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22 juillet 2022

Marie Madeleine 2.75

Il faut peut-être dépasser certains fantasmes parfois érotiques ou picturaux que 2000 ans de fausse « contemplation » ont accumulés sur cette « figure » du nouveau testament pour redécouvrir la véritable quête spirituelle de celle qui a lavé les pieds du maître avant son départ avec un parfum de grand prix et qui sombre dans la douleur d’un bonheur perdu au point de ne plus reconnaître la lumière du Ressuscité…

« Les leçons de Béthanie » de Sylvaine Landrivon m’ont ouvert à une autre contemplation, celle d’une femme forte, habitée par la contemplation de l’essentiel, goûtant, comme sa sœur, d’une belle clairvoyance sur la mission du Fils. On comprend mieux l’amitié profonde qu’il avait pour elle et son frère, et ces larmes qu’il verse pour Lazare.

Le Christ est sa lumière (cf. 2.76) et de sa tristesse, naît un espoir pour l’Église.




Femme pourquoi pleures-tu ? Va…

L’appel lancé à la première des Témoins n’est pas à effacer d’un trait, il doit encore interpeler notre façon de faire Église dans la richesse polyphonique et polyédrique d’un Corps à [re]construire où les Marthe et les Marie ont toutes leurs places.

18 avril 2022

Kénose

 Tout perdre, y compris celui que son cœur aime.

Avancer dans la nuit et le vide.

Ne plus se laisser distraire

Entrer au service 

Se mettre à genoux

Panser les plaies.

Se dépouiller

Kénose 

Impossible chemin ?

Quête inaccessible à l’homme ?

Rejoindre Celui qui nous précède ?

Tâcher de Le saisir et finalement se laisser saisir ?


Écoutons Simon…:


« Femme, qui cherches-tu ? » (Jn 20,15)


Ne te relâche pas, mon âme, dans la poursuite du Maître,

mais comme une âme qui s’est une bonne fois livrée d’elle-même à la mort,

ne tâtonne pas à la recherche de tes aises, ne poursuis pas la gloire,

ni la jouissance du corps, ni l’affection de tes proches,

ne jette pas un coup d’œil à droite, pas un coup d’œil à gauche,

mais, comme tu as commencé, et même de plus belle, cours,

hâte-toi sans répit pour atteindre, pour saisir le Maître !

Quand bien même il disparaîtrait dix mille fois et dix mille fois t’apparaîtrait,

et qu’ainsi l’insaisissable serait pour toi saisissable,

dix mille fois, ou plutôt tant que tu respires,

redouble d’ardeur à sa poursuite et cours vers lui !

Car il ne t’abandonnera pas, il ne t’oubliera pas,

peu à peu, au contraire, de mieux en mieux il se montrera,

plus fréquente se fera pour toi, mon âme, la présence du Maître

et, après t’avoir parfaitement purifié par l’éclat de sa lumière,

lui-même tout entier viendra en toi, lui-même habitera en toi,

lui-même sera avec toi, lui l’auteur du monde,

et tu posséderas la richesse véritable que le monde ne possède pas,

que seuls possèdent le ciel et ceux qui sont inscrits dans les cieux. (…)

Celui qui a fait le ciel, le Maître de la terre

et de tout ce qui est dans le Ciel et de tout ce qui est dans le monde,

le Créateur, lui le seul Juge, lui le seul Roi,

c’est lui qui habite en toi, c’est lui qui se montre en toi,

qui tout entier t’éclaire de sa lumière et te fait voir la beauté

de son visage, qui t’accorde de le voir en personne

plus distinctement, qui te donne part à sa propre gloire.

Dis-moi, qu’existe-t-il de plus grand que cela ? (1)


(1) Syméon le Nouveau Théologien (v. 949-1022)

moine grec

Hymnes 48, SC 196 (Hymnes III ; trad. J. Paramelle et L. Neyrand, éd du Cerf, 2003 ; p. 141-143 ; rev.)

03 avril 2021

Homélie du dimanche de Pâques

Projet 4

 La première lecture donne le ton avec 4 fois le mot témoigner et une fois le mot annoncer. Annoncer, témoigner de quoi ?

« Il est ressuscité... » Êtes-vous prêts ?

Nous devrions sauter de joie, alors que nous sortons des zones sombres que nous venons de traverser... 

Cessons de voir du noir, la lumière est là, toute proche. Elle ne demande qu’à jaillir...

A défaut, ceux qui nous croiseront diront, non sans raison : « Où est-il votre ressuscité ? »


Mais j’anticipe... —- que nous dit en effet l’Evangile...?


Le chapitre 20 de Jean mérite un long détour avec trois questions.

Quand, où, comment la résurrection se manifeste-t-elle ?


Quand...

Nous sommes encore dans les ténèbres. Les disciples sont partis, presque en courant. Il ne reste que les femmes. Celles qui ont accompagné le corps de Jésus au tombeau. Cette Marie-Madeleine, dont on ne connaît pas grand-chose, qui vient, perdue parce que son Seigneur est mort sur une croix. Voilà le contexte. Peu d’espoir, la solitude d’une femme. Et pourtant, c’est à elle, bien avant les deux apôtres que la révélation se fait...méditons cela...


Où ? 

Nous sommes au jardin... pas le jardin d’Eden, pas celui où règne l’arbre interdit... enfin presque, parce que le seul tronc qui demeure, tout près est celui de la Croix, nue, signe de la violence des hommes...

On pourrait penser qu’il s’agit d’un nouveau clin d’œil de Dieu... alors que la tradition accuse la femme à Éden, c’est bien à cette femme seule que sera donné le signe... à méditer...là encore..


Comment ?

Le texte que nous donne à lire la liturgie est court... nous n’avons pas les anges, la rencontre, l’envoi... juste la première partie... une disparition... une femme qui cherche... il nous faut faire avec ( je vous invite néanmoins à aller plus loin... car le récit ne s’arrête pas là...) lire la suite et le rôle d’apôtre que lui donne Jesus. Sa quête n’est pas restée sans réponse...

Restons cependant à contempler ce qui nous est donné... un vide, un creux, un manque...

Jean est discret, il ne laisse qu’une trace, un doute, une absence... le corps n’est plus là... il manque... il nous manque.

Il manque à Pierre qui reste sur son échec.. il manque à Jean qui se sent lui aussi bien seul après le dernier échange entre lui et Jésus mourant...

Si nous avions pris le texte du dimanche soir, nous aurions eu un peu plus... un Christ qui rejoint,  accompagne, explique aux pèlerins d’Emmaus...

Mais aussi un Christ qui disparaît... pourquoi ?

Laissons résonner la question...

Pourquoi la résurrection est-elle un manque...  ?

Deux embryons de réponse :

  1. Elle nous échappe... Dieu reste inaccessible, manque, désir 
  2. Dieu a besoin de nous...

Nous n’avons pas grand chose à contempler personnellement de la résurrection... juste une brûlure intérieure qui nous habite... une brûlure et un manque. 

En fait nous ne sommes témoins de la résurrection que par nos vies... par cet amour qui a germé en nous, cette foi et cette espérance qui nous fait vivre...

Si le monde vous demande encore où est notre Ressuscité c’est que notre foi n’est pas encore pleine et entière, que notre amour n’est pas rayonnant, que notre espérance n’est pas vive....

Alors laissons le Christ nous habiter vraiment, rayonnons de l’amour et de la joie qui nous habite et nous pourrons crier, comme Marie Madeleine : il est ressuscité. 

Il est là... en nous, il vit, il agit...

C’est notre espérance, c’est notre joie...

Ce n’est pas une joie encore pleine et entière mais les premiers frémissements d’une joie à venir, celle de la danse des anges...



Écoutons les pas du Jardinier qui vient semer en nous de nouvelles graines, laissons sa Présence toucher nos cœurs et faire renaître en nous ce qu’Il a déposé dans le silence et par tendresse..


La résurrection est un feu qui ne demande qu’à brûler. 

Hier Vital nous parlait de tout ce que nous devons abandonner... il est temps maintenant d’accueillir, de laisser nos vieux sarments desséchés s’embraser par la joie de Pâques. L’amour est plus fort que la mort... 

ce que découvre les trois premiers témoins est la plus belle des révélations. Au delà de nos morts, la vie est là. Elle nous attend, tout au fond de nous, prête à embraser nos cœurs. Laissons jaillir en nous l’amour, laissons jaillir en nous la joie...

Christ est ressuscité, Alléluia...



PS : Quand on connaît un peu le contexte de rédaction de Jean 20 et 21, on peu douter de l’historicité de l’épisode entre Jean et Pierre. Le rédacteur du chapitre semble sous entendre que Jean a mieux compris que Pierre... est-ce le reste d’un conflit entre deux écoles ? À creuser...


18 avril 2020

Homélie pour le dimanche de la miséricorde

Projet 2 - méditation 

J'ose reprendre ici et compléter tout en lui faisant hommage quelques idées de mon curé le père Vital dans son message dominical aux paroissiens de sainte Thérèse. Le mal, a sa manière, tente de fermer nos églises mais nous sommes invités à en ouvrir d'autres, des millions d'églises domestiques.

Saint Thomas a été invité à mettre sa main dans le côté ouvert et transpercé de celui qui est mort pour nous révéler l'amour. Nous sommes invités à notre tour à ouvrir notre cœur pour y laisser entrer Jésus.

Comme le rappelle Vital, à la consécration nous pouvons faire notre la prière de Thomas : «  Mon Seigneur et mon Dieu ».

Que nous soyons privé d'Eucharistie ne nous prive pas de sa présence. Nous avons reçu en nous le Christ. Il n'a pas disparu même si notre communion est ancienne. Il est là, flamme fragile, déposée en nos cœurs.
Soyons, comme le dit une très ancienne catéchèse les « porte-Christ » que nous devons être, réveillons en nous ce buisson ardent en disant à notre tour, au creux de notre prière intérieure : «  Mon Seigneur et mon Dieu ». Tu es là. Tu est « le chemin la vérité et la vie ». En ce dimanche de la miséricorde n'oublions pas d'ouvrir notre cœur à l'image de celui qui s'est laissé dépouiller (1) et transpercé. Il est vie...


« Puisses-tu avoir le visage dévoilé, grâce à une conscience pure, refléter la gloire du Seigneur, et marcher de gloire en gloire, dans le Christ Jésus notre Seigneur. »(2)

(1) cf. https://www.revue-etudes.com/article/depouillement-francois-cassingena-trevedy-22587
(2) catéchèse de Jérusalem aux nouveaux baptisés

Nb : sur ce thème de la miséricorde voir aussi ma trilogie «  Humilité et miséricorde »

14 avril 2020

Au fil de Jean 20 - Mon Seigneur


« on a enlevé mon Seigneur (Jean 20, 17)». Le grec « τν Κύριόν μοu » littéralement « Le Seigneur de moi » m'interpelle ce matin. Non sur cette dévotion particulière et légitime de Marie Madeleine qui doit au Seigneur le retour à la vie, mais sur notre tentation de privatisation qui a été jusqu'à cette interprétation fermée de : « hors de l'Église point de salut ».

Le Christ est venu pour moi comme pour tous. Les semences du Verbe évoquées par saint Justin et reprises dans Vatican II ne sont pas réservées aux chrétiens. Elles sont l'amour en nous, dépôt fragile d'un Dieu qui se donne et nous conduit à la vie.
« Ne me touche pas » devient une invitation à ne pas enfermer le Seigneur dans une clé d'interprétation fermée.

La nouvelle traduction liturgique est d'ailleurs plus ouverte en dépit du verbe grec aptou : « Ne me retiens pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Va trouver mes frères pour leur dire que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. »

On veut souvent toucher et prendre. La chasteté est de se laisser toucher, saisir (cf. Ph. 3) bien au contraire, c'est-à-dire retourner de l'intérieur.

02 mars 2019

Kénose de Thérèse — F. Marxer

Une belle analyse de F. Marxer que cette compilation des phrases de Thérèse de Lisieux qui fait ressortir un mouvement kénotique (cf. Ph 2) chez la petite sainte et docteur de l'Église :
« Comme Madeleine se baissant toujours auprès du tombeau vide finit par trouver ce qu'elle cherchait, elle s'est abaissée « jusque dans les profondeurs de [son] néant », pour être saisie [cf. Ph. 3], « joie délirante », éblouissement d'un instant : « (...) dans le coeur de l'Église, ma mère, je serai l'amour... ainsi je serai tout... ainsi mon rêve sera réalisé !!!... »

(1) François Marxer, Au péril de la Nuit, Femmes mystiques du XXeme siècle, Paris, Cerf, 2017, p.85

22 juillet 2017

Tressaillement et embrasement

Saint Grégoire le  Grand, dans son commentaire de Jean 20 nous emmène loin sur le thème du buisson ardent : " il faut mesurer avec quelle force l'amour avait embrasé l'âme de cette femme [Marie Madeleine] ne s'éloignait pas du tombeau du Seigneur, même lorsque les disciples l'avaient quitté. Elle recherchait celui qu'elle ne trouvait pas, elle pleurait en le cherchant, et, embrasée par le feu de son amour, elle brûlait du désir de celui qu'elle croyait enlevé. C'est pour cela qu'elle a été la seule à le voir, elle qui était restée pour le chercher, car l'efficacité d'une œuvre bonne tient à la persévérance, et la Vérité dit cette parole : Celui qui aura persévéré jusqu'à la fin, celui-là sera sauvé.Elle a donc commencé par chercher, et elle n'a rien trouvé ; elle a persévéré dans sa recherche, et c'est pourquoi elle devait trouver ; ce qui s'est produit, c'est que ses désirs ont grandi à cause de son attente, et en grandissant ils ont pu saisir ce qu'ils avaient trouvé. Car l'attente fait grandir les saints désirs. Si l'attente les fait tomber, ce n'était pas de vrais désirs. C'est d'un tel amour qu'ont brûlé tous ceux qui ont pu atteindre la vérité" (....)"Appelée par son nom, Marie reconnaît donc son créateur et elle l'appelle aussitôt Rabboni, c'est-à-dire maître, parce que celui qu'elle cherchait extérieurement était celui-là même qui lui enseignait intérieurement à le chercher." (1)
"J'ai trouvé celui que mon coeur aime", chante en écho le cantique.
La quête extérieure est intérieure.  Augustin parlera de ce qui était là et qu'il ne connaissait pas(2). Auto communication du Verbe (3) au creux de nos reins, Tressaillement de l'infini en nous qui se révèle comme un buisson ardent (Ex 3) qui ne se consume pas.

(1) Saint Grégoire le Grand,  commentaire de l'Évangile de Jean,  source AELF
(2) Confessions 9
(3) pour reprendre l'idée de Karl Rahner

04 février 2017

Marie Madeleine et Gn2

Belle image que celle de Claude Flipo qui voit la rencontre de Jésus avec Marie Madeleine comme celle du premier jour du Paradis(1). Alors qu'en Gn 3 c'est Dieu qui cherche l'humain dans un "où es-tu ?" resté sans vrai réponse, c'est cette fois la femme qui cherche son Dieu. Plus qu'une allusion au Cantique des Cantiques, il y a là comme une conclusion et un chemin de contemplation. "Maintenant Seigneur tu peux laisser ton serviteur s'en aller en Paix, car mais yeux ont vu le salut..."

(1) cf. Op. Cit. p. 234

16 avril 2016

Ne me touche pas ?

En écho à la phrase célèbre de Jésus, voici une contre résonance chez Theobald : "Nous sommes invités à le toucher, à le rencontrer, à le manger, à nous nourrir de lui et à entrer dans son mouvement pascal d'effacement" (1).

Contre résonance mais aussi résonance, car le "me touche pas" Jn 20, 17 prononcé à Marie Madeleine est compatible avec les propos du théologien. Ne pas toucher c'est entrer dans le cacher dévoiler de Dieu, respecter l'inconnaissable divin et percevoir que bien que nourriture il nous échappe encore.

(1) Christoph Théobald, op. Cit. p. 30

04 avril 2016

Sur le toit du monde - 2

Après avoir laissé résonner le silence du tombeau vide, la voix d'un fin silence nous fait entendre son chant. Il se murmure depuis l'éternité.  On l'entend dans l'entre-deux entre la terre et le ciel, où dans la nuit du jardin de l'homme,  alors que nous sommes emportés par le sommeil.
J'étais là (1)
Je suis celui qui suis (2)
Je serai qui je serai (2)
Je suis.(3)
Un "je suis" (ego eimi) répété trois fois auquel Pierre réponds,  à notre image un je ne suis pas (ouk eimi)
Il n'est que murmure,  car c'est la voix du silence(4) et de l'abaissement,  de l'humilité et du renoncement.  Et pourtant,  il ne cesse de résonner dans nos déserts, de crier sa soif de nous rejoindre.
Donne-moi à boire (5)
J'ai soif (6)
Sur la croix, le chant du Christ semble s'éteindre.  Il est remit au Père.
Et pourtant,  alors qu'on croit venue la fin, résonne un ultime chant. Est-ce le chant des anges ?
Je serai avec vous (7)
Allez
Il vous attend au coeur de l'humain,  en Gallilée
À ceux qui doutent encore,  il demeure un signe, celui d'un fleuve immense jailli du sein du Fils de l'homme.
Pour aller plus loin
(1) Proverbes 8, 27 - cf. C. Gripon, op. Cit. p.  61
(2) Ex 3
(3) Jn 18
(4) 1 Rois 19, cf. La voix d'un fin silence,  in L'amphore et le fleuve
(5) Jn 4
(6) Jn 19, cf. aussi Sur les pas de Jean
(7) Mt 28, 20