03 juin 2016

L'eau et le sang

Qu'est-ce qui apparaît au terme de notre étude sur la dynamique sacramentelle ? L'analogie sponsale de l'auteur de la lettre aux Éphesiens‎ à elle-même ses limites. Elle s'approche seulement du mystère central du rapport entre le Christ et l'Église qui se nourrit de l'Écriture comme les anciens tableaux du Moyen-âge le représentaient : à genoux devant la Croix, tendant la coupe vers le fleuve irremplaçable du coeur transpercé d'où jaillit le sang et l'eau. Si la tradition y voit, outre le fleuve décrit par Ezechiel le baptême et l'Eucharistie, il serait réducteur de s'arrêter au signe. C'est le Christ qui est sacrement-source et l'imitation prêchée par Paul est la voie vers celui qui est chemin, vérité et vie.

02 juin 2016

Les limites de l'Écriture

Une citation qui rejoint mes réflexions sur la dynamique sacramentelle, dont la deuxième édition vient de paraître : "Ce n'est pas [l'Écriture], c'est le Christ qui est sacrement de Dieu"(1). En cela, tout discours, toute exégèse, toute théologie aura pour limite la réalité insurpassable de la  Croix. Et la lectio comme le rituel reste en deçà de l'exercice de la miséricorde qui est la véritable imitation du Christ, le véritable "canon"(2).

(1) Hans Urs von Balthasar, Gc1 op. Cit. p. 459
(2) 460

01 juin 2016

La stéréoscopie raffinée de l'évangile

 "La stéréophonie raffinée des quatre Evangiles". Cette réflexion de Balthasar (GC1 p. 457) est à elle seule contemplation. On en trouvera une application dans mes "chemins croisés", cet essai de lecture de Matthieu à l'aune des 3 autres évangiles, point final de mes lectures pastorales.

30 mai 2016

Église et Écriture

Il ne faut pas "prendre l'Écriture pour la révélation (...) elle nest pas quelque chose comme une icône magico-sacramentelle dans laquelle la chose, c'est à dire la grâce, serait substantiellement enfermée et cachée (..) le véritable enfantement de l'Église consiste à porter des âmes pour le Christ." (1)

Nous retombons la sur l'interaction constante et nécessaire entre les trois tables déjà évoquées plus haut. La Parole, les sacrements ne sont pas au centre du système, ils s'articulent dans la construction de l'Église, de ces pierres vivantes qui se rassemblent en Christo (456).

(1) Hans Urs von Balthasar Gc1 op Cit p. 458

29 mai 2016

Les trois tables

L'articulation entre les deux tables (écriture et sacrement) est pour Balthasar liée dans la figure de l'Église qui les conjuguent. Cette Église qui devient temple du Christ est pour moi comme une troisième table. 
C'est l'enjeu de cette dynamique sacramentelle que je cherche à articuler.

"L'Eucharistie n'aurait pas de sens, s'il ne se fait des hommes pour la goûter; elle tend donc plus loin qu'elle même, elle est figure médiatrice(2), ajoute Balthasar. 

Et pourtant l'articulation même de ces trois tables est autant nécessaire que fragile. 
L'Écriture elle même est attaquée sous les coups parfois légitimes de l'historico-critique néo-bultmannienne(3), quand les sacrements apparaissent eux-mêmes fragiles dans leur capacités à être signe, donnant à l'Église, réputée pécheresse par la faute des hommes, peu de justification. 
On peut être effrayé par tout cela. 
C'est sans compter sur le travail de l'Esprit et

l'importance de l'humilité et de la faiblesse, chemin trinitaire par excellence. Il y a peut être à comprendre que la fragilité même des trois tables est figure de la triple kénose : une danse fragile et relative qui est chemin de l'image à la ressemblance. 



(1) Hans Urs von Balthasar, GC1 op. Cit p. 447
(2) p. 448
(3) p. 449ss

28 mai 2016

Pierres pécheresses

"Une Église qui ne serait que le corps du Christ  c'est à dire en tout que l'expression de sa force vivifiante et en rien celle de la résistance à cette force (...) serait contradictoire, du fait qu'elle n'aurait plus besoin de" s'amender et d'humilité. L'Église reste  pécheresse. "Elle doit croire à l'image de l'obscurité mais aussi la contempler (...) pour qu'elle puisse être transformée en cette même image (2Co 3, 18) par la force spirituelle qui en émane" (1) 
Je retrouve dans ces pages de Balthasar des éléments développés dans ‎mes deux derniers tomes de Humilité et miséricorde, mais aussi dans "Cette Église que je cherche à aimer" à la suite des travaux de Kung, Moltmann et de Moingt.

(1) Hans Urs von Balthasar,  Gc1, p. 441ss.

27 mai 2016

Rédemption et enfouissement

Aux cris des souffrants comme à ceux des curieux qui voudraient voir la gloire de Dieu manifestée dans sa splendeur, il ne sera donné que le signe de Jonas. Paradoxe de l'humilité de Dieu.  "La rédemption du monde ne peut pas se produire au coeur d'une théophanie spectaculaire qui de son éclat éblouirait la misère, mais seulement dans le mystère d'un amour survivant dans la souffrance à toute la honte dont il est revêtu et au fardeau qui lui est imposé" (1)

Hans Urs von Balthasar, GC1 p. 440

26 mai 2016

Aveugle...

Sommes-nous des Bartimée ? (Cf. Mc 10, 46-52). Souvent nous nous tenons au seuil, parfois même au premier rang de cette route qui monte du monde (Jericho) à Dieu (Jérusalem). Jésus passe et nous le voyons de loin. Il nous attire, mais nous ne le voyons pas de l'intérieur.  Nos soucis nous aveuglent.

Il faut du temps pour percevoir la nuit qui envahit notre coeur.  Et pourtant,  comme le suggère saint Grégoire le grand,  "Celui donc qui reconnaît les ténèbres de son aveuglement et ressent la privation de la lumière éternelle, qu'il crie au fond de son cœur, qu'il crie de toute son âme : « Jésus, Fils de David, aie pitié de moi ! » (1)

(1) Homélies sur les évangiles, n°2 (trad. Tissot, Les Pères nous parlent, 1954, p. 190)

Pierres vivantes

" Vous aussi, comme pierres vivantes, entrez dans la construction de la demeure spirituelle, pour devenir le sacerdoce saint et présenter des sacrifices spirituels, agréables à Dieu, par Jésus Christ." (1 P 2, 5)

Cette phrase de l'épître de Pierre, donnée par la liturgie d'aujourd'hui nous invite à la contemplation et à l'humilité.  Nous ne serons jamais en effet le tout de l'Église, même pas une église locale.  Nous ne sommes qu'une pierre, un caillou sur le chemin.  Seul nous ne servons qu'à faire trébucher le passant.  Et pourtant Dieu se sert de notre pierre pour le grand édifice,  parfois comme signe, souvent comme contre signe. Il nous place au bon endroit, caché dans une fondation obscure ou ciselé sur un chapiteau.  Peu importe,  seuls nous ne sommes rien. Ensemble, nous faisons l'Église.

25 mai 2016

Sacrement et sommet

Le sommet de toute dynamique humaine et sacramentelle est l'unité dans le Corps, une unité ‎qui s'ouvre dans la fraction du pain, signe du don du Corps, jamais purement humain ou purement divin, mais toujours divino-humain, source de notre contemplation/appropriation qui nous conduit à une vie "de plus en plus profonde et de plus en plus riche, venant du Christ et s'introduisant dans le Christ, en intégrant progressivement le Dieu vivant trinitaire et la création totale résumée dans le Christ" (1)

Ces propos pourraient être Teilhardien, Balthasar introduit là ce qu'il développera plus tard dans sa Dramatique Divine, sous le concept de "en Christo"‎.

(1) Hans Urs von Balthasar , GC1 p. 414.

24 mai 2016

Contempler et agir

Il y a équivalence pour Balthasar entre contemplation et appropriation. Pour lui la contemplation n'est pas tant une prise de distance qu'une interaction intérieure entre le regard porté sur le Christ, la mise en vibration de cette révélation lumineuse et son effet sur l'agir. ‎On rejoint pour moi ici les trois stades de la vie spirituelle dont parle Jean-Jacques Olier.
La contemplation de la Croix, gloire tragique de notre Seigneur "nous transforme en cette même image/icône" (2 Co 3, 18). Sa lumière, en pénétrant en nous, nous transperce et nous transforme. "La figure qui s'inscrit [ainsi] dans ma propre vie devient pour moi le salut (...) C'est en elle que j'apprends, que je déchiffre" ce qui est "désordre sans figure".
On se trouve là au coeur de la méditation du chemin de tout homme.

Pour le couple, coeur de notre étude et dont nous ne devons pas abandonner la perspective, comme pour tout homme, dynamique sacramentelle et rejoint le chemin tracé par GS 48, faire de sa vie un sacrement.
tout cela s'inscrit au coeur de sa

(1) Hans Urs von Balthasar, GC1, op. Cit p. 410.


Contemplation trinitaire

Le Christ est un tremblement de terre dans l'histoire de la quête de l'homme vers Dieu. Épicentre de toute révélation, il annule et remplace toutes les quêtes. Les dieux grecs, le Dieu de Moïse comme celui de l'Islam n'atteignent pas la pointe non-violente de l'homme-Dieu crucifié par amour pour l'homme, signe ultime de tout dévoilement et pourtant trace fragile et humble d'un Dieu qui se cache de peur de violer notre liberté de croire.
A ses côtés, tous les essais semblent de bien pales répliques, même si nous devons les respecter et y chercher les semences du Verbe.

23 mai 2016

Ode à l'enfouissement

Les vingt dernières années, certains se sont attachés à déconstruire ‎le chemin de leurs pères dans la foi, les accusant trop facilement de la déchristianisation. La réponse apportée nous a construit un monde docte, de savants, parfois trop sûrs d'eux, qui enseignent avec autorité mais à qui manque parfois une véritable sensibilité pastorale. 
Le chemin idéal est probablement entre les deux, mais l'enfouissement n'est pas la cause principale de nos problèmes. Il fallait peut-être que les graines du moralisme exacerbé meurt pour que l'amour de l'Église rejaillisse du coeur de l'homme.‎ Et l'enfouissement qui est en soi une figure évangélique de l'humilité et de la kénose est probablement une des voies prises par l'Esprit pour préparer les temps nouveaux. Si la formation est devenue nécessité, n'opposons pas trop les deux voies.
Cherchons l'unité dans une véritable démarche pastorale.

22 mai 2016

Figure et enthousiasme

"L'Esprit ‎est à la fois figure et figuration et amour et enthousiasme" (1)
Que veut nous dire Balthasar par cette tension ? J'y vois celle qui existe entre la Croix et la joie, la souffrance et l'amour, la tristesse et l'espérance. Folie aux yeux des hommes, elle n'est pas illusion ou opium mais ce grand écart auquel Dieu nous conduit entre nos désirs d'homme et l'incroyable construction du royaume. Chacun a sa pierre à porter sur ce sentier. Parfois nous ne parvenons qu'a l'un des points cités mais nous savons qu'ensemble nous portons ce projet, poussé par l'Esprit.

(1) Hans Urs von Balthasar, GC1 op Cit p. 417

Envoyé de mon smartphone BlackBerry 10 sur le réseau SFR.

19 mai 2016

Le déploiement de la figure

C'est dans la contemplation de la vie cachée des saints que la dynamique trinitaire s'aperçoit et se cache, se révèle et s'enfouit‎ dans le monde. "Elle ne fait pas violence (...) et nous laisse libres, parce qu'elle nous rend libres, et c'est justement en cela qu'elle doit être l'évidence suprême. L'amour qui lui répond librement, elle ne veut le subjuguer qu'à sa manière, par l'évidence de l'amour" (1) Balthasar nous développe cette thèse en évoquant Pascal et son insistance sur le Dieu caché : "toute religion qui ne dit pas que Dieu est caché n'est pas véritable" (2) Jésus-Christ est demeuré inconnu parmi les hommes (...) ainsi l'Eucharistie parmi le pain commun" (3). Pour Balthasar, Pascal ne veut ni d'une clarté trop manifeste, ni une obscurité destructrice. Il vise la contemplation du "mystère de Jésus" qui rassemble et tient captives toutes les évidences de Dieu et de la création (...) fait éclater les véritables dimensions de l'homme : sa grandeur comme sa misère. (4)

(1) Hans Urs von Balthasar Gc1 p. 407s
(2) Pascal, Pensées 598
(3) ibid 638
(4) Gc1 p. 409