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13 août 2022

En route vers la Galilée - 8 - Marie

 

En cette fête de l’Assomption, fête des superlatifs, peut-on revenir à l’essentiel ? 

Il y a, chez Luc, comme l’accomplissement d’une attente. Alors que dans les annonciations précédentes, le mystère restait opaque et la crainte régnait chez l’homme, l’évangéliste nous présente ici un cœur pur et déjà ouvert à recevoir la venue de Dieu. Sommes-nous parvenus avec Marie au terme de cette quête ? Est-elle la nouvelle Ève qui a entendu l’appel du jardin. 

La lecture de Luc, tardive, plus qu’historique est surtout spirituelle. Elle poursuit ce fil rouge que nous suivons depuis Osée.

Ici, l’ange reste médiateur du mystère. Il commence par un « Réjouis-toi ! » qui fait résonner les annonces de l’Ancien Testament (cf. So 3, 14-18, Is 60, 1-5 ou Za 9, 9-10) puis procède à une annonce progressive de cette maternité particulière. À la différence des mères stériles de l’Ancien Testament, elle sera mère du Messie, par l’action de l’Esprit Saint. Luc fait ici résonner dans un sens messianique les prophéties d’Isaïe :

 « Voici que la Vierge a conçu, et elle enfante un fils, et on lui donne le nom d'Emmanuel. » Is 7,14 


 «Car un enfant nous est né, un fils nous a été donné ; l'empire a été posé sur ses épaules, et on lui donne pour nom : Conseiller admirable, Dieu fort, Père éternel, Prince de la paix : Pour étendre l'empire et pour donner une paix sans fin au trône de David et à sa royauté, pour l'établir et l'affermir dans le droit et dans la justice, dès maintenant et à toujours » Is 9, 5-6 


Son accueil est ici plus serein, plus total. La Vierge se fait réceptrice de Dieu et de sa parole.

Cette réceptivité à la parole sera un thème récurrent chez Luc, comme le note L. Legrand (1). 


On pourrait déjà mettre cette insistance de Luc en parallèle avec la phrase de Marie en Jean 2, 5 à Cana « Faites ce qu’il vous dira »…


Pour saint Augustin, elle doit cela seulement à son humilité : « Toute mon ambition, c'est mon humilité ; voilà pourquoi «mon âme grandit le Seigneur, et mon esprit a tressailli en Dieu mon Sauveur (Lc 1,47) » ; car il a regardé, non pas ma tunique garnie de nœuds d'or, non pas ma chevelure pompeusement ornée et jetant l'éclat de l'or, non pas les pierres précieuses, les perles et les diamants suspendus à mes oreilles, non pas la beauté de mon visage trompeusement fardé ; mais « il a regardé l'humilité de sa servante ».


Rappelons, dans la même lignée, le mot du Cardinal de Bérulle sur la naissance de la Vierge : « Elle naît à petit bruit sans que le monde en parle… Mais si la terre n’y pense pas, le ciel la regarde et Dieu l’aime… Il la regarde, la chérit, la conduit, comme celle à qui il veut se donner comme fils. »


Il fallait à l’apogée de la révélation un écrin particulier, vierge de toutes contradictions et d’influences. C’est dans le cœur simple d’une femme qu’il a choisi de déposer son message, de même qu’il cherchera à inscrire son Esprit, au-delà de nos raisonnements et de nos mouvements sensibles, au plus profond de nos cœurs écoutants et disponibles. 

 « Et je vous donnerai un cœur nouveau, et je mettrai au-dedans de vous un esprit nouveau ; j'ôterai de votre chair le cœur de pierre ; et je vous donnerai un cœur de chair » Ez, 36, 26. 


Luc 1, 28-29 – Je te salue, comblée de grâce

28 L’ange entra chez elle, et dit : Je te salue, toi à qui une grâce a été faite ; le Seigneur est avec toi. 29 Troublée par cette parole, Marie se demandait ce que pouvait signifier une telle salutation.


La tradition a fait de cette salutation le début de notre prière à Marie. Il y a en effet chez l'ange comme une vénération. Il sait que Dieu l'a choisi pour demeure, pour temple de Dieu. Cela fait résonner les paroles de l'apôtre. Vous êtes le temple de Dieu. Marie est la première sur ce chemin.


Contemplons maintenant la Vierge, son trouble face à cette annonce. Dans une petite cellule du musée San Marco à Florence, le peintre Fra Angelico a bien rendu le visage de la Vierge après la parole de l'ange. Elle est dépassée par ce qu'elle perçoit. 


On sent sur son visage l'ampleur de ce qui l'attend. Elle semble bien frêle et fragile cette vierge sur laquelle repose l'avenir de l'humanité. Quel contraste avec Zacharie, le prêtre vêtu de tous ses ornements et entouré de l'encens qu'il projette sur l'autel ! Ici, la tradition imagine une visite nocturne, dans le silence d'une petite ville de Galilée... Le pèlerin revoit cette bourgade perdue sur le flanc d'une colline. Que vient faire l'ange ici. Écoutons-le !


Luc 1, 30-33 – Ne crains point

30 L’ange lui dit : Ne crains point, Marie ; car tu as trouvé grâce devant Dieu. 31 Et voici, tu deviendras enceinte, et tu enfanteras un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus. 32    Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut, et le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père. 33 Il régnera sur la maison de Jacob éternellement, et son règne n’aura point de fin.


Jésus, ce qui veut dire « Dieu sauve ». Ici, l'action humaine, le culte sont réduits à néant. Il s'agit d'une réception pure : le don de Dieu. Dans la liturgie nuptiale, on peut entendre la réponse sacramentelle qui est signe de l'alliance même de Dieu et de l'homme : « Je te reçois et je me donne à toi ». 


Ici aussi la réception dépasse de loin le don, même si celui-ci sera total. Car ce qui est donné de manière unique à la Vierge est ce don de Dieu fait homme. Prenons distance sur ce petit village de Nazareth, ce bout du monde, loin du Temple où l'on n'attendait rien. Certes, il y avait quelques prophéties passées que les phrases attribuées à l'ange semblent rappeler (cf. Za 9, 9 : « Exulte de joie, fille de Sion ») ou Is. 7, 14 : « une jeune femme est enceinte », mais on est bien dans un lieu qui semble abandonné de Dieu, dans un pays sous la coupe de l'envahisseur, dans un monde où la foi semble avoir quitté le peuple. 


Et c'est là que Dieu a choisi d'habiter, mettant ainsi l'espoir là où on ne l'attendait plus.

Il y a là pour tous, même aujourd'hui, un signe d'espérance...

Le lecteur d’aujourd’hui est en droit cependant d’affirmer son scepticisme. Comment est-ce possible qu’une vierge puisse enfanter ? Les réponses de la Tradition sont multiples. Elles interpellent la foi et le mystère. Le rationalisme moderne peut rejeter tout cela. 

Il y a néanmoins, quelque chose qu’il ne peut rejeter : la lecture spirituelle. Déjà, dès les premiers siècles, certains pères de l'Église pratiquaient cette prise de distance par rapport aux faits. Ainsi Grégoire de Nysse parlait des plaies d’Égypte comme les tentations intérieures de l’homme et non comme les punitions d’un Dieu vengeur. Et son interprétation permettait de dépasser la non-historicité d’un récit ancien.

Alors, si nous n’avions qu’une lecture croyante, que voudrait dire la virginité de Marie ? Peut-être la seule contemplation qu’au-delà des contingences matérielles, le don de Dieu, quel qu’en soit les formes est immenses et dépasse notre raison. La naissance virginale est-elle une légende ? Peut-être, même si ce n’est pas ce qu’affirme l'Église. Ce qui compte demeure : comment accueillons-nous dans nos vies l’infini de Dieu ?


Luc 1, 34-37 – Rien n’est impossible à Dieu

34 Marie dit à l’ange : Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? 35     L’ange lui répondit : Le Saint-Esprit viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre. C’est pourquoi le saint enfant qui naîtra de toi sera appelé Fils de Dieu. 36 Voici, Élisabeth, ta parente, a conçu, elle aussi, un fils en sa vieillesse, et celle qui était appelée stérile est dans son sixième mois. 37, Car rien n’est impossible à Dieu.


« Couvrir de son ombre » Il faut contempler cette nuée du Seigneur qui accompagne la pérégrination du peuple de Dieu dans le désert. C'est dans cette nuée où réside Dieu quand il se manifeste à l'homme (cf. notamment Ex. 33, 9 et 34, 5) que le mystère de l'impossible prend naissance. Luc ici nous appelle à un acte de foi du même type que la résurrection. De même que Dieu ressuscitera Jésus, de même la Vierge enfantera un fils. Va-t-on faire ce saut de la foi sans quoi rien n'a de sens ? Marie n'a pas demandé de preuve comme a pu le faire Zacharie, pourtant l'ange lui donne un espoir : même la femme stérile peut donner naissance. Ici la puissance du Dieu caché se révèle dans la nuée. Rien n'est impossible à Dieu. (cf. aussi Gn 18, 14)


Luc 1, 38 – Je suis la servante du Seigneur

38 Marie dit : Je suis la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon ta parole ! Et l’ange la quitta.


Fiat marial. 

Que dire ? 

On ne peut que contempler cette réception mariale, ce qui n'est que renoncement à toute prétention humaine, ce que l'on pourrait appeler la kénose de Marie qui entre en vibration avec la kénose trinitaire. Ce terme savant, qui n'est que la reprise du terme grec de ekenosen : se vider est surtout dit du Fils qui se vide de lui-même (cf. Phil 2, 7 : il s'est anéanti, prenant la condition de serviteur). Mais n'est-ce pas là aussi ce que fait Marie, qui entre ainsi, de plan pied dans cette danse trinitaire. Si Dieu a tout donné en son Fils, s'il s'est dépossédé de sa puissance pour prendre la condition d'un enfant d'homme, d'un embryon « à-venir », que dire alors de celle qui devient le réceptacle de ce don. La danse nuptiale est dans ce « je te reçois et je me donne à toi ». Certes, la Vierge ne sait pas encore jusqu'où ira ce don, mais l'on peut le pressentir, en concevoir, à l'aune de notre propre connaissance de sa vie, combien ce renoncement est de fait une kénose.

On pourrait s’arrêter sur la Vierge. Ce serait passer à côté de quelque chose de plus grand. On contemple souvent en effet Marie sous l'angle de l'humanité, mais comme le souligne Adrienne von Speyr, on devrait aussi contempler le Père, qui en confiant son Fils au sein d'une Vierge, amorce le mouvement même d’une kénose à laquelle le Fils pourra répondre.

Le renoncement de Dieu, sa paternité, c’est faire confiance à cette graine de moutarde, déposée au creux de l’humanité, dans le plus beau des Temples. Un abandon de toute volonté de puissance, de règne et de royaume. Là est aussi la kénose. 

Quel pari fou sur l'homme ! N'est-on pas déjà dans le mouvement même de l'abandon et de l'agenouillement de la Trinité qui, par amour, se fait faiblesse pour que l’homme entre dans sa danse ?


Le désir d’un « Dieu qui vient à l’homme »avait besoin d’une réponse et cette réponse est celle fragile, si bien illustrée par Fra angelico d’une jeune fille surprise par cette sollicitude et qui ose répondre oui, mais mieux encore « fiat » sur le bout des lèvres dans le creuset d’un village perdu de Nazareth.


Il faut mettre peut-être ici aussi en perspective cet « où es-tu ? » de Dieu lancé à Adam ET Ève dans le jardin (2) pour contempler que c’est une petite bergère de Nazareth qui a répondu la première et totalement à cet appel de Dieu.


Le chemin de Marie ne sera pas un long fleuve tranquille. Avant peut-être de vénérer celle qui a dit oui, il nous faut contempler dans le silence ce chemin.


Que célébrons nous aujourd’hui finalement ?

Plus que l’assomption de la vierge Marie, c’est l’ensemble du mystère de la venue du Christ sur terre qui est à contempler.


Marie est l’écrin fragile de notre salut.


Mais qui est-elle véritablement ? Entre la jeune fille fragile que nous idéalisons et la femme-disciple que nous présente Jean à Cana, il existe une tension à maintenir.

Marie n’a pas été dès le début nimbée de lumière et de grâce mais a suivi un sentier qui nous interpelle. 

Marie est en effet au cœur de notre humanité celle qui répond probablement le mieux à l’appel de Dieu, celle qui comprend EN sa chair toute humaine, l’enjeu de la venue du Christ, marche à sa suite et répond à cet appel originel de Dieu(Gn 3,5), évoquée plus tôt. Elle devient en cela chemin pour nous. 

Ce que nous font découvrir les textes de d’aujourd’hui n’est-il pas finalement que, dans le mystère de cette naissance, de cette femme habitée par la grâce divine, bouleversée par la venue du Christ EN son humanité (3) et dans le jusqu’au bout de son Amour, c’est la vocation de tout baptisé qui est surtout à contempler.

Dans la liturgie de la veille au soir du 15 août l’évangile interpelle notre propre manière de recevoir le Christ : L’Évangile de Luc ( 11, 28) insiste même dans le sens de tout ceux qui comme moi souvent rejette une idéalisation excessive. Relisons bien ce texte qui surprend la veille du 15/8 :

« En ce temps-là, comme Jésus était en train de parler, une femme éleva la voix au milieu de la foule pour lui dire : « Heureuse la mère qui t’a porté en elle, et dont les seins t’ont nourri ! »

 Jésus déclare alors : « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! » Ces propos sont choquants a priori. 


Jésus « n’efface » pas sa mère mais insiste bien sur ce basculement entre la figure mariale et l’appel renouvelé à notre vocation. 


L’assomption n’est pas seulement en effet la fête de Marie. 

Elle ouvre une espérance particulière pour l’humanité que le magnificat vient amplifier, en faisant vibrer à nouveau l’espérance du peuple de Dieu, de tout ce que portait l’AT. 


« Mon âme exulte le Seigneur car ce dernier disperse les superbes et vient élever les humbles, combler de biens les affamés, renvoyer les riches les mains vides, relever Israël son serviteur ». 


Le cri de Marie est notre joie : « Dieu se souvient de son amour ».


Dans le tressaillement d’Elisabeth que nous donne à contempler Luc se retrouve à sa manière cette espérance du peuple en marche et donc notre propre espérance. 


Oui Dieu vient nous visiter…

À chaque fois que la Parole prend chair en nous, qu’elle fait en nous sa demeure, l’assomption prend sens, quand nous tressaillons, à la suite du Baptiste, de la joie du don de Dieu qui veut nous habiter.(5)

Le rêve de Dieu devient notre danse… 


« Heureux ceux qui écoutent la parole de Dieu, et qui la gardent ! »


Le mystère de l’assomption c’est que Dieu veut habiter TOUT homme. 


Le mystère c’est que Dieu souhaite prendre chair EN nous et que sa victoire sur la mort ne viendra que lorsque nous serons un, femmes et hommes, dans la contemplation du Verbe de Dieu, de cette Parole qui prend chair dans notre chair, nous transforme… 


Il y a peut-être ensuite un parallèle théologique à faire entre Philippiens 2 (et notamment le « c’est pourquoi » du verset 9 qui souligne que Jésus est relevé car il s’est vidé de lui même) et le dogme de l’assomption. Au delà du chemin intérieur de Marie, à rapprocher peut-être de la conversion même du Christ dont parle Sesboué dans sa « pédagogie du Christ (7), le chemin intérieur de Marie est aussi marqué par une forme de kénose. Or ce dessaisissement de soi qui s’exprime notamment dans son fiat, si bien traduit par Fra angelico, peut justifier que l’Église ai souhaité lui donner une place particulière que la tradition a cristallisé dans un dogme. Sans valider les excès d’une mariolatrie excessive si bien dénoncée par Congar(6), on peut néanmoins s’interroger sur la distance qui demeure entre le chemin vectoriel (c’est-à-dire qui nous pousse à grandir et kénotique de la vierge Marie et notre propre chemin et en tirer une forme d’interpellation, d’humilité à défaut d’une vénération…


Il y enfin un thème que l’on peut également contempler dans le « en Christo » paulinien(6), c’est finalement la danse mariale particulière de celle qui a été habitée par le Verbe et est donc devenue contenant de l’insaisissable, ce qui pour reprendre la théologie de Karl Rahner donne à la vierge, un autre chemin vectoriel pour nos eucharisties et fait résonner nos tressaillements intérieurs avec ceux de toutes les mères à commencer par Elisabeth.(7)

Être en Christ et recevoir en soi celui qui nous invite à faire Corps…


(1) Lucien Legrand, in L’annonce à Marie, p. 99ss, Lectio Divina n° 106, Cerf, 1981

(2) au sens de l’ « en christo » souligné par Hans Urs von Balthasar dans sa Dramatique 

(3) voir mes écrits divers sur le thème du tressaillement et notamment mon roman « le vieil homme et la brise »

(6) Sesboué y soutient que le Christ n’a qu’une conscience progressive de son rôle, une idée que j’ai toujours trouvée intéressante pour percevoir l’interaction entre humanité et divinité

(7) je pense notamment à son deuxième tome du journal du concile

(6) cf. note 5

(7) J’ai longuement développé ce point dans « danse trinitaire » puis dans « A genoux devant l’homme »

31 mai 2022

Visitation

 Visitation…

« L'enfant a tressailli... »

Que dire quand on est homme et que jamais l'enfant n’a en nous manifesté sa présence ? Peut-on en être jaloux ?

Il y a pourtant des tressaillements intérieurs, des caresses de Dieu qui nous réveillent et nous font pressentir cela...


Signes discrets d’un Dieu qui vient se révéler

 à nous dans le silence ?

Signes plus tangibles quand la Parole 

fait vibrer en nous le mystère....

Tourbillons intérieurs qui se préparent alors que la Pentecôte approche à grand pas…

Chemins d’espérance ?


On devrait peut-être même aller plus loin et glisser sur la pointe des pieds que lorsqu'il nous a été donné de communier au corps et au sang du Christ, nous devenons à notre tour capables de ces « tressaillements » de Dieu en nous. 

Mais pas seulement, tans les dons de Dieu sont variés et les semences du verbe et de l’Esprit nombreuses.


Capax dei !


Est-ce ce que suggère François Varillon quand il dit que Dieu vient diviniser ce que nous avons humanisé ? (1)


Si j’ai du mal avec le mot diviniser, qui nous vient d’Irenée, peut-être est-ce là qu’il prend chair, dans ce tressaillement intérieur dû à l’inhabitation fugace du Verbe en l’homme...


Alors nous pouvons faire nôtre le magnificat. Car nous entrons à notre tour dans cette danse trinitaire à laquelle le "fiat" marial nous a invités. 


« Heureuse celle qui a cru... » 

On entend déjà résonner à nos oreilles le chant du magnificat qui rejoint soudain celui des béatitudes et notre cœur peut bondir d'allégresse d’une « petite espérance » car, en ce jour de la visitation, l'Église rentre dans la fête et la danse du peuple de Dieu. 


Après des siècles d’attente, après le désert, l'exil et la peine, la bonne nouvelle d'un Dieu parmi nous devrait à nouveau nous envahir. 

Dieu a entendu son peuple et lui a donné un sauveur...



« L'enfant a tressailli... » 

« Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur ! Il s'est penché sur son humble servante ».... (Luc 1, 47)


Ce chant m’habite, habite aussi mes joies, même les plus intérieures. Il prend sa source dans les chants de l’AT et devient signe de nos espérances... il relève les humbles...


Que Dieu tressaille en nous à l’aube du mystère...


(1) F. Varillon, Joie de croire, joie de vivre


PS  : Variations sur ma danse 1.20 (cf. mon recueil,  « danse avec ton Dieu » chez Kobo/Fnac

25 décembre 2021

Double agenouillement et ouverture - 2.23

Avant d’arriver au cœur du mystère de l’incarnation, peut-être fallait-il descendre jusqu’au point où l’on écoute, dans le silence, le bruit du monde, sa plainte, son désarroi, ses impasses et ses chemins stériles, ses fausses joies, son désespoir et plus fondamentalement la violence qui demeure. 

Ce chemin je viens de tenter de le parcourir. Ce n’est en effet qu’en descendant très bas, aussi bas que possible, dans le silence de la nuit, quand le cri de l’enfant martyrisé, abusé, violenté, ou plus sournoisement nié et tué que l’on peut comprendre l’agenouillement de Dieu devant la femme qui va porter en son sein un Sauveur.

Au delà de toutes polémiques, il est demandé à l’homme de s’interroger pour savoir comment il est possible que le Père s’agenouille aussi bas…

C’est quand on perçoit le double agenouillement de Dieu et de la femme qui,  dans leur « me voici / fiat » mêlés, que peut apparaître une lueur, un fragile rayon de lumière et que l’espérance jaillit.

La lecture très spirituelle de Luc et de Matthieu n’est-elle pas finalement au dessus de toute rationalité historique et charnelle ? 

Ne devient elle pas chemin d’espérance ? 

La kénose du Père et la réponse mariale mérite d’arrêter tout discours et de contempler à la fois dans le silence, l’innommable, l’impossible, l’imposture et l’insaisissable…

Comment l’infini s’approche-y-il de l’humain, au plus loin de toutes « périphéries » pour rejoindre sans violence ce monde pris dans le tumulte d’une suffisance.

Le double agenouillement de la femme et de Dieu, l’intercession, la rencontre, la danse, au sein même de la circumincession des Personnes divines, laisse finalement une seule voie fragile, celle de notre propre agenouillement…


À l’épaisseur du mystère et du voile qui recouvrent l’incarnation et cette question souvent discutée de celle qui s’ouvre à ce mystère, que cherche à percer les deux « évangiles de l’enfance », répond pour moi, comme en écho, deux voies / voix tout aussi fragiles, celles qui :

1. aboutit au cri / sommet sorti de la gorge du centurion infidèle (Mc 15, 39) que Marc fait suivre au déchirement du voile (*) 

2. ou l’agenouillement sponsal d’un Christ (*) qui se dépouille de son vêtement pour laver les pieds de l’homme en Jn 13, dans ce X. Leon Dufour appelle un mime d’une extrême densité symbolique.

C’est au creux de ces quatre voies, dans la polyphonie des Écritures que prend chair, pour moi, la symphonie fragile des Évangiles…(1) et que peut se concevoir ce que l’Église cherche à contempler, y compris sur la virginité. 


En ce jour du martyre des saints innocents peut on dire plus, espérer plus que de tracer un chemin fragile qui va d’un souffrant à l’autre jusqu’à la contemplation de la déréliction, ce silence de Dieu qui accompagne la mort du crucifié et nous appelle à croire que Dieu est vainqueur de la mort par ce mystère fragile qui va de l’incarnation à la résurrection ? Et qui, ce faisant, « a besoin de nos mains », comme le disait Etty Hillesum au camp de Westerbroch (2)


(*) cf. mes essais « Le voile déchiré » et « À genoux devant l’homme »

(1) un beau thème développé par Hans Urs von Balthasar dans la fin de sa trilogie 

(2) cf. Une vie bouleversée

23 décembre 2020

Tressaillement et danse - 20

 



« L'enfant a tressailli... »

Que dire quand on est homme et que jamais l'enfant n’a en nous manifesté sa présence ? Peut-on en être jaloux ? 😉 

Il y a pourtant des tressaillements intérieurs, des caresses de Dieu qui nous réveillent et nous font pressentir cela...

Signes discrets d’un Dieu qui vient se révéler à nous dans le silence ?

Signes plus tangibles quand la Parole fait vibrer en nous le mystère....

On devrait peut-être même aller plus loin et glisser sur la pointe des pieds que lorsqu'il nous a été donné de communier au corps et au sang du Christ, nous devenons à notre tour capables de ces « tressaillements » de Dieu en nous. 

Capax dei !

Est-ce ce que suggère François Varillon quand il dit que Dieu vient diviniser ce que nous avons humanisé ? (1)

J’ai du mal avec le mot diviniser, qui nous vient d’Irenée, mais c’est peut-être là qu’il prend chair, dans ce tressaillement intérieur dû à l’inhabitation fugace du Verbe en l’homme...

Alors nous pouvons faire nôtre le magnificat. Car nous entrons à notre tour dans cette danse trinitaire à laquelle le "fiat" marial nous a invités. 


« Heureuse celle qui a cru... » On entend déjà résonner à nos oreilles le chant des béatitudes et notre cœur devrait lui aussi bondir d'allégresse, car, en ce jour de la visitation, l'Église rentre dans la fête et la danse du peuple de Dieu. Après des siècles d’attente, après le désert, l'exil et la peine, la bonne nouvelle d'un Dieu parmi nous devrait nous envahir. Dieu a entendu son peuple et lui a donné un sauveur...

« L'enfant a tressailli... » 

« Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur ! Il s'est penché sur son humble servante ».... (Luc 1, 47)


Ce chant m’habite, habite aussi mes joies, même les plus intérieures. Il prend sa source dans les chants de l’AT et devient signe de nos espérances... il relève les humbles...


Que Dieu tressaille en nous à l’aube du mystère...


(1) cf. Joie de croire, joie de vivre

PS : extrait complété de mon « Chemins de miséricorde »

Voir aussi « la danse intérieure »

La visitation - peinture de ma soeur, L. Franc (c)

19 décembre 2020

D’agenouillements en agenouillements - danse 18

« Le Seigneur est avec toi... »

C’est le point commun entre la première lecture et l’Evangile de ce dimanche... cela peut être aussi le point de départ d’une méditation.

Laissons nous assez de place dans nos vies pour le Seigneur ?

Dans le livre de Samuel, nous voyons David désireux de construire une maison pour lui. Mais Nathan l’en dissuade. Pourquoi ? 

Il y a de nombreuses manières de faire une place à Dieu dans nos vies. On peut le vénérer dans une église, dire qu’il est là dans le tabernacle et parfois l’oublier en sortant. Après David, Salomon construira un temple, mais oubliera son Dieu et construira d’autres lieux de culte aux petits dieux de ses épouses.

Nous allons aussi faire de belles crèches, cacher le petit Jésus puis essayer de retrouver sa cachette le jour de Noël... mais l’Avent n’est peut-être pas là 😉

L’avent consiste à creuser en nos cœurs la place auquel le Seigneur a droit... Quelle place exactement ?

Suivre Marie, dans son humanité ? Elle est la première en chemin... Elle s’est préparée et devient signe pour nous... 

Si l’ange vient la visiter, c’est probablement parce qu’elle a creusé en son cœur ce qui lui permettra d’accueillir la venue de Dieu....

Comme Zachée à qui Jesus dit « descend, je veux demeurer chez toi » ouvrons, nous aussi, nos cœurs à ce Dieu qui vient nous visiter. Faisons un temple de nos corps, une crèche toute intérieure...

Creusons en nous cette vallée intérieure où Dieu peut venir. Entrons dans le silence, fuyons un instant la course fébrile des Noels païens pour nous rendre disponible à la venue de Dieu...

Comme l’ange d’Arcabas qui s’agenouille devant Marie, contemplons  cette préparation toute particulière d’une femme choisie par Dieu pour recevoir Dieu en son corps. Sa crainte, sa réponse est chemin pour nous.

À notre tour, préparons-nous à devenir temple. Disons à la suite de Marie, « comment cela peut-il se faire que tu daignes me visiter », « mais dit seulement une parole » et j’ouvrirai ma porte, à nouveau, à ta présence.

Jésus Christ est le mystère gardé depuis l’origine nous dit Paul... le mot mystère en grec est plus vaste que le petit Jésus caché pour Noël... 

Prenons le temps d’ouvrir nos cœurs à cette descente toute particulière de Jésus en nous, pour répondre à la suite de Marie, « Fiat »... qu’il soit fait en moi comme le demande ton Verbe, un temple digne ta présence. 

Si l’ange d’Arcabas se met à genoux, ce n’est pas pour rien. Jésus à sa suite, se mettra à genoux devant l’homme le soir de sa Passion, comme l’ont fait les Marie de l’Evangile(1). S’il se met à genoux, c’est peut-être en réponse à tous les agenouillements intérieurs des femmes et des hommes de l’Ancien et du Nouveau testament. La théophanie de Luc ne déroge pas, en effet, aux schémas littéraires de toutes les théophanies de l’Ancien Testament. Elle prépare la venue en nous d’un Dieu à genoux. 

C’est pour moi une danse inachevée entre l’homme et Dieu, une danse humble et fragile... une réciprocité dans l’agenouillement. 

Viens Seigneur, je t’attends... à genoux. Non dans un agenouillement servil, mais parce que le premier, tu te fais petit pour nous visiter.

(1) raccourci criticable  inspiré par Berulle qui voit une seule femme dans les trois femmes au pied de Jésus 

PS : J’ose soumettre ici à votre sagacité le texte de mon homélie de dimanche, issue de nos discussions toujours fructueuses en « Maison d’Evangile » cf. https://www.facebook.com/groups/2688040694859764/

Comme toujours, un accouchement difficile.

PS2 : le titre de danse 18, fait allusion à de nombreux billets publiés ici, mais aussi, plus qu’ailleurs, à mes deux essais déjà évoqués « La danse trinitaire » et « à genoux devant l’homme » disponibles gratuitement sur Kobo/Fnac cf. Ci dessous 

12 août 2020

De dépouillement en dépouillement - à genoux devant l’homme

Il y a une danse presqu'éternelle entre l'homme et Dieu. Elle commence par le don et l'appel d'un « où es-tu ? » (Gn 3, 9) où Dieu cherche l'homme en dépit de sa faute. Y répond les pas de l'homme vers son Dieu qui l'appelle. On les entr'aperçoit dans le « quitter » et l'agenouillement qu'entreprend Abraham (cf. Gn 12 et Gn 18)
Dans ce mouvement, c'est à la fois Dieu qui se penche vers l'homme et demande son amour en dépit de ses fuites et du mal qui l'habite, mais aussi l'homme qui retire ses sandales (Ex 3) ou son vêtement (Ex 33) pour s'agenouiller devant son Dieu.
En premier, nous avons, comme le souligne sainte Catherine « cet amour incompréhensible qui t'a poussé à créer l'homme à ton image et ressemblance. ~ Quel motif avais-tu d'établir l'homme dans une telle dignité ? Certainement, c'est uniquement l'amour incompréhensible par lequel tu as considéré ta créature en toi-même et tu t'en es épris.(1) »
Mais l'amour infini de Dieu n'est pas resté sans réponse, sa pédagogie et son dépouillement (2) ne cesse de briser le cœur fier de l'homme.
La dynamique est bien double.
L'agenouillement de l'homme est plus habituel. On l'aperçoit dans chacune des théophanies. Celui de Dieu est plus discret dans l'Ancien Testament, on le sent pourtant entre les lignes. Il se révèle dans cette miséricorde qui affleure déjà chez les prophètes (3), devient plus visible dans cet agenouillement de l'ange devant la Vierge qui dans l'émerveillement d'un « fiat »(c'est en tout cas l'interprétation de Fra Angelica ou d'Arcabas - cf. Luc 1, 26-38) esquisse un mouvement vers le sol. Ce n'est que lorsque le voile de la kénose se déchire que Dieu pudique laisse apparaître enfin Jésus à genoux devant Pierre ou Judas.



On retient souvent l'agenouillement des Maries de Béthanie ou d'ailleurs... on ignore trop souvent que l'humilité de Dieu et son dépouillement est esquissé bien avant la Croix, dans cette alliance improbable et presqu'incompréhensible qu'il tente avec l'homme en dépit de tous ses reniements depuis David jusqu'à Pierre, depuis Abraham jusqu'à Judas...
Contempler l'agenouillement de Dieu, c'est prendre conscience de son amour infini. Le livre que je viens de mettre en ligne gratuitement n'est qu'une fenêtre sur un mystère qui nous dépasse, ce Dieu « à genoux devant l'homme » (4) qui nous demande de l'aimer comme il nous aime.
Il constitue l'essence de ma foi...

(1) sainte Catherine de Sienne, dialogue sur la providence, source office des lectures du 9/8.
(2) cf. Pédagogie divine in Dieu dépouillé
(3) cf. Osée 11sq. Voir aussi lire « lire l'ancien testament, tome 1 »
(4) voir le lien ou sur le site de la Fnac

21 décembre 2019

Homélie de la messe de Minuit

Homélie de la messe de Minuit - projet 4

 Les enfants, nous venons de jouer une petite saynète qui nous fait entrer dans le mystère de Noël. Je voudrais vous raconter une petite histoire. C'est celle de Silo, un petit berger(1) du temps de Jésus. Il était tout jeune et le soir de Noël il a perdu sa brebis. Il l’a longtemps cherché, mais quand il l’a trouvé il faisait nuit. Et comme il était un peu perdu, il a été lui aussi à l'auberge, attiré par les lumières et la fête. Mais les bergers, au temps de Jésus, n'étaient pas considérés comme des gens biens. Ils étaient rejetés parce qu'ils sentaient forts, qu'ils avaient les mains sales. il s'est vu interdire la porte de l’auberge.. alors il s’est couché à côté du puits, affamé et apeuré.
Quand les premières étoiles sont arrivées c'est lui a rencontré Marie et Joseph et les a conduit à la crèche.Comme ils avaient soif,  il a confié sa brebis à Joseph puis il a couru plusieurs fois, entre le puits et la crèche.  Lorsque les anges ont appelé ses frères,  il était là, lui aussi, les mains vides. Il était fatigué d’avoir aidé Joseph, d’avoir donné à boire à l’âne, d’avoir porté de l’eau à Marie, mais il avait les mains vides. Il est entré tout doucement alors que les autres bergers arrivaient. Ils avaient tous des petits cadeaux pour Joseph et Marie, du fromage, de la laine. Lui n'avait rien, qu'un cœur d'enfant et les mains propres à force d’avoir titré de l’eau. Quand Marie a vu cette foule, elle a cherché à poser le petit Jésus pour recevoir tous ces petits cadeaux et elle lui a confié l'enfant. Il avait les mains vides et c'est lui qui a reçu Jésus.

Pourquoi ? D'après- vous ?

Ce soir, peut-être allez-vous recevoir des cadeaux de vos parents. Peut-être y aura-t-il des lumières de toutes les couleurs au sapin...

N'oubliez pas l'essentiel. Ce n'est pas l'extérieur qui compte. L'essentiel c'est l'amour. C’est l’amour qui/que vous donnera Jésus.

C’est Noël chaque fois que vous serez serviteur, chaque fois que l’amour sera premier pour vous.
C’est aussi l’amour qui conduit votre papa et votre maman qui est l’important. L’essentiel c'est surtout Jésus qui vient et vous rend visite, vous inviter à aimer...
L'essentiel c'est d'avoir un cœur pur... et un cœur qui bat pour ceux qui sont exclus, souffrants.

L'essentiel c'est l'amour de Jésus qui vient vous visiter
L'essentiel c'est d'oublier le superflu
L'essentiel c'est d'avoir un cœur qui bat pour aimer.
L'essentiel c'est l'amour.

Alors vous comprendrez que contempler la crèche, comme la Croix, c’est contempler l’amour qui se donne et vous invite à donner. Ces deux lieux sont les lieux où Dieu se montre faible, où il se met à nu devant l'homme pour l'inviter à aimer.

Petit message pour les parents :
Il y a quelques jours le pape a mis au Vatican un gilet de sauvetage sur un crucifix. Ce gilet appartenait à un disparu en Méditerranée. Pourquoi ce geste ? Parce que pour lui, les nouveaux migrants, ceux qui sont exclus de l’auberge, sont à nos portes et souvent nous restons à l’auberge... Je vous laisse méditer cela, au jour de Noël.

(1) Autre variation d’un conte raconté par le P. Cantalamessa
PS : Silo est le héros de mon livre éponyme (en téléchargement gratuit sur Fnac.com), dont je présente ici une petite variation




14 août 2019

Homélie de l'Assomption - 15 août - version 8

Homélie du 15 août 2019 - notes finales d’une homélie prononcée à Droisy 

Frères 
Êtes-vous dans la joie ? 
Cette joie profonde de la Résurrection et de l’Assomption, fondée sur l’Espérance que porte la fête d’aujourd’hui ?  

Il y a dans les textes d'aujourd'hui une triple dimension :
  • Une dimension historique par la manière dont les textes retracent les dons de Dieu depuis l'origine comme le fait superbement le magnificat, complétée par la tradition de l’Église jusqu’au texte de Pie 12 sur l’Assomption en 1950 (1)
  • Une espérance que l'on appelle eschatologique (propre à la fin des temps) avec l'annonce de la victoire de Marie et surtout de son Fils sur le monde
  • Enfin une dimension spirituelle, d'une certaine manière mystique et eucharistique en ce qu'elle touche l'aujourd'hui de nos vies et c'est là dessus que je voudrais insister, car c'est à la fois l'essentiel et souvent ce qui est oublié dans cette fête de l'Assomption
Il y a en effet, trois sous-points à cette troisième dimension si vous le voulez bien :
  • Marie est chemin pour nous. Elle est l'image même du chrétien "accompli" en ce qu'elle se dessaisit et se détache de toute logique humaine pour accueillir en son sein le Sauveur.. Par son fiat, elle est le chemin qu'il nous reste sans cesse à imiter. « Qu’il me soit fait selon ta parole » (Luc 1)
  • Marie est celle qui, en union et à l'image de son Fils, porte le plus nos souffrances humaines. Dans sa présence jusqu'à la croix (stabat mater) se dévoile le cœur de ce qui est pour nous la voix royale. Elle est la première en chemin… C’est probablement pour cela que nous l’appelons souvent notre dame des douleurs... 
  • C'est entre ces deux tensions ; le détachement de soi et sa capacité à traverser la souffrance que que se révèle quelque chose de fragile en nous. Et c'est peut-être la clé ou la porte qu'il nous faut chercher dans cesse.
Prenons le temps de refaire doucement ce chemin. Il est en effet enchâssé dans les deux autres : au point focal entre dessaisissement et souffrance avec ou pour le monde. Nous ne pouvons accéder à Dieu que si nous quittons ce qui nous retient sur nous-mêmes. Et cela demande un grand pas en avant...

Marie est restée dans la nuit. Luc le dit avec ses mots à lui. Elle n’aura droit qu’au silence et parfois au mépris - rappelons nous ce « qui est ma mère » (Marc 3, 33 / Mat 12, 48 / Lc 8, 21) qui sonne comme un rejet de Jésus. Pourtant elle a cru au-delà de tout désespoir. Elle est, en cela, lumière dans notre nuit.  Et quand tout le monde a fui, elle est là debout...




Quel enseignement pour nous ?
La venue de Dieu en nous est comme un accouchement. Et c'est là où le monde féminin nous précède, c'est là où Marie est la première en chemin, la nouvelle Ève.
Qu'est-ce qu'un accouchement ? Je me sens petit pour parler de cela… Juste après la naissance de mon troisième petit-enfant. Petit et humble devant cette merveille de l'accouchement. 

Que dire sinon entrer dans le silence ?
Je vous invite à méditer cela d'ici dimanche. Il  y a là une clé que Marie nous révèle à sa manière par sa vie  ; En acceptant d'être visitée par Dieu, en Le portant en elle, en courant au service de sa cousine, en acceptant que son Fils soit détaché, oserait-je dire arraché de ses entrailles, qu'il quitte son giron familial, en se tenant debout et traversant la souffrance, elle nous enseigne la clé de toute vie chrétienne véritable. Plus loin qu’une fidélité de façade elle se fait instrument de Dieu. 
Prenons le temps d’accueillir cela en nous. Dieu vient nous visiter à sa manière, dans le silence particulier qui est propre à sa communication aimante. Il viendra tout à l'heure dans l'Eucharistie. Faisons à notre tour une juste place à sa venue. Devenons, comme elle, des porte-Christ.
Il est venu, il est mort et Dieu l'a ressuscité... 
Il revient en nous si nous le laissons vraiment tressaillir en nous, c'est-à-dire si nous lui laissons vraiment la juste place...
Il reviendra nous visiter.. 

L'Assomption de Marie, que nous fêtons aujourd'hui, s'inscrit dans cette espérance.
Alors accueillons le, par notre fiat... au-delà de nos peurs... au delà de nos souffrances
Qu'il me soit fait selon ta Parole !

(1) cf. la constitution apostolique sur l’Assomption de 1950
(*) Si j'ose partager avec vous ces balbutiements c'est dans l'espoir, parfois vérifié, que vos remarques m'aident à améliorer ce texte... alors n'hésitez pas à m'écrire.

21 avril 2019

Alléluia - il est ressuscité - saint Jean Chrysostome - Benedictus - Pâques - Homélie

Alléluia 
Christ a vaincu la mort.
Il nous relève de nos tombeaux, nous libère de nos servitudes.
Jour de la résurrection, jour de joie

« Voici le jour que le Seigneur a fait ; passons-le dans la joie et dans l'allégresse ! » (Ps 117,24) Pourquoi ? Parce que le soleil n'est plus obscurci, mais tout s'illumine ; (...) ; nous ne tenons plus des rameaux de palmier, mais nous entourons les nouveaux baptisés.
« Voici le jour que le Seigneur a fait »... Voici le jour au sens propre, le jour triomphal, le jour consacré à fêter la résurrection, le jour où l'on se pare de grâce, le jour où l'on partage l'Agneau spirituel, le jour où l'on abreuve de lait ceux qui viennent de naître, le jour où se réalise le plan de la Providence en faveur des pauvres. « Passons ce jour dans la joie et dans l'allégresse »..
Voici le jour où Adam a été libéré, où Ève a été délivrée de sa peine, où la mort sauvage a frémi, où la puissance des pierres a été brisée, où les verrous des tombeaux ont été arrachés..., où les lois immuables des puissances des enfers ont été abrogées, où les cieux se sont ouverts quand le Christ, notre Maître, est ressuscité. Voici le jour où, pour le bien des hommes, la plante verdoyante et fertile de la résurrection a multiplié ses rejetons dans tout l'univers comme dans un jardin, où les lys des nouveaux baptisés se sont épanouis..., où la foule des croyants se réjouissent, où les couronnes des martyrs reverdissent. « Voici le jour que le Seigneur a fait ; passons-le dans la joie et dans l'allégresse.(1)



Dieu a fait de son Fils le « Juge des vivants et des morts. C'est à lui que tous les prophètes rendent ce témoignage : Tout homme qui croit en lui reçoit par lui le pardon de ses péchés. » (Actes 10, 42-43)

Voici le jour que fit le Seigneur, 
jour de fête et de joie.
Peuples, rayonnez de joie ; 
voici la Pâque du Seigneur.
Voici le jour où le Christ, notre Dieu, 
nous conduit de la mort à la vie.

Le soleil s'est levé : ne cherchez plus parmi les morts le Fils de l'homme : il a brisé les verrous de la mort, alléluia !

« Il a fait surgir la force qui nous sauve
dans la maison de David, son serviteur,
comme il l'avait dit par la bouche des saints,
par ses prophètes, depuis les temps anciens :
salut qui nous arrache à l'ennemi,
à la main de tous nos oppresseurs,
amour qu'il montre envers nos pères,
mémoire de son alliance sainte,
serment juré à notre père Abraham
de nous rendre sans crainte,
afin que, délivrés de la main des ennemis, +
nous le servions dans la justice et la sainteté,
en sa présence, tout au long de nos jours.
(...) tendresse, l'amour de notre Dieu,
quand nous visite l'astre d'en haut,
[qui vient] illuminer ceux qui habitent les ténèbres
et l'ombre de la mort, *
pour conduire nos pas
au chemin de la paix. (2) 

Gloire à toi, Jésus, notre vie !
Ô Christ, radieuse lumière qui brille dans nos ténèbres, 
tu as sanctifié pour toujours notre condition mortelle.
Seigneur, toi qui as marché sur la voie du calvaire, 
tu nous appelles à te suivre pour mourir et ressusciter avec toi.
Fils du Père, notre frère et notre maître, 
tu fais de nous un peuple de prêtres et de rois.
Roi de gloire, 
nous attendons le jour éclatant de ta manifestation : 
alors nous te verrons tel que tu es, 
et nous serons semblables à toi.(3)

Aujourd'hui, Dieu notre Père, tu nous ouvres la vie éternelle par la victoire de ton Fils sur la mort, et nous fêtons sa résurrection. Que ton Esprit fasse de nous des hommes nouveaux pour que nous ressuscitions avec le Christ dans la lumière de la vie. Lui qui règne.(4)
Alléluia 

(1) Homélie attribuée à saint Jean Chrysostome (trad. SC 187, p. 321 rev. Brésard)
(2) Benedictus Luc 1, 70-78
(3 et 4) Antienne et oraison des Laudes du jour de Pâques, source AELF 

25 mars 2019

Au fil de Luc 1,26-38. - Annonciation


« L'Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c'est pourquoi celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu (...) rien n'est impossible à Dieu. »
Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m'advienne selon ta parole. » Alors l'ange la quitta. (Luc 1, 36-38)

Nous sommes encore loin de cette confiance de Marie. Elle est chemin, miroir de la grâce qui vient l'habiter et la portera jusqu'à la Croix.



Je vous salue, comblée de grâce, le Seigneur est avec vous. Vous êtes bénie entre toutes les femmes et Jésus votre enfant est béni. 



25 janvier 2019

Au fil de Lc 1, 1-4 ; 4, 14-21 - Accomplissement - Projet d’homélie du dimanche 27 janvier

Questions pour préparer Dimanche - messe des familles à St Martin de Nonancourt 

  1. Qu'est-ce qu'un jeu de Kapla  ?
  2. Que se passe-t-il si l'on retire une pièce dans une tour en Kapla
  3. Qui était Isaïe  ?
  4. Combien d'années entre Isaïe et Jésus (100, 200, plus de 600 ans)
  5. Combien d'étoiles dans l'univers (100, 1000, des milliards)
  6. Combien d'années entre la création du monde et Jésus (1 million, 1 milliard, plus de 10 milliards)
  7. Que veut dire le mot accompli (aux parents)

Homélie pour Dimanche 
Les textes que nous avons lu interpellent au lendemain de la semaine pour l’unité et posent à la fois plein de questions et pour mieux les comprendre et méditer sur les réponses nous avons demandé aux enfants de nous aider dans sa compréhension.

Question 1...
  1. Qu'est-ce qu'un jeu de Kapla  ? / ou 2 ateliers de construction par les enfants. les autres enfants cherchent Isaïe dans son livre de vie.
Réponse des enfants
Dans la 2eme lecture Paul (1 Co 12), nous parle de l'Eglise. C'est pour lui, un peu comme un jeu de Kapla, sauf que les pièces sont toutes différentes en taille.

Question 2
Que se passe-t-il si l'on retire une pièce dans une tour en Kapla ?

Réponse des enfants
Dans ce jeu, toutes les pieces se ressemble. Pour Dieu, chaque pièce est unique et c'est que nous dit saint Paul. Chacun à sa place, qu'il soit petit ou grand aux yeux des hommes. Et pourtant, malgré ces différences nous formons un grand corps qui, comme pour les Kapla ne tient que si chacun trouve sa place.
En fait, la tour que nous construisons reste fragile. S'il manque l'amour tout s'écroule. Il nous faut l'amour entre nous....

Question secrète
Or l'amour nous vient de qui ? Qui nous apprends à aimer ?
Réponse des enfants

Oui, c'est Jésus qui nous conduit à aimer. La grandeur de cet amour, il est difficile de la décrire. 
L'amour qui nous unit à Dieu nous dépasse. 
L'amour supporte tout ; l'amour est patient pour tout, il ne connaît pas la division, ne pousse pas à la révolte nous dit Paul. C'est à cause de son amour pour nous que Jésus Christ notre Seigneur a donné son sang pour nous, pour nos vies. 

C'est là où on en vient à l'évangile.

Reprise du récit...

Qu'est-ce qu'il décrit. Jésus ouvre un livre, lit un passage d'Isaīe qui dit « L'Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m'a consacré par l'onction »  puis il ajoute : c'est aujourd'hui que cela devient vrai, que cela s'accomplit.

Question 3 et 4
Qui était Isaïe  ? Combien d'années entre Isaïe et Jésus (100, 200, plus de 400 ans)
Qu'est-ce qu'il y a dans dans votre cahier de vie...
Réponse des enfants
Ce que nous dit l'évangile, c'est que ce qu'attendait les juifs, le messie, depuis plus de 700 ans, est accompli, c'est à dire est réalisé maintenant avec la venue de Jésus-Christ 
« L'Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m'a consacré par l'onction » cela veut dire, « je suis le messie !, l'oint de Dieu. 
La promesse de Dieu se réalise... Mais quelle promesse...?
Ce Dieu qui a créé le monde et les étoiles est celui que Jésus nous révèle. 

Combien y-a-t-il d'étoiles déjà dans le ciel  ? Des milliers des millions ou des milliards ,
Réponse des enfants
Plus de 10 milliards et pourtant c'est sur cette terre que Dieu a choisi de se montrer...

Combien d'années a-t-il attendu pour que son amour pour l'homme se révèle ?
Savez vous combien de temps il a mis pour créer le monde ?
Réponse des enfants
Dieu a attendu longtemps, plus de 12 milliards d'années nous dit la science et c'est avec le Christ que tout se révèle...

Voilà mes frères ce que nous avons à méditer aujourd'hui 
Ce que nous allons vivre aujourd'hui en célébrant la messe c'est la mémoire de tout cela

Un psaume nous invite à contempler cela. Qu'est-ce que l'homme pour que tu t'intéresse à lui ?
Pourquoi nous as tu donné ton Fils ?
Ce que nous pouvons contempler dans notre cœur aujourd'hui c'est le plan de Dieu dans sa.triple dimension : ce qu'il a fait pour nous, de l'univers et des étoiles à chacun de nous. Ce qu'il a fait en Jésus.


Une dernière question aux parents. Savez vous combien de fois le mot accompli est cité dans l'évangile ?
Réponse des parents ?
En fait on le trouve une petite vingtaine de fois dans l'évangile, mais ce qui est frappant, c'est que c'est l'un des premiers mots de Jésus dans Luc et le dernier dans Jean. Tout est accompli. C'est peut-être cela que nous avons à contempler aujourd'hui. En méditant cette phrase, qui nous concerne aussi :  «J'ai un baptême à recevoir; comme cela me pèse qu'il soit accompli!»
Selon Luc 12:50 NBS
Cette phrase nous pouvons aussi la contempler. Car nous sommes nous aussi baptisés du même baptême.
écoutons ce que nous dit la tradition de l'Église : 
« Pour que l'homme soit un fils à son image, 
Dieu l'a travaillé au souffle de l'Esprit :
Lorsque nous n'avions ni forme ni visage, 
Son amour nous voyait libres comme lui. (...)

Quand ce fut le jour, et l'heure favorable,
Dieu nous a donné Jésus, le Bien-Aimé :
L'arbre de la croix indique le passage
Vers un monde où toute chose est consacrée » (1)

(1) Hymne de l'office des lectures, source AELF 

21 décembre 2018

Au fil de Luc 1, 44 - Tressaillement - 11

"L'enfant a tressailli d'allégresse en moi" (luc 1, 44).

Il nous faut contempler ce cri et le laisser résonner en nous, à la fois, parce qu'il réveille l'enfant en nous et parce qu'il s'agit du bien le plus précieux : Dieu vient nous visiter.



(1) cf. Mon roman sur le sujet



20 décembre 2018

Amour est en toi - 26 - Manducation et tressaillement

Il y a dans ce texte d'aujourd'hui (Luc 1) une manducation à faire pour qu'à la suite de la Vierge nous puissions à notre tour dire "je suis la servante du Seigneur". Aujourd'hui, en communiant au corps et au sang du Christ nous recevons aussi le Christ en nous. Et cette inhabitation de Dieu peut provoquer tressaillement et joie.

Dieu vient habiter en nous. Portons, à la suite de la Vierge ce corps livré, communions à ses souffrances et à ses joies de mère, prions pour que ce que nous avons reçu donne aussi du fruit.

De même qu’elle porte le Seigneur, devenons de vrais porte-Christ (1).

Le monde a besoin de sentir ce que nous ressentons. Trouvons les mots pour transpirer de cette joie d'un Dieu qui vient en l'homme.

(1) expression des premiers siècles de l’Église

Annonciation - Luc 1, 26-38 - L’amour vient en toi - 25 - saint Bernard

En ce jour qui reprend les textes de l’annonciation laissons résonner en nous les paroles de la Vierge “je suis la servante du  Seigneur” ce ne sont pas des paroles en l’air. Il s’agit d’accueullir en soi le tressaillement de Dieu, de le porter pour qu’il donne son fruit en son temps. 

« Ne tarde plus, Vierge Marie. (...)  Vite, réponds à l'ange, ou plutôt, par l'ange réponds au Seigneur. Réponds une parole et accueille la Parole ; prononce la tienne et conçois celle de Dieu ; profère une parole passagère et étreins la Parole éternelle.

Pourquoi tarder ? Pourquoi trembler ? Crois, parle selon ta foi et fais-toi tout accueil. Que ton humilité devienne audacieuse, ta timidité, confiante. Certes il ne convient pas en cet instant que la simplicité de ton cœur virginal oublie la prudence ; mais en cette rencontre unique ne crains point la présomption, Vierge prudente. Car si ta réserve fut agréable à Dieu dans le silence, plus nécessaire maintenant est l'accord empressé de ta parole. Heureuse Vierge, ouvre ton cœur à la foi, tes lèvres à l'assentiment, ton sein au Créateur. Voici qu'au dehors le Désiré de toutes les nations frappe à ta porte. Ah ! Si pendant que tu tardes il allait passer son chemin, t'obligeant à chercher de nouveau dans les larmes celui que ton cœur aime. Lève-toi, cours, ouvre-lui : lève-toi par la foi, cours par l'empressement à sa volonté, ouvre-lui par ton consentement. »





(1) Saint Bernard, Sermon sur les louanges de la vierge Marie, source Bréviaire AELF 

27 novembre 2018

Au fil de Luc 21, 5-11 - Apocalypse - Saint Cyrille d’Alexandrie


« Veillez à ne pas vous laisser égarer. Beaucoup, en effet, viendront en se servant de mon nom, en disant: « C'est moi! », et: « Le temps s'est approché! » N'allez pas à leur suite. » ‭‭(...) « Quand ces évènements commenceront, redressez-vous et relevez la tête » Luc‬ ‭21:8‬, 28

Les images de l'Apocalypse ou celles qui ponctuent le discours du même style chez Luc 21 sont-elles à prendre au premier degré ?
Oui et non, probablement. On sait maintenant combien de drames et de catastrophes ont rempli l'univers. Il y a le mal de peine, ce qui touche à la nature et, comme le souligne saint Thomas, le mal de faute, ce qui vient des hommes. 
Comme l'écrit saint Cyrille, « Ces villes renversées, selon nous, ne sont pas celles que l'on peut percevoir par les sens, ce ne sont pas les hommes qui y vivent. Mais, à notre avis, il s'agit plutôt de chacune des puissances mauvaises et hostiles, et avant tout de Satan, qui est appelé ici une ville, et une « ville forte »...
Lorsque l'Emmanuel est apparu et a brillé sur le monde, la troupe impie des puissances adverses a été ruinée, Satan a été renversé « depuis ses fondements » ; il est tombé, il est affaibli à jamais et ne peut plus espérer se redresser un jour, ni relever la tête. » (1)
Certes nous savons maintenant que le mal renaît de ses cendres. Pour autant, nous devons résister à cette double tentation : celle de nous croire exempt de combats intérieurs et celle de penser que Dieu est vaincu. Croire en la grâce et la miséricorde divine doit nous inviter à persévérer. 
Dieu est plus grand que la mort. Telle est notre espérance. C'est pourquoi nous pouvons, « nous redressez et relevez la tête »  
« C'est pour cela que « le peuple pauvre et la ville des hommes opprimés te bénira » (LXX). (...).. Lorsque le Christ en personne est apparu et que, chassant la tyrannie du diable, il les a conduites à son Dieu et Père, alors elles ont été enrichies par la lumière de la vérité, par la participation à la gloire divine, par la grandeur de la vie de l'Évangile. C'est pourquoi elles ont fait jaillir des hymnes d'action de grâce au Dieu et Père : « Oui, Seigneur, tu as accompli ton dessein ancien et vrai » (v.1) en récapitulant tout dans le Christ. Tu as « illuminé ceux qui étaient assis dans les ténèbres » (Lc 1,79) en renversant les puissances qui dominent le monde (Ep 6,12), comme on renverse des villes fortifiées. « C'est pourquoi le peuple pauvre te bénira, toutes les villes te glorifieront. » (2)

C’est peut-être cela qu’il nous reste à contempler : le Christ, lumière et phare pour nos vies et espérance pour les hommes.

(1) Saint Cyrille d'Alexandrie, Sur Isaïe, III, 1 (trad. Sr Isabelle de la Source, Lire la Bible, t. 6, p. 76), source Evangelizo 
(2! Ibid.







31 mai 2018

L'amour est en Toi - 3

« Pousse des cris de joie, fille de Sion !
Éclate en ovations, Israël !
Réjouis-toi, de tout ton cœur bondis de joie,fille de Jérusalem !
Le Seigneur a levé les sentences qui pesaient sur toi,
il a écarté tes ennemis.
Le roi d’Israël, le Seigneur, est en toi.
Tu n’as plus à craindre le malheur.
Ce jour-là, on dira à Jérusalem :
« Ne crains pas, Sion !
Ne laisse pas tes mains défaillir !
Le Seigneur ton Dieu est en toi,
c’est lui, le héros qui apporte le salut.
Il aura en toi sa joie et son allégresse,
il te renouvellera par son amour ;
il exultera pour toi et se réjouira,
comme aux jours de fête. » (1)

"Voici le Dieu qui me sauve :
j’ai confiance, je n’ai plus de crainte.
Ma force et mon chant, c’est le Seigneur ;
il est pour moi le salut.
Exultant de joie,
vous puiserez les eaux aux sources du salut.
Ce jour-là, vous direz :
« Rendez grâce au Seigneur,
proclamez son nom,
annoncez parmi les peuples ses hauts faits ! »
Redites-le : « Sublime est son nom ! »
Jouez pour le Seigneur,
il montre sa magnificence,
et toute la terre le sait.
Jubilez, criez de joie,
habitants de Sion,
car il est grand au milieu de toi,
le Saint d’Israël !"

"En ces jours-là,Marie se mit en route et se rendit avec empressement vers la région montagneuse, dans une ville de Judée.
Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth.
Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie,l’enfant tressaillit en elle.
Alors, Élisabeth fut remplie d’Esprit Saint,
et s’écria d’une voix forte :
« Tu es bénie entre toutes les femmes,et le fruit de tes entrailles est béni.
D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ?
Car, lorsque tes paroles de salutation sont parvenues à mes oreilles,
l’enfant a tressailli d’allégresse en moi.

Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles
qui lui furent dites de la part du Seigneur. »
Marie dit alors :
« Mon âme exalte le Seigneur,
exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur !
Il s’est penché sur son humble servante ;
désormais tous les âges me diront bienheureuse.
Le Puissant fit pour moi des merveilles ;
Saint est son nom !
Sa miséricorde s’étend d’âge en âge
sur ceux qui le craignent.
Déployant la force de son bras,
il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leurs trônes,
il élève les humbles.
Il comble de biens les affamés,
renvoie les riches les mains vides.
Il relève Israël son serviteur,
il se souvient de son amour
de la promesse faite à nos pères,
en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais. »
Marie resta avec Élisabeth environ trois mois,
puis elle s’en retourna chez elle. (3)

Sans autre commentaire que celui du tressaillement,  déjà largement évoqué dans ces pages et dans le Mendiant et la Brise (4)

(1) So 3, 14-18
(2) Isaïe 12, 2, 3, 4abcd, 4e-5, 6
(3) Lc 1, 39-56, Source AELF
(4) voir mon livre éponyme