Quelques milliers de notes et réflexions interactives sur la vie et la foi, à partir de lectures souvent théologiques et à la lumière d'un Autre... Petit "blog" catholique d'un apprenti théologien (Bac canonique), perdu dans l'immensité de la toile... (ordonné diacre en septembre 2018)...
17 novembre 2016
De la trace à l'image - Bonaventure
Ce qui me marque en deuxième lecture est le double rapport entre l'image et le beau souligné plus bas par Hans Urs von Balthasar : soit comme "renvoi à l'archétype", soit comme représentation ( donc réceptacle) de l'archétype. (2)
L'enjeu souligne-t-il est de n'être pas seulement un simple renvoi ou rappel de l'existence de Dieu, comme la fleur qui signale la création, mais devenir en soi une représentation. Comment est-ce possible ? Probablement par le travail intérieur de l'humilité et de la miséricorde (3) qui nous rend temple de l'Esprit et signe efficace de sa présence. C'est pour moi l'enjeu décrit dans ma "dynamique sacramentelle".(4)
Cette attitude n'est belle et vraie que dans la mesure où elle reproduit celle du Fils envers son Père(5). Le Fils ne veut être rien d'autre que l'image du Père.
"Contrairement à la trace, l'imago en l'homme est une assimilatio expressa et de proximo à Dieu", probablement en phase avec les propos de Paul en Philippiens 3 (du saisissement à l'imitation).
(1) GC2 p. 271, repris notamment dans "Aimer pour la vie".
(2) Ibid. p. 271.
(3) cf. Ma recherche éponyme.
(4) idem.
(5) De red. art., 8 (V, 322 a), cité par Hans Urs von Balthasar GC2 p. 270
(6) 2 d 16, 1 q.1, ibid. p. 272
16 novembre 2016
Qu'est ce que l'amour?
"Qu'est-ce que l'amour » ? L'amour est ce par quoi nous aimons." (1) il ne vient pas de nous, il nous vient de Dieu. Je suppose que c'est ce que veut dire l'expression vertu thélogale.
A méditer à l'aune de la distinction augustienne entre amare amari, amare amare et amare (aimer être aimé, aimer aimer, et aimer tout court).
(1) Saint Augustin, commentaire du psaume 63, source office des lectures
12 novembre 2016
Une théologie de l'excès - Bonaventure
C'est peut-être là qu'une juste interprétation de ce que nous disions plus haut chez Anselme prend du sens. Devant l'amour infini de Dieu nous sommes comme un homme debout dans le fleuve, une petite amphore à la main, et notre réponse n'est peut-être pas dans le désir de retenir le don mais de se laisser porter par l'amour qui vient.
(1) Hans Urs von Balthasar, GC2 p. 256
11 novembre 2016
Science et sagesse chez Bonaventure
Par cette affirmation Bonaventure prend de la distance avec le thomisme grandissant et renvoie "à l'étude approfondie de l'Écriture (...) mais il ne faut pas verser dans le vin de l'Écriture tant d'eau de philosophie que le vin devienne de l'eau, ce serait un bien triste miracle"(2)...
Ce qui compte chez l'homme c'est l'événement intérieur, la venue du Christ dans l'esprit, "se laisser porter par la lumière surnaturelle de la foi, autrement dit par l'inspiration divine qui ne peut se tromper"(3)
(1) Hex. 2, 3, cité par Hans Urs von Balthasar, in GC2 p. 251.
(2) ibid. p. 252.
(3) p. 254
10 novembre 2016
Union spirituelle avec le Syrien de Mossoul
À la suite de mes propos sur François d'Assise et en union de prière avec les chrétiens de Mossoul, contemplons la méditation du jour donnée par Isaac le Syrien :
" Dieu et ses anges désirent l'homme qui cherche Dieu dans son cœur jour et nuit avec ferveur, et qui repousse loin de lui les agressions de l'ennemi. Le pays spirituel de cet homme pur en son âme est au-dedans de lui : le soleil qui brille en lui est la lumière de la Sainte Trinité ; l'air que respirent les pensées qui l'habitent est le Saint Esprit consolateur. Et les saints anges demeurent avec lui. Leur vie, leur joie, leur réjouissance sont le Christ, lumière de la lumière du Père. Un tel homme se réjouit à toute heure de la contemplation de son âme, et il s'émerveille de la beauté qu'il y voit, cent fois plus lumineuse que la splendeur du soleil.
C'est Jérusalem. Et c'est « le Royaume de Dieu caché au-dedans de nous », selon la parole du Seigneur. Ce pays est la nuée de la gloire de Dieu, où seuls entrerons les cœurs purs pour contempler la face de leur Maître (Mt 5,8), et leur entendement sera illuminé par les rayons de sa lumière." (1)
(1) Isaac le Syrien (7e siècle), moine près de Mossoul
Discours ascétiques, 1ère série (trad. DDB 1981 rev.)
09 novembre 2016
Les 4 fleuves du Paradis - saint Bonaventure
Ils résonnent aussi pour Bonaventure avec les 4 mystères cachés : l'essence divine, la sagesse, la puissance et la miséricorde(3).
(1) cf. le livre éponyme dont le titre est une libre adaptation d'un texte parlant de la Seine et d'une cruche, cité par Hans Urs von Balthasar in GC2 p. 244
(2) ibid. p. 241
(3) p. 244
Une expression de l'amour du crucifié - stigmates de saint François
08 novembre 2016
Anselme et Bonaventure - Convergences
Le verbe saisir renvoie à Philippiens 3, mais nous retrouvons aussi cette distinction déjà notée chez Anselme entre un Dieu qui ne fait pas que venir en nous, mais nous tire toujours plus loin. Le bonheur ne peut être intérieur longtemps. S'il n'est pas communion sponsale ou surtout ecclésiale il est une cymbale qui résonne dans le vide (1 Cor 13). Le bonheur se conjugue avec le sens symphonique du "une seule chair" de Gn 2, 24 (2)
(1) Bonaventure citant Anselme in Hans Urs von Balthasar, GC2, p. 239
(2) cf. Lire l'Ancien Testament, tome 1, Genèse et Exode.
04 novembre 2016
Le gérant malhonnête - Luc 16
Paul nous le souligne dans la première lecture : "Ils ne pensent qu’aux choses de la terre. Mais nous, nous avons notre citoyenneté dans les cieux, d’où nous attendons comme sauveur le Seigneur Jésus Christ". ( Ph. 3). On pourrait y voir un élitisme. Ne s'agit il pas plutôt d'une exhortation, car en nous réside bien les deux extrêmes, cette adhérence au monde et l'appel divin ?
Cette interprétation prépare une clé de lecture de ce texte difficile du gérant malhonnête (Luc 16, 1-10). Elle est donné par la petite Thérèse (1) : si les gens de ce monde sont habiles en générosité, combien plus devrions nous faire oeuvre de charité, nous qui avons reçu de Dieu des biens en abondance. "Donne nous un double Amour", demande-telle, soulignant qu'il nous viendra de Dieu. Reste ensuite à agir.
(1) Thérèse de Lisieux, Manuscrit autobiographique B, 4r°
03 novembre 2016
Trois lectures de l'Écriture - Saint Jérôme
"La science de la loi de Dieu, nul ne peut la recevoir si elle ne lui a été donnée par le Père des lumières qui illumine tout homme venant en ce monde". Jérôme continue plus loin en précisant : "Une triple manière nous est chère pour exposer les Écritures. La première est de les comprendre selon le sens historique, la seconde selon la tropologie [sens éthique], la troisième selon l'intelligence spirituelle". (1) Dans le dernier niveau, il ajoute que "la méditation de la vie courante devient ainsi la figure du bonheur futur". Henri de Lubac, dans ses exégèses médiévales parlera, sur la base d'autres Pères de l'Église de quatre sens. Il distingue la lecture spirituelle de la téléologique qui sont contenues, de fait, dans ce troisième point. Personnellement je travaille notamment à la croisée de ces deux points. Mes 8 tomes de lectures pastorales cherchent pour l'instant à réveiller dans l'aujourd'hui de nos vies, les pas de Dieu vers nous. Les 4 sens sont présents mais ce qui prime, c'est le chemin du Verbe jusqu'au coeur.
(1) Saint Jérôme, Lettre 120 à la veuve Hédypia, cité in Claude Ollivier, Jérôme, Paris, Éditions Ouvrières, 1993, p. 101.
31 octobre 2016
Miséricorde - suite
parce que tu peux tout.
Tu fermes les yeux sur leurs péchés,
pour qu'ils se convertissent. (...)
Ceux qui tombent, tu les reprends
peu à peu,
tu les avertis, tu leur rappelles en quoi
ils pèchent,
pour qu'ils se détournent du mal
et croient en toi, Seigneur." (Sg 11, 22 – 12)
Le psaume 144 souligne cela avec tendresse,
reprenant l'affirmation d'Exode 34 :
"Le Seigneur est tendresse et pitié,
lent à la colère et plein d'amour ;
la bonté du Seigneur est pour tous,
sa tendresse, pour toutes ses œuvres."
La tendresse du Christ
pour Zachée (Lc 19, 1-12),
se révèle quant à elle quand il
qui veut habiter chez le publicain.
Que nous dit tout cela ?
La faute de l'homme ne demande
pas une "expiation infinie" mais
"qu'il se redresse et se relève
par lui-même" nous dit saint Anselme (1).
Et pour offrir ce choix, le seul chemin
tracé par Dieu est la voie
prise librement par l'homme-Dieu
et qui interpelle notre liberté
tout en criant cet "où es-tu ?" (Gn 3)
qui nous réveille et nous invite
à la danse. Cette voie n'est pas de l'ordre
de la réparation, mais de la justification
au sens paulinien et non français :
Dieu n'exige rien, il pleure et il souffre
de nos erreurs, il meurt de nos violences,
Il est partout où l'homme souffre et meurt,
Il est crucifié de nos collusions au mal,
Et son cri n'a qu'un but : nous aider à prendre
le chemin de la justice, à suivre le fils
aimant et en cela à nous "justifier", à devenir juste
c'est-à-dire à choisir le destin auquel ils nous appellent.
Cf. Rom 8, 30.
(1) Anselme, CDH 2, 8 cité par Hans Urs von Balthasar in GC2 p. 226
30 octobre 2016
Suivre nu, le Christ nu...
Saint Jérôme, lui, n'hésite pas : "Si l'Évangile ordonne à ceux qui ont des terres et des richesses de tout vendre, de tout donner aux pauvres, et de suivre, nus, le Christ nu, tu dois, mon respectable ami, dans le cas où tu serais riche, faire ce qui t'est commandé. (...) cette humble veuve de l'Évangile qui mit dans le tronc deux petites pièces de monnaie est au dessus de tous les riches. Toi donc, ne cherche pas ce que tu dois donner, mais donne ce que tu as acquis afin que le Christ reconnaisse le courage (...) et que le Père aille joyeux à ta rencontre (...) et te donnes l'anneau (Lc 15) (1)".
(1) Saint Jérome, Lettre 146 au prêtre Evangelius, cité par Claude Ollivier, op. Cit p. 62
29 octobre 2016
Portrait d'un prêtre
À contempler
(1) Saint Jérôme, lettre n°60 à Héliodore, éloge du prêtre Népotien, cité in Claude Ollivier, Jérôme, Paris, Les Éditions ouvrières, 1993, p. 56
28 octobre 2016
De la théorie du rachat au tout amour de Dieu
Qu'est-ce à dire pour nous ? La liberté du Christ, son adhésion au projet du Père n'est pas sacrifice inutile, il s'inscrit pleinement dans cette pédagogie de Dieu qui met l'amour au centre, couronnement d'un refus de la violence. La mort du Fils est le jusqu'au bout de la non-violence de Dieu (2).
(1) Hans Urs von Balthasar, GC2 p. 223.
(2) je rejoins là mon dernier travail : "Dieu n'est pas violent".
La liberté comme victoire - Anselme de Cantorbéry
Un deuxième apport d'Anselme peut être de concevoir la liberté non comme un droit mais comme une victoire(1), celle d'accéder à la veritable liberté sur toutes les "adhérences humaines", addictions, tentations, péchés qui nous éloignent de ce à quoi nous sommes destinés (la joie en Dieu) et nous éloignent de Dieu.
Cette distinction conceptuelle est pleine d'intérêt car elle ne voit plus le pêché originel comme un boulet incontournable, mais comme une vision temporaire, anti-pélagienne et incomplète de notre réalité humaine. Nous sommes créés en vue de cette joie à venir... Et tout ce qui nous retient de marcher vers Dieu est chemin, lieu d'effort, de conversion, d'écoute, de décentrement en direction du seul but à atteindre, considérer :
- le passé comme balayure (cf. Ph. 3) et en même temps chemin de conversion et d'apprentissage
- et l'avenir comme appel et joie à venir, celle d'être porté par la grâce et d'être saisi en Christ (Ph 3) pour participer librement au Royaume.
Il reste un point à ajouter. C'est l'insistance sur la grâce, car nos adhérences au mal nous retiennent souvent d'accéder à cette victoire et nos addictions nous empêchent d'avancer. Là plus qu'ailleurs la prière prend du sens car Dieu seul peut nous aider à surmonter cet obstacle qui est de fait de l'ordre de l'originel. Si nous ne pouvons aller seul plus loin, c'est parce que la médiation du Christ est essentielle, point de basculement qui fait de nous des êtres assoiffés de cette grâce qui nous conduira à la victoire finale.
(1) cf. Hans Urs von Balthasar, GC2 p. 217