagé, goutte d'un fleuve jaillisant, étincelle d'une lumière qui nous enveloppe...

(1) Cité par Hans Urs von Balthasar, ThII, p.63

23 juillet 2007

Pastorale

« Le devoir absolu de ceux qui sont parvenus à la plénitude de la foi est d’aider les autres à poursuivre la route » (1)

La grande difficulté est de trouver le moyen d'être passeur de Dieu, pour reprendre l'expression de Théobald. C'est l'une de mes préoccupations principales, celles qui a motivé la publication de "Chemins d'Humanité, chemins vers Dieu". Parce que l'on exporte pas ses convictions. On peut juste transparaître d'une lumière qui nous dépasse, mais qui est avant tout reçue et donc intransmissible sauf si celui qui en est à l'origine, trouve chez l'autre une porte d'entrée, qui sera peut-être différente de celle qui nous a donné accès à la lumière. Nous sommes des amateurs...

(1) Hans Urs von Balthasar, Théologique II, p. 32

22 juillet 2007

Aimer


« le mot ultime qui lie Dieu et l’homme est en même temps le mot décisif entre l’homme et l’homme : il s’agit d’aimer (agapân) »(1)

Sans commentaires...

(1) W. Grundman, Das Evangelium nach Markus, dans Theologisches Hand Kommentar zum Neuen Testament II, Berlin, 1965, 252

21 juillet 2007

Charité

Il ne peut y avoir de charité (caritas) entre moins de deux personnes, car on ne peut dire de personne qu’on éprouve de la charité pour soi-même ; bien plus, l’amour (dilectio) tend vers l’autre afin d’être charité (caritas). (1)

(1) d'après Grégoire le Grand, In Evang. 17,1 (PL 76, 1139) cité par Hans Urs von Balthasar, Th. II, p. 39

19 juillet 2007

Les entrailles de Dieu

L’Ancienne, comme la Nouvelle Alliance (Lc 1,78) parlent des « splanchna », de l’intérieur, des entrailles de la miséricorde de Dieu et le mot est employé aussi pour désigner la pitié de Jésus envers les pécheurs et les malades. Ainsi pour Balthasar, « le portrait de Dieu est le parfait contre-pied de l’intouchable du néo-platonisme qu’elle que soit la forme dont il rayonne dans son isolement » Avec le Ps 145,9 ajoute Hans Urs von Balthasar, on chante : « sa miséricorde règne sur toutes ses œuvres » Ps 145,9. (...) Le cœur de Dieu devient transparent pour nous dans les paraboles du bon Samaritain, du Fils prodigue ou de la recherche de la brebis perdue.

Ibid p.156

18 juillet 2007

La vérité unique

« La vérité unique - explicitation du Père par le Fils - elle-même explicitée par l’Esprit est finalement vérité trinitaire, mais en tant que a-lêtheia (dévoilement), révélée dans le monde et pour le monde ». (1)

Balthasar souligne ainsi à la suite de Jn 1,14 que la grâce-charité (Charis) et (la vérité dévoilée) l’alêtheia ont atteint leur plénitude (plêrês) dans le Fils incarné du Père.(2)

Le théologien ajoute non sans raison que cette vérité devient plénitude « seulement lorsque le Père se dévoile intégralement dans le Fils devenu pleinement homme pour en être l’interprète et lorsque cette plénitude est susceptible d’être « reçue » par l’homme grâce à l’Esprit Saint ».

(1) Hans Urs von Balthasar, Théologique II, ibid p. 13ss

(2) Je note d’ailleurs que la traduction de ce verset par la nouvelle Bible de Bayard parle tendresse et de fidélité. Il me semble que traduire grâce-charité en tendresse est intéressant mais que par contre le transfert qui va de vérité à fidélité est peut-être un raccourci pastoral intéressant mais qui en limite le sens. La Tob, quant à elle se contente de parler de grâce et de vérité.

17 juillet 2007

Esprit – source de vie

« En plus de l’eau et du sang qui coulent de la plaie du côté, l’Esprit rend témoignage, parce que l’Esprit est vérité (1 Jn 5,6) » (1). On peut ajouter que l’eau et le sang ne sont de fait que le signe visible du don de l’Esprit. Ils préfigurent la fécondité de Dieu sous toutes ses formes trinitaires, procédant de l’amour du Père dans le Fils et procédant de l’amour du Fils au-delà de sa mort et dans sa résurrection.

Pour Hans Urs von Balthasar, l’Esprit s’est « ex-spiré à la mort de Jésus » (2) comme l’indiquerai Jn 19, 30 (« il rendit le souffle ») ou Lc 23,46 (Je remets ton souffle entre tes mains).

(1) Hans Urs von Balthasar, Théologique II, p. 12
(2) ibid p. 17

16 juillet 2007

"Je suis la vérité"

Nous arrivons presque à l’issue de notre lecture de la trilogie balthasarienne avec l’avant dernier tome de la troisième partie : La Théologique, II (1). Hans Urs von Balthasar commence (2) par une question fondamentale. De qu’elle droit, Jésus-Christ ose-t-il dire : « je suis la vérité » (Jn 14,6) ? Pour le théologien, cela doit « s’enraciner d’en haut, suivant le mouvement de quelqu’un qui est venu là pour devenir, sur terre, cette vérité est pour en témoigner ».

Il me semble que cette affirmation interpelle dès le départ notre foi. Nous ne pouvons entrer dans cette dynamique que par un acte de fiance, de foi…

(1) La Théologique, II – Vérité de Dieu, Culture et Vérité, Traduction Béatrice Déchelotte et Camille Dumont, s.j., Namur février 1995, titre original Théologik II – Warheit Gottes, Johannes Verlag, 1985. Nous citerons plus loin cet ouvrage sous la référence « Théologique II ».

(2) Ibid p. 9

15 juillet 2007

Beauté

Qui peut dire la signification d’une symphonie de Mozart ? Et pourtant chaque note est pleine de sens nous rappelle Hans Urs von Balthasar. Plus l’œuvre est parfaite, plus aussi son contenu à interpréter est inépuisable.

Il conçoit alors la beauté comme le « rayonnement inexpliqué du foyer de l’être sur le plan extérieur de l’image ». Un rayonnement qui s’imprime sur l’image elle-même et « lui confère une unité, une plénitude et une profondeur représentant bien plus que ce que l’image en elle-même contient. Elle est généralement ce qui donne à la vérité le caractère permanent d’une grâce ». (1)

Cela fait résonner en moi ce que je me plais à affirmer sur le « je te reçois et je me donne à toi ». On reçoit infiniment plus que ce que l’on ne pourra jamais donner, parce que le don de l’autre n’est que la face visible du don de Dieu. L’autre est image d’un mystère plus grand, plus infini qui l’habite et le transcende.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p.149-150

14 juillet 2007

La source

De son créateur, l’homme a reçu, pour sa route, « la grâce de participer à la fécondité inépuisable de sa source ». Il possède en soi une richesse qui ne s’épuise pas. Pour Hans Urs von Balthasar, il a toujours « une ouverture secrète, par où entrent à partir de l’éternel des provisions de sens constamment renouvelées. » En cela, il ne peut, selon le théologien, « s’enfermer dans le silence » (1). Il semble obligé de se plier à la loi qui se manifeste à lui. Cela ne l’empêche pas cependant de choisir de résister et de faire le tri, de passer au dessus, d’oublier. (2) Il me semble, pour reprendre l’image développée dans les billets précédents, qu’il s’enferme surtout dans cet aveuglement déjà décrié par Jésus. L’homme résiste à Dieu. C’est sa liberté, mais j’ajouterais aussi, c’est profondément humain. Et il nous faut trouver en nous, tous les moyens possibles pour désensabler la source. L’enjeu est de retrouver cette fraîcheur juvénile qui nous faisait voir Dieu dans l’irruption fragile de toute beauté.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p.114-115
(2) cf. chez P. Ricœur, Le temps et l’oubli

13 juillet 2007

Iceberg

J’ai longuement développé dans « Chemins d’humanité, chemins vers Dieu » le concept de tours : cette carapace humaine qui s’enferme et se protège derrière ses certitudes et son savoir. Peut-être qu’il faut relever, au-delà de cette apparence, l’immense fragilité de l’être. C’est peut-être une manière d’excuser cette construction arrogante. Parce que l’homme est fragile, sensible, il ne résiste à l’agression du monde qu’à travers l’édification de ses propres défenses. Et cette apparence masque l’immense iceberg de l’être. On n’aura jamais fini de percevoir, au-delà des apparences, l’insondable et immense mystère de l’être humain.

12 juillet 2007

Illusions

Pour le théologien, « la pensée technique moderne croit être vraiment au fond d’un domaine entier de l’être ; elle estime l’avoir maîtrisé au point qu’il ne recèle plus aucun mystère » (1). Il me semble que cette toute-puissance humaine ne peut finalement être ébranlé que par l’interpellation de la toute-faiblesse. Car ce n’est pas lorsque l’homme est tout puissant qu’il s’ouvre à un ailleurs. C’est probablement lorsqu’il chute, qu’il se blesse, que peut se produire l’interpellation du kérygme.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p.108

11 juillet 2007

Révélation

De la graine à la plante, de la plante à la fleur se dit le « message sans doute le plus éloquent de la nature muette » et « quand la forme parfaite en soi penche vers son déclin et, tout juste à ce moment, alors que nous pressentons la mort, elle nous surprend en livrant son fruit, auquel un double sens est lié : être consumé dans la terre en vue d’une nouvelle naissance, ou être consommé dans la bouche, pour la nourriture d’êtres plus élevés » (1) C’est pour Hans Urs von Balthasar le mystère de la vie. Cette vérité est dévoilement. Le vivant se dévoile simplement par sa vie en acte, « il ouvre son sens degré par degré, avec une clarté presque excessive ». Pour lui, ajoute-t-il plus loin, la vérité « se trouvera toujours infiniment plus riche et plus étendue que ce qu’on arrive à en percevoir ».

Je trouve là encore que l’analogie entre l’humain et le divin est porteuse de sens. Comme une hyperbole qui nous fait prendre conscience de cette double tension du don pascal : être consumé dans la terre pour renaître à la vie et être partagé comme nourriture pour les hommes…

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p. 91 et 93

10 juillet 2007

Désacralisation

Hans Urs von Balthasar s’insurge contre la perte chez l’homme de tout sens du mystère de l’être, le renoncement à l’admiration et à l’adoration. D’une certaine manière, ajoute-t-il « en accentuant si nettement la différence entre pensée profane et pensée sacralisée, comme le fait Bergson, on pose en absolu la faille qui les sépare et l’on ne veut plus aucun moyens d’y poser remède. On coupe définitivement en deux ce que Thomas d’Aquin regarde comme une unité indissoluble, c'est à dire l’unité de la fonction judicative de l’intellect et la fonction réceptrice. On arrache ainsi à la pensée rationnelle son caractère de mystère, on enlève à la pensée intuitive et compréhensible sa crédibilité, sa structure logique, en la condamnant à devenir marginale et irrationnelle ». Il conclut que pour lui « ce fut toujours une saine philosophie de ne voir, dans ces deux versants de l’être, aucune contradiction ni la moindre opposition ». (1)

Je ne sais si le problème réside actuellement dans la perte du sacré et de toute admiration. Il s’agit pour moi plutôt d’une vanité qui refuse de se considérer comme « dépendant » de tout être qui mettrait en danger l’individu dans sa toute-puissance. Il me semble que nous venons d’atteindre le sommet de la tour de Babel. Plus rien ne retient l’homme et le sacré n’a tout simplement plus sa place, sauf à l’heure des « trois failles », où, pour reprendre les termes du Cardinal Daniélou, il est touché dans sa chair (la naissance, l’amour et la mort). Alors s’ouvre une fenêtre sur la transcendance… Essayons de favoriser l’entrebâillement par une révélation qui puisse atteindre le cœur.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p. 88

09 juillet 2007

Ouverture et mysticisme

Le risque de cette réceptivité est peut-être de tomber dans le sensible, dans l’absolu des sens qui risquent de nous éloigner du réel, du temps et de l’instant. C’est pourquoi le théologien insiste pour dire qu’il n’y a pas d’autre connaissance de Dieu « que celle qu’on obtient par la médiation de la contingence du monde et il n’en existe pas d’autre capable de conduire à Dieu par une voie plus directe » (1) C’est peut-être l’erreur du bouddhisme, qui en nous retirant du réel pense trouver ailleurs ce qui n’existe que dans la communion… Le danger de tout mysticisme est là.

C’est pourquoi, Hans Urs von Balthasar insiste avec raison sur le fait que pour atteindre une quelconque ressemblance avec Dieu tout sujet doit être « premièrement arraché à lui-même et jeté vers le dehors. Il prend conscience de cette ressemblance divine exactement dans la mesure où il constate sa propre présence à l’autre, et donc quand il confesse sa réalité de créature » (2) J’ajouterais que cette réalité de créature ne peut être conçue en soi, sans la prise de conscience des « autres » créatures…

(1) et (2) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p.53

08 juillet 2007

Ouverture et décentrement

Quelle peut être le sens d’un décentrement véritable. Peut-on paraphraser les termes de Balthasar et concevoir la réceptivité comme quelque chose qui peut faire de nous un « espace éclairé absolument vide » au point qu’il faille « que quelque chose y brille pour qu’on s’aperçoive du rayonnement lumineux » (1) Il me semble que pour en arriver à ce niveau de détachement, il faut percevoir combien nous ne sommes que peu de chose et que ce qui est en nous de bon nous vient d’ailleurs. Alors peut-on arriver à cette transparence qui fait rayonner la lumière qui en nous vient d’ailleurs. On rejoint alors ce que suggère plus loin Balthasar : « Le sujet qui s’ouvre à la vérité éprouve précisément à son contact, tout le contraire d’un sentiment de maîtrise dominatrice épuisant son objet. Il a plutôt l’impression paradoxale d’accomplir un progrès véritable dans la connaissance et le savoir (…) une extension de plus en plus large et infinie. » (2).

Ce qui compte alors, c’est peut-être de rester ouvert, les sens entièrement tournés vers la réceptivité de ce qui, venant d’ailleurs, nous donne d’être, de vivre et de désirer. Une ouverture à toute vérité possible qui devient « participation finie à la lumière infinie »

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p.49

(2) Ibid p. 50-51

07 juillet 2007

Passivité

Je ne peux plus lire le mot passivité sans que résonne à mes oreilles l’expression lévinassienne de « passivité plus que passive » qui habite Autrement qu’être et au-delà de l’essence. Il ne me semble pas qu’Hans Urs von Balthasar s’éloigne de ce concept quand il considère que la passivité « permet de recevoir comme un don toujours plus enrichissant ce qui lui est offert par le Tu » (1)

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p.48

06 juillet 2007

Dévoilement - II

Pour Hans Urs von Balthasar, l’homme, en devenant apte à se mesurer lui-même, et après s’être « dévoilé à ses propres yeux » devient « sujet ». « En se dévoilant, il devient intérieurement lumineux, il s’éclaire lui-même et se rend transparent, c'est à dire que son être à la forme particulière de la conscience ». Sur ce point, le théologien ajoute que c’est en se reconnaissant comme homme « qu’il saisit du même coup ce qu’est l’être en général et en sa totalité » (1). Ainsi mesure-t-il non seulement son propre être mais aussi foncièrement tout être. On pourrait à ce stade basculé dans ce que dit Catherine de Sienne : « Dans la connaissance de toi-même tu deviendras humble, puisque tu y verras que tu n'es rien par toi-même et que ton être vient de moi puisque je vous ai aimés avant que vous n'ayez existé. » mais ce n’est pas le propos d’Hans Urs von Balthasar qui continue sa maïeutique à petits pas. (2) Et cependant, il se trahit dans l’affirmation suivante : « Pour être capable d’éprouver et de goûter toutes les richesses de l’être, il faut une sorte de pauvreté, une sensibilité pour ce qui est autre et conduit plus loin, une aptitude à écouter une révélation étrangère, une conviction d’être obligé de toujours apprendre, et d’en être capable » (1)

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, ibid, p.46-7

(2) Sainte Catherine de Sienne (1347-1380), tertiaire dominicaine, docteur de l'Église, co-patronne de l'Europe in Dialogues, ch. 4 (trad. Seuil 1953, p. 37 rev)

05 juillet 2007

Vérité - II

Pour le théologien, la seconde propriété de la vérité, après l’absence de repli sur soi (alêthéia) c’est 'emet' : on peut faire confiance, se reposer sur. Lié le dévoilement à la confiance, c’est introduire pour moi la condition de tout dévoilement. Il ne peut y avoir de vérité sans fiance et l’échange de la confiance, de la foi, est terreau de toute révélation. La fidélité, la constance, la solidité des rapports humains ne peut s’éprouver que dans le temps. Et le temps est ce qui donne à l’échange, son poids, sa mesure.

04 juillet 2007

Dévoilement - I

Pour Balthasar, le sens même de la vérité se définit comme un dévoilement, une mise à nue, une ouverture. En cela elle est absence de repli dans l’être (a-lêtheia) (1). Toute son analyse va porter sur ce dévoilement dans une tension entre la pudeur, l’intimité et la révélation. Ce qui me frappe c’est peut-être la puissance à ce niveau de l’analogie entre le dévoilement de l’homme et celui de la vérité divine. On touche à la puissance de l’image, même anthropocentrique dans l’expression de la théologie.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, Culture et Vérité, Traduction Camille Dumont, s.j., Namur 1994, Théologik – Warheit des Welt, Johannes Verlag, 1985, p.37-8

03 juillet 2007

Travail de la grâce

Nous continuons notre cheminement à travers l’œuvre d’Hans Urs von Balthasar en abordant cette fois le troisième triptyque de sa trilogie : Theologik et en particulier son premier tome sur la Vérité du monde.

Pour lui, on découvre en effet, « dans le domaine naturel, une ampleur, une plénitude, une rareté qui permettent aussi d’apprécier pleinement le travail de la grâce : celle-ci, en effet a besoin de toute cette plénitude pour se déployer : elle la pénètre, l’informe, l’élève et la mène à son dernier achèvement. » (1). Cette malaxation de la glaise humaine, ce champ exécutoire du logos évoque pour moi ce qu’il disait plus haut, à la suite de Soloviev sur la kénose de l’Écriture. C’est dans le travail philosophique, dans la rumination de l’esprit que la théologie prend racine. Sans cela, ajoute-t-il, elle ne serait bâtie que sur « des concepts desséchés » ou se « bricolerait des bases »

(1) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, I – Vérité du monde, Culture et Vérité, Traduction Camille Dumont, s.j., Namur 1994, Théologik – Warheit des Welt, Johannes Verlag, 1985, p. 12

02 juillet 2007

Sainte Catherine de Sienne - Décentrement

[Dieu a dit à sainte Catherine :] « Tu demandes à me connaître et à m'aimer, moi, la Vérité suprême. Voici la voie pour qui veut arriver à me connaître parfaitement et me goûter (…) ne sors jamais de la connaissance de toi-même et, abaissée que tu seras dans la vallée de l'humilité, c'est en toi-même que tu me connaîtras. C'est dans cette connaissance que tu puiseras tout ce qui te manque, tout ce qui t'est nécessaire. Nulle vertu n'a de vie en elle-même si elle ne la tire de la charité ; or l'humilité est la nourrice et la gouvernante de la charité.

Dans la connaissance de toi-même tu deviendras humble, puisque tu y verras que tu n'es rien par toi-même et que ton être vient de moi puisque je vous ai aimés avant que vous n'ayez existé.
» (1)

Il me semble que l’on touche là encore au source même de ce que j’appelle le décentrement, cette plongée au cœur de soi pour sortir de la toute puissance de soi, y trouver plus grand que soi et se centrer sur cet essentiel plus profond que toute ma profondeur…

(1) Sainte Catherine de Sienne (1347-1380), tertiaire dominicaine, docteur de l'Église, co-patronne de l'Europe in Dialogues, ch. 4 (trad. Seuil 1953, p. 37 rev), source : Evangile au Quotidien du 3 mars 2007

01 juillet 2007

Fécondité spirituelle

C’est avant tout spirituellement que l’homme doit être fécond. Tel est pour lui à la fois le don et le devoir qu’il doit exécuter par obéissance envers Dieu.
Dans l’acte d’amour sexuel authentique, la part de l’homme qui a première vue n’est qu’action devient un réel don, mais seulement s’il comprend la perte de soi comme une manière de se retrouver en se donnant à l’autre. « L’homme ouvre la femme du dehors il l’a pénètre pour donner lieu au processus féminin d’enfantement qui se déroule du dedans au dehors. Les deux sont liés : chacun des deux mouvements est à la fois fin et commencement. On a de plus une dialectique entre solitude et couple : l’homme fait appel à la puissance d’enfantement de la femme pour engendrer en elle (...) dans l’acte même qui le rend agissant comme principe masculin, il manifeste à la femme la puissance qui réside en elle, tandis que la femme, en enfantant, manifeste la force de l’homme : dans l’acte de conception l’homme est actif, la femme contemplative, dans la naissance c’est l’inverse". (1)

Il me semble, même si Balthasar rejette l'intuition de K. Barth de trouver dans cette échange des éléments de comparaison avec la trinité économique semble latents. Il y a, de toute évidence depuis Genèse 2 et le Cantique des Cantiques, une analogie forte entre le mystère conjugal et le mystère divin, que l'on ne peut systhématiser, mais que l'on ne peut non plus oublier. C'est pour moi un chemin de réflexion en termes de pastorale du mariage. Non pour justifier un discours dogmatique mais pour introduire, dans un discours pastoral sur l'amour, une dimension chrétienne qui la dépasse, un sens sacramentel...

(1) Adrienne von Speyr, 80 psaumes, p. 113s cité par Hans Urs von Balthasar DDIV, p. 433

De la page à la vie

La plus grande difficulté de la lectio divina est justement dans la capacité à rapprocher le texte de notre quotidien, de notre aujourd’hui. Faire émerger un message « qui parle à mon aujourd’hui », à ma vie… Le risque est de « réduire la lectio divina à une grille moraliste voire culpabilisante ». Pour E. Bianchi, cela rendrait « stérile la possible fécondité de la lecture », alors que tout devrait nous conduire à ouvrir notre cœur et le rendre disponible « à la contemplation du visage du Christ » (1)

En conclusion, il reprend d’ailleurs les termes de Jean-Paul II, dans Novo Millennio Ineunte (2) : « Nous nourrir de la Parole pour que nous soyons des serviteurs de la Parole dans notre mission d’évangélisation, c’est assurèment une priorité pour l’évangélisation au début du nouveau millénaire »

(1) Enzo Bianchi, Ecouter la parole, Les enjeux de la Lectio Divina, Lessuis 2006, p. 92
(2) Novo Millennio Ineunte, 40 , Documentation Catholique 2240, 21 janvier 2001

PS : L'été approche avec ses périodes d'absence mais aussi des temps plus grands pour la lecture... A venir, dans Chemins de Lecture, la fin de la trilogie de Balthasar (La Théologique...), le nouveau livre de Benoît XVI,...