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29 avril 2021

Homélie du 5eme dimanche de Pâques - année b

Projet 9
Quand Jésus prononce-t-il ces phrases [du chapitre 15] que je viens de lire ? Pour Jean, ce passage est placé entre le lavement des pieds et la croix et représente une sorte de testament spirituel et d'exhortation.

Qui dit testament dit don et cela me fait toujours penser à la question que l’on peut se poser, qu’est-ce qu’a pensé le père du fils prodigue au moment où il a partagé ses biens ? Quels étaient ses dons ? 
Une réponse se trouve peut-être ici.
En effet, si l’on trouve dans la Bible nombreuses allusions à la vigne et notamment dans la parabole de la vigne et des vignerons, chez Jean, le « Je suis la vigne » (1) nous fait faire un bon (2) puisque Jésus s’identifie à elle et devient en somme la révélation de l’amour de Dieu en actes. Il est don de Dieu en vérité... la mort du Fils signant comme le don ultime du Père [avant le don de l’Esprit qui nous « relie » à celle du Fils par la magie de cette danse trinitaire que je ne cesse d’évoquer]. 
Aujourd'hui nous découvrons également ce beau lien entre la vigne et les sarments. Avec de nombreuses insistances sur le mot demeurer et donc sur le lien entre les sarments et la vigne, qu'est-ce que ça veut dire pour nous aujourd'hui ? 
Sommes-nous véritablement attachés à cette vigne ? 
Qu’est ce que la vigne pour nous ? La parole, le pain, ou plus profondément Dieu en nous ? 
Dieu vient-il demeurer en nous ? 
Nous laissons nous la place ?
Je suis d’ailleurs frappé par certaines manières de communier. Le beau sens de la main tendue pour recevoir le corps du Christ exprime notre réceptivité fragile de ce don. N’hésitons pas à nous faire temple rien que dans ce « mime » symbolique...
Mais le fond du mystère est dans ce demeurer... qui résonne avec le « où demeures tu ? » des disciples des les premiers chapitres, le «  je veux demeurer chez toi » dis à Zachée, mais aussi avec l’où es-tu originel. 
La vigne -elle la source de notre vie, est-elle le but ultime ?

Cette question, il faut l'avoir en tête quand nous lisons avec attention la deuxième lecture ou saint Jean nous propose d'aimer « en actes et en vérité ».

Car cette question de la vérité de nos actes est finalement la question des « beaux fruits » évoqués dans l’Evangile...

Il est a priori assez simple de savoir si nous aimons en actes mais c'est peut-être plus compliqué de savoir si nous aimons en vérité. Laissons cette question raisonner avec notre lien avec la vigne. Sommes-nous rattachés à cette vigne ? Est-elle la source, la sève, le point central qui vient nourrir nos actes ?
Est-elle aussi communion, danse entre nous et avec notre Dieu ?

Aimer en actes et en vérité.
Quand je parle à ceux qui préparent leurs mariages, j'aime souvent les interroger sur leur amour [avec le triple prisme de saint Augustin] : aimez-vous aimer pour la simple joie d'aimer ou d'être aimés où êtes-vous dans l'amour don, (dans l’agapè) ?

Est-ce que vous offrez des fleurs à l'autre pour avoir un retour ou par don... ? Il est peut-être plus vrai de déposer un bouquet devant la porte de la vieille voisine sans mettre un mot qui rattache ce bouquet à vous... que d'offrir des fleurs à son épouse - je ne suis pas très bon sur ce point....

Ce qui compte le plus, n'est-ce pas en effet de parvenir au don gratuit, un don où le donateur s'efface (3) Ce type d'amour est par essence celui de l'amour divin, un amour qui est par essence gratuité... c’est d’ailleurs ce que nous contemplons depuis Emmaüs, un Dieu qui se retire après la fraction du pain, c’est à dire qui donne sa vie et se retire dans le silence pour préparer la venue en nous de l’Esprit,

Ce Paul, dont nous parle la première lecture, est celui qui en parlera le mieux : "L'amour prend patience, il ne cherche pas son intérêt." (cf . 1 Co 13..)
Si nous sommes unis à la vigne, à cette vigne même que constitue le Christ qui a donné sa vie pour nous, alors notre don ne sera vrai, il prendra patience, ne cherchera pas son intérêt et sera comme le Christ un don total, alors nous aimerons en actes et en vérité, à la suite du Christ, rattachés à sa vigne.
Alors nous entrerons dans cette danse...


L’enjeu, comme le suggère une amie est bien dans ce « Demeurez en moi comme je demeure en vous », qui revient huit fois dans ce passage pour bien insister sur l’importance de ce trait d’union, cette danse, qui nous rend participant à la lumière et l’espérance qui pointe chez Jesus au delà de la trahison qui va suivre. Il est « la lumière (...) venue dans le monde pour que celui qui croit en [lui] ne demeure pas dans les ténèbres » Jn 12 (44-50).

Dieu connaît nos limites. Il nous invite à cette danse tout en sachant que nous ne savons pas danser, alors son message devient un cri à entendre dans la lignée de tous les cris et de tous les agenouillements de Dieu. C’est le cri de l’ amour du père du fils prodigue (Luc 15) : même si vous quittez la vigne, n’oubliez pas mon amour, le pain et le vin versés pour vous, ce fruit de mon amour/ de ma vigne qui vous redonnera le sens profond de l’amour...
Demeurez en moi comme je cherche à genoux, à demeurer en vous...
Le Christ parle à des disciples qui vont le quitter, le trahir...
Il vient de leur laver les pieds et il va mourir pour eux —- et pour nous —- ces paroles sont comme le cri non prononcé du père du fils prodigue.... va, vis ta vie, mais n’oublie que je t’aime en parole et en vérité...
Laissons demeurer en nous ce souvenir, faisons le habiter en nous...
Car nos vies ne porteront fruits, ne seront en vérité que si Dieu demeure en nous. Pas par un rite, un bref passage dominical à l’Église pour nous rassurer mais parce que Dieu aura SA place en nous, habitera chacun de nos actes....
Ouvrons nos mains, mes surtout nos cœurs à ce Dieu qui se donne...

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(1) cf. Zumstein tome 2 p. 98
(2) Zumstein évoque une hypertextualité et une métaphore qui danse pour moi avec les métaphores vives de Ricoeur.
PS :  Lire jean 15 ne peut se faire qu’à la lumière de cet agenouillement extraordinaire de Jean 13... son discours est loin d’être anodin, car il est encadré par un pont théologique entre l’agenouillement et la croix, le premier étant, comme je le rappelle à la suite de XLD. (4) qu’un mime de cette vigne à venir, coupée de ses sarments les plus chers et versant, au prix le plus fort, un vin nouveau qui devient fleuve au sens d’Ezechiel 47...
Il faut donc entendre derrière le cri...






(3) cf. sur ce thème les travaux de Mauss ou Jean Luc Marion, Étant -donné, op, cit.
(4) cf. Xavier Léon Dufour et son commentaire de Jean tome 2
PS : merci à l’amie fidèle, qui par ses suggestions donne du relief à ces essais d’homélies et en font un travail « collégial »

19 mai 2020

Esprit d’unité - dépouillement 5 - Au fil de Jean 14 et 15

Dans la foulée du billet précédent et en préparation de la Pentecôte à venir, il nous est donné de comprendre que l'Esprit est le ferment discret de notre unité. Ce n'est qu'à travers la renonciation à la triple tentation du pouvoir, du valoir et de l'avoir que nous pouvons entrer à suite dans le véritable dépouillement qui laisse Dieu agir, être ferment en nous de cette unité polyédrique (1) dont parle le pape François dans le sillage de ce que nous révèle Irénée : « Car, comme de farine sèche on ne peut pas, sans eau, faire une seule pâte et un seul pain, ainsi nous, qui étions une multitude, nous ne pouvions pas non plus devenir un dans le Christ Jésus (1Co 10,17) sans l'Eau venue du ciel. Et comme la terre aride, à moins de recevoir de l'eau, ne fructifie pas, ainsi nous-mêmes, qui n'étions d'abord que du bois sec, nous n'aurions jamais porté du fruit de vie sans la Pluie généreuse venue d'en haut. Car nos corps, par le bain du baptême, ont reçu l'union à l'incorruptibilité, tandis que nos âmes l'ont reçue par l'Esprit. C'est pourquoi l'un et l'autre sont nécessaires, puisque l'un et l'autre contribuent à donner la vie en Dieu. (2)

Images : Sculptures de G. Schneider (Chapelle Baltard, St Séverin)

« En effet, bien que nous soyons une multitude d'individus, et que le Christ fasse demeurer en chacun de nous l'Esprit de son Père qui est le sien, il n'y a cependant qu'un seul Esprit indivisible, qui rassemble en lui-même des esprits distincts les uns des autres du fait de leur existence individuelle, et qui les fait apparaître pour ainsi dire comme ayant tous une seule existence en lui. De même que la vertu de la chair sacrée fait un seul corps de tous ceux en qui elle est venue, de la même manière, à mon avis, l'Esprit de Dieu un et indivisible qui nous habite nous conduit tous à l'unité spirituelle. C'est pourquoi saint Paul nous exhortait ainsi : Supportez-vous les uns les autres avec amour ; rassemblés dans la paix, ayez à cœur de garder l'unité dans un même Esprit, comme votre vocation vous a tous appelés à une seule espérance. Il n'y a qu'un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, parmi tous, et en tous. Si l'unique Esprit habite en nous, le Dieu unique, Père de tous, sera en nous, et il conduira par son Fils à l'union mutuelle et à l'union avec lui tout ce qui participe de l'Esprit.
Que nous soyons unis au Saint-Esprit par une participation, cela aussi est visible, et voici comment. Si nous abandonnons une vie purement naturelle pour obéir une bonne fois aux lois de l'Esprit, ne sera-t-il pas évident pour tous qu'après avoir pour ainsi dire renoncé à notre vie propre, et réalisé l'union avec l'Esprit, nous avons obtenu une condition céleste, si bien que nous avons comme changé de nature ? Nous ne sommes plus seulement des hommes, mais en outre nous sommes des fils de Dieu, des hommes célestes, puisque nous sommes devenus participants de la nature divine.
Tous, nous sommes donc un seul être dans le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Un seul être, dis-je, dans une identité d'état, ~ un seul être dans un progrès conforme à la piété, par notre communion à la chair sacrée du Christ, par notre communion à l'unique Esprit Saint. »(3)

Qui es-tu, douce lumière qui me combles et illumines la ténèbre de mon cœur ?...
Es-tu le Maître d'œuvre, le bâtisseur de la cathédrale éternelle qui depuis la terre s'élève jusqu'au Ciel ?
Tu donnes vie à ses colonnes, qui se dressent, hautes et droites, solides et immuables (Ap 3,12).
Marquées du signe du Nom divin et éternel, elles s'élancent vers la lumière et portent la coupole qui achève et couronne la sainte cathédrale,
ton œuvre qui embrasse l'univers entier : Saint Esprit, Main de Dieu créatrice !... Es-tu le doux cantique de l'amour et du respect sacré qui retentit sans fin
autour du trône de la Trinité sainte (Ap 4,8), symphonie où résonne la note pure donnée par chaque créature ?
Le son harmonieux, l'accord unanime des membres et de la Tête (Col 2,19), dans lequel chacun au comble de la joie découvre le sens mystérieux de son être
et le laisse jaillir en cri de jubilation, rendu libre en participant à ton propre jaillissement :
Saint Esprit, jubilation éternelle (4)

(1) cf. Polyèdre dans les balises de ce blog
(2) Saint Irénée de Lyon Contre les hérésies III, 17, 1-2 (trad. SC 211, p. 331 rev.)
(3) saint Cyrille d'Alexandrie, commentaire de l'Évangile de Jean, source : office des lectures du 6eme mardi de Pâques, AELF
(4) Sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix [Édith Stein] 
Poésie Pentecôte 1937/1942 (trad. Malgré la nuit, Ad solem 2002, p. 125), source  : l’Évangile au Quotidien

14 mai 2020

Méditation du 6eme dimanche de Pâques année A - Au fil de Jean 14…

 Au fil de Jean 14 - En guise d'homélie

Projet n.4

Qui est cet Esprit Saint dont nous parle le Christ en Jean 14 ?

Est-ce la puissance de Dieu qui a placé Marie sous son ombre et nous a valu un sauveur ?
Est-ce le consolateur qui vient nous guérir de toute peine et de toute maladie ?
Est-ce l'esprit de prophétie qui nous conduit à parler en langues comme les apôtres à la Pentecôte ou à Samarie comme le raconte Actes 8 ?

La question doit rester ouverte. Car non seulement l'esprit est multiforme, mais Il ne peut se réduire à une manifestation visible. Il reste parfois dans le silence. Tout ce que l'on sait c’est qu'il repose en nous, dans le secret de notre cœur.

L'épître de Pierre au chapitre 3 nous trace un chemin :

« Soyez prêts à tout moment à présenter une défense devant quiconque vous demande de rendre raison de l'espérance qui est en vous ; mais faites-le avec douceur et respect.
Ayez une conscience droite, afin que vos adversaires soient pris de honte sur le point même où ils disent du mal de vous pour la bonne conduite que vous avez dans le Christ.
    Car mieux vaudrait souffrir en faisant le bien, si c'était la volonté de Dieu, plutôt qu'en faisant le mal.
    Car le Christ, lui aussi, a souffert pour les péchés, une seule fois, lui, le juste, pour les injustes,
afin de vous introduire devant Dieu ; il a été mis à mort dans la chair » (1 P 3).

Le Christ nous introduit à Dieu.
Il y a là une clé d'interprétation qu'il ne faut pas négliger.
Attention à ne pas séparer l’Esprit du Christ.
Attention à ne pas utiliser l'Esprit comme instrument de puissance, de prosélytisme ou comme bouclier protecteur.

Il souffle où il veut l'Esprit. Mais il n'est ni dans le Pouvoir, l'excès d'autorité, ni dans le valoir, l'excès de science apparente, ni dans l'avoir, comme quelque chose que l'on détiendrait plus que les autres. L'esprit reste don fragile, remis miraculeusement aux païens dans le récit de Luc, donné silencieusement à notre baptême. Diadoque de Photicé le décrit comme un cadeau caché. Il est en nous. Nous devons le découvrir au creux de nous mêmes comme cette perle précieuse ou ce trésor au fond du champ (Mat 13).

L’Esprit nous vient de Dieu. Il nous conduit à Dieu. Il participe à cette dynamique particulière que les Pères de l’Église appellent la circumincession (cf. Danse trinitaire).  Notre accès à lui vient surtout par l'unique porte du berger (cf. Jn 10) celle qui a résisté à la tentation du pouvoir, du valoir et de l'avoir (cf. Luc 4, Mat 4) et nous conduit à l'humilité, le détachement, le dépouillement, la kénose et la charité :
    « Si vous m'aimez, vous garderez mes commandements.
    Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous :
    l'Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous, et il sera en vous.
    Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous.  D'ici peu de temps, le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi.
    En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi,
et moi en vous. Celui qui reçoit mes commandements et les garde, c'est celui-là qui m'aime ;
et celui qui m'aime sera aimé de mon Père ; moi aussi, je l'aimerai, et je me manifesterai à lui. »(Jn 14, 15-21)

Si vous m'aimez il sera en vous...
A l'aube de sa Passion, alors que le m'aimes-tu jusqu'au bout sera posé à Pierre, par trois fois (cf. J’en 21), ne brandissons pas trop vite notre aptitude à dire oui.

La présence de l'Esprit ne se juge qu'à ses fruits. Soyons honnêtes sur ce point. « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis afin que vous alliez et portiez du fruit » (Jn 15). 

L'Esprit ne nous appartient pas. Il est en nous, mais nous ne pouvons le saisir. Oubliant le chemin parcouru, tâchons de le saisir comme il nous a saisi : « Je ne prétends pas avoir déjà atteint le but ou être déjà devenu parfait. Mais je poursuis ma course pour m'efforcer d'en saisir le prix, car j'ai été moi-même saisi par Jésus-Christ
‭‭Philippiens‬ ‭3:12‬ ‭»
 Il faudrait dire chaque matin : « Mon Dieu, envoyez-moi votre Esprit Saint qui me fera connaître ce que je suis et ce que Vous êtes... » Une âme qui possède le Saint-Esprit goûte une exquise saveur dans la prière : elle ne perd jamais la sainte Présence de Dieu.(1)

(1) St Jean Marie Vianney, Morceaux choisis, Téqui 1999, p. 67

Rappel : l’interêt de ce blog, désormais vieux de 15 ans, réside surtout dans l’interactivité des balises (tags) de la version web qui comptent maintenant près de 2.500 billets 

13 mai 2020

Au fil de Jean 15 - La vigne - saint Cyrille d’Alexandrie

Dans la suite de nos contemplations de l'Église à construire, une Église faite de pierres vivantes ce commentaire de Cyrille est une belle exhortation.
« Le Seigneur dit ~ qu'il est lui-même la vigne, pour nous apprendre à nous attacher à son amour et nous montrer combien d'avantages nous retirons de notre union avec lui. Et il compare aux sarments ceux qui lui sont unis, ajustés en quelque sorte et fixés en lui : ceux-là sont déjà participants de sa nature du fait qu'ils ont reçu le Saint-Esprit en partage. Car ce qui nous unit au Christ Sauveur, c'est son Esprit Saint.

L'union avec la vigne de ceux qui se joignent à elle vient de leur libre choix ; mais de la part de la vigne à notre égard, cela vient de sa nature. C'est en vertu d'un bon choix que nous nous avançons par la foi, et nous devenons de sa race parce que nous avons reçu de lui la dignité de fils adoptifs. En effet, selon saint Paul, celui qui s'unit au Seigneur ne fait plus qu'un esprit avec lui.

En d'autres endroits de l'Écriture, par la voix du Prophète, le Christ est appelé base et fondement. En effet, c'est sur lui que nous sommes bâtis, et nous sommes appelés pierres vivantes et spirituelles, en vue d'un sacerdoce saint, pour devenir une habitation de Dieu dans l'Esprit, et nous ne pouvons pas entrer dans cet édifice si nous n'avons pas le Christ comme fondation. C'est dans le même sens que Jésus dit ici qu'il est la vigne qui engendre et nourrit les sarments.

En effet, nous avons reçu la nouvelle naissance de lui et en lui, dans l'Esprit, en vue de porter des fruits de vie ; non pas de la vie ancienne et dépassée, mais de la vie renouvelée par la foi et l'amour envers lui. Maintenons-nous dans cet état, greffés en quelque sorte sur le Christ, attachés coûte que coûte au commandement sacré qui nous a été donné. Évertuons-nous à conserver les avantages de notre noblesse, c'est-à-dire à ne laisser aucunement contrister le Saint-Esprit qui a fait son habitation en nous, et par qui l'on sait que Dieu demeure en nous.

Comment nous sommes dans le Christ, et lui en nous, le sage saint Jean nous l'a montré par cette parole : Nous reconnaissons qu'il demeure en nous, et nous en lui, parce qu'il nous a donné son Esprit. ~

De même que la souche de la vigne fournit et distribue aux sarments la qualité naturelle qui lui est propre et qui est en elle, c'est ainsi que le Verbe, Fils unique de Dieu le Père, introduit chez les saints une sorte de parenté avec sa nature en leur donnant l'Esprit, surtout à ceux qui lui sont unis par la foi et par une parfaite sainteté. Il les nourrit et fait progresser leur piété, il développe en eux la science de toute vertu et de toute bonté.(1) »

(1) Cyrille d'Alexandrie, commentaire de l'Evangile selon saint Jean, source : office des lectures, 5eme mardi de Pâques AELF

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30 mai 2019

Homélie de mariage - 4 - Hébreux 13 et Jean 15

Extrait de l’Ébauche pour la quatrième. Commentaires bienvenus...
——-
Qu'est ce qui fait ce lien très particulier qui vous rassemble ? Deux choses, à mon avis :
  1. Votre générosité débordante, l'un comme l'autre
  2. La complémentarité de vos tempéraments 
Prenez le temps d'approfondir cela...

Votre générosité vient de cet amour que vous partagez. Elle en dépend. c’est de votre amour, puissant, indéfectible que vient cette force. Et plus encore, c’est de Dieu même que vient ce don. Même si vous en oublierez parfois la source, sachez qu’il vous a choisis l’un pour l’autre, qu’il vous a réunis, qu’il vous porte dans son cœur, vous accompagne et vous accompagnera...

J’aimerais revenir sur ces belles lectures que vous avez sélectionnées. J’évoquais votre générosité, elle transparaît aussi dans la lettre de saint Paul aux Hébreux que nous venons d'entendre.
 « Frères, (...) N’oubliez pas l’hospitalité : elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez eux des anges. »

[je ne sais pas si vous voyez des anges chez vous. Moi je les ai aperçus. Peut-être parce que j’ai des yeux pour cela... il y a peut-être votre grand-mère, si discrète et pourtant toujours là, vos enfants, des petits anges parfois... il y a aussi le grand-père trop vite parti, mais qui est là - j’en suis certain - et qui vous porte dans son cœur, parce qu’il est auprès de Dieu et que ma foi me fait affirmer qu’il se penche, maintenant avec Jésus sur la rambarde du ciel et qu’il prie avec vous, pleure avec vous, danse avec vous aussi.

Si je me permets de dire cela, c’est parce que Paul le dit aussi aux Hébreux : « Dieu lui-même a dit : Jamais je ne te lâcherai, jamais je ne t’abandonnerai. C’est pourquoi nous pouvons dire en toute assurance : Le Seigneur est mon secours, je n’ai rien à craindre ! » (Heb 13)

Ce que dit Paul dans sa lettre, « Jésus le disait [aussi] à ses disciples : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. » c’est dans l’Évangile que vous avez choisi. 

L’amour de Dieu n’est pas un sens unique. C’est comme une danse. Parce qu’il nous aime, il nous invite à danser avec lui. 

« Demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour. Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. (Jn 15)

Sébastien et Jennifer, tout à l’heure vous allez prononcer un oui qui vous engage pour le reste de votre vie. Nous en avons beaucoup parlé samedi dernier et je suis convaincu de notre discussion que vous en mesurez l’enjeu...

Ce sera, je le sais un chemin de joie et de larmes parfois. Toute vie, dans l’amour n’est pas un long fleuve tranquille. Ce que vous avez ciselé l’un avec l’autre, ce que vous avez construit, constitue une base solide pour aborder les mois, les années à venir. N’oubliez pas la joie d’aujourd’hui, n’oubliez pas ce que vous avez tissé hier, n’oubliez pas, surtout, que Dieu est là, à vos côtés, même s’il reste discret parfois. Il a confiance en vous, parce que, depuis votre baptême, son amour vous habite, parce que vous demeurez en lui.

Votre amour est signe. Il déborde déjà de générosité. Soufflez sur cette flamme, elle est image de l’amour de Dieu. C’est en cela que votre amour prend sa dimension de sacrement. La meilleure traduction du mot sacrement c’est signe efficace.

13 novembre 2018

Au fil de Luc 17, 10 - serviteur fidèle

Quel est notre chemin sur cette terre ? Nous rêvons souvent de faire de grande chose et oublions que tout vient de Dieu.
S'il y a une chose qui compte dans nos vies, c'est bien d'être attentif à la grâce.
    « Car la grâce de Dieu s'est manifestée
pour le salut de tous les hommes.
    Elle nous apprend à renoncer à l'impiété
et aux convoitises de ce monde,
et à vivre dans le temps présent de manière raisonnable,
avec justice et piété,
    attendant que se réalise la bienheureuse espérance :
la manifestation de la gloire
de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus Christ.
    Car il s'est donné pour nous
afin de nous racheter de toutes nos fautes,
et de nous purifier
pour faire de nous son peuple,
un peuple ardent à faire le bien. » (Tite,  2, 11-14)
           
Au terme d'une vie bien remplie nous pourrons dire :
"Nous sommes de simples serviteurs :
nous n'avons fait que notre devoir" » (Luc 17, 10)

Et nous aurons alors rembourser la dette que le Seigneur n'exige jamais, mais qui s'est contracté avec notre créateur pour toutes les grâces reçues.

C'est à l'aurore de nos vies que nous entendrons alors le prix du serviteur fidèle : «Je ne vous appelle plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître. Je vous ai appelés amis, parce que je vous ai fait connaître tout ce que j'ai entendu de mon Père.» (Jean 15, 15)


PS : il n’est pas neutre que Jésus emploie le « nous » et non le « vous » en Lc 17,10, soulignait aujourd’hui un commentateur sur RND. Est-ce à dire qu’il se met dans le lot ? Ce ne serait pas impossible à l’aube de sa passion.

19 juin 2016

La Croix, source de toute grâce

En ce jour,  contemplons la Croix,  buvons à cette source offerte. Comme nous y invite la première lecture par son "Ils regarderont vers moi. Celui qu’ils ont transpercé" (1), la liturgie nous invite à la fois à percevoir ce qui en nous a rendu possible la mort du Christ et ce qui, de cette mort peut nous sauver. Alors nous pourrons nous lamenter sur ce qui nous éloigne de Dieu : " Ils feront une lamentation sur lui, comme on se lamente sur un fils unique ; ils pleureront sur lui amèrement, comme on pleure sur un premier-né.
Ce jour-là, il y aura grande lamentation dans Jérusalem (...) Ce jour-là, il y aura une source qui jaillira pour la maison de David et pour les habitants de Jérusalem : elle les lavera de leur péché et de leur souillure" (1).
Cette lettre de Zacharie est la clé de notre soif vers Dieu.  Et le psaume du jour (63) n'est qu'une illustration de cette soif qui devrait nous habiter. Goûtons à cette prière,  faisons la nôtre :
"Dieu, tu es mon Dieu,
je te cherche dès l'aube :
mon âme a soif de toi ;
après toi languit ma chair,
terre aride, altérée, sans eau.
Je t'ai contemplé au sanctuaire,
j'ai vu ta force et ta gloire.
Ton amour vaut mieux que la vie :
tu seras la louange de mes lèvres !
Toute ma vie je vais te bénir,
lever les mains en invoquant ton nom.
Comme par un festin je serai rassasié ;
la joie sur les lèvres, je dirai ta louange.
Oui, tu es venu à mon secours :
je crie de joie à l'ombre de tes ailes.
Mon âme s'attache à toi,
ta main droite me soutient"(2)
Que nous apporte alors la deuxième lecture ?
"Frères, tous, dans le Christ Jésus, vous êtes fils de Dieu par la foi.
En effet, vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ;
il n’y a plus ni juif ni grec, il n’y a plus ni esclave ni homme libre, il n’y a plus l’homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu’un dans le Christ Jésus.
Et si vous appartenez au Christ, vous êtes de la descendance d’Abraham : vous êtes héritiers selon la promesse".
Si nous buvons à la source du Christ,  ni nous croyons vraiment que le sang et l'eau versé est ce fleuve immense décrit par Ézékiel 47, alors nous pouvons réaliser ce à quoi nous sommes appelés : "appartenir au Christ,  non pas sous forme d'esclave,  mais dans la direction de Jean 15, 15, comme des "amis", c'est à dire en chemin vers un amour qui ne cherche pas "son intérêt" (1 Corinthiens 13).
Cette conversion intérieure nous permet d'affirmer à la suite de Pierre (Lc 9, 20) : tu es l'oint de Dieu, le messie. Non pas seulement comme David a été oint (1 Samuel 16) mais par cette double onction du Père et de l'Esprit qui fait de lui le fils unique et nous invite à entrer dans le cercle trinitaire
(1) Livre de Zacharie 12
(2) Psaume 63(62),2.3-4.5-6.8-9.
(3) Lettre de saint Paul Apôtre aux Galates 3,26-29.
Textez, source AELF

09 mars 2016

Mort et mission

On connaît probablement l'interprétation de Bernard Sesboué sur la conscience progressive du Christ. J'apprécie ce que dit Balthasar sur le même thème, car il rejoint mes travaux en cours sur l'humilité de Dieu : "L'homme Jésus se comprend lui-même (...) comme ce qu'il est : La Parole du Père adressée au monde, dont la mission comporte le destin du grain de froment : mourir pour le monde et par là porter du fruit. Par là même il fait l'expérience de Dieu, non dans une vision objective, séparée de sa propre réalité, mais dans une humilité qui ne réfléchit pas sur elle-même (...) mais laisse en soi toute la place à Dieu et éprouve en sa propre réalité fonctionnelle la réalité du Dieu qui l'envoie, dispose de lui et l'engendre  éternellement. (...) la transparence de son humilité est expression de son assomption" (1)

On retrouve là l'accent de Ph. 2, 7, mais aussi cette idée de décentrement propre à Jean 15 et 16, où le Fils se love dans le projet du Père. 

(1) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Apparition,  tome 1, Cerf,  Ddb, 1965-1990, p. 275 (GC1)


15 décembre 2015

Image et ressemblance - 2

"Comme moi et toi nous sommes uns, ainsi qu'eux aussi soient un avec nous". Comme le suggère Origène, cette phrase du discours d'adieu de Jésus est une invitation à progresser dans la ressemblance, pour que "semblable on devienne un" (1)

Elle rejoint les nombreuses concordances relevées dans ces lignes, depuis les Pères de l'Église jusqu'à Bonaventure et Balthasar...

(1) Origène, traité des Principes, III, 6, 1, cité par Jacques Loew, op Cit p. 88