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25 décembre 2021

Double agenouillement et ouverture - 2.23

Avant d’arriver au cœur du mystère de l’incarnation, peut-être fallait-il descendre jusqu’au point où l’on écoute, dans le silence, le bruit du monde, sa plainte, son désarroi, ses impasses et ses chemins stériles, ses fausses joies, son désespoir et plus fondamentalement la violence qui demeure. 

Ce chemin je viens de tenter de le parcourir. Ce n’est en effet qu’en descendant très bas, aussi bas que possible, dans le silence de la nuit, quand le cri de l’enfant martyrisé, abusé, violenté, ou plus sournoisement nié et tué que l’on peut comprendre l’agenouillement de Dieu devant la femme qui va porter en son sein un Sauveur.

Au delà de toutes polémiques, il est demandé à l’homme de s’interroger pour savoir comment il est possible que le Père s’agenouille aussi bas…

C’est quand on perçoit le double agenouillement de Dieu et de la femme qui,  dans leur « me voici / fiat » mêlés, que peut apparaître une lueur, un fragile rayon de lumière et que l’espérance jaillit.

La lecture très spirituelle de Luc et de Matthieu n’est-elle pas finalement au dessus de toute rationalité historique et charnelle ? 

Ne devient elle pas chemin d’espérance ? 

La kénose du Père et la réponse mariale mérite d’arrêter tout discours et de contempler à la fois dans le silence, l’innommable, l’impossible, l’imposture et l’insaisissable…

Comment l’infini s’approche-y-il de l’humain, au plus loin de toutes « périphéries » pour rejoindre sans violence ce monde pris dans le tumulte d’une suffisance.

Le double agenouillement de la femme et de Dieu, l’intercession, la rencontre, la danse, au sein même de la circumincession des Personnes divines, laisse finalement une seule voie fragile, celle de notre propre agenouillement…


À l’épaisseur du mystère et du voile qui recouvrent l’incarnation et cette question souvent discutée de celle qui s’ouvre à ce mystère, que cherche à percer les deux « évangiles de l’enfance », répond pour moi, comme en écho, deux voies / voix tout aussi fragiles, celles qui :

1. aboutit au cri / sommet sorti de la gorge du centurion infidèle (Mc 15, 39) que Marc fait suivre au déchirement du voile (*) 

2. ou l’agenouillement sponsal d’un Christ (*) qui se dépouille de son vêtement pour laver les pieds de l’homme en Jn 13, dans ce X. Leon Dufour appelle un mime d’une extrême densité symbolique.

C’est au creux de ces quatre voies, dans la polyphonie des Écritures que prend chair, pour moi, la symphonie fragile des Évangiles…(1) et que peut se concevoir ce que l’Église cherche à contempler, y compris sur la virginité. 


En ce jour du martyre des saints innocents peut on dire plus, espérer plus que de tracer un chemin fragile qui va d’un souffrant à l’autre jusqu’à la contemplation de la déréliction, ce silence de Dieu qui accompagne la mort du crucifié et nous appelle à croire que Dieu est vainqueur de la mort par ce mystère fragile qui va de l’incarnation à la résurrection ? Et qui, ce faisant, « a besoin de nos mains », comme le disait Etty Hillesum au camp de Westerbroch (2)


(*) cf. mes essais « Le voile déchiré » et « À genoux devant l’homme »

(1) un beau thème développé par Hans Urs von Balthasar dans la fin de sa trilogie 

(2) cf. Une vie bouleversée

20 avril 2021

Danse avec la nouvelle Ève - 50


«Marie, était fiancée à Joseph; avant leur union, elle se trouva enceinte par le fait de l’Esprit saint.» Matthieu‬ ‭1:18‬ ‭‬

Le commentaire de François Cassingena-Trévedy  soulève chez moi plusieurs vagues contemplatives. Écoutons-le d’abord : « Inventa est un utero habens de Spiritu Sancto » - l’homme découvrit que la femme avait quelque chose dans le ventre. Au milieu de sa province la plus familière, l’homme découvrit que la femme était une terre habitée. Et lui, l’homme du petit pays, il découvrait que la femme était habitée par l’étranger, par l’inconnu. La femme tenait du Saint-Esprit. La femme était toute chose. La femme depuis quelques temps avec quelque chose d’étrange. Quelque chose d’autre. Quelque chose. Et l’homme, un instant égaré dans le sous-bois de la femme, ne savait pas encore que cet indéfini était l’Infini même. (1)


La profondeur de ces textes suscite souvent des résonances. Ici, j’ai été un pas plus loin puisque cela rime avec d’autres échanges que je vous partage ce soir.

 

1er pas de danse

C’est peut-être ce cri de l’homme devant la femme au jardin d’Eden, cet autre, ce vis à vis(2), à la fois différente et fait de la même chair, qui nous conduit à percevoir à la fois l’altérité et notre vulnérabilité (3).

Il y a pour nous les « terreux », quelque chose à méditer qui vient fissurer nos désirs de puissance, de pouvoir et d’autorité. Elle est là, fragile parfois, vulnérable souvent, elle interpelle notre moi profond par sa différence et sa sensibilité, souvent plus intérieure, qui réveille chez nous notre propre sensibilité, ce qui peut être féminin en nous et que nous n’osons voir... premier pas d’une symphonie à construire.

 

2eme pas de danse

C’est peut-être, plus loin encore que la première Ève, cette Marie qui porte en elle l’Infini de Dieu. Première inhabitée qui interpellera toujours nos propres tressaillements intérieurs. Sans idolâtrer la « première en chemin », il faut considérer combien elle trace une route pour nous, dans cette capacité à recevoir Celui qui veut demeurer chez nous, Celui qui descends de Jérusalem à Jéricho, aux plus profond de nos sous-bois, pour dire comme à Zachée : je veux habiter chez toi. Comment recevons-nous le Verbe qui s’invite dans nos rendez-vous espacés pour danser avec nous la triple valse du croire, de l’espérance et de l’amour. Ève nouvelle qui va porter dans sa chair, le glaive d‘une présence jusqu’aux « jointures de l’âme » (Heb 4,12) et la double Pâques de l’enfantement et de la mort du Fils. Chemin qui précède notre capacité à traverser la souffrance ? (4).

 

3eme pas de danse

Peut-être cet hommage aux femmes délaissées, ignorées, méprisées par une Église qui ne cesse de croire que Jésus ne se conjugue qu’au masculin sans percevoir combien la communion et la collégialité polyédrique passe par le relèvement du féminin pour qu’enfin nos Églises retrouvent la dimension première qu’elle a perdue depuis Hippolyte de Rome (5)

 

4eme pas de danse

C’est peut-être contempler, à la suite de l’invitation du pape François, l’humilité de Joseph, silence qui permet la naissance de l’Infini chez l’autre

 

5eme pas de danse

Voir en l’autre la flamme fragile de l’Esprit qui couve doucement au cœur du silence les graines délicates semées par le Verbe, pour que le dit murmuré par Dieu devienne un Dire au sens lévinassien (6)

 

6eme pas de danse

C’est plus essentiellement la contemplation de cette danse trinitaire qui se prépare. « Les mouvements en Dieu, le simple amour du Père et du Fils ne produit qu’une « binité » (Binität). Ce qui manque, ajoute Hans Urs von Balthasar, c’est « le miracle de la fécondité, du cadeau qui dépasse l’un et l’autre ». (7) On ne peut s’empêcher de penser, quand on a la joie d’être père, à ce « toujours plus » que constitue l’enfant. Car c’est bien de la même « image et ressemblance » qu’il s’agit. Le conjugal s’épuise quand il est tourné sur soi-même et qu’il n’intègre pas le don, ce débordement que constitue toute fécondité, dont l’enfant naturel n’est que la face la plus visible.

À partir du don de l’enfant se prépare celui de l’Esprit que la liturgie nous prépare lentement à recevoir, cet Esprit envoyé au monde, invitation non contraignante à un retour. Rêve de Dieu (8) ? que l’homme réponde par sa danse à l’invitation que lui fait la danse trinitaire (9).


7eme pas de danse... suggéré dans le cadre d’une autre discussion avec Marie-Odile Dervin  qui avait « une pensée pour les couples qui ne connaissent pas la joie de donner la vie. Quand le sacrement de mariage donné l’un à l’autre se vit sous le regard de Dieu, la relation devient fécondité. »


Une belle remarque que celle-là ! Pour avoir souffert de cette non fécondité charnelle avec mon épouse - je danse avec cette idée... La fécondité est un concept large qui dépasse de loin celle de la naissance d’un enfant et en même temps elle est déchirement et vulnérabilité, soit parce que l’enfant ne vient pas (ou ne vient plus, c’était notre cas, Dieu nous ayant fait deux beaux cadeaux), soit parce que l’enfant qui naît est différent de notre rêve et nous fait grandir en grandissant...

Dieu élargit toujours notre regard, lui qui est source de nos fécondités...

Il faut néanmoins souligner combien la stérilité est d’abord souffrance. Comme toute souffrance elle passe d’abord par une saine révolte, un cri, une nécessaire conversion intérieure avant de trouver en soi l’embryon d’une réponse, souvent délicate à articuler avant de devenir chemin d’espérance. Là Dieu devient aidant.


L’enjeu de ce septième pas serait alors de trouver une fécondité commune - par l’enfant, mais plus largement par tous les fruits que Dieu nous confie et qui deviennent par nos mains une co-création...


Huitième pas de danse qui reprend celui de toute la valse (proposée par Sylvaine Landrivon, suite également à un bel échange) :

« Mouvement de danse qui commence, en effet, par la stupeur du masculin se reconnaissant autonome face à celle qui se tient devant lui, à la fois semblable et autre, issue de la même chair du premier humain. Tellement proche et pourtant si différente que cet humain, devenant « il » en vis-à-vis de celle qui naît à l’être « elle », ne sait comment entrer en dialogue ni comment s’en dissocier autrement qu’en se l’appropriant par une série de dangereux possessifs « os de mes os, chair de ma chair »

Est-ce que le masculin n’est  pas souvent  en train de lutter contre cette emprise inaugurale, sauf dans l’union des corps où se lâche sa crainte d’être privé d’autrui? 

Il ne pourra sortir de la solitude délétère qui l’enferme et n’apprendra à danser qu’en apprivoisant le rythme de la création jusqu’à ce que murmure en lui l’appel d’une valse nouvelle. Il parviendra enfin à ce à quoi ils sont tous deux appelés : une valse à trois temps, symphonie réorchestrée par les valeurs théologales que sont l’amour, la  foi et l’espérance.

 

Dieu est bel et bien le musicien dont parle Saint Irénée. La « mélodie harmonieuse »  (A.H. IV, 20, 7) que Dieu compose est nécessaire à la réalisation de l’œuvre, et n’a d’autre but que de faire danser la vie jusqu’à la divinisation de ses créatures humaines. Il nous envoie son Fils pour nous emporter dans les ondes de l’Esprit. Et la valse commence.

Au premier temps de la valse, se dit l’amour de Dieu qui, dans la création nouvelle, vient s’incarner dans le corps consentant de Marie. Femme puissante porteuse du poids (kavôd = pesant et sacré) du Dieu Unique, elle porte le Verbe qui irradie dans l’intimité de sa toute faiblesse humaine. Il vient révéler la dimension trinitaire et universelle  du Don.

Au deuxième temps de la valse, Joseph unit ses pas aux siens et sa foi virevolte dans la lumière de la bonne Nouvelle, conjuguant les charismes du masculin et du féminin pour assurer l’harmonie qui vibre dans l’inouï du don offert. Au troisième temps de la valse, la promesse de joie éternelle par le salut à jamais donné, enlace la communauté d’amour dans l’espérance apaisante.

« Rêve de valse » ou « Apothéose de la danse », il faut savoir danser sa foi comme Claude Hériard nous y invite, car la danse est la plus belle des métaphores pour exalter la beauté des harmoniques masculines et féminines au service de la gloire de Dieu.(10) ».


À méditer...


Le 9eme pas de danse que suggère ce 8ème pas est peut-être ce à quoi nous conduit tout cela, ce double agenouillement du Fils et de sa mère, « pas de danse » kénotiques où l’un et l’autre s’effacent devant l’infini de Dieu à venir, entrent dans le vrai silence, celui de l’intime et en cela dans un « fiat » à deux voix, un « tout est accompli », avant de s’effacer comme à Emmaüs et nous conduire, en « Galilée », au bout d’un long chemin, à entrer aussi dans cette kénose tant attendue de l’Église qui seule rend possible une véritable harmonie entre l’homme et Dieu...


10eme pas de danse qui nous ramène à François Cassingena-Trévedy qui fait écho au premier texte d’où est partie cette valse, de Jésus qui « dans sa mort, les yeux ouverts et loin de chercher à rentrer, à régresser dans sa mère, nous la donne [au contraire], mais incomparablement plus large » (11). Que veut-il nous dire ? Peut-être que cette matrice nouvelle est dans l’oxymore de l’effacement et de la proximité, un royaume « ouvert », un Corps, une cathédrale fragile dont nous sommes les pierres vivantes, chacune utiles, chères aux yeux de Dieu, comme nous le rappelle le pape Francois dans son insistance sur le polyèdre...


« En confiant l’un à l’autre le Bien-aimé et Marie, Jésus sur la croix offre l’universalité au peuple d’Israel que symbolise sa mère. Il donne ses fondations à notre Église précisément là... et annonce ce qu’il dira ensuite à la Magdaléenne : Son Père devient Notre Père parce que, par le lien nouveau créé à la croix, nous sommes tous devenus les frères et sœurs du Christ » (10).


Je ne trouve pas encore de 11 eme pas de danse..., à vous de l’écrire 😉

 


(1) François Cassingena-Trévedy, Étincelles III, op.cit. p.101

(2) cf. Sylvaine Landrivon, La femme remodelée

(3) voir mes échanges récents avec Isabelle Laurent et son mémoire « Vulnérabilité et unité de la personne

Une lecture des tentations du Christ au désert » Mémoire de licence canonique de théologie, Septembre 2017

(4) cf. mon « Quelle espérance pour l’homme souffrant ? »

(5) cf. sur ce point Joseph Moingt, L’esprit du christianisme, Paris, Temps présent, 2018.

(6) Emmanuel Lévinas, Autrement qu’être ou au-delà de l’essence, Poche, 1975?

(7) Hans Urs von Balthasar, La Théologique, III – L’Esprit de Vérité p. 39

(8) j’emprunte cette belle image du rêve de Dieu à François, in Un temps pour changer

(9) cf. mon livre éponyme

(10) Sylvaine Landrivon, inédit 🙂

(11) Étincelles p. 109

21 décembre 2019

Projet 3 - homélie du 4eme dimanche de l’avent

Projet 3
Quel est l'enjeu de ces quatre lectures que la liturgie nous propose à quelques jours de Noël ?

Peut être une interpellation : celle qui nous conduit à recevoir ce Dieu qui sauve...
Puis une contemplation : celle des pas de Dieu vers l'homme
Enfin une méditation : comment Joseph nous montre le chemin

Interpellation donc :
Nous allons fêter Noël. Mais la fête qui se prépare n'est rien si nous n'allons à l'essentiel : accepter ce Dieu qui sauve...

Quel enjeu pour nous ?
Il nous est donné par le psaume, retrouver la pureté intérieure :
L'homme au cœur pur, aux mains innocentes,
qui ne livre pas son âme aux idoles.
obtient, du Seigneur, la bénédiction,
et de Dieu son Sauveur, la justice.

L'enjeu de l'avent est de purifier notre cœur pour accueillir véritablement, je dirais même virginalement la venue de Dieu en nous.

C'est dans l'entretien de Jésus avec Nicodème que nous trouvons la clé de lecture de ces textes.
« personne ne peut voir le Royaume de Dieu s'il ne naît pas de nouveau.»
‭‭Jean‬ ‭3:3

Notre baptême doit être une nouvelle naissance. le renouvellement de ce qui constitue le cœur de notre état de baptisé. Purifier nos cœurs, c'est se laisser interpeler par Dieu, voir ce qui n'est pas amour en nous. Chacun d'entre nous est d'ailleurs invité avant Noël au sacrement de réconciliation qui scelle entre Dieu et nous une alliance nouvelle. Purifions notre vie. Ouvrons nos cœurs à l'esprit.

L'avent est baigné et stimulé par cette démarche d'ouverture du cœur qui naît d'une Contemplation.

Isaïe évoque la naissance d'un fils de roi qui sortira le peuple de l'exil. Mais cette prophétie n'avait jamais été pleinement réalisée car nous le savons bien, le peuple juif n'est, comme nous, rarement digne de la miséricorde divine. C'est pourquoi elle est reprise dans un autre contexte, plus large, celui du salut que Jésus Christ nous apporte.

Christ vient nous sauver.

Plus que la magie enfantine qui s'est forgée autour de Noël, ce qui nous est donné à contempler, le salut véritable n'est pas seulement la magie de Noël mais le changement de nos cœurs qui passe de la morale et le jugement à un amour plus large, celui de Joseph qui passe du jugement à la confiance, celui que nous avons aussi à trouver en nous, le chemin de la confiance au delà du doute.. celui qui est plus grand que Noël, le d'un Christ venu changer nos cœurs, le don de la Passion, d'un Christ mort pour nous et que Dieu a ressuscité.

Dieu nous sauve... Tel est le message donné à Joseph, tel est le message que nous avons à découvrir dans et au delà de Noël. Dieu nous sauve en ouvrant nos cœurs au delà d'une morale étriquée. Joseph est une belle figure à contempler sur ce chemin, vers ces fiançailles à laquelle Dieu nous invite

18 décembre 2019

Au fil de Matthieu 1 - « Dieu-avec-nous »- suite 3

Au fil de Matthieu 1 - « Dieu-avec-nous »- suite 3

En complément du corrigé

« Nous voici conviés à entrer dans l'intimité d'un couple : Marie et Joseph. Alors qu'ils étaient promis l'un à l'autre, leurs projets prennent une autre tournure. Je prends le temps de contempler Marie, sa grossesse surprenante et sa manière d'accueillir tout cela avec confiance. Comment peut-elle m'inspirer dans les situations que je ne maîtrise pas dans ma vie ?
 
Après avoir contemplé Marie, je tourne les yeux vers Joseph. Quelle aventure intérieure pour lui aussi ! Sa décision n'a pas été facile à prendre. Il est même prêt à laisser sa place à un autre car il veut être juste avec Marie et ne pas prendre un rôle qui ne semble pas pour lui. J'imagine ce qui se passe en lui, ses questions, ses déceptions et ses espérances.
 
Comme pour Marie, Joseph a besoin d'une annonciation pour entrer dans le mystère de ce qui vient d'arriver. Ce sont presque les mêmes mots que ceux adressés Marie. Pour Joseph, ce sera durant son sommeil, un moment de "lâcher-prise" pour mieux entendre le message de l'ange. Et moi, comment puis-je me mettre à l'écoute des événements et des anges de ce jour ?  (1)

Donne nous Seigneur cette docilité et cette confiance.

Source : Prie en chemin, une application à découvrir et consommer sans modération
https://prieenchemin.org/p/o/2691



Au fil de Matthieu 1, Les fiançailles éternelles - suite de mon homélie…


Au fil de Matthieu 1, Les fiançailles éternelles - suite de mon homélie ?

« Marie, la mère de Jésus, avait été accordée en mariage à Joseph » Mat 1
Pourquoi Dieu a-t-il confié à une fiancée le sort du salut. Ce n'est pas un détail, nous dit saint Pierre Chrysologue apportant ainsi un complément à mon homélie de dimanche prochain...

« Marie, sa mère, était fiancée. » Il aurait suffi de dire : Marie était fiancée. Que signifie une mère fiancée ? Si elle est mère, elle n'est pas fiancée ; si elle est fiancée, elle n'est pas encore mère. « Marie, sa mère, était fiancée » : fiancée par la virginité, mère par la fécondité. C'était une mère ne connaissant point d'homme, et pourtant qui a connu la maternité. Comment ne serait-elle mère avant d'avoir conçu, elle qui, après la naissance, est vierge et mère ? Quand n'était-elle pas mère, celle qui engendra le fondateur des temps qui a donné un commencement aux choses ? (...)
Pourquoi le mystère de l'innocence céleste se destine-t-il à une fiancée, et non une vierge encore libre ? Pourquoi la jalousie d'un fiancé doit-elle mettre en péril la fiancée ? Pourquoi tant de vertu semble-t-elle péché et le salut éternel danger ? (...) Quel mystère étreignons-nous là, mes frères ? Pas un trait de plume, pas une lettre, pas une syllabe, pas un mot, pas un nom, pas un personnage dans l'Évangile n'est vide de sens divin. Une fiancée est choisie, afin que déjà soit désignée l'Église, fiancée du Christ, selon la parole du prophète Osée : « Je te fiancerai à moi dans la justice et dans le droit, dans la tendresse et dans l'amour, je te fiancerai à moi dans la fidélité » (2,21-22). C'est pourquoi Jean dit : « Celui qui a l'épouse est l'Époux » (Jn 3,29). Et saint Paul : « Je vous ai fiancés au seul Époux comme une vierge pure à présenter au Christ » (2Co 11,2). Ô véritable épouse, l'Église, qui par la naissance virginale [du baptême], engendre une nouvelle enfance du Christ(1)

Si Dieu prépare avec nous des fiançailles, c'est peut-être qu'il ne cesse de rêver d'un amour éternel avec l'humanité et l'amour entre Joseph et Marie est à contempler dans ce sens. Dieu va se faire petit pour envahir notre cœur de sa Grâce.



(1) Saint Pierre Chrysologue (v. 406-450), évêque de Ravenne, docteur de l'Église, Sermon 146, sur Mt 1,18 ; PL 52, 591 (trad. coll. Icthus, vol. 12, p. 295 rev.), source : l'Évangile au Quotidien

15 décembre 2019

Homélie du 22/12/19 - 4eme dimanche de l’avent - Année À - Matthieu 1

Projet 2 - voir plus haut le projet 3
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Quel est l'enjeu de ces quatre lectures que la liturgie nous propose à quelques jours de Noël ?

Peut être une interpellation : celle qui nous conduit à recevoir ce Dieu qui sauve...
Puis une contemplation : celle des pas de Dieu vers l'homme

Interpellation donc :
Nous allons fêter Noël. Mais la fête qui se prépare n'est rien si nous n'allons à l'essentiel : accepter ce Dieu qui sauve...

Quel enjeu pour nous ?
Il nous est donné par le psaume :
L'homme au cœur pur, aux mains innocentes,
qui ne livre pas son âme aux idoles.
obtient, du Seigneur, la bénédiction,
et de Dieu son Sauveur, la justice.


L'enjeu de l'avent est de purifier notre cœur pour accueillir véritablement, je dirais même virginalement la venue de Dieu en nous.

C'est dans l'entretien de Jésus avec Nicodème que nous trouvons la clé de lecture de ces textes.

«Jésus lui répondit: «Oui, je te le déclare, c'est la vérité: personne ne peut voir le Royaume de Dieu s'il ne naît pas de nouveau.» Nicodème lui demanda: «Comment un homme déjà âgé peut-il naître de nouveau? Il ne peut pourtant pas retourner dans le ventre de sa mère et naître une seconde fois?» Jésus répondit: «Oui, je te le déclare, c'est la vérité: personne ne peut entrer dans le Royaume de Dieu s'il ne naît pas d'eau et de l'Esprit.»
‭‭Jean‬ ‭3:3-5‬

Notre baptême doit être une nouvelle naissance. le renouvellement de ce qui constitue le cœur de notre état de baptisé nous invite à purifier nos cœurs.  C'est pour cela que chacun d'entre nous est invité avant Noël au sacrement de réconciliation qui scelle entre Dieu et nous une alliance nouvelle. Purifions notre vie. Ouvrons nos cœurs à l'esprit.

Mais ce chemin qui est celui de tout l'avent est aussi baigné et stimulé par une Contemplation.

Le texte d'Isaïe fait à l'origine référence à une naissance : celle d'un fils de roi qui sortira le peuple de l'exil. Mais cette prophétie n'avait jamais été pleinement réalisée car nous le savons bien, le peuple juif n'est, comme nous, rarement digne de la miséricorde divine. C'est pourquoi elle est reprise dans un autre contexte, plus large, celui du salut que Jésus Christ nous apporte. e. Plus que la magie enfantine qui s'est forgée autour de Noël, ce qui nous est donné à contempler, le salut véritable n'est pas seulement la magie de Noël mais le don de la Passion (Christ mort pour nous) et de la résurrection.


19 mars 2019

Au fil de Matthieu 1,16.18-21.24a. - saint Joseph

« Jacob engendra Joseph, l'époux de Marie, de laquelle fut engendré Jésus, que l'on appelle Christ.
Or, voici comment fut engendré Jésus Christ : Marie, sa mère, avait été accordée en mariage à Joseph ; avant qu'ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l'action de l'Esprit Saint.
Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la renvoyer en secret.
Comme il avait formé ce projet, voici que l'ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l'enfant qui est engendré en elle vient de l'Esprit Saint ;
elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c'est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. »
Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l'ange du Seigneur lui avait prescrit. »
( Mat 1, 16-24), Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris


Écoutons sur ce point saint François de Sales :  « Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l'ange du Seigneur lui avait prescrit »
Combien ce grand saint [que nous fêtons] a été fidèle en humilité ! Cela ne se peut dire selon sa perfection, car malgré ce qu'il était, en quelle pauvreté et en quelle abjection ne vécut-il pas tout le temps de sa vie ! Pauvreté et abjection sous laquelle il tenait cachées et couvertes ses grandes vertus et dignités… Vraiment, je ne doute nullement que les anges, ravis d'admiration, ne soient venus, troupes à troupes, le considérer et admirer son humilité, lorsqu'il tenait ce cher enfant dans sa pauvre boutique, où il travaillait de son métier pour nourrir le fils et la mère qui lui étaient confiés » (1) 

Derrière l'obéissance du père, se dessine l'obéissance du Fils.
Derrière le métier du père se dessine la vocation du Fils.
Derrière l'humilité du père se dessine la kénose du Fils.
Imaginons l'enfant travaillant le bois avec amour et patience, maintenant cloué sur La Croix et nous verrons jusqu'où va l'amour. 



Poursuivons la méditation de saint François de Sales ; « Il n'y a point de doute que saint Joseph (...)  réduit en l'exercice de la charpenterie, [a été] éclairé de la lumière céleste, tant il tenait cachés tous les dons remarquables dont Dieu l'avait gratifié ? Mais quelle sagesse n'avait-il pas, puisque Dieu lui donnait en charge son Fils très glorieux…, Prince universel du ciel et de la terre ?… Néanmoins, vous voyez combien il était rabaissé et humilié plus qu'il ne peut se dire ou imaginer… : il s'en va en son pays et en sa ville de Bethléem, et nul n'est rejeté de tous les logis que lui… Regardez comment l'ange le tourne à toutes mains. Il lui dit qu'il faut aller en Égypte, il y va ; il commande qu'il revienne, il s'en revient. Dieu veut qu'il soit toujours pauvre…, et il s'y soumet amoureusement, et non pour un temps, car il a été pauvre toute sa vie » (1) 

(1) Saint François de Sales, Entretiens, n° 19 (français modernisé),  source  : l'Évangile au Quotidien 

17 décembre 2018

Au fil de Matthieu 1 - Généalogie - Homélie du 17/12

Notes pour une homélie prononcée à St P. du Roule
—-
Quel est l'enjeu de cette généalogie de Matthieu ?

On trouve deux généalogies de Jésus dans le NT. Elles sont différentes dans le nombre de générations et dans les noms. Cette différence invite à une lecture spirituelle.
Celle de Luc est descendante. Elle part de Jésus pour aller vers  Adam et est plus tournée vers une présentation du Christ comme nouvel Adam tout en portant une ouverture à la miséricorde.
Celle de Matthieu est plus dans l'axe de l'héritage.

Il nous faut souligner une contemplation avant de donner plusieurs pistes de méditation

1. contemplation
Cette généalogie est porteuse de plusieurs sens.
  1. Les trois temps évoqués englobent toute l'histoire juive, un ancrage souvent développé par Matthieu.
  2. Le quatorze sous entend 2x7 une perfection du plan de Dieu ?
"Après avoir à bien des reprises, et de bien des manières, parlé par les prophètes, Dieu, en ces jours qui sont les derniers, nous a parlé par son Fils » (He 1,1-2)

2. Méditation
Mais, malgré cette succession d'hommes, la présence des femmes marquent ici des ruptures, le rappel aussi péché de l'homme. Elles nous conduisent à un
regard sur notre propre histoire
L'AT est notre histoire, nos balbutiements
Méditer sur la vie en Dieu, voir les pas de Dieu accomplis dans nos vies implique de voir deux temps:
Temps 1 Notre quête de pouvoir, valoir, avoir : avec la figure de David
Temps 2 : Nos fautes,  nos impasses.
Ces 2 premiers temps rejoignent l'interrogation de la première lecture sur la royauté promise. Mais qu'est-ce qu'un roi ?
Le Christ présenté par Matthieu et complété par Jean va inverser la vision de la royauté dans la contemplation de la Croix...

Temps 3 : c'est l'Exil, le désert, le temps de conversion

Et tout cela nous conduit à ce glissement entre Joseph et Marie, entre le pouvoir et l'humilité constitutive d'une nouvelle vision du Royaume, l'Intervention divine qui rend possible ce qui est impossible à l'homme…
Quelle conclusion tirer sur notre aujourd'hui ?
Depuis Abraham jusqu'à Jésus c'est l'histoire de notre vocation qui est en jeu !
L'histoire n'a de sens que si elle perpétuellement revisitée.
Elle nous conduit à deux déplacements : à l'humilité et à ouverture à la grâce qui fait de nous des enfants de Dieu.


11 août 2017

Le reste - porte d'espérance

Les 7.000 évoqués à Élie en 1 Rois 19 ou Rom 11, 4, est-il différent de ce reste évoqué dans Michée 5 ?
"Et le reste de Jacob sera, au milieu de peuples nombreux, comme une rosée venant de Yahweh, comme des gouttes de pluie sur le gazon, lequel n'attend personne, et n'espère pas dans les enfants des hommes. Et le reste de Jacob sera aussi parmi les nations, au milieu de peuples nombreux, comme un lion parmi les bêtes de la forêt, comme un jeune lion parmi les troupeaux de brebis ; lorsqu'il passe, foule et déchire, personne ne délivre (Michée 5:6‭-‬7 BCC1923)".
Qu'est ce que ce reste, si ce n'est ce qui transforme la vallée d'Akor (c'est à dire de la déroute) en porte d'espérance (cf. Osée 2).

L'expérience de la déréliction faite par Élie au désert ne trouve sa clé de lecture qu'à Béthleem (cf.  Michee 5 et Matthieu 1) et sur la Croix. 

A la suite de Claire, contemplons ce chemin qui est celui de l'humilité et de la pauvreté : "O stupéfiante pauvreté ! le Roi des anges, le Seigneur du ciel et de la terre est couché dans une mangeoire. Au centre du miroir, considère l'humilité, ou du moins la bienheureuse pauvreté, les labeurs et les peines innombrables qu'il a supportés pour la rédemption du genre humain. Et à l'extrémité de ce miroir, contemple l'inexprimable charité dont il a voulu mourir sur l'arbre de la croix, et y mourir du genre de mort le plus honteux. Ainsi ce miroir, placé sur le bois de la croix, avertissait les passants de considérer tout cela, en leur disant : Vous tous qui passez sur le chemin, regardez et voyez, s'il est une douleur comparable à ma douleur. À celui qui crie et se lamente ainsi, répondons d'une seule voix, d'un seul esprit : Je m'en souviendrai toujours, et mon âme défaillira en moi. Consume-moi donc de ce feu d'amour, toujours plus fortement, ô reine, épouse du roi céleste. Contemple aussi ses indicibles délices, ses richesses et ses honneurs sans fin ; et en soupirant à cause du désir et de l'amour intenses de ton cœur, proclame : Entraîne-moi sur tes pas, courons à l'odeur de tes parfums, époux céleste. Je courrai sans m'arrêter, jusqu'à ce que tu m'introduises dans le cellier à vin, que ton bras gauche soulève ma tête que ton bras droit m'étreigne pour mon bonheur et que tu me baises du baiser délicieux de ta bouche." (1)

( 1) Lettre de Sainte Claire à la bienheureuse Agnès de Prague