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20 juin 2019

Postorale périphérique - 6 - Le malentendu

"Toute rencontre doit nécessairement traverser des malentendus. (...) [comme avec] la Samaritaine: "Donne-moi de cette eau pour que je n'aie plus soif, que je n'aie plus à venir puiser ici" (Jn 4, 15).
Le malentendu dans une rencontre hospitalière peut durer très longtemps, et même être entretenu (...) Le chemin du malentendu, vers une entente passe par l'interrogation, et d'abord une auto-interrogation : la mise en question de soi-même est sans doute la condition ultime d'une rencontre réussie. Je suis interrogé par la présence d'autrui ; et je m'interroge sur mes préjugés, sur mes représentations, sur mes images, en raison de l'incontournable altérité de l'autre" (1)

Quel est l'enjeu ? Probablement cette inversion des rapports, cet effacement souvent prêchée par Jean Vanier dans ses discours sur la fragilité partagée. Elle est loin de tout enseignement d'en haut mais véritable rencontre, apostolat du seuil(2).

(1) Christoph Théobald, Paroles humaines, parole de Dieu, Salvator, 2015, p. 94-95
(2) cf. Pastorale du seuil

18 mai 2019

Au fil de Jean 13, 31 - ébauche d’homélie du 5eme dimanche de Pâques - hommage à Jean Vanier

Ébauche n.4 pour samedi...et dimanche (commentaires bienvenus)

« Maintenant le Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui.
Si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera ; et il le glorifiera bientôt.
Petits enfants, c’est pour peu de temps encore que je suis avec vous.
 Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres.
Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres.
 À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » (Jn 13)

Quelle est la gloire dont nous parle Jésus?
La question mérite d'être travaillée en entendant l'Évangile.
D'autant qu'elle mérite un énorme déplacement par rapport à notre vision humaine 
À développer : 
  1. le contexte du discours  : le dernier repas, après le lavement des pieds ! À contempler !
  2. La kénose décrite par Paul en Ph 2, 11 : c’est de comprendre que c’est dans l’abaissement et l’humilité que le Christ dévoile sa gloire
  3. Le commandement : aimer vous comme, n’a de sens que sur le comme 
La question légitime m'a été posée en groupe de lecture (lectio divina) sur ces deux versets de Jn 13 : « Νν δοξάσθη  υἱὸς το νθρώπου, κα  θες δοξάσθη ν ατ· ε  θες δοξάσθη ν ατ, κα  θες δοξάσει ατν ν ατ, κα εθς δοξάσει ατόν.» («Maintenant le Fils de l'homme a été glorifié, et Dieu a été glorifié en lui. Si Dieu a été glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera en lui, il le glorifiera aussitôt.») 
Difficile, avec nos yeux du XXIème siècle de voir la gloire divine dans le lavement des pieds et la bouchée à Judas. Et pourtant, à l'aune de Ph. 2,11 et de la kénose, il faut entendre les deux versets non sous l'angle de la gloire mondaine, mais sous celui de la révélation kénotique de la faiblesse divine : en paraphrasant et remplaçant « gloire » (doxa, kabod au sens d'Exode 34) par « lumière de la révélation » on obtient une version peut-être plus accessible à l'homme d'aujourd'hui : « Maintenant le Fils de l'homme s'est dévoilé et Dieu a été révélé en lui comme Dieu humble et aimant. Si Dieu a été révélé en lui, Dieu aussi le/[se] révélera en lui, [et] il le glorifiera aussitôt.»

Aimons-nous les uns les autres...
Pas à moitié, en passant, en critiquant par derrière 
La critique de l'autre trahit notre orgueil, notre jalousie 
Aimons-nous les uns les autres comme
Comme le dit Paul à plusieurs reprises dans ses lettres: imitez moi qui imite le Christ. Ce n’est pas sur l’apparence que cela se joue, mais bien dans cette course infinie où je me laisse saisir par lui (cf. Ph 3).
Il est le chemin...
C’est là un commandement nouveau. Il ne s’agit pas d’aimer comme le fond tous les hommes, dans une logique d’échange : je t’aime parce que ou pour que tu m’aimes. Non, la nouveauté du Christ c’est d’entrer dans le don gratuit, immense, sans limites, débordant d’un Dieu qui s’oublie pour se donner jusqu’à la Croix. 
C’est peut-être sous les pas de Jean Vanier que nous avons à chercher le chemin de l’amour gratuit.
Quelle est la découverte de Jean Vanier, c’est peut-être de regarder les choses à l’envers. Le petit, le faible, le rejeté, le fêlé nous donnes accès à Dieu. Comme le diacre Philippe pendu par les pieds laissons nous retourner. La gloire de Dieu, c’est de voir le monde à l’envers des hommes : aimer le petit et le faible. 
C’est le chemin du Christ, la kénose, Écoutons ce que nous dit Paul en Ph. 2. Il s’est abaissé, c’est fait esclave, c’est pourquoi Dieu l’a relevé et lui a donné la gloire. 



Au fil d’Apocalypse 18, 1-20 - La chute de Babylone - inversion 3

« 01 Moi Jean, j'ai vu descendre du ciel un autre ange, ayant un grande pouvoir, et la terre fut illuminée de sa gloire.
02 Il s'écria d'une voix puissante : « Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la Grande ! (..) 
07 À la mesure de la gloire et du luxe qu'elle a étalés, donnez-lui torture et deuil. Car elle dit dans son cœur : "Je trône, je suis reine, je ne suis pas veuve, je ne verrai jamais le deuil."
08 C'est pourquoi des fléaux, en un seul jour, viendront sur elle : mort, deuil, famine, et elle sera brûlée au feu, car il est fort, le Seigneur Dieu qui l'a jugée. »
09 Alors, ils pleureront et se lamenteront sur elle, les rois de la terre qui se sont prostitués avec elle et qui ont partagé son luxe, quand ils verront la fumée de son incendie.
10 Ils se tiendront à distance par peur de ses tortures, et ils diront : « Malheur ! Malheur ! la grande ville, Babylone, ville puissante : en une heure, ton jugement est arrivé ! »
(...) 19 Et jetant de la poussière sur leur tête, ils criaient dans les pleurs et le deuil. Ils disaient : « Malheur ! Malheur ! La grande ville, dont l'opulence enrichissait tous ceux qui avaient des bateaux sur la mer : en une heure, elle a été dévastée ! »
20 Ciel, sois dans la joie à cause d'elle, ainsi que vous, les saints, les apôtres et les prophètes, car Dieu, en la jugeant, vous a rendu justice. » (Ap 18, 1-20 source AELF)

En paraphrasant mon homélie de ce week-end : Quelle est la leçon de ce texte ? c'est peut-être de regarder les choses à l'envers. Le petit, le faible, le rejeté, le fêlé nous donnes accès à Dieu. Comme le diacre Philippe pendu par les pieds laissons nous retourner. La gloire des hommes du verset 7 ne conduis qu'à la mort....

Celle de Dieu, c'est de voir le monde à l'envers des hommes : comme Jean Vanier, comme Jésus aimer le petit et le faible. 

C'est le chemin du Christ, la kénose, Écoutons ce que nous dit Paul en Ph. 2. Il s'est abaissé, c'est fait esclave, c'est pourquoi Dieu l'a relevé et lui a donné la gloire. 

« Il est venu en ce monde en s'incarnant non pour être servi, mais, comme il le dit lui-même, pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude.
Il le reconnaissait bien : il est venu évidemment pour accomplir les promesses faites à Israël, puisqu'il disait : Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues d'lsraël. C'est pourquoi saint Paul ne ment pas lorsqu'il dit que le Christ s'est fait le serviteur des Juifs pour garantir les promesses faites à leurs pères. Mais il dit aussi que le Christ a été chargé par Dieu le Père de faire obtenir miséricorde aux païens, afin qu'eux aussi le glorifient comme le Créateur et l'Artisan de toutes choses, le Sauveur et le Rédempteur. ~ Ainsi, la clémence divine s'est étendue à tous, les païens ont été accueillis, et le mystère de la sagesse accompli dans le Christ n'a pas dévié de son but de miséricorde. Pour remplacer ceux qui sont tombés, c'est le monde entier qui a été sauvé par la compassion de Dieu. » (1)

Notre salut est dans le Christ serviteur. 

(1) Saint Cyrille d’Alexandrie, commentaire de la lettre aux Romains, source AELF, office des lectures du samedi de la 4eme semaine de Pâques 






19 août 2014

Diaconie VII - Philanthropie de Dieu et diaconie de l'Église


Le message à porter au monde nous dit Moingt* est la "révélation de la philanthropie de Dieu ". Un message, précise-t-il qu'il faut plutôt mettre en "oeuvre et en image, en paraboles comme le faisait Jésus". N'est ce pas la encore un appel à la diaconie et au service.

Je citais dans mon post précédent un extrait des notes de Congar au Concile. On trouve plus loin, dans le même livre une phrase qui m'a aussi marqué : "Dieu m’a amené à la servir et à servir les hommes à partir de lui et pour lui, surtout par la voie des idées. J’ai été amené à une vie solitaire, très vouée à la parole et au papier. C’est ma part dans le plan d’amour. Mais je veux m’y engager aussi de cœur et de vie et que ce service d’idées lui même soit un service des hommes."

Servir l'humain... Quel que soit soit sa forme, sa visibilité, l'essentiel est peut être l'essentiel en ce qu'il rayonne à sa manière de la philanthropie de Dieu.

N'est-ce pas d'ailleurs ce que le monde retient de plus beau à travers les gestes désintéressés des Soeurs Téresa, Emmanuelle ou d'un abbé Pierre ou Ceyras comme d'un Jean Vannier. Si ce service de l'humain est le seul message qui passe, n'est-ce pas en sa manière d'être "à genoux devant l'homme".

Poursuivons avec Congar : "Quand on regarde vivre l'Église, (...) ce qu'elle est et porte en elle (...) Il y a là, de sa part, dans les formes mineures au moins de son sacerdoce, de son prophétisme, l'exercice d'une forme de royauté, non d'autorité et de puissance — elle ne l'a pas — mais d'influence et de service, qui répond à sa véritable situation par rapport au monde. Car on peut dire qu'elle en a la responsabilité (...)". Le dominicain cite à ce sujet précise que "l'Eglise a [notamment] dans ce cadre véritablement le nom de semence ou cellule germinale du Royaume qu'aiment à lui donner en particulier les théologiens de langue allemande (Keimzelle)****".

Ce que saint Justin appellait les spermatikos logos ne sont-ils pas ces germes d'amour qui en scintillant de l'amour humain véritable deviennent signes de la philanthropie de Dieu.

* J. Moingt, L'Évangile sauvera l'Église, op. cit p. 121
** Yves Congar, Mon Journal du Concile I, 1960-63, Cerf, Paris, 2002, op. cit. p. 384
*** Yves Congar, Jalons pour une théologie du laïcat, Cerf 1953, p. 133
**** ibid. p. 134 et sa note où il cite le livre de H. André, Die Kirche als Keimzelle der Weltgöttlichung (Leipzig, 1920)