09 octobre 2018

Diaconat 3 - Imitateur de Dieu - Saint Ignace d’Antioche

« J'ai glorifié Dieu puisque j'avais trouvé en vous, je le savais, des imitateurs de Dieu.
Car, lorsque vous êtes soumis à l'évêque comme à Jésus Christ, je vois que vous ne vivez pas selon les hommes, mais selon Jésus Christ qui est mort pour vous afin que, croyant en sa mort, vous échappiez à la mort. Il est donc nécessaire, comme vous le faites, de ne jamais agir sans l'évêque mais d'être soumis aussi au presbyterium comme aux Apôtres de Jésus Christ, notre espérance. C'est en lui que nous serons, si nous vivons ainsi.
Il faut aussi que les diacres, qui sont les serviteurs des mystères de Jésus Christ, soient agréés de tous en toute chose. Car ce n'est pas de nourriture et de boisson qu'ils sont les diacres : ils sont les serviteurs de l'Église de Dieu. Il faut donc qu'ils évitent comme le feu tout motif de reproche.(1). »
(1) Saint Ignace d'Antioche, Lettre aux Tralliens, source AELF




L’amour est en toi - 18 - Sainte Élisabeth de la Trinité


« Pour que rien ne me sorte du beau silence du dedans, [je garderai] toujours la même condition, le même isolement, la même séparation, le même dépouillement. Si mes désirs, mes craintes, mes joies ou mes douleurs... ne sont pas parfaitement ordonnés à Dieu, je ne serai pas solitaire, il y aura du bruit en moi ; il faut donc l'apaisement, le « sommeil des puissances », l'unité de l'être. « Écoute, ma fille, prête l'oreille, oublie ton peuple et la maison de ton père, et le Roi sera épris de ta beauté » (Ps 44,11-12)... « Oublier son peuple » c'est difficile, il me semble ; car ce peuple c'est tout ce monde qui fait pour ainsi dire partie de nous-mêmes : c'est la sensibilité, les souvenirs, les impressions, etc. ... Quand l'âme a fait cette rupture, quand elle est libre de tout cela, le Roi est épris de sa beauté...
Le Créateur, en voyant le beau silence qui règne en sa créature, en la considérant toute recueillie..., la fait passer en cette solitude immense, infinie, en ce « lieu spacieux » chanté par le prophète (Ps 17,20) et qui n'est autre que lui-même... « Je la conduirai dans la solitude et je lui parlerai au cœur. » (Os 2,16) La voici, cette âme entrée en cette vaste solitude où Dieu va se faire entendre ! « Sa parole, dit saint Paul, est vivante et efficace, et plus pénétrante qu'aucun glaive à deux tranchants : elle atteint jusqu'à la division de l'âme et de l'esprit, jusque dans les jointures et dans les mœlles. » (He 4,12) C'est donc elle directement qui achèvera le travail du dépouillement dans l'âme...
Mais ce n'est pas tout de l'entendre, cette parole, il faut la garder ! (Jn 14,23) Et c'est en la gardant que l'âme sera « sanctifiée dans la vérité » (Jn 17,17) ; c'est là le désir du Maître... À celui qui garde sa parole, n'a-t-il pas fait cette promesse : « Mon Père l'aimera, et nous viendrons à lui et nous ferons en lui notre demeure » ? (Jn 14,23) C'est toute la Trinité qui habite dans l'âme qui l'aime en vérité, c'est-à-dire en gardant sa parole.(1) »

(1) Sainte Élisabeth de la Trinité, Dernière Retraite, 10e – 11e  jours (in OC, Cerf 1991, p.173s, source Evangelizo 

03 octobre 2018

Théologie du corps - L’amour est en toi 17

C’est peut-être dans la première lettre aux Corinthiens que se dévoile le mieux la théologie chrétienne du corps. D’abord dans les premiers chapitres où Paul parle de notre corps comme temple de l’Esprit et met de fait tout notre rapport au monde en tension avec notre ouverture au divin.
«Ne le savez-vous pas? Votre corps est le sanctuaire de l’Esprit saint qui est en vous et que vous tenez de Dieu; vous ne vous appartenez pas à vous-mêmes, car vous avez été achetés à un prix. Glorifiez donc Dieu dans votre corps.»
‭ (1 Co ‭6:19-20‬)
Cette théologie est héritage du premier Testament. L’hébreu est lui-même objet d’interprétation puisque le mot « basar » est en grec traduit soit par sarx (chair) ou soma (corps) alors que cette chair est habitée par nephesh (le souffle de vie) et ruah (relation disposée vers Dieu)
Bien sûr, on peut passer aux côtés de cette théologie, mais c’est faire impasse sur Gn 2, don du souffle et appel à faire une seule chair.
Il y a dans le don du corps à l’homme à la fois une infinie liberté et une invitation : être signe d’une danse symphonique entre l’homme et Dieu dans la « chair même » d’une danse des corps.
Saint Jean Paul Il l’a bien compris dans ses catéchèses, « l’union conjugale peut être liturgie » dit-il.
Si nos corps à corps deviennent symphonie, c’est qu’en portant du fruit, ils participent à la création du monde. J’entends cela au sens le plus large du mot fécondité.
Et c’est là où les chapitres 12 et 13 de Corinthiens entrent en compte. Si je n’ai pas l’amour je ne suis rien. « L’amour prend patience, ne cherche pas son intérêt », est don total (agape) qui s’oublie dans une fécondité sans retour, qu’elle soit dans une autre chair ou d’un autre ordre.
Alors pouvons-nous comprendre Ephesiens 5 : «Maris, aimez votre femme comme le Christ a aimé l’Eglise: il s’est livré lui-même pour elle,»
‭‭(Eph. 5:25‬),
L’amour humain est tremplin vers l’agape. S’en priver n’a de sens que s’il est don renouvelé de soi. S’y consacrer à l’inverse n’est pas chemin de perdition. Il est don pour une même diaconie : l’amour conjugal devient sacrement dans l’effacement de la chair qui devient temple de la vie reçue et donnée (1)

  1. en résonance avec un cours d’Eric Morin aux Bernardins sur 1 Co 7 (https://www.collegedesbernardins.fr/content/saint-paul-la-premiere-lettre-aux-corinthiens-2017) et mes travaux publiés sous le titre de Aimer pour la vie, essai de spiritualité conjugale



01 octobre 2018

Ma vocation c’est l’amour - sainte Thérèse de Lisieux

« Considérant le corps mystique de l'Église, je ne m'étais reconnue dans aucun des membres décrits par S. Paul, ou plutôt je voulais me reconnaître en tous... La charité me donna la clé de ma vocation. Je compris que si l'Église avait un corps, composé de différents membres, le plus nécessaire, le plus noble de tous ne lui manquait pas ; je compris que l'Église avait un Cœur, et que ce Cœur était brûlant d'amour. Je compris que l'Amour seul faisait agir les membres de l'Église, que si l'Amour venait à s'éteindre, les Apôtres n'annonceraient plus l'Évangile, les Martyrs refuseraient de verser leur sang... Je compris que l'amour renfermait toutes les vocations, que l'amour était tout, qu'il embrassait tous les temps et tous les lieux... ; en un mot, qu'il est éternel !...
Alors, dans l'excès de ma joie délirante, je me suis écriée : Ô Jésus, mon Amour... ma vocation, enfin je l'ai trouvée, ma vocation, c'est l'amour !...
Oui, j'ai trouvé ma place dans l'Église et cette place, ô mon Dieu, c'est vous qui me l'avez donnée... dans le Cœur de l'Église, ma Mère, je serai l'Amour... ainsi, je serai tout... ainsi mon rêve sera réalisé !!!... » (1)
(1) Sainte Thérèse de l'enfant Jésus et de la Sainte Face, lettre à sœur Marie du Sacré Cœur, 22/9/1896

28 septembre 2018

L’abandon - Sainte Thérèse de Lisieux

Il est sur cette terre
Un Arbre merveilleux
Sa racine, ô mystère ! 
Se trouve dans les cieux.

Jamais sous son ombrage
Rien ne saurait blesser ;
Là, sans craindre l'orage
On peut se reposer.

De cet Arbre ineffable 
L'Amour voilà le nom, 
Et son fruit délectable
S'appelle l'abandon.

Ce fruit dès cette vie
Me donne le bonheur ;
Mon âme est réjouie
Par sa divine odeur.

Ce fruit, quand je le touche,
Me paraît un trésor ;
Le portant à ma bouche,
Il m'est plus doux encor.

Il me donne en ce monde 
Un océan de paix ;
En cette paix profonde 
Je repose à jamais.

Seul l'abandon me livre 
En tes bras, ô Jésus.
C'est lui qui me fait vivre 

De la vie des élus.(1)

(1) Sainte Thérèse de l’enfant Jésus et de la Sainte Face, Poésie 52  L.abandon est le fruit délicieux de l’amour

Source : Évangile au quotidien

11 septembre 2018

Les fruits de l'Esprit

Quel est notre chemin si ce n'est de suivre le Christ en se laissant dépouiller en tout.
"Si nous mourons avec lui, nous vivrons aussi avec lui;" (1)

Ceux qui se laissent porter par l'Esprit ont des fruits multiples :"Parfois ils sont comme plongés dans le deuil et l'affliction pour le genre humain, ils répandent des prières pour toute l'humanité, ils se livrent à la tristesse et aux larmes, parce que l'Esprit les embrase d'amour pour tous les hommes.


D'autres fois, l'Esprit fait brûler en eux tant d'exaltation et d'amour que, si c'était possible, ils enfermeraient dans leur coeur tous les hommes, sans distinction de bien ou de mal.

D'autres fois, ils s'abaissent plus bas que tous les autres dans l'humilité de l'Esprit, au point de s'estimer les derniers et les moindres de tous.

D'autres fois, ils demeurent dans une joie inexprimable sous l'action de l'Esprit." (2)

(1) 2 Timothée 2:11 BCC1923
(2) Homélie du IVeme siècle,  source Bréviaire, AELF

08 septembre 2018

Penser / Agir

"Je ne méprise pas les pensées profondes mais (...) les plus belles pensées ne sont rien sans les oeuvres" (1)

(1) ibid 19v p. 260

Kénose chez Thérèse de Lisieux- 2

"Abandonner son manteau (Mt 5, 40-42) c'est, il me semble, renoncer à ses derniers droits, c'est se considérer comme la servante, l'esclave des autres. Lorsqu'on a quitté son manteau (1), c'est plus facile de marcher, de courir, aussi Jésus ajoute-t-il : Et qui que ce soit qui vous force de faire mille pas, faites-en deux mille de plus avec lui. (Mt 5, 41) (2)

(1) cf. aussi mon commentaire de Exode 33 in la voix d'un fin sile
(2) Sainte Thérèse de Lisieux, Manuscrit C, 16v, ibid p. 256

Béatitudes - Saint Léon le grand

"Heureux, dit-il, les pauvres de coeur, car le Royaume des cieux est à eux. On aurait pu se demander de quels pauvres parlait la Vérité si, en disant : Heureux les pauvres, elle n'avait pas précisé de quel genre de pauvres il fallait l'entendre ; et il aurait paru suffire, pour mériter le Royaume des cieux, de connaître le dénuement que beaucoup subissent par le poids et la rigueur de la nécessité. Mais en disant: Heureux les pauvres de coeur, le Seigneur montre que le Royaume des cieux doit être accordé à ceux que recommande l'humilité de l'âme plutôt que le manque de ressources." (1)

Est-ce à dire que les nécessiteux manqueront le Royaume.  La réponse est dans les mystères de l'âme humaine et la miséricorde divine.  Tablons surtout sur cette dernière

(1) Saint Saint Léon le grand,  Sermon sur les béatitudes,  source AELF

Nativité de la Vierge - Saint André de Crête - l’amour vient en toi - 17

"la naissance de la Mère de Dieu inaugure le mystère qui a pour conclusion et pour terme l'union du Verbe avec la chair. (...) C'est maintenant que la Vierge vient de naître, qu'elle est allaitée, qu'elle se forme, qu'elle se prépare à être la mère du Roi universel de tous les siècles."(1)

Ce que nous contemplons est à la fois le sommet du plan de Dieu sur l'homme que les premiers chrétiens ont trouvé décrit en Isaïe 7, 14, la venue à venir du Sauveur au cœur d'une vierge, mais plus originellement le travail intérieur, qui le précède et prend chair dans l'humanité comme en nous, la venue de Dieu au fond de nos pâtes humaines. Dieu s'est penché sur notre chair, a soufflé en nous un désir. Elle est la "première en chemin" sur cette route qui conduit à recevoir le Christ.

(1) Saint André de Crête, Homélie sur la nativité de la Vierge, source AELF, bréviaire du 8/9.

01 septembre 2018

La juste place - St Jean Chrysostome

"Tu veux honorer le Corps du Christ ? Ne le méprise pas lorsqu'il est nu. Ne l'honore pas ici dans l'église, par des tissus de soie tandis que tu le laisses dehors souffrir du froid et du manque de vêtements. (...)   Commence par rassasier l'affamé et, avec ce qui te restera, tu orneras son autel. Tu fais une coupe en or, et tu donnes pas un verre d'eau fraîche ? Et à quoi bon revêtir la table du Christ de voiles d'or, si tu ne lui donnes pas la couverture qui lui est nécessaire ? Qu'y gagnes-tu ? Dis-moi donc : Si tu vois le Christ manquer de la nourriture indispensable, et que tu l'abandonnes pour recouvrir l'autel d'un revêtement précieux, est-ce qu'il va t'en savoir gré ? Est-ce qu'il ne va pas plutôt s'en indigner ? Ou encore, tu vois le Christ couvert de haillons, gelant de froid, tu négliges de lui donner un manteau, mais tu lui élèves des colonnes d'or dans l'église en disant que tu fais cela pour l'honorer. (...) lorsque tu ornes l'église, n'oublie pas ton frère en détresse, car ce temple-là a plus de valeur que l'autre." (1)

Un texte qui a longtemps été oublié ?

(1) St Jean Chrysostome, Sermon sur l'évangile de Matthieu, source AELF

31 août 2018

Les mains vides - Sainte Thérèse de Lisieux

« Depuis longtemps elle a compris que Dieu n'a besoin de personne pour faire du bien sur la terre »(1)
Comme l'indique la note de l'édition des œuvres complètes c'est à lire en négatif chez Thérèse de son désir de faire du bien au ciel.
Cette position est confirmée plus loin (cf. 9r : « si Jésus ne l’emportait bien vite au Ciel, le sort de la petit colombe de Noë serait le mien ; qu’un jour le Seigneur ouvrirait la fenêtre de l’arche et me dirait de voler bien loin, bien loin vers des rivages infidèles portant avec moi la petite branche d’oliver (Gn 8,11-12) ».
Pour autant ce sentiment d’inutilité reste une approche intéressante  des « Mains vides (2) » (sic, note 25). Elle entre aussi dans la dynamique kénotique de la jeune fille et interpelle notre propre illusion d'utilité sans Dieu. La charité n'est pas notre fait. Elle est théologale...

On peut entendre en tension néanmoins l'affirmation d'Etty Hillesum : « Dieu a besoin de nos mains ».

Il nous faut tricoter entre les deux.

(1) Thérèse de Lisieux, Manuscrit C, 3 verso, ibid p. 238
(2) cf. aussi mon livre éponyme

28 août 2018

La lumière de Dieu - Augustin d’Hippone- Dieu est en toi 16

« Averti de revenir à moi-même, je suis entré au fond de mon cœur, sous ta conduite, Seigneur, et j'ai pu le faire, parce que tu es venu à mon secours. Je suis entré, et avec le regard de mon âme, quel que fût son état, au-dessus de ce même regard, au-dessus de mon intelligence, j'ai vu la lumière immuable. Ce n'était pas cette lumière ordinaire que tout le monde peut voir ; ce n'était pas non plus une lumière de même nature, mais plus puissante, qui aurait brillé de plus en plus et aurait tout rempli par son éclat. Non, cette lumière n'était pas cela, elle était autre chose, tout autre chose. Elle n'était pas au-dessus de mon esprit comme l'huile flotte à la surface de l'eau, ni comme le ciel s'étend au-dessus de la terre. Elle était au-dessus de moi parce qu'elle m'a créé ; j'étais au-dessous d'elle parce que créé par elle. Celui qui connaît la vérité la connaît, et celui qui la connaît, connaît l'éternité. C'est l'amour qui la connaît !
O éternelle vérité, ô véritable charité, ô chère éternité ! Tu es mon Dieu, je soupire après toi jour et nuit. Quand je t'ai connu pour la première fois, tu m'as soulevé vers toi pour me faire voir l'existence de quelque chose que je devrais voir, mais que je ne pourrais pas encore voir moi-même. Tu as ébloui la faiblesse de mon regard par la puissance de ton rayonnement, et je frissonnais d'amour et d'effroi. J'ai découvert que j'étais loin de toi, dans le pays de l'exil et de la dissemblance, et il me semblait que j'entendais ta voix, venant du haut du ciel : « Je suis la nourriture des forts : grandis et tu me mangeras. Tu ne me changeras pas en toi, comme la nourriture de ton corps, c'est toi qui seras changé en moi. » (...)
Je cherchais le moyen d'acquérir la force qui me rendrait capable de vivre uni à toi, et je ne la trouvais pas. Enfin, j'ai embrassé le Médiateur entre Dieu et les hommes, l'homme Jésus Christ, lui qui est au-dessus de tout, Dieu béni éternellement. C'est lui qui nous appelle et nous dit : Moi, je suis le chemin, la vérité et la vie
. Il unit à la chair — puisque le Verbe s'est fait chair ; la nourriture que j'étais incapable de prendre, afin que ta sagesse, par laquelle tu as tout créé, se transforme en lait pour s'adapter à notre condition d'enfants. (...)
Je t'ai aimée bien tard, Beauté si ancienne et si nouvelle, t'ai aimée bien tard ! Mais voilà : tu étais au-dedans de moi quand j'étais au-dehors, et c'est dehors que je te cherchais ; dans ma laideur, je me précipitais sur la grâce de tes créatures. Tu étais avec moi, et je n'étais pas avec toi. Elles me retenaient loin de toi, ces choses qui n'existeraient pas si elles n'existaient en toi. Tu m'as appelé, tu as crié, tu as vaincu ma surdité ; tu as brillé, tu as resplendi, et tu as dissipé mon aveuglement ; tu as répandu ton parfum, je l'ai respiré et je soupire maintenant pour toi ; je t'ai goûtée, et j'ai faim et soif de toi ; tu m'as touché et je me suis enflammé pour obtenir la paix qui est en toi. »

Saint Augustin d'Hippone, Confessions, Source : Bréviaire, AELF, 28/8.

25 août 2018

Agir et Diaconie - Saint Antoine de Padoue

"Celui qui est rempli du Saint-Esprit parle diverses langues (Ac 2,4). Ces diverses langues sont les divers témoignages rendus au Christ, comme l'humilité, la pauvreté, la patience et l'obéissance. Nous les parlons quand, en les pratiquant nous-mêmes, nous les montrons aux autres. La parole est vivante lorsque ce sont les actions qui parlent.
Je vous en prie, que les paroles se taisent et que les actions parlent. Nous sommes pleins de paroles mais vides d'actions ; à cause de cela le Seigneur nous maudit, lui qui a maudit le figuier où il n'a pas trouvé de fruits mais seulement des feuilles (Mc 11,13s). « La loi, dit saint Grégoire, a été présentée au prédicateur pour qu'il pratique ce qu'il prêche. » Il perd son temps à répandre la connaissance de la loi, celui qui détruit son enseignement par ses actions.Mais les apôtres parlaient selon le don de l'Esprit. Heureux celui qui parle selon le don de l'Esprit, et non selon son propre sentiment... Parlons donc selon ce que l'Esprit Saint nous donnera de dire. Demandons-lui humblement et pieusement de répandre en nous sa grâce." (1)

On rejoint la ce que notait Hamman en 1968 :  « dans sa signification primitive, le diaconat met en garde l'Église contre un double danger qui la menace toujours : la liturgie qui ne s'achève pas en charité trahit le mystère qu'elle proclame, l'action qui ne s'alimente pas dans l'Eucharistie se dégrade en politique.  Au moment où l'Église réfléchit sur la restauration du diaconat et sur l'orientation de sa fonction, une question se pose : le diacre ne pourrait-il pas redevenir ce qu'il a été aux origines, le prophète et l'homme de la charité, en découvrant à la liturgie et à l'action sociale leur nécessaire fonction et leur unité d'inspiration ? Ne sont-elles pas l'une et l'autre services de la même agapé ? Le diaconat ferait comprendre que toute célébration liturgique est une provocation à une charité vécue, et aussi que toute action sociale ou politique se protège contre toute dégradation dans la mesure où elle communie à la tendresse de Dieu ».

À méditer à l'aune de nos actes.

(1) Saint Antoine de Padoue, Sermons, Source  : Évangile au quotidien
(2) A. Hamman, Vie liturgique et vie sociale, Desclée, 1968, p. 150.

24 août 2018

Au fil de Luc - 7, 37 - Lavement des pieds 1

"Et voici qu'une femme qui menait dans la ville une vie déréglée, ayant su qu'il était à table dans la maison du Pharisien, apporta un vase d'albâtre plein de parfum; et se tenant derrière lui, à ses pieds, tout en pleurs, elle se mit à les arroser de ses larmes et à les essuyer avec les cheveux de sa tête, et elle les baisait et les oignait de parfum." (Luc 7:37‭-‬38 BCC1923)

Commentaire :
Il nous faut prendre le temps de contempler ce qui chez nous reste déréglé pour apprécier la scène dans toute la profondeur du mystère qui nous fait passer de la mort à la vie en Dieu 

Ne sommes nous pas englués dans nos enfermements, nos échecs,  nos adhérences à la violence.  Chaos originel pourrait-on dire pour ne pas employer les mots trop historiquement marqués de péché originel.

Ce monde qui nous caractérise si bien, ces addictions diverses sont ce que le P. Moingt appelle le temps du tombeau vide. Pourquoi ?

Parce qu'il nous rapproche de l'homme sans dieu. Le marécage où nous restons sans cesse embourbé est celui de nos vies sans espérance.

Bienheureux celui qui ne chute pas à la première pierre. Il doit être protégé par le Seigneur,  parce que trop faible et fragile (1)?

 

Notre réalité est moins idéale et il nous faut souvent,  à la suite du pape lui - même affirmer que nous sommes des pécheurs pardonnés.

Pardonnés ? Pourquoi ?

Parce que, dès l'origine,  l'esprit plane sur les eaux (Gn 1, 1).

Autant nous sommes incapables du bien,  autant Dieu nous rends bon par sa grâce. Ce qui est bon en nous vient de Dieu. L'amour n'est pas notre nature,  il est insufflé en nous (Gn 2, 7) pour animer la glaise qui nous caractèrise. C'est le don de Dieu à tout homme.


En confessant notre incapacité et notre faiblesse , comme le fait cette femme aux pieds de Jesus, les arrosant de ses larmes, nous témoignons de la foi en Dieu qui sauve de la mort.
En lavant ces pieds qui vont être transpercé par nos aveuglements nous decouvrons l'essentiel,  le chemin de l'humilité et du pardon. 

Ce temps de la prise de conscience est essentiel. Dans une lettre à ses frères,  François Xavier les exhortait à ne pas donner l'absolution trop vite aux pénitents. Il faut leur laisser ruminer deux ou trois jours leurs fautes, pour qu'un véritable chemin de conversion s' enclanche. Dans sa miséricorde,  le Seigneur m'a laissé personnellement près de 40 ans, comme son peuple au désert,  avant de m'appeler à passer sur l'autre rive. En suis-je digne ? Moïse n'a pas eu ce privilège.  Il a contemplé la terre promise depuis le mont Nebo. 

 (1) Thérèse de Lisieux,  Manuscrit A, 38 vers, oeuvres complètes p. 131



Au fil de Luc - 6, 13 - faiblesse de l'Église

"Quand il fut jour, il appela ses disciples, et choisit douze d'entre eux, qu'il nomma apôtres: Simon, auquel il donna le nom de Pierre, et André son frère, Jacques et Jean, Philippe et Barthélemy" (Luc 6:13‭-‬14 BCC1923)

Commentaire de St Jean Chrysostome :

Comment douze hommes, des ignorants, ont-ils pu avoir l'idée d'une pareille entreprise, eux qui vivaient auprès des lacs et des fleuves, et dans le désert ? Eux qui n'avaient jamais fréquenté les villes et leurs assemblées, comment ont-ils pu songer à se mobiliser contre la terre entière ? Ils étaient craintifs et sans courage : celui qui a écrit sur eux le montre bien, lui qui n'a voulu ni excuser ni cacher leurs défauts. C'est là une preuve très forte de vérité. Que dit-il donc à leur sujet ? Quand le Christ fut arrêté, après avoir fait d'innombrables miracles, la plupart s'enfuirent, et celui qui était leur chef de file ne resta que pour le renier.

Ces hommes étaient incapables de soutenir l'assaut des Juifs quand le Christ était vivant. Et lorsqu'il fut mort et enseveli, alors qu'il n'était pas ressuscité, qu'il ne leur avait donc pas adressé la parole pour leur rendre courage, d'où croyez-vous qu'ils se seraient mobilisés contre la terre entière ? Est-ce qu'ils n'auraient pas dû se dire : « Qu'est-ce que cela ? Il n'a pas été capable de se sauver lui-même, et il nous protégerait ? Quand il était vivant, il n'a pas pu se défendre, et maintenant qu'il est mort il nous tendrait la main ? Quand il était vivant, il n'a pu se soumettre aucune nation, et nous allons convaincre la terre entière en proclamant son nom ? Comment ne serait-il pas déraisonnable, non pas même de le faire, mais seulement d'y penser ? »

La chose est donc évidente : s'ils ne l'avaient pas vu ressuscité et s'ils n'avaient pas eu la preuve de sa toute-puissance, ils n'auraient pas pris un risque pareil.(1)

Commentaire 2 : 

Cette faiblesse originelle est à contempler dans l'espérance,  alors que notre Église est plus que jamais decriée par certains scandales. À la lumière de ce que nous avons vu chez Michée 4 et 1 Rois 19, il faut croire en toute humilité qu'un petit reste peut sauver le monde.

Dans sa visite à Rome sainte Thérèse de Lisieux découvre que les prêtres restent des hommes(2).  C'est dans sa faiblesse que l'Esprit agi.

(1) St Jean Chrysostome, Homélie sur la première lettre aux Corinthiens, source Bréviaire,  AELF,  vendredi 17eme semaine

(2) Ms A, ibid.






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23 août 2018

Abandon - Thérèse de Lisieux

"C'est l'amour seul qui m'attire. (..) C'est l'abandon seul qui me guide, je n'ai point d'autres boussole.(1)

À méditer

(1) Sainte Thérèse de Lisieux,  Ms A 83r, ibid p. 210

Au fil de Luc - 7, 28 - Kénose du baptiste

"Parmi ceux qui sont nés d'une femme,  aucun n'est plus grand que Jean ; et cependant le plus petit du Royaume de Dieu est plus grand que lui" (Luc 7, 28 Tob 88)

Commentaire :
"Il sera grand devant le Seigneur" disait déjà Lc 1, 15. Que pensez de cette limite ? Peut-on dire que la sagesse humaine du Baptiste n'est pas complète ? Elle reste conditionnée à la révélation du Tiduum pascal. Jean va au plus loin du Premier Testament,  pourtant cette sagesse partiellement révélée n'est rien par rapport à ce que va révèler la vie et la mort de Jésus.  La kénose du cousin de Jésus précède celle de ce dernier et l'introduit.  C'est dans la kénose du Fils que Dieu révélera "le Nom qui est au dessus de tout nom". (Ph. 2, 9).

Commentaire 2 :
Certains commentaires donnent au diacre un parallélisme intéressant avec le Baptiste. Comme Jean il est appelé à être signe et instrument (LG1) de la fonction de l'évêque, prologeant la fonction de serviteur de l'évêque(1)  Cette fonction prépare et s'efface devant le maître dont il n'est pas digne d'exercer les fonctions. Appelé à être ordonné diacre à Chartres le 22/9/18 je fais mémoire de mon futur saint patron Guildin, diacre appelé à être évêque et qui va jusqu'à Rome pour refuser cette fonction. Le diacre n'est pas appelé à gouverner, sauf dans des cas extrêmes de suppléance. Sa fonction n'est pas un monopole.  Il est signe, instrument et "passeur" d'une église serviteur de l'homme (2)

( 1) cf. Tournier
(2) cf. mon livre éponyme

Ordination diaconale

Quels sont les pas indiscibles de Dieu vers l'homme ?
Face à nos balbutiements et nos hésitations Dieu se fait silence et amour.
L'amour est-il autre chose que le silence d'un regard ?
La caresse d'un sourire ?
La chaleur d'une présence ?
La brise qui fait tressaillir.
Le 22 septembre à 10h30 je serai ordonné diacre en la cathédrale de Chartres.
Visiteur anonyme ou régulier,  que vous ayez senti ou ignoré ce pas fragile d'un homme vers son Dieu,
Que ces dix ans de lectures commentées ai touché ou non votre coeur, vous êtes conviés à ce "passage".


Dieu vient vers toi -15 - Thérèse de Lisieux

Une expression purement kénotique chez Thérèse mérite notre contemplation :
"Ce n'est pas pour rester dans le ciboire d'or qu'Il descend chaque jour du Ciel, c'est afin de trouver un autre Ciel qui lui est infiniment plus cher que le premier,  le Ciel de notre âme,  faite à son image,  le temple vivant de l'adorable Trinité" (1)
Elle la complète quelques lignes plus loin : "Il s' abaissait vers moi, il m'instruisait en secret des choses de son amour (...) secrets que toute (...) science ne peut découvrir,  puisque que pour les posséder il faut être pauvre d'esprit ! Comme le dit St Jean de la Croix en son cantique :" je n'avais ni guide ni lumière,  excepté celle qui brillait dans mon cœur" (2).
Ce chemin kénotique prend de l'ampleur après son entrée au carmel :"la vraie sagesse consiste à "vouloir être ignorée et comptée pour rien" (3) (...) Je voulais que mon visage soit vraiment caché,  que sur la terre personne ne me reconnaisse. (Ibid).

(1) Sainte Thérèse de Lisieux,  Manuscrit A,  48v○ , ibid p. 148
(2) 49 r, p. 149 citant Saint Jean de la Croix,  Nuit obscure,  str. 3 et 4.
(3) Ms A, 71r, ibid p. 189, citant l'imitation 1, 2, 3 et III, 49, 7.

J'ai soif - Sainte Thérèse de Lisieux

Une des contemplations de Thérèse mérite un arrêt sur image tant elle est charnière de sa vocation :
"Je fus frappée par le sang qui tombait de ses mains Divines (...) et je me résolus de me tenir en esprit au pied de la Croix pour recevoir la Divine Rosée,  comprenant qu'il me faudrait ensuite la répandre sur les âmes.  Le cri de Jésus retentissait aussi continuellement dans mon coeur.... "J'ai soif !" (Jn 19, 28). Ces paroles allumaient en moi une ardeur inconnue et très vive... Je voulais donner à boire à mon Bien-Aimé et je me sentais moi-même dévorée de la soif des âmes". (1)

Il y a la chez Thérèse une contemplation qui rejoint l'axe de lecture de Jn 4 à 19 (2) alliant la soif de la Samaritaine à celle de Jésus.

On retrouve ce thème dans le début du manuscrit B : "Il n'a pas craint de mendier un peu d'eau à la Samaritaine.  Il avait soif... Mais en disant "donne moi à boire" c'était l'amour de sa pauvre créature que l'univers réclamait. Il avait soif d'amour. Ah je le sens plus que jamais,  Jésus est Altéré" (3)

(1) Manuscrit A,  46 recto, ibid p. 143
(2) cf. "Sur les pas de Jean"
(3) Thérèse de Lisieux,  Manuscrit B, 1v, ibid. p. 221

Au fil de Luc - 6, 20 - Les pauvres

"Heureux vous les pauvres,  le royaume des cieux est à eux" Luc 6, 20

Commentaire :
Il faudrait un livre entier pour traiter du sujet et le hasard me conduit vers "le visage des pauvres" publié en 2016 par l'AES (1).

Dans un premier colloque Emmanuel Aumônier y reprend les propos du cardinal Saliège en 1938 sur les "installés".  Une tentation qui nous guette,  à nous qui avons tout.  La porte est étroite (Mat, 19, 24) pour ceux qui amassent et jouissent de richesse sans entendre le cri du pauvre. Il ne suffit pas d'évoquer Lévinas ou Madeleine Delbrel.  Le visage du souffrant doit rester cette épine dans la chair de tout homme. La réponse au cri n'est pas écrite. Elle est aussi infinie que le cri.

(1) François Xavier de Guilbert, Le visage des pauvres, annales de l'AES, 2016

21 août 2018

Au fil de luc - 6, 8 - la main desséchée

La main desséchée, Lc 6, 8
Commentaire 1 :
Pourquoi sommes nous sec pour le royaume. Si notre coeur n'est plus lié à la source notre main sera paralysée et nos actes stériles.
Seul Dieu nous rend fécond par sa grâce.

20 août 2018

Au fil de Luc - 6, 1 - Liberté

Nous reprenons chez Luc une lecture cursive (1) à partir de Luc 6. Quelques notes au fil de l'eau.

« Ses disciples arrachaient des épis, les frottaient dans leurs mains et les mangeaient » Lc 6, 1b

Commentaire 1 : il y a là une liberté essentielle des disciples de Jésus qui interpelle notre propre liberté. Comment agissons nous ? Quelle est notre liberté véritable ? Sommes nous libres des rites et des usages pour le royaume ou pour nos propres besoins ?

Commentaire 2 :
Sainte Thérèse de Lisieux le jour de sa première communion : « Ce jour là, ce n'était plus un regard, mais une fusion, il n'était plus deux, Thérèse avait disparu, comme la goutte d'eau qui se perd au sein de l'océan. Jésus restait seul, Il était le Maître et le Roi. Thérèse ne lui avait pas demandé de lui ôter sa liberté, car sa liberté lui faisait peur, elle se sentait si faible, si fragile que pour jamais elle voulait s'unir à la Force Divine »(2).
Notre liberté se limite à cette acceptation de la volonté de Dieu. Ouvrons nos mains à cet Amour qui nous guide.

Commentaire 3 : relire Ignace d'Antioche : je veux être la farine de Dieu (cf. Tag)

(1) cf. mon livre « Chemins de miséricorde »
(2) Manuscrit A, 35 verso, ibid p. 125

17 août 2018

Déréliction de Marie

« La déréliction dans laquelle elle vit (...) est sans attache aucune. C'est un délaissement absolu. La mère ne sent plus rien que l'impuissance et la solitude, au point que ce sentiment occupe toute son âme, et que le cri du Fils la saisit tout entière et fait d'elle une partie même de ce cri. Et alors qu'elle s'enfonce ainsi dans la plainte du Fils, son premier oui reprend vie (...) surexigence pure » (...) Ce qu'elle a à donner n'est plus force mais faiblesse. (1)

« C'est Dieu lui-même qui conduit par delà le seuil de l'activité d'obéissance dans la passivité consistant à ne plus être que celui dont on dispose »(2)

Il y a la le sommet du décentrement...

(1) La servante du Seigneur - Adrienne von Speyr, ibid. p. 162
(2) p. 163

Don et obéissance - La servante du Seigneur - Adrienne von Speyr

A propos du mariage la lecture mystique d'Adrienne va très loin à partir d'une contemplation de Jean et Marie au pied de la Croix : « Le véritable amour doit donner à la personne aimée la possibilité d'obéir à Dieu, de sorte qu'il est lui-même disposé à obéir (...) ultime obéissance envers Dieu. (...) le regard est tourné vers Dieu (...) changement de direction total » (1)

Depuis le oui originel jusqu'au oui de la Croix, « jaillit en une effusion pure et eucharistique, ouverte et féconde à l'infini » (2) toute la dynamique sacramentelle d'une vie.

(1) Adrienne von Speyr, La servante du Seigneur, Johannes Verlag, 1948/79, p.173
(2) ibid p. 177

16 août 2018

Un petit reste - Michée 4 - Espérance

En écho à 1 Rois 19, ce petit texte de Michée trace un chemin d'espérance :
« En ce jour-là, – oracle de Yahweh, je recueillerai celles qui boitent, je rassemblerai celles qui étaient dispersées, et auxquelles j'avais fait du mal. Et je ferai de celles qui boitent un reste, et de celles qui sont éloignées une nation puissante. Et Yahweh régnera sur eux, sur la montagne de Sion, dès lors et à jamais. » (1)

Il entre en résonance avec d.autres textes comme 1 Rois 19, 18, Jr 31, 7, ou Sophonie 3 : « «En ce jour-là, tu n’auras plus honte de tous les agissements par lesquels tu t’es révoltée contre moi; car alors j’écarterai de toi ceux qui exultent de ton triomphe, et tu ne seras plus hautaine dans ma montagne sacrée. Je laisserai en ton sein un peuple pauvre et faible, qui trouvera un abri dans le nom du S EIGNEUR. Le reste d’Israël n’agira plus injustement. Ils ne diront plus de mensonges, et il ne se trouvera plus dans leur bouche une langue trompeuse, quand ils se coucheront dans leur pâturage et qu’il n’y aura personne pour les troubler.»
‭‭
(1) Michée 4:6‭-‬7, traduction BCC1923
(2) Sophonie‬ ‭3:11-13‬ ‭NBS‬‬



14 août 2018

Kolbe - Dieu est tout

"Dieu est tout. Tout ce qui existe en dehors de Dieu n'a de valeur qu'en référence à lui, qui est Créateur de toutes choses et Rédempteur des hommes. C'est donc lui qui nous manifeste sa volonté adorable par ses représentants sur terre et nous attire ainsi à lui, dans le but d'attirer aussi à lui par nous d'autres âmes et de les unir à lui par une plus grande charité.
Tu vois, frère, quelle est la dignité de notre condition, grâce à la miséricorde de Dieu. Par l'obéissance, nous dépassons pour ainsi dire les limites de notre petitesse, et nous nous conformons à la volonté divine qui nous guide par sa sagesse et sa prudence infinie pour que notre action soit bonne. Bien plus, en adhérant à sa divine volonté, à laquelle aucune chose créée ne peut résister, nous devenons plus forts que tout." (1)

(1) Lettre de saint Maximilien Marie Kolbe



10 août 2018

Polyèdre 3 - Saint Augustin - diacre Laurent

On trouve aujourd'hui une autre déclinaison kénotique du Polyèdre chez Augustin d'Hippone :

"Aujourd'hui, l'Église de Rome nous invite à fêter le jour où le bienheureux Laurent a triomphé, jour où il a terrassé le monde furieux, où il a dédaigné le monde flatteur et ainsi a doublement vaincu le démon persécuteur. ~ Dans l'Église de Rome, vous le savez bien, il exerçait les fonctions de diacre. C'est là qu'il présentait le sang sacré du Christ, et c'est là qu'il répandit son propre sang pour le nom du Christ. ~ L'Apôtre saint Jean a mis en pleine clarté le mystère de la Cène du Seigneur lorsqu'il a dit : Jésus a donné sa vie pour nous ; nous aussi, nous devons donner notre vie pour nos frères. Saint Laurent a compris cela, mes frères, il l'a compris et il l'a fait ; et ce qu'il avait consommé à cette table, c'est cela qu'il a voulu apprêter. Il a aimé le Christ par sa vie, il l'a aimé par sa mort.

Et nous, mes frères, si nous aimons vraiment, nous devons imiter. Car nous ne pourrons pas produire un meilleur fruit de notre amour qu'en nous montrant nous aussi des imitateurs. Le Christ a souffert pour nous et nous a laissé son exemple pour que nous suivions ses traces. Par cette phrase, il semble que, pour l'Apôtre Pierre, le Christ a souffert seulement pour ceux qui suivent ses traces, que la passion du Christ ne sert à rien, sinon à ceux qui suivent ses traces. En effet, les saints martyrs l'ont suivi jusqu'à répandre leur sang, jusqu'à imiter sa passion ; les martyrs l'ont suivi, mais ils ne sont pas les seuls. Après leur passage, le pont n'a pas été coupé ; après qu'ils ont bu, la source n'a pas tari. ~

Le jardin du Seigneur, mes frères, ce jardin a toutes sortes de fleurs : non seulement les roses des martyrs, mais aussi les lis des vierges, le lierre des gens mariés, les violettes des veuves. Absolument aucune catégorie de gens, mes bien-aimés, ne doit désespérer de sa vocation : c'est pour nous que le Seigneur a souffert. C'est très véritablement qu'il est écrit de lui : Il veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à connaître pleinement la vérité.

Il faut donc comprendre comment, en dehors de l'effusion du sang et du risque de subir la passion, le chrétien doit suivre le Christ. L'Apôtre dit, au sujet du Christ Seigneur : Lui qui était dans la condition de Dieu, il n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu. Que lle majesté ! Mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur, devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement. Quel abaissement !

Le Christ s'est abaissé : voilà, chrétien, ce qui est à ta disposition. Le Christ s'est fait obéissant. Alors pourquoi es-tu orgueilleux ? ~ Ensuite, après être allé jusqu'au bout de cet abaissement et avoir terrassé la mort, le Christ est monté au ciel : suivons-le. Écoutons l'Apôtre qui nous dit : Si vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d'en haut : c'est là qu'est le Christ, assis à la droite de Dieu.

Pour demeurer fidèle au Christ,
tu n'as pas craint la haine des hommes !
Ardente est la braise de ton supplice !
Plus ardente la flamme de la charité
qui te consume en holocauste !"

(1) Saint Augustin, Homélie pour la fête de Saint Laurent, source AELF,  Bréviaire du 10/8

09 août 2018

Les deux verres - Sainte Thérèse - vision polyédrique 2

Gf« Pauline me dit d'aller chercher le grand verre à papa et de le mettre à côté de mon petit dé, puis de les remplir d'eau et ensuite elle me demanda de lequel était le plus plein. (...) ma Mère Chérie me fit alors comprendre qu'au Ciel le Bon Dieu donnerait à ses élus autant de gloire qu'ils pourraient en contenir » (1)

Une autre insistance sur le polyèdre...

(1) Ste Thérèse de Lisieux, oeuvres complètes, ibid p. 99

05 août 2018

Contemplation polyèdrique - Sainte Thérèse de l’enfant Jésus

Pour ceux qui connaissent l'image souvent évoquée par le pape François du polyèdre, ils trouveront dans cette méditation de la petite Thérèse un écho aux accents kénotique : « j'ai compris que toutes les fleurs qu'il a créées sont belles, que l'éclat de la rose et la blancheur du Lys n'enlèvent pas le parfum de la violette (...) l'amour de Notre Seigneur se révèle aussi bien dans l'âme la plus simple qui ne résiste en rien à sa grâce que dans l'âme la plus sublime, en effet le propre de l'amour étant de s'abaisser (...) il a créé l'enfant qui ne sait rien [pour y descendre (...)] et montrer sa grâce infinie. »(1)

(1) Manuscrit A, ibid. p. 72

Élection et miséricorde - Sainte Thérèse de l’enfant Jésus

« Dieu n'appelle pas ceux qui en sont dignes, mais ceux qu'il lui plaît » nous dit la petite Thérèse. On n'est pas pour autant dans un arbitraire de Dieu, mais bien dans une contemplation des voies insondables de Dieu qui appellent même les pêcheurs à son service. On retrouve la même idée chez François dans sa devise. Thérèse précise : « Ce n'est donc pas l'ouvrage de celui qui veut ni celui qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde »(1)

À contempler

(1) Thérèse de Lisieux, Oeuvres complètes, Manuscrit A, p. 71

14 juillet 2018

Avec Dieu au goulag - Walter J. Cizek

On peut écrire des pages de théorie et de théologie sur la foi et la pratique. 
Ce livre nous conduit sans fards à l'expérience la plus profonde et la plus humble d'une rencontre de l'homme avec son Dieu.
Dieu apparaît quand l'homme cesse de décider, de vouloir, quand il abdique devant la volonté de Dieu.
Un chemin difficile, exigeant, impossible à l'homme sans la main de Dieu qui trace au coeur d'une vie la vérité et la paix.
Walter Ciszek nous conduit au coeur de ce qu'on appelle la déréliction - ce lieu où Dieu semble absent et où pourtant il nous attend.



Avec Dieu au goulag - Walter J.  Cizek, Points / Editions des béatitudes, 2010, Poche 8,10 €, 400p.

13 juillet 2018

Il frappe à ta porte - 14 - Saint Ambroise

"Ouvre ta porte à celui qui vient, ouvre ton âme, élargis l'accueil de ton esprit afin qu'il découvre les richesses de la simplicité, les trésors de la paix, la douceur de la grâce. Dilate ton cœur, viens vers le soleil de la lumière éternelle qui éclaire tout homme. Sans doute, la vraie lumière brille pour tous ; mais celui qui ferme ses fenêtres se privera de l'éternelle lumière. Donc, le Christ lui-même est laissé dehors, si tu fermes la porte de ton esprit. Bien qu'il soit capable d'entrer, il ne veut pas s'introduire de force, il ne veut pas contraindre ceux qui le refusent.
Issu de la Vierge, il est sorti de son sein en rayonnant sur tout l'univers, afin de briller pour tous. Ils le reçoivent, ceux qui désirent la clarté d'une lumière perpétuelle que la nuit ne vient jamais interrompre. Car le soleil que nous voyons de nos yeux est supplanté par l'obscurité de la nuit ; mais le soleil de justice ne se couche jamais parce que le mal ne supplante jamais la sagesse.

Heureux donc celui à la porte duquel frappe le Christ. Notre porte, c'est la foi, qui, si elle est solide, défend toute la maison. C'est par cette porte que le Christ fait son entrée. Aussi l'Église dit-elle dans le Cantique : J'entends mon frère qui frappe à la porte. Écoute celui qui frappe, écoute celui qui désire entrer : Ouvre-moi, ma soeur, mon épouse, ma colombe, ma parfaite ! Car ma tête est couverte de rosée, mes boucles, des gouttes de la nuit.

Comprends avec quelle force le Dieu Verbe frappe à ta porte lorsque sa tête est couverte de la rosée nocturne. Car il daigne visiter ceux qui sont exposés à l'épreuve et aux tentations, pour qu'ils ne risquent pas d'être vaincus et de succomber à leurs difficultés. Sa tête est donc couverte de rosée ou de pluie quand son corps est dans la peine. C'est alors qu'il faut veiller, de peur que l'Époux, quand il viendra, ne se retire parce que la maison lui sera fermée. Si tu dors, et si ton cœur ne veille pas, il se retire avant d'avoir frappé. Si ton cœur veille, il frappe et il demande qu'on lui ouvre la porte.

Nous savons donc quelle est l'entrée de notre âme, nous savons aussi quelles sont ces portes dont il est dit : Portes, élevez vos linteaux, élevez-vous, portes éternelles, et le Roi de gloire entrera. Si tu veux élever ces portes de ta foi, le Roi de gloire entrera auprès de toi, paré du triomphe de sa passion. La justice aussi a des portes. Car nous lisons à leur sujet ce que Jésus dit par son prophète : Ouvrez-moi les portes de la justice. (..)

C'est donc l'âme qui a une entrée, qui a des portes. Le Christ vient à cette entrée et il frappe, il frappe aux portes. Ouvre-lui donc : il veut entrer, il veut trouver son Épouse éveillée" (1)

Voix de mon Bien-aimé qui frappe à la porte : « Ouvre-moi» ! alléluia !

  • (1) Saint Ambroise,  Sermon sur le psaume 118.

10 juillet 2018

Dieu est en toi - 13

Dieu n'est pas dans le bruit et l'agitation. Il est dans "le creux d'un silence au coeur de ma vie" (1)

(1) Méditation de l'application "Prie en chemin" du 10/7/18

03 juillet 2018

Esthétique pascalienne

La contemplation de l'univers est source d'un saut transcendantal. C'est ce que nous dit Hans Urs von Balthasar dans sa lecture de Pascal : « Toutes les grandeurs charnelles ou spirituelles n'ont nul rapport avec l'empire de la sainteté ». (1)
« La figure finie ne peut exister et être compréhensible qu'au sein d'un infini » (2)
Cette découverte à l'heure de celle des pandoravirus et des voyages intergalactiques nous emmène un pas plus loin. L'homme est fini mais Dieu est amour...

L’amour est en toi - 12 - 2 Co 4

Il y a des silences qui nous interpellent. Où es-tu donc mon Dieu ?
« Ne perdons pas courage (...) l'homme intérieur se renouvelle de jour en jour. Car nos détresses d'un moment sont légères par rapport au poids extraordinaire de gloire éternelle qu'elles nous préparent. Notre objectif n'est pas ce qui se voit ; ce qui se voit est provisoire, mais ce qui ne se voit pas est éternel »(1)

À nous de persévérer dans cette nuit qui creuse en nous le désir.

(1) 2 Co 4, 17-18

28 juin 2018

L’amour est en toi - Irenée de Lyon

Le travail de Dieu en l’homme se fait dans la douceur. Écoutons ce que dit Irenée : « Depuis le commencement, le Fils est l'exégète du Père, puisqu'il est depuis le commencement auprès du Père : au temps voulu, il a montré aux hommes pour leur profit les visions prophétiques, la variété des charismes, ses ministères et la glorification du Père, de façon cohérente et claire : Qui dit cohésion dit harmonie, qui dit harmonie dit temps voulu, et qui dit temps voulu dit profit. C'est pourquoi le Verbe s'est fait le dispensateur de la gloire du Père au profit des hommes pour qui il accomplit de telles économies : ainsi il montre Dieu aux hommes, et présente l'homme à Dieu, tout en préservant l'invisibilité du Père, de peur que l'homme n'en vienne à mépriser Dieu, mais, en même temps, pour qu'il ait toujours des progrès en vue, il rend Dieu visible aux hommes en le montrant par de nombreuses économies, de peur que, totalement privé de Dieu, l'homme cesse d'être. Car la gloire de Dieu, c'est l'homme vivant, et la vie de l'homme, c'est la vue de Dieu. Si la révélation de Dieu par la création donne la vie à tout être vivant sur la terre, combien plus la manifestation du Père par le Verbe donne-t-elle la vie à ceux qui voient Dieu ! » (1)

« Ce n’est pas toi qui te fait, mais Dieu qui te fait. Si tu es l’ouvrage de Dieu, attends tout de sa main : Livre-toi à Celui qui peut te modeler et qui fait bien toutes choses en temps opportun; Quant à toi, ton rôle c’est de te laisser ouvrager. Présente-lui un coeur souple et docile, Livre-toi à lui comme une argile malléable. Ayant en toi l'Eau qui vient de lui, Reçois en toi la forme que le Maître Ouvrier veut te donner. Garde en toi cette humilité qui vient de la grâce,  pour ne pas empêcher le Seigneur d’imprimer en toi la marque de son doigt. C’est en recevant son empreinte que tu deviendras parfait, et seul le Seigneur pourra faire oeuvre d’art avec cette pauvre argile que tu es. En effet, faire est le propre de la bonté de Dieu, et le laisser faire, c’est le rôle qui convient à ta nature d’homme ».


(1) Irenée de Lyon, Contre les hérésies, source AELF, office des lectures du 28 juin.

L’amour est en toi - 11 - St jean de la Croix

On ne peut passer sous silence la question posée par Hans Urs von Balthasar p.64. « Pourquoi l'orientation apostolique reste absente ? (...) où trouve-t-on le prochain dans toute l'œuvre de Jean de La Croix ?  » Quid du « Dieu s'abaissant qui vient dans la chair et la souffrance ? »(1)
La réponse du théologien reste ouverte. L'agape est sous entendue chez Jean de La Croix
Mais il ne faut pas faire abstraction du risque d'une tentation mystique, celle qui nous guette dans tout discours chrétien. Dieu nous emporte dans sa danse mais ne laisse pas sur le chemin les oubliés et les souffrants.

Nos élans mystiques ne portent fruit que s’ils conduisent à une véritable charité.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Styles 2, De Jean de la Croix à Péguy, Paris, Aubier, 1972 p. 64


20 juin 2018

L'amour est en toi -10 - Saint Augustin

Pour que la semence prenne chair,  il nous faut fermer la porte à toutes les mauvaises herbes.  C'est l'enjeu compliqué de toutes vie intérieure. En écho au livre de François Cassingena Trévédy longuement commenté ici on peut entendre les propos d'Augustin :
«Jésus dit : « Quand tu pries, entre dans ta chambre ». Quelle est cette chambre sinon le cœur, comme l'indique le psaume où il est écrit : « Ce que vous dites dans votre cœur, regrettez-le dans votre chambre » (Ps 4,5 Vulg). Et, dit-il, « après avoir fermé la porte, prie ton Père dans le secret ». Il ne suffit pas d'entrer dans sa chambre, si la porte reste ouverte aux gens indiscrets : les futilités du dehors s'introduisent furtivement par cette porte et envahissent l'intérieur. Les faits passagers et tangibles pénètrent par la porte, dans nos pensées ; c'est-à-dire une foule de vains fantasmes entre par nos sens et troublent notre prière. Il faut donc fermer la porte, ce qui veut dire résister aux sens, afin qu'une prière toute spirituelle monte jusqu'au Père, jaillie du creux de notre cœur où nous prions le Père dans le secret. « Et votre Père, qui voit dans le secret, te le revaudra »… Le Seigneur n'a pas l'intention de nous recommander de prier mais de nous apprendre comment prier. De même plus haut il ne nous recommandait pas l'aumône, mais l'esprit dans lequel il faut faire l'aumône. Il exige la pureté du cœur que l'on peut obtenir seulement par une intention unique et simple, orientée sur la vie éternelle par un amour de la sagesse unique et pur. (1)

(1) Saint Augustin, Explication du Sermon sur la montagne, 3, 11 (trad. coll. Pères dans la foi, n°5, p. 94 rev.) Source Évangile au quotidien
Rappel : l’interêt de ce blog, désormais vieux de 15 ans, réside surtout dans l’interactivité des balises (tags) qui comptent maintenant près de 2.500 billets

19 juin 2018

L’amour est en toi - 9 - la solitude

L'Amour est en toi et cependant t'échappe. Par un petit croquis sur le Christ en croix, saint Jean de la croix nous indique « avec un poids presque écrasant, une troisième idée : celle de la solitude de celui qui marche à la suite du Christ et de l'impossibilité de placer cette œuvre d'imitation sur la même ligne que celle du Christ »(1)

(1) Urs von Balthasar,  GC2.2 ibid. p. 63

14 juin 2018

Dieu n'est pas violent - 2 - Origène et Jéricho


Cette belle homélie d'Origène pourrait fort bien entrer dans le cadre de mon essai éponyme sur la non violence de Dieu  : "On assiège Jéricho, et il faut la prendre d'assaut. Quels vont être les moyens d'attaque ? On ne tire pas l'épée, on ne dresse pas la machine de guerre, on ne brandit pas les javelots contre elle. Seules sont utilisées les trompettes des prêtres, et elles font s'écrouler les murs de Jéricho.

Dans l'Écriture, nous rencontrons souvent Jéricho comme la figure de ce monde. Par exemple, lorsque l'Évangile nous dit : Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho et il tomba sur des bandits, cet homme est évidemment la figure d'Adam, chassé du paradis et exilé dans ce monde. Quant aux aveugles de Jéricho, que Jésus vint trouver pour leur rendre la vue, ils représentaient les hommes de ce monde, accablés par la cécité de l'ignorance, et pour qui le Fils de Dieu est venu.
Or, cette ville de Jéricho, c'est-à-dire notre monde, doit s'effondrer. Car, depuis longtemps, les livres saints ont annoncé la fin du monde. Or, comment donc finira-t-il ?

De quelle manière ? Par le son des trompettes, dit l'Écriture. De quelles trompettes ? Demandons à saint Paul de nous dévoiler ce secret ; écoutez ses propres paroles : Elle sonnera, la trompette, et ceux qui sont morts dans le Christ ressusciteront, impérissables. Et encore : Sur l'ordre de Dieu, à la voix de l'archange, au son de 1a trompette, le Seigneur descendra du ciel. C'est alors qu'au son de la trompette notre Seigneur Jésus (Josué) triomphera de Jéricho, et sa victoire sera si accablante que seule la courtisane avec toute sa maison sera sauvée. Il viendra donc, Jésus, notre Seigneur, et il viendra au son des trompettes. ~

Dans ce récit Rahab symbolise avec sa famille ceux qui seront sauvés. Que le Seigneur la sauve, elle seule qui accueillit ses éclaireurs, c'est-à-dire qui a reçut ses Apôtres avec foi et soumission, et les installa dans le haut de sa maison qu'il joigne et unisse cette courtisane à la maison d'lsraël. Mais cessons de rappeler ses anciennes fautes et de lui en tenir rigueur. Elle a été courtisane autrefois, maintenant elle a été unie au Christ comme une vierge chaste à son unique époux. Écoutez comment l'Apôtre parle d'elle : Je vous ai fait rencontrer le seul Époux et vous êtes l'épouse chaste que j'ai unie au Christ. Il en venait, celui-là même qui disait : Nous étions autrefois tous insensés, errants, égarés, esclaves de toutes sortes de convoitises et de jouissances.

Faut-il de plus longs commentaires pour vous expliquer comment la courtisane n'est plus une courtisane ? Écoutez encore saint Paul : Vous avez été tout cela, mais tous vous avez été lavés, et vous avez été sanctifiés au nom de Jésus Christ notre Seigneur et dans l'Esprit de votre Dieu.

Pour qu'elle échappât, en effet, à la ruine de Jéricho, elle reçut des éclaireurs le signe très puissant du salut, le fil d'écarlate. Car c'est par le sang du Christ que l'Église universelle est sauvée, en Jésus Christ notre Seigneur, à qui appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles des siècles." ( 1)

Dieu ne brandit d'autres armes qu'un Fils déchiré par une lance.
A méditer.


(1) Homélie d'Origène sur Jéricho, source, office des Lectures,  AELF

09 juin 2018

L.’amour est en toi - 8 - Saint Augustin

Clin d’oeil de La Croix du week-end sur ma web série : « Dans la tradition chrétienne, l’intériorité n’est pas le fruit d’un travail, ni d’un « développement personnel », mais d’une rencontre, magnifiquement illustrée par la célèbre formule d’Augustin : « Deus est interior intimo meo » (« Dieu est plus intérieur que le plus intérieur »).« Ce qui se murmure dans cette formule, c’est qu’au fond de notre intériorité se trouve toujours déjà la présence d’une brûlure prévenante et aimante : celle de l’autre, celle du Grand Autre », souligne Éric Fiat » (1)



(1) Élodie Maurot in « un si grand besoin d’intériorité », La Croix du 9/6/2018

08 juin 2018

L’amour est en toi - 7 - Saint Jean de la Croix

« Cuán manso y amoroso
Recuerdas en mi seno ! »(1)
« Avec quelle douceur et quel amour
Vous vous réveillez dans mon sein »

« Le monde s'élève dans l'âme en même temps que Dieu ! » ajoute Hans Urs von Balthasar sur cette citation de Vive Flamme. On est au cœur de l'inhabitation de Dieu en l'homme et probablement du travail de la grâce...

En cette fête du Sacré Cœur, et la lecture de Jn 19, cette méditation nous conduit encore plus loin. Car notre cœur ne peut être indifférent au coeur transpercé du Christ.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Styles 2, De Jean de la Croix à Péguy, Paris, Aubier, 1972 p. 48

07 juin 2018

Jeux de kénose - St Jean de la Croix

Poursuivons notre lecture de Jean de la Croix, dans les yeux de Balthasar :
«La quête est tellement absolue (...) tend tellement à l'absolu qu'elle ne peut pas finir par [le] trouver (...) on [ne] peut pas dire (...) comme chez Rilke « nous projetons des Dieu » (...) car il sait qu'il est pris et porté plus loin ; plus que se vider lui-même, il est vidé ; il agit moins que Dieu n'agit en lui, c'est pourquoi la base de sa contemplation, c'est d'être contemplé ; de même que (...) les yeux de Dieu ne sont qu'esquissés dans l'âme, et que celle-ci persévère dans l'attente de voir apparaître l’œil divin dans le milieu de la foi » (1)

L'enjeu de la quête de St Jean de la Croix est ici cette double kénose, ce jeux des kénoses réciproques qui touche à ce que j'appelle la danse trinitaire (2), une circumincession où la kénose de Dieu appelle et creuse notre humilité et nous conduit à la révélation ultime.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Styles
2, De Jean de la Croix à Péguy, Paris, Aubier, 1972 p. 45

(2) La danse trinitaire et repris maintenant dans L'amphore et le Fleuve

06 juin 2018

La Gloire et la Croix - Jn 13,31-32

Une question légitime en groupe de lectio divina sur ces deux versets de Jn 13 : « Νῦν ἐδοξάσθη ὁ υἱὸς τοῦ ἀνθρώπου, καὶ ὁ θεὸς ἐδοξάσθη ἐν αὐτῷ· ⸂εἰ ὁ θεὸς ἐδοξάσθη ἐν αὐτῷ,⸃ καὶ ὁ θεὸς δοξάσει αὐτὸν ἐν ⸀αὑτῷ, καὶ εὐθὺς δοξάσει αὐτόν.» («Maintenant le Fils de l'homme a été glorifié, et Dieu a été glorifié en lui. Si Dieu a été glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera en lui, il le glorifiera aussitôt.»)
Difficile, avec nos yeux du XXIème siècle de voir la gloire divine dans le lavement des pieds et la bouchée à Judas. Et pourtant, à l'aune de Ph. 2,11 et de la kénose, il faut entendre les deux versets non sous l'angle de la gloire mondaine, mais sous celui de la révélation kénotique de la faiblesse divine : en paraphrasant et remplaçant « gloire » (doxa, kabod au sens d'Exode 34) par « lumière de la révélation » on obtient une version peut-être plus accessible à l'homme d'aujourd'hui : « Maintenant le Fils de l'homme s'est révélé amour, et Dieu a été révélé en lui comme Dieu humble et aimant. Si Dieu a été révélé en lui, Dieu aussi le/[se] révélera en lui, [et] il le glorifiera aussitôt.»

L’amour est en toi - 6 - Saint Jean de la Croix

Dieu « possède une souveraine humilité (...) il se découvre lui-même à vous avec joie (...) il vous met à son niveau (...) et vous dit « je suis content d'être ce que je suis pour être à toi et me donner à toi »(1).

À méditer et entendre pour nous dans l'aujourd'hui de nos vies.

(1) Saint Jean de la Croix, L.III 6 (G. p. 978) cité par Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Styles 2, De Jean de la Croix à Péguy, Paris, Aubier, 1972 p. 43

05 juin 2018

L’amour est en toi - 5 - Jean de la Croix

« La mystique de Jean ne peut s'achever que dans l'ordre trinitaire ». Une danse (1) qu'Hans Urs von Balthasar souligne à sa manière dans la même page : Dieu comme « centre » du mystère, le mystère de l'Esprit-Saint et l'amour de la créature qui devient « par la grâce, une aspiration à la spiratio divine (...) appelée (...) à participer passivement et activement (...) miracle de la grâce (...) miracle du contact substantiel entre le je et le Toi, de l'éveil du Toi au cœur même du je et du je au coeur du Toi (...) Vous vous réveillez ô Verbe-Époux, dans le centre et le fond de mon âme, dans sa pure et intime substance » (2)

(1) cf. mon livre éponyme La danse trinitaire (in À genoux devant l’homme)
(2) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Styles 2, De Jean de la Croix à Péguy, Paris, Aubier, 1972 p. 41


04 juin 2018

La quête de Dieu - 2 - Saint Jean de la Croix

Au coeur de notre désir de Dieu, le monde perd sens... il nous faut abandonner tout désir de comprendre. En effet cela "prive l'aventure de la quête de Dieu" (...) qui n'est accessible que "dans la nuit".  Il nous faut parvenir à l'oubli volontaire de toutes les impressions extérieures afin que dans le silence cette faculté se taise et prête seulement l'oreille de l'esprit pour écouter Dieu" (1) La nuit obscure est un long processus qui conduit progressivement à "la perte du goût pour les choses sensibles et les biens finis [qui] prouve déjà qu'on commence à goûter Dieu tel qu'il est en lui-même". Il faut pour Jean de la Croix, comme le précise Hans Urs von Balthasar un "renoncement radical (...) un retrait passif de toute délectation (...) le minuit de la pure foi aveugle (2)" avant le commencement de la lumière.

(1) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Styles 2, De Jean de la Croix à Péguy, Paris, Aubier, 1972 p 35
 
(2) p. 38-39

L’amour est pour toi - 4 - Curé d’Ars

Si l'on peut méditer ce don fait à l'homme par l'Amour, c'est peut-être en contemplant ce vide qui se creuse en nous dans la prière pour recevoir Dieu.

Sentez-vous en effet ce manque que Dieu seul peut combler ? Il est en creux ce que l'amour est en surplus. Il naît d'un désir et d'une soif que l'on n'étanche pas...

"Dieu voulut se donner Lui-même pour nourriture.

Mais le grand malheur est qu'on néglige de recourir à cette divine Nourriture, pour traverser le désert de cette vie. Comme une personne qui meurt de faim à côté d'une table bien servie, il y en a qui restent cinquante, soixante ans sans nourrir leur âme.

Si les chrétiens pouvaient comprendre ce langage de notre Seigneur qui leur dit : « Malgré ta misère, Je veux voir de près cette belle âme que J'ai créée pour Moi. Je l'ai faite si grande qu'il n'y a que Moi qui puisse la remplir. Je l'ai faite si pure qu'il n'y a que mon Corps qui puisse la nourrir. » (1)

(1) Saint Jean-Marie Vianney, Esprit du Curé d'Ars dans ses Catéchismes, ses Sermons, ses Conversations (Abbé Monnin, Éds Tequi 2007, p. 57-58, rev.)

01 juin 2018

Le mystère de Dieu - 3 - Saint Jean de la Croix

"La conquista essentielle qui, per caminos nuevos nunca sabidos, conduit, en tâtonnant dans l'obscurité, à une sabidura oscura. L'idée de secret est essentielle chez Jean de la Croix, [sans aucun] relent de science secrète (...) ne promet rien (...) mais seulement l'immensité infinie et sans image du Dieu incompréhensible. (...) Le rayon de ténèbres est obscur (...) sans doute parce que l'âme n'est pas adaptée à la lumière excessive" (1)

On prendra le temps de contempler cette immensité divine...
Ce mystère n'est pas là pour nous perdre mais pour aiguiser notre désir et notre soif jusqu'à l'affirmation du Centurion quand se déchire le voile.

(1) Hans Urs von Balthasar, Hans Urs von Balthasar, La Gloire et la Croix, Styles 2, De Jean de la Croix à Péguy, Paris, Aubier, 1972 p. 16