16 mars 2020

Leçon d’humilité - saint Basile


« Que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse, que le vaillant ne se glorifie pas de sa vaillance, que le riche ne se glorifie de sa richesse ! Alors, où est la vraie gloire et en quoi l'homme est-il vraiment grand ? Le prophète répond : Celui qui veut se glorifier trouvera sa gloire s'il reconnaît et comprend que je suis le Seigneur.

Voilà quelle est la noblesse de l'homme, voilà quelle est sa gloire et sa grandeur : connaître vraiment ce qui est grand et s'y unir, et rechercher sa gloire dans la gloire de Dieu. L'Apôtre dit en effet : Celui qui se glorifie, qu'il se glorifie dans le Seigneur, après avoir dit : Le Christ a été envoyé pour être notre sagesse, pour être notre justice, notre sanctification, notre rédemption. ~

Voilà quelle est en Dieu notre fierté parfaite et exacte : ne pas se flatter de sa propre justice, mais savoir qu'on est dépourvu de vraie justice et ne trouver sa justice que dans la foi au Christ. Et c'est en cela que Paul se glorifie, car il méprise sa propre justice : il recherche cette justice qui est donnée par le Christ, qui vient de Dieu et qui consiste en la foi, pour connaître le Christ, éprouver la puissance de sa résurrection, et communier aux souffrances de sa passion, en reproduisant sa mort dans l'espoir de parvenir à ressusciter d'entre les morts.

Alors, toute la prétention de l'orgueil s'écroule. Il ne te reste plus rien, pauvre homme, dont tu puisses te vanter, où tu puisses mettre ta fierté et ton espérance. Il ne te reste qu'à mortifier tout ce que tu possèdes, qu'à chercher dans le Christ ta vie future. Nous l'avons par avance, nous y sommes déjà, puisque nous vivons entièrement par la grâce que Dieu nous donne.

Et certes, c'est l'action de Dieu qui produit en nous la volonté et l'action, parce qu'il veut notre bien. En outre Dieu nous révèle par son Esprit sa sagesse qui a préparé notre gloire. Et c'est Dieu qui nous donne la force dont nous avons besoin dans nos labeurs. J'ai travaillé plus qu'eux tous, dit saint Paul ; non pas moi, mais la grâce de Dieu qui est avec moi.

Dieu nous a délivrés de tout danger au-delà de toute espérance humaine. Nous avions reçu en nous-mêmes notre arrêt de mort, dit saint Paul. Ainsi notre confiance ne pouvait plus se fonder sur nous-mêmes, mais sur Dieu qui ressuscite les morts. C'est lui qui nous a arrachés à une telle mort et nous en arrachera ; en lui nous avons mis notre espérance : il nous en arrachera encore. » (1)

Si l'on croit bien faire, un seul remède : considérer notre faiblesse et accepter que ce qui est bien à travers nous vient de Dieu seul, cet amour déposé en nous, miette vivante non consumée de la Parole et de l'Eucharistie partagée qui subsiste à nos adhérences et devient grâce parce qu'elle est germe de Dieu.

C'est peut-être cela qui nous fait considérer que Dieu plante dans nos jardins mal cultivés des graines qui dépasse notre terre pour jaillir vers le ciel.


C'est au nom de cela que je continue d'écrire en dépit de l'orgueil qui m'étouffe.
C'est au nom de cela que je pense qu'un misérable comme celui tant blâmé dans le passé récent a pu faire naître une grande œuvre qui l'a dépassé et fait jaillir de la fragilité une lueur d'espoir et de charité.
La charité, l'espérance et la foi restent théologales, c'est-à-dire don de Dieu, prêchent avec raison notre Église.

(1) Basile de Césarée - Homelie sur l'humilité, source Office des lectures du 3eme lundi de carême

15 mars 2020

Au fil de Jean 4 - La Samaritaine - Saint Augustin

En guise de corrigé de mon homélie, Écoutons saint Augustin sur Jean 4 :

« Arrive une femme. Elle représente l'Église ; l'Église qui n'était pas encore justifiée, mais déjà appelée à la justification. Car c'est de cela qu'il est question. Elle arrive sans savoir, elle trouve Jésus, et la conversation s'engage.

Voyons comment, voyons pourquoi arrive une femme de Samarie qui venait puiser de l'eau. Les Samaritains n'appartenaient pas au peuple des Juifs, car à l'origine ils étaient des étrangers. ~ C'est un symbole de la réalité qu'arrive de chez les étrangers cette femme qui était l'image de l'Église, car l'Église devait venir aussi des nations païennes, être étrangère à la descendance des Juifs.
Écoutons-la donc : en elle, c'est nous qui parlons ! Reconnaissons-nous en elle et, en elle, rendons grâce à Dieu pour nous. Elle était la figure, non la vérité ; car elle-même a présenté d'abord la figure, et la vérité est venue. Car elle a cru en celui qui, en elle, nous présentait cette préfiguration. Donc, elle venait puiser de l'eau, tout simplement, comme font ordinairement des hommes ou des femmes.
  
Jésus lui dit : Donne-moi à boire. (En effet, ses disciples étaient partis à la ville pour acheter de quoi manger). La Samaritaine lui dit : Comment, toi qui es Juif, tu me demandes à boire, à moi, une Samaritaine ? En effet, les Juifs ne veulent rien avoir en commun avec les Samaritains.
Vous voyez que c'étaient bien des étrangers : les Juifs n'employaient jamais leurs récipients. Et, parce que cette femme avait emporté une cruche pour puiser l'eau, elle s'étonne de ce qu'un Juif lui demande à boire, ce qui n'était pas la coutume des Juifs. Mais celui qui cherchait à boire avait soif de la foi de cette femme.

Écoute enfin quel est celui qui demande à boire. Jésus lui répondit : Si tu savais le don de Dieu, si tu connaissais celui qui te dit : Donne-moi à boire, c'est toi qui lui aurais demandé, et il t'aurait donné de l'eau vive. Il demande à boire, et il promet à boire. Il est dans le besoin, comme celui qui va recevoir, et il est dans l'abondance, comme celui qui va combler. Si tu savais le don de Dieu, dit-il. Le don de Dieu, c'est l'Esprit Saint. Mais Jésus parle encore à cette femme de façon cachée et peu à peu il entre dans son cœur. Peut-être l'instruit-il déjà. Qu'y a-t-il de plus doux et de plus bienveillant que cette invitation : Si tu savais le don de Dieu, si tu connaissais celui qui te dit : Donne-moi a boire, c'est peut-être toi qui demanderais, et il te donnerait de l'eau vive. ~
Quelle eau va-t-il lui donner, sinon cette eau dont il est dit : En toi est la source de vie ? Comment auraient-ils soif, ceux qui seront enivrés par les richesses de ta maison ?
Il promettait donc la nourriture substantielle et le rassasiement de l'Esprit Saint, mais la femme ne comprenait pas encore. Et, parce qu'elle ne comprenait pas, que répondait-elle ? La femme lui dit : Seigneur, donne-la moi, cette eau :  que je n'aie plus soif, et que je n'aie plus à venir ici pour puiser. Sa pauvreté l'obligeait à peiner, et sa faiblesse refusait cette peine. Elle aurait dû entendre cette parole : Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos ! Jésus lui disait cela pour qu'elle cesse de peiner. Mais elle ne comprenait pas encore.(1) »

(1) Augustin d'Hippone, commentaire de l'Evangile de Jean, source: office des lectures du 3eme dimanche de carême

14 mars 2020

Homélie du 3eme dimanche de carême - La Samaritaine - Jean 4

Homélie du 3eme dimanche de carême - La Samaritaine - Jean 4

Projet 2
Connaissons-nous le don de Dieu ?

C'est peut-être la contemplation centrale des textes de ce dimanche. Si nous avons accepté de quitter nos habitudes pour marcher dans le « désert » et rencontré la soif véritable, alors nous rejoignons le grand assoiffé d'amour : Jésus Christ, celui qui se présente au puits à l'heure la plus chaude et nous demande à boire.
Avant-dernier agenouillement du Fils devant « l'homme » - ici une femme qui ne cesse d'avoir soif malgré ses cinq maris.
Le contraste est saisissant et c'est pourtant là que tout se joue.

Le puits est le lieu de la rencontre typique de l'ancien testament. C'est donc de nos épousailles qu'il s'agit. Allons nous répondre à cette demande en mariage ?
« Donne moi à boire ? »

Pouvons nous apporter l'eau pour qu'il serve au vin des noces ?
Qui sont nos cinq maris et celui avec qui nous restons englués ? Orgueil, suffisance, avarice, luxure... (je parle pour moi...) ?

Pouvons-nous quitter ce qui nous empêche de comprendre que l'eau de la vie vient de Dieu ? Que l'eau n'est autre que cet amour déposé au fond de notre cœur et qui ne demande qu'à jaillir.
    
Méditons d'abord sur ce don de Dieu, même si l'actualité nous détourne le coeur des chemins d'espérance.

Dieu n'est pas dans le drame, mais dans l'amour qui jaillit, dans ces chants qui emplissent les maisons italiennes en ce moment et traduisent que l'amour est plus fort que la mort.

« Quiconque boit de cette eau aura de nouveau soif ; mais celui qui boira de l'eau que moi je lui donnerai n'aura plus jamais soif ; et l'eau que je lui donnerai deviendra en lui une source d'eau jaillissant pour la vie éternelle. »

Le Christ est le Rocher d'où jaillit l'amour. C'est ce qu'affirme en tout cas de nombreux commentaires sur l'épisode du Rocher : « Moi, je serai là, devant toi, sur le rocher du mont Horeb.
Tu frapperas le rocher, il en sortira de l'eau, et le peuple boira ! » Exode 17

Ils ont transpercé le cœur de Dieu et de cette plaie offerte jaillit un fleuve immense : « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : 'Donne-moi à boire', c'est toi qui lui aurais demandé, et il t'aurait donné de l'eau vive. » Jean 4

L'eau jaillissante...

« l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l'Esprit Saint qui nous a été donné. » Romains 5
Précise saint Paul...

Ce qui jaillit du cœur transpercé est l'Esprit d'amour. Laissons nous inonder de l'intérieur par cette eau vive. La vie est là. Même si nous sommes privés d'eucharistie, elle est au fond de nous, dès que nous quittons ce qui obscurcit notre regard...



11 mars 2020

Pédagogie divine 21 - Saint Irénée


Cela pourrait être le résumé du livre "Pédagogie divine" dont je viens de mettre en ligne la première épreuve, après plusieurs années de cisèlement.

Ce n'est jamais un hasard pour moi de tomber sur des textes qui éclairent où résonnent avec mes sujets de recherche. Celui-ci, retrouvé dans l'office des lectures d'aujourd'hui, entre largement dans cette catégorie.
Écoutons donc saint Irénée :

« Depuis le commencement, Dieu a modelé l'homme en vue de ses dons ; il a choisi les patriarches en vue de leur salut ; il formait d'avance le peuple, pour apprendre aux ignorants à suivre Dieu ; il préparait les prophètes, pour habituer l'homme sur la terre à porter son Esprit et
à être en communion avec Dieu. Lui qui n'avait besoin de rien accorde sa communion à ceux qui ont besoin de lui ; pour ceux qui lui plaisaient, il dessinait comme un architecte l'édifice du salut ; à ceux qui ne le voyaient pas en Égypte, il servait lui-même de guide ; aux turbulents dans le désert, il donnait la loi pleinement adaptée ; à ceux qui entraient dans une bonne terre, il donnait l'héritage approprié ; pour ceux qui revenaient vers le Père, il immolait le veau gras, et leur offrait la meilleure robe. Bref, de bien des manières, il disposait le genre humain à l'harmonie du salut.

Voilà pourquoi Jean dit dans l'Apocalypse : Et sa voix était pareille à la voix des multiples eaux. Oui, elles sont nombreuses, les eaux de l'Esprit de Dieu, — car le Père est riche et grand — et passant à travers elles toutes, le Verbe apportait généreusement son assistance à ceux qui lui étaient soumis, prescrivant à toute créature la loi nécessaire et appropriée.

Ainsi par la Loi, il déterminait la construction du tabernacle, l'édification du Temple, le choix des Lévites, les sacrifices et les oblations, les purifications, et tout le reste du service du culte. Lui-même n'a nul besoin de tout cela : car il est toujours comblé de tous biens, et a en lui toute odeur de suavité, et toutes les fumées de parfums, même avant que Moïse fût.

Mais il éduquait le peuple enclin à retourner aux idoles : il le disposait, par de nombreuses prestations, à persévérer dans le service de Dieu, il l'appelait par les choses secondaires aux principales, c'est-à-dire par les figuratives aux véritables, par les temporelles aux éternelles, par les charnelles aux spirituelles, par les terrestres aux célestes.

Qu'est-ce qui fut dit à Moïse : Tu feras tout selon le modèle de ce que tu as vu sur la montagne. En effet, pendant quarante jours, il apprit à retenir les paroles de Dieu, les caractères célestes, les images spirituelles, et les figures des choses à venir. Ainsi le dit Paul : Ils buvaient au rocher qui les suivait, car le rocher était le Christ. Puis ayant rappelé le contenu de la loi, il ajoute : Toutes ces choses leur arrivaient en figures ; elles ont été écrites pour être instruction, à nous en qui est arrivée la fin des siècles. Par ces figures, ils apprenaient à craindre Dieu et à persévérer dans son service. Ainsi la loi était pour eux un enseignement, en même temps qu'une prophétie de l'avenir. » (1)

(1) Saint Irénée de Lyon, Contre les hérésies

08 mars 2020

Parole, proximité et silence


Je découvre dans La Croix du 5 mars ce très bel extrait de la règle des diaconesses de Reuilly : « [La Parole] t'est offerte et cependant te résiste. Elle est forte et cependant s'estompe, fragile sous l'afflux de tes mots. Elle est limpide et cependant cachée, elle se cherche comme à tâtons. Elle t'éclaire et cependant ne brille qu'au-devant de ton pas. Elle est tout près de toi et cependant son immensité occupe les siècles. Cherche, scrute, patiente, demande. Ne te laisse pas rebuter car c'est Dieu lui-même qui veut t'apprendre Dieu. Aime assez l'Écriture pour qu'elle te délivre ses secrets. Ses accents sont toujours nouveaux. Imprègne-toi d'elle, fais-en ton étude, écris-la, raconte-la… Mais si t'enflammait une seule parole, fais silence et ne désire rien d'autre : le Seigneur t'a parlé comme l'ami parle à son ami. »

On retrouve ici une belle composition spirituelle qui fait entrer en résonance plusieurs médiations comme le texte célèbre d'Augustin extrait des Confessions sur la proximité et distance de Dieu et ce beau texte teilhardien de La custode que je rêve de retrouver.

Belle contemplation.

07 mars 2020

Homélie du deuxième dimanche de carême - Année A - Pédagogie et transfiguration…

Pourquoi a-t-on besoin du carême ?

Cinq  verbes dans les textes d'aujourd’hui nous donne le chemin : quitter, monter, contempler, écouter agir...

Quitter
Dieu nous a fait des êtres libres.
« Le chemin qui s'ouvre devant [l'homme] est celui de la liberté ou de la servitude, du progrès ou de la régression, de la fraternité ou de la haine. En outre, l'homme découvre qu'il lui appartient de bien diriger les forces qu'il a mises en mouvement et qui peuvent l'écraser ou le servir. (...) En vérité, les déséquilibres dont souffre le monde actuel sont liés à un déséquilibre plus fondamental, qui a sa racine dans le cœur même de l'homme. C'est en l'homme lui-même, en effet, que de nombreux éléments se combattent. D'une part, comme créature, il lit l'expérience de ses multiples limites ; d'autre part, il se sent illimité dans ses désirs et appelé à une vie supérieure, sollicité par tant d'appels, il est sans cesse contraint de choisir entre eux et d'en abandonner quelques-uns. En outre, faible et pécheur, il accomplit souvent ce qu'il ne veut pas et n'accomplit point ce qu'il voudrait. C'est donc en lui-même qu'il souffre division, et c'est de là que naissent au sein de la société des discordes si nombreuses et si profondes » Gaudium et Spes
Nous avons abusé de cette liberté. Nous avons besoin de retrouver le chemin qui nous révèle notre saine dépendance au divin.
Nous avons besoin de comprendre et sentir Sa tendresse, de contempler Sa bonté.

Face à Israël perdu sur les voies du monde, Dieu se décide à ramener son peuple au désert, à le séduire ... comme Osée le fait symboliquement avec Gomer (Osée 2)

Mais ce détour au désert n'est pas chemin de mort. Il est pédagogie, une « plongée dans la mort » pour redécouvrir la vie : « il les rassasie du pain venu des cieux ; il ouvre le rocher : l'eau jaillit, un fleuve coule au désert. » Ps 104, 40-41

Quel est ce fleuve ?

C'est ce que nous révèle l’Évangile de ce dimanche.
Il faut avoir accepté de quitter, aux côtés d'Abraham, son « pays » (Gn 12), ce monde qui nous enferme dans sa routine et ses nœuds.
Il faut, spirituellement, monter, faire l'ascension dans l'effort, aux côtés de Pierre, Jacques et Jean, malgré la fatigue et la soif, pour découvrir que la lumière est au bout du chemin. Le Fils est ce buisson ardent révélé trois fois à Moïse (cf. Exode 3, Exode 34 - aux termes de 40 ans de désert et Mat 17). Il est le souffle ténu senti par Élie  après 40 jours de désert (1 Rois 19). Il est chemin de vie et fleuve éternel...

L'Évangile de Matthieu reprend les codes des Théophanies (1) de l’Ancien Testament pour insister sur cette révélation de Dieu. 

C'est au bout de la route que la lumière déchire le brouillard. Si nous croyons, la mort n'a plus d'importance. Oublions un instant la peur et la panique qui occupe le monde. A ses trois amis, Jésus donne d'entrevoir la lumière. Alors quittons ce qui nous retient au monde, partons au désert malgré cette aridité apparente.

« Dieu nous a sauvés, il nous a appelés à une vocation sainte, non pas à cause de nos propres actes, mais à cause de son projet à lui et de sa grâce. Cette grâce nous avait été donnée dans le Christ Jésus avant tous les siècles, et maintenant elle est devenue visible, car notre Sauveur, le Christ Jésus, s'est manifesté : il a détruit la mort,
et il a fait resplendir la vie et l'immortalité
par l'annonce de l'Évangile ».
2 Tim 9, 10

Il a fait resplendir la vie. Au cœur de notre carême tournons nos cœur vers la lumière de l'eucharistie, laissons Jesus briser nos cœurs de pierre...

Contemplons la lumière, non pour s’y arrêter comme le suggère Pierre, mais pour agir...
Les théophanies n’ont pour fonction que de nous mettre en chemin. « Si les théophanies sont colorés et impressionnante surtout dans les songes, les images restent fonction de ce qui est le plus important : des paroles de la promesse, et c’est pour cette promesse »(2) qu’elles se destinent.

Ici, la révélation faite aux disciples est destinée à préparer à la promesse finale : Dieu est plus fort que la mort ». C’est le kérygme qui est visé, notre foi en la résurrection.


(1) Sur ce thème cf. mes travaux de recherche et notamment L’amphore et le fleuve
(2) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et La Croix, 3, Théologie, Ancienne Alliance, Paris, Aubier, 1974 p 171
Illustration : Moïse frappant le rocher. Trésor des églises d’Eure et Loir

06 mars 2020

Au fil de Jean 13 – lavement des pieds – plus qu’un sacrement - pédagogie 20

« L'Église a fait de l'eucharistie le sommet des sacrements dont elle vit. Pourquoi le lavement des pieds n'est-il pas devenu à son tour un sacrement de l'Église ? Jésus y a posé le geste, a donné la parole et indiqué le devoir de le répéter. Ce cas est infiniment plus clair que ceux de plusieurs autres sacrements. Après quelques hésitations dans la tradition, la répétition liturgique s'est bornée au geste, devenu formel, accompli par l'évêque ou le prêtre le Jeudi saint. La réponse à cette question est dans la nature du geste lui-même : l'eucharistie est un symbole vrai du sacrifice du Christ. Ici nous sommes pas dans le symbole, mais dans la chose elle-même. Jésus ne demande pas de célébrer mais de réaliser tous les jours, comme il l'a fait lui-même [tout au long de sa vie], le service fraternel. Ce geste accompli le commandement de l'amour que Jésus ne cessera de redire aux siens (cf. Jn 14-17). (...). Ce geste est plus qu'un sacrement : il révèle Jésus (...). Et nous donne en même temps l'exemple et la tâche de servir tous les jours nos frères. Comme la croix, le lavement des pieds est la matrice de tous nos sacrements. Dans cette scène volontairement humble Jésus se révèle tout entier »(1)

On a là le sommet de la pédagogie de Jésus : nous conduire presque sans mots et avant le grand silence de la croix à l'essentiel. Et cette dynamique sacramentelle (2) est plus large que ce l'Église cristallise dans les sacrements : elle devient l'axe même de notre vie, de l'amour...

Jeune diacre je regrettais de ne pas avoir à agir le jeudi saint... L'enjeu n'est pas là, comme je le découvre en lisant Sesboué : le jeudi saint n'est qu'un rappel. La tâche du diacre est un perpétuel lavement des pieds...

(1) Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p. 335
(2) cf. mon essai éponyme

Au fil de Marc 6, Pédagogie du Christ - 19


« La vraie multiplication des pains, celle qui se poursuit par toute la terre, c'est l'eucharistie, nourriture pour la vie éternelle. La même scène [de Marc 6] est racontée par l'évangile de Jean [6] avec plus de détails encore. Marc disait que la foule s'était assis sur l'herbe verte ; Jean précise qu'il y avait beaucoup d'herbe à cet endroit. Cette même foule poursuit alors Jésus qui leur transmet le grand enseignement sur l'eucharistie : il fait passer du désir de rassasier sa faim à celui du pain de la vie éternelle (...) pain de son corps qu'il donnera à manger au risque de scandaliser ses disciples qui ne comprennent pas comment il leur faudra manger sa chair et boire son sang. Ce signe des pains est une propédeutique patiente [on pourrait dire pédagogie] pour éduquer la foule au mystère du pain de la vie éternelle. (1)

Certains exégètes peuvent souligner que la lecture de Jean est post-pascale. Il n'empêche qu'elle s'inscrit dans cette pédagogie divine que nous essayons de thématiser.

La multiplication est en soi une parabole extraordinaire de ce don d'amour fait par le Christ et à travers le Fils le Père dans cette danse trinitaire qui se perpétue.

(1) Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p. 333

29 février 2020

Pédagogie divine 18 - Hans Urs von Balthasar

Hans Urs von Balthasar nous introduit à sa manière à un croisement théologique entre plusieurs mouvements de compréhension (1). Je vais tenter de traduire avec mes mots son long développement et, par nature, sa contemplation de cette pédagogie divine que je cherche à dévoiler.

  1. Il y a d'abord la contemplation du grand Donateur, de ce Dieu qui est source de tout don et à qui tout appartient sans pour autant, comme le dira plus tard Jean-Luc Marion, être celui qui réclame - mais au contraire s'efface.
  2. Il y a ensuite ce Dieu qui nous convie à découvrir que notre repos est en lui, que l'amour n'est autre que de se réfugier dans ses bras miséricordieux : « en toi est la source de la vie » Ps 36,9
  3. A cet amour l'homme est appelé à répondre dans une alliance qui ne lui laisse pas de repos : « c'est de tout son cœur et de toute son âme » (cf. notamment Dt 18) que l'on doit répondre.
  4. Et pourtant nos échecs laisse percevoir la distance entre cette lente révélation de la gloire qui tranche avec la « nudité » de l'homme. Face à cette gloire, presque inaccessible, apparaît la nécessité d'un médiateur, serviteur souffrant qui, à l'image de Moïse, conduit à la terre promise sans pouvoir y accéder (Nb 20, 12).
Tout cela est, à sa manière, pédagogie, car Dieu s'y révèle doucement comme ce Dieu qui prépare à la révélation finale, dans ce sublime dévoilement trinitaire de l'incarnation, de la Croix et de la résurrection tout en gardant pour nous un sens, une immédiateté presque palpable tant le don de Dieu, sa révélation en nous, l'humilité et le besoin de médiation reste constitutif de notre « christianité ».

Il en vient une réflexion qui réhabilite à sa manière la figure du prêtre comme médiateur lui aussi de quelque chose.
En théorie il est appelé à personnifier cet entre deux. La difficulté est que le prêtre reste homme, fragile, blessé et qu'en dépit de sa vocation à la « ressemblance » il reste souvent pâle image de celui qu'il représente.

L'actualité récente est à ce titre une leçon d'humilité...

(1) Hans Urs von Balthasar, La Gloire et La Croix, 3, Théologie, Ancienne Alliance, Paris, Aubier, 1974 p. 155

Homélie du 1er Dimanche de Carême - Gn 2-3, Ps 50, Rom 5, Mat 4

Projet 3

Deux questions ce matin, à l'occasion de ce premier dimanche de Carême 
Qu'est-ce qui m'attache au mal ?
Qu'est-ce qui m'en libère ?
  1. Qu'est-ce qui m'attache au mal ?
La première lecture (Gn2 et 3) n'est pas à prendre comme une vision historique des choses mais bien comme une constatation très intérieure de nos désirs de puissance sur l'autre, sur les biens de l'autre, sur nous-mêmes contre Dieu à qui nous refusons la première place, par orgueil et par aveuglement...

Le tentateur s'installe chez nous dès que nous entrons dans cet engrenage...
Notre liberté, notre clair vision est troublée, obscurcie par ces adhérences, ces routines qui nous conduisent progressivement à perdre la vraie liberté : celle de dire non à ce mal qui nous envahit...

L'illusion est de croire que nous échappons à cela. Le mal s'installe parfois dans des fausses pistes qui ont l'apparence du bien...

Matthieu nous dévoile la même chose dans le discours subtile du tentateur à Jésus. « Ordonne que ces pierres deviennent des pains. »
 Jésus peut-il se servir de sa toute-puissance pour convertir ? Non ?
« Il est écrit : L'homme ne vit pas seulement de pain,
mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.
 »
Le Fils nous ramène au Père...

« Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas. »
Jésus peut-il sombrer dans l'orgueil ? Non..! :
« Tu ne mettras pas à l'épreuve le Seigneur ton Dieu. »
Jésus veut-il le pouvoir sur la terre ? Non !
« C'est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras »

A la triple tentation qui résume toutes les autres, « l'avoir, le valoir et le pouvoir » le Christ nous conduit à une seule réponse : Dieu est premier. S’il n’est pas premier c’est que nous avons pris un mauvais chemin.
Méditons cela dans nos cœurs.

Nous en venons à ma deuxième question.
Qu'est-ce qui me libère de cette adhérence au mal ?

Paul nous donne sa réponse : Jésus Christ 
Autant notre faute est bien commune, autant le salut est unique. Notre faute est fausse liberté. Le salut est plus grand. Dieu nous libère.
Alors, prenons le temps de la distance, contemplons les dons de Dieu, méditons sur ses pas :
  1. Contre nos désirs « d'avoir » Jésus nous introduit à la générosité 
  2. Contre le valoir Jésus nous conduit à l'humilité 
  3. Contre nos désirs de pouvoir, Jésus nous introduit à  la prise de conscience de nos fragilités...
Le carême est en quelque sorte une station météo pour nous :
Quel est notre degré d’humilité ?
Quelle est la force du vent (pouvoir) ?
Quel est notre température d’avarice.. ?

Prenons alors le temps de méditer le psaume 50
« Oui, je connais mon péché,
ma faute est toujours devant moi.
Contre toi, et toi seul, j'ai péché,
ce qui est mal à tes yeux, je l'ai fait.
Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu,
renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit.
Ne me chasse pas loin de ta face,
ne me reprends pas ton esprit saint.
Rends-moi la joie d'être sauvé ;
que l'esprit généreux me soutienne.
Seigneur, ouvre mes lèvres,
et ma bouche annoncera ta louange. » 
Le psaume 50 peut nous conduire pendant ce temps de carême.

Entrons dans ce chemin de purification, ce chemin de désert 
Et n’oublions pas qu’un prêtre nous attend pour recevoir notre confession, les bras grands ouverts au nom du Père.




28 février 2020

Pédagogie du Christ - 17

En support au thème de mon livre en préparation, je découvre chez Sesboué la même idée (je n'ai rien inventé) qui nous décrit dans un long chapitre 12 la pédagogie du Christ face au pécheurs. Après l'évocation de Zachée je retiendrais l'épisode chez Simon le pharisien (Mc 14, Lc 7,36sq, Jn 12) où une femme pécheresse vient laver les pieds de Jésus - un geste qui pourrait avoir suscité l'épisode du lavement des pieds ? Plutôt qu'un enseignement moralisateur c'est par une parabole que Jésus travaille le cœur de Simon. «  la pédagogie de [Jésus passe par] une parole qui témoigne de sa même tendresse que vit à vis de la femme »(1)

Le terme de tendresse est bien trouvé. C'est l'amour de Dieu pour l'homme qui se manifeste là et va trouver son apogée dans le lavement des pieds et dans la croix. Suivre cela c'est percevoir tout le chemin et la pédagogie divine qui se manifeste depuis la genèse jusqu'à nous.

(1) Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p. 317

27 février 2020

Homélie de baptême - 27 - à partir d’Ezechiel 47


Qui suis-je devant l'amour d'un homme et d'une femme qui viennent présenter à Dieu le fruit de leur amour ?

Les textes d'aujourd'hui et tout particulièrement la première lecture nous invitent à leur manière à contempler cela.
L'amour qui vous a réuni C et L est grand. Il vous dépasse.

Il est comme ce fleuve qui jaillit du Temple de Dieu dont nous parle la première lecture que vous avez choisie (Ez 47). Pour l'instant il semble fragile, comme cet enfant que vous présentez à Dieu.

Et pourtant vous pressentez que cette petite Alice peut vous surprendre, par ses sourires d'abord, sa tendresse, et plus tard par sa capacité à aimer.

Il vous reste à soigner cette croissance, la conduire, la rendre à son tour amour.

Le baptême s'inscrit dans cette dynamique. Ce n'est pas un simple passage, c'est un engagement de tout faire de votre côté pour que ce potentiel d'amour qui repose en elle échappe à toutes les tentations, à toutes les adhérences et toutes les addictions.

Alice va devoir choisir entre la vie pour aimer et la mort qui résulte d'un enfermement sur soi. Choisir la vie et non la mort auquel nous conduit toute forme de servitude. 

Alice est don de Dieu. N'oubliez pas cela. Prenez le temps, à votre manière, de l'introduire à cette contemplation de ce qu'est l'amour, du pourquoi de l'amour...

Alice va aujourd'hui être baptisée selon cette dynamique particulière du Christ. En la plongeant dans l'eau, elle va symboliquement mourir à ce qui l'empêche d'aimer pour vivre dans l'amour. Et vous parents, parrain et marraine en renonçant de même au mal, tout à l'heure vous allez signifier que pour elle vous choisissez l'amour plus que ce qui vous empêche d'aimer. Ce choix est un début, le début d'une conversion intérieure. Vous allez être les pierres vivantes de cette transformation d'Alice en fleuve d'amour. Vous allez être porteur de cette flamme qui va faire d'elle un feu de joie pour le monde...

Bien sûr ce chemin n'est pas simple. Le chemin du Christ l'a conduit à la croix. C'est pourquoi elle aura besoin de vous tous ici rassemblés, et notamment de vous parents parrain et marraine pour avancer. Nous allons exprimer cela, dans le rite qui va suivre...

26 février 2020

Mercredi des cendres - Au fil de Matthieu 6


« Ce que vous faites pour devenir des justes, évitez de l'accomplir devant les hommes pour vous faire remarquer. Sinon, il n'y a pas de récompense pour vous auprès de votre Père qui est aux cieux.
Ainsi, quand tu fais l'aumône, ne fais pas sonner la trompette devant toi, comme les hypocrites qui se donnent en spectacle dans les synagogues et dans les rues, pour obtenir la gloire qui vient des hommes. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont reçu leur récompense.
Mais toi, quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite,
afin que ton aumône reste dans le secret ; ton Père qui voit dans le secret te le rendra.
Et quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites : ils aiment à se tenir debout dans les synagogues et aux carrefours pour bien se montrer aux hommes quand ils prient. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont reçu leur récompense.
Mais toi, quand tu pries, retire-toi dans ta pièce la plus retirée, ferme la porte, et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père qui voit dans le secret te le rendra.
Et quand vous jeûnez, ne prenez pas un air abattu, comme les hypocrites : ils prennent une mine défaite pour bien montrer aux hommes qu'ils jeûnent. Amen, je vous le déclare : ceux-là ont reçu leur récompense.
Mais toi, quand tu jeûnes, parfume-toi la tête et lave-toi le visage ;
ainsi, ton jeûne ne sera pas connu des hommes, mais seulement de ton Père qui est présent au plus secret ; ton Père qui voit au plus secret te le rendra. » Mat 6


« Sois fort, sois fidèle, Israël,
Dieu te mène au désert ;
C'est lui dont le bras souverain
Ouvrit dans la mer
Un chemin sous tes pas. »(1)

« Le jeûne qui me plaît, n'est-ce pas ceci : faire tomber les chaînes injustes, délier les attaches du joug, rendre la liberté aux opprimés, briser tous les jougs ?
N'est-ce pas partager ton pain avec celui qui a faim, accueillir chez toi les pauvres sans abri, couvrir celui que tu verras sans vêtement, ne pas te dérober à ton semblable ?
Alors ta lumière jaillira comme l'aurore, et tes forces reviendront vite. Devant toi marchera ta justice, et la gloire du Seigneur fermera la marche.
Alors, si tu appelles, le Seigneur répondra ; si tu cries, il dira : « Me voici. » Si tu fais disparaître de chez toi le joug, le geste accusateur, la parole malfaisante,
si tu donnes à celui qui a faim ce que toi, tu désires, et si tu combles les désirs du malheureux, ta lumière se lèvera dans les ténèbres et ton obscurité sera lumière de midi.
Le Seigneur sera toujours ton guide. En plein désert, il comblera tes désirs et te rendra vigueur. Tu seras comme un jardin bien irrigué, comme une source où les eaux ne manquent jamais.
Tu rebâtiras les ruines anciennes, tu restaureras les fondations séculaires. On t'appellera : « Celui qui répare les brèches », « Celui qui remet en service les chemins » (Isaïe 58, 6-12) AELF (1)

Nous entrons en carême : Quarante jours pour grandir dans l'amour de Dieu et de notre prochain.

Écoutons saint Grégoire : « Nous entamons aujourd'hui les saints quarante jours du carême, et il nous faut examiner attentivement pourquoi cette abstinence est observée pendant quarante jours. Moïse, pour recevoir la Loi une seconde fois, a jeûné quarante jours (Ex 34,28). Élie, dans le désert, s'est abstenu de manger quarante jours (1R 19,8). Le Créateur des hommes lui-même, venant parmi les hommes, n'a pas pris pas la moindre nourriture pendant quarante jours (Mt 4,2). Efforçons-nous, nous aussi, autant que cela nous est possible, de refréner notre corps par l'abstinence en ce temps annuel des saints quarante jours (...), afin de devenir, selon le mot de Paul, « une hostie vivante » (Rm 12,1). (...) Mais que personne ne s'imagine que seule cette abstinence nous suffise. Le Seigneur dit par la bouche du prophète : « Le jeûne que je préfère ne consiste-t-il pas plutôt en ceci ? Partager ton pain avec l'affamé, recevoir chez toi les pauvres et les vagabonds, habiller celui que tu vois sans vêtement, et ne pas mépriser ton semblable » (Is 58,6-7). Voilà le jeûne que Dieu approuve (...) : un jeûne réalisé dans l'amour du prochain et imprégné de bonté. Prodigue donc aux autres ce que tu retires à toi-même; ainsi, ta pénitence corporelle soulagera le bien-être corporel de ton prochain qui est dans le besoin. » (2)

Il y a là un chemin de conversion à accomplir, non pour une abstinence exceptionnelle mais pour convertir notre façon d'agir de manière permanente en trouvant ce qui est véritablement essentiel, non pas notre petit confort personnel mais notre charité débordante : « celui qui n'a pas tout donné n'a rien donné » (3)

(1) office des lectures
(2) Saint Grégoire le Grand, Homélies sur les évangiles, n° 16, 5 (trad. par les moines du Barroux ; Le Barroux , Éd. Sainte-Madeleine ; diff. Téqui, 2000; rev.), source : l'Évangile au Quotidien
(3) attribué au Père Ceyrac

24 février 2020

Pédagogie divine 16

«Tout l'organisme de la révélation, de l'Ancien comme du Nouveau Testament pivote autour de l'idée de salut. (...) [Et la question : ] « Qui doit être le Christ pour qu'il ait pu nous sauver, comme cela nous a été annoncé ? [est le centre]. Tout dans la Bible, et tout d'abord la personne du Christ, est ordonné à notre salut, c'est-à-dire à notre bonheur total et définitif (...) la Bible est un immense « pour nous », organisé par Dieu » (1)

C'est dans ce sens que la pédagogie de Dieu vers l'homme se résume à une invitation à Sa Danse (cf. plus haut) et que la déchirure du voile (cf. Mc 15, 38) révèle l'ensemble du mystère : Christ est mort pour notre salut et sa résurrection est le prologue de notre bonheur à venir in Christo.

« Notre Dieu est un Dieu qui s’intéresse à l’homme, qui se fait proche de l’homme et pour qui l’homme existe en vérité »(2)

« L’abaissement du Christ venant chez nous est une élévation de notre dignité et la révélation de notre vocation à vivre en amis de Dieu (...) Le Christ respecte notre condition humaine en la partageant en tout de sa naissance à sa mort. D’un même mouvement il nous révèle cette ressemblance originelle et il l’a restauré. Tout son comportement est devenu un agir d’homme, mais d’un homme parfait accomplissant totalement le vœu créateur de son Père. Il établit entre son Père et nous une solidarité et une communion nouvelle. Il nous a montré comment l’amour de Dieu pour nous pouvait s’exprimer avec toute la tendresse d’un homme » (3)

« En souffrant pour nous , il ne nous a pas seulement donné l’exemple, afin que nous marchions sur ses pas, mais il a ouvert une route nouvelle ; si nous la suivons, la vie et la mort deviennent saintes et acquièrent un sens nouveau » (GS 22,3)

(1) Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p. 285
(2) p. 286
(3) p. 296

23 février 2020

Divinisation ou invitation à la danse - Bernard Sesboué

 Le terme de divinisation surprend, même si je l'avais déjà rencontré chez Varillon dans Joie de croire, joie de vivre qui l'évoque à partir de l'eucharistie : « Dieu vient diviniser ce que nous humanisons ».

Pour Sesboué le concept rejoint l'idée que nous sommes « enfants de Dieu » (Rom 8, 16 et 1 Jn 3,1), mais aussi cette grande image nuptiale déployée dans Eph 5. Pour lui, il « ressort de ces textes que nous sommes invités à entrer dans l'intimité affectueuse de la famille divine dont nos liens d'amour les plus forts sont une image. Le paradoxe veut que cette entrée dans l'amour même de Dieu ne nous arrache en rien à notre humanité. Parce que nous sommes ainsi faits de par notre création, notre divinisation est le accomplissement dernier de notre humanisation » (1)

Notre salut se destine à cette divinisation. Il rejoint là peut-être ce que disait à sa manière Fra Angelico par sa danse des anges dans son tableau du jugement dernier, une image qui entre en résonance avec ce que je développe dans « danse trinitaire »(2), cette idée que Dieu, dans sa bonté, rêve de nous voir participer à sa danse.



(1) Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p. 284
(2) cf. notamment l'Amphore et le fleuve.

Mal originé ou prix de la liberté - Bernard Sesboué

Mal originé ou prix de la liberté - Bernard Sesboué

Je continue ma lecture. Après une longue analyse sur les différentes interprétations du « péché originel » qui nous conduit de Pélage et Augustin au concile de Trente et ses premiers canons (1), l'auteur analyse la réponse des philosophes des Temps Modernes. On quitte la notion étroite d'un mal transmis par Adam vers une interpellation du mal comme « passage de la nature à la liberté ». Pour Kant, la source du mal se « trouve dans un choix libre » fait par tout homme. Hegel évoque quant à lui un mal qui révèle le bien en creux, « les deux connaissances étant inséparables pour [que l'homme devienne] un être moral (...) [qu'il parvienne à un] processus de maturation (...) [au] développement de la conscience de soi (...) Félix culpa (...) [cette chute] nécessaire pour un plus grand bien. (...) Ce qui chez Kant était de l'ordre de la liberté devient chez Hegel le devenir nécessaire de la conscience » (2).

L'enjeu n'est pas de chercher un coupable ailleurs, mais de se rendre compte de l'enchaînement qui nous rend esclave et de trouver une manière d'accueillir cette grâce qui nous en libère.

Tout cela n'est pas éloigné de cette pédagogie divine que nous cherchons à mettre en lumière.
La liberté donnée à Adam n'est pas incompatible avec la sollicitude de Dieu et la question intérieure posée à l'homme : « où es-tu ? »(3)

Mais Sesboué continue, à l'aune des travaux de Rahner, vers une approche qui n'est pas loin de ce que j'appelle la constatation de nos « adhérences » au mal qu'il définit comme un héritage que l'on ne peut trop vite appeler originel mais qui est constitutif de notre état, de notre liberté et de notre chemin de sanctification. C'est à partir de l'homme actuel que la constatation de nos faiblesses permettent d'appréhender l'origine du mal et non une prétendue connaissance historique qui nous conditionnerait au mal, au serf-arbitre ou à tout autre fatalité. Et c'est dans cette condition que Christ a sa place. Si nous ouvrons nos cœurs à ce Dieu sauveur.

(1) Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p.199 à 245.
(2) ibid. p. 246-8
(3) cf. mon livre éponyme

21 février 2020

Fais de la place pour l’amour - Augustin - Amour en toi 55


Je suis d'autant plus sensible à cette exhortation qu'elle est centrée sur une mention de Philippiens 3, choisi pour mon mariage il y a 33 ans...
un clin Dieu... ;-)

« Quelle est la promesse qui nous a été faite ? Nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu'il est. La parole s'est exprimée comme elle a pu ; le reste, c'est au cœur de le comprendre. Alors que saint Jean lui-même s'exprime, comme il peut par rapport à Celui qui est, que pourrions-nous dire, nous qui sommes si loin d'égaler ses mérites ?

Revenons donc à cette onction du Christ, revenons à cette onction qui nous enseigne intérieurement ce que nous ne pouvons pas exprimer ; et puisque vous ne pouvez pas voir maintenant, que votre activité se contente de désirer. Toute la vie du vrai chrétien est un saint désir. Sans doute, ce que tu désires, tu ne le vois pas encore : mais en le désirant tu deviens capable d'être comblé lorsque viendra ce que tu dois voir.

Supposons que tu veuilles remplir une sorte de poche et que tu saches les grandes dimensions de ce qu'on va te donner, tu élargis cette poche, que ce soit un sac, une outre, ou n'importe quoi de ce genre. Tu sais l'importance de ce que tu vas y mettre, et tu vois que la poche est trop resserrée : en l'élargissant, tu augmentes sa capacité. C'est ainsi que Dieu, en faisant attendre, élargit le désir ; en faisant désirer, il élargit l'âme ; en l'élargissant, il augmente sa capacité de recevoir.

Nous devons donc désirer, mes frères, parce que nous allons être comblés. Voyez saint Paul, élargissant son désir pour être capable de recevoir ce qui doit venir. Il dit en effet : « Certes, je ne suis pas encore arrivé, je ne suis pas encore parfait. ~ Frères, je ne pense pas avoir déjà saisi le Christ. »

Que fais-tu alors en cette vie, si tu ne l'as pas encore saisi ? — « Une seule chose compte : Oubliant ce qui est en arrière et tendu vers l'avant, je suis mon élan vers le triomphe auquel je suis appelé de là-haut »[Ph 3]. Il dit qu'il est tendu et qu'il suit son élan. Il se sentait incapable de saisir ce que l'œil n'a pas vu, ce que l'oreille n'a pas entendu, ce que le cœur de l'homme n'a pu concevoir.

Voilà notre vie : nous exercer en désirant. Le saint désir nous exerce d'autant plus que nous avons détaché nos désirs de l'amour du monde. Nous l'avons déjà dit à l'occasion : vide ce qui doit être rempli. Ce qui doit être rempli par le bien, il faut en vider le mal.

Suppose que Dieu veut te remplir de miel : si tu es rempli de vinaigre, où mettras-tu ce miel ? Il faut répandre le contenu du vase il faut nettoyer le vase lui-même il faut le nettoyer à force de travailler, à force de frotter, pour qu'il soit capable de recevoir autre chose.

Parlons de miel, d'or ou de vin : nous pouvons désigner de n'importe quel nom ce qui est indicible, mais son vrai nom est Dieu. Et quand nous disons « Dieu », que disons nous ? Ce mot désigne tout ce que nous attendons. Tout ce que nous pouvons dire est en dessous de la réalité ; élargissons-nous, en nous portant vers lui, afin qu'il nous comble, quand il viendra. Nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu'il est. » (1)

Sur même sujet on trouvera les mêmes accents dans la vie de Moise de Grégoire de Nysse (2)

(1) Saint Augustin, sermon sur la première lettre de Jean
(2) cf. La course infinie

Au fil de Marc 8, 29-33 - suivre malgré tout

« Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Pierre, prenant la parole, lui dit : « Tu es le Christ. »
Alors, il leur défendit vivement de parler de lui à personne.
Il commença à leur enseigner qu'il fallait que le Fils de l'homme souffre beaucoup, qu'il soit rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu'il soit tué, et que, trois jours après, il ressuscite.
Jésus disait cette parole ouvertement. Pierre, le prenant à part, se mit à lui faire de vifs reproches.
Mais Jésus se retourna et, voyant ses disciples, il interpella vivement Pierre : « Passe derrière moi, Satan ! Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. » (Marc 8, 29-33l

La tentation de Pierre mets en lumière nos propres fragilités. Comme le souligne en substance saint Cyrille, nous ne devons pas avoir honte de la croix du Sauveur, mais plutôt se laisser traverser par sa signification profonde : « Le langage de la croix est scandale pour les juifs, folie pour les païens », mais pour nous elle est le salut. (...) elle est puissance de Dieu (1Co 1,18-24).(...) Ce n'est pas par contrainte qu'il a quitté la vie, ce n'est pas par force qu'il a été immolé, mais par sa propre volonté. Écoutez ce qu'il dit : « J'ai le pouvoir de donner ma vie, et le pouvoir de la recevoir à nouveau » (Jn 10,18). ~ Il est venu délibérément à sa Passion, (...) Il n'a pas eu honte de la croix, car il sauvait toute la terre. Ce n'était pas un pauvre homme qui souffrait, mais Dieu fait homme qui allait combattre pour obtenir le prix de la patience.
Ne te réjouis pas de la croix en temps de paix seulement ; garde la même foi en temps de persécution ; ne sois pas l'ami de Jésus seulement en temps de paix, (...) . Tu reçois maintenant le pardon de tes péchés et les dons spirituels prodigués par ton roi ; lorsque la guerre éclatera, combats vaillamment pour ton roi. Jésus a été crucifié pour toi, lui qui était sans péché.Ce n'est pas toi qui lui as fait cette grâce, car tu l'as reçue le premier. Mais tu rends grâce à celui qui a payé ta dette en étant crucifié pour toi sur le Golgotha(1)


(1) Saint Cyrille de Jérusalem, Catéchèse baptismale n° 13, 3.6.23 (Livre des jours – Office romain des lectures ; Le Cerf – Desclée de Brouwer – Desclée – Mame ; © AELF Paris 1976 ; 4e jeudi TO, 578-579), source : l'Évangile au Quotidien

Au fil de Jean 14, 6 « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie »


Pour le père Ignace de La Potterie, théologien jésuite mort en 2003, parmi les occurrences du mot « vérité » dans l'Évangile de Jean, celle « où Jésus déclare qu'il est lui-même "la Vérité", est incontestablement la plus neuve, la plus hardie et la plus profonde ». Selon le jésuite, ce mot est à comprendre chez saint Jean comme synonyme de « révélation ». Ainsi, analysait le prêtre, en affirmant être lui-même la Vérité, le Christ est « non seulement le révélateur du Père aux hommes, mais il est lui-même en plénitude cette révélation ; il est, dans sa personne, la révélation par excellence, totale et définitive »« Nous touchons ici du doigt la nouveauté unique de la révélation chrétienne : le chemin de la vérité doit désormais se chercher dans la personne même de Jésus », s'enthousiasmait le père de La Potterie. De plus, comme le Christ « vit de la vie du Père, mais appartient en même temps à notre monde humain », poursuit le théologien, Jésus « nous rend participants à la vie du Père » dès ce chemin sur terre.
 (1) « Je suis la Voie, la vérité et la Vie », Nouvelle revue théologique 88-9 (1966), p. 907-942, cité dans La Croix, vendredi 7 février 2020

Pépite - Au fil de Genèse 3 - Je suis caché !

« Pour la première fois dans ma lecture [de Genèse 3] , j'ai entendu Adam dire à Dieu : « Je suis caché ! » Adam vient de manger du fruit défendu, il prend conscience de sa nudité et se cache. À Dieu qui demande : « Où es-tu ? », il répond : « Je suis caché ! » Je l'entends dire, comme un enfant : « Dieu, cherche-moi, montre-moi combien tu tiens à moi. Même si j'ai fait une bêtise, je t'en prie, trouve-moi ! » Si Adam ne souhaite pas que Dieu le retrouve, il lui suffit de ne pas répondre. Or Adam répond à l'appel de Dieu. En mangeant du fruit défendu, il affiche son indépendance. En répondant à Dieu, il veut continuer à être en relation avec Dieu, même après avoir bravé l'interdit. Cet appel à être trouvé m'a bouleversée et fait penser à un enfant qui se cache derrière un rideau et crie à l'adulte : « Je suis caché ! », en espérant vivement que celui-ci va le chercher, et le trouver. Mais pas trop vite, car l'enfant aime sentir le soin que prend l'adulte à fouiller la maison avant de le trouver. 
(...)  Il y a dans la Bible quelqu'un qui se cache et qui est cherché par Dieu.
 C'est sa façon de demander à Dieu : « M'aimes-tu ? » Aujourd'hui, nous continuons à nous cacher, à demander à Dieu de nous chercher et de nous donner des preuves d'amour. Depuis Adam, nos besoins sont les mêmes, c'est la façon de les exprimer qui varie. (1)

J’abuse ici du droit de citation mais cet article fait trop écho à la thèse que je développe longuement dans Où es-tu ? et dans Lire l’Ancien Testament  tome 1


(1) Aurore de Neuville, La Croix, vendredi 7 février 2020)

19 février 2020

Sagesse et pédagogie divine 2


Dieu nous prépare un chemin de vie. Il a tracé dans l'histoire ce beau « tournant où tout au monde n'est que grâce. Dans le secret, il nous prépare ce qui pourra devenir le jour de gloire. Sa clarté filtre déjà et nous entrons dans son histoire »(1)

« La Sagesse a bâti sa maison, elle a taillé sept colonnes. (...) « Venez, mangez de mon pain, buvez le vin que j'ai préparé. (...) prenez le chemin de l'intelligence. » La sagesse commence avec la crainte du Seigneur, connaître le Dieu saint, voilà l'intelligence ».(2)

« l'Esprit invite (...) par la bouche de [ses] serviteurs (...) : Celui qui manque de sagesse est celui qui pense dans son cœur que Dieu n'existe pas. Qu'il rejette son athéisme, qu'il me rejoigne par la foi, qu'il sache que je suis le Créateur et le Seigneur de l'univers. (...) Venez manger mon pain et boire le vin que j'ai mélangé pour vous ! (...) Venez manger mon corps qui, comme du pain, vous nourrit pour la pratique de la vertu ; buvez mon sang qui, par la connaissance, vous réjouira comme du vin et vous enivrera pour vous diviniser. Car ce sang, d'une façon étonnante, je l'ai mélangé à la divinité, pour votre salut. »(3)



(1) Hymne de l'office des lectures du 19/2
(2) Proverbes 9, 1, 5, 6, 10
(3) Procope de Gaza, commentaire sur les Proverbes, source AELF, office des lectures du 19/2/20

18 février 2020

Sagesse et pédagogie divine


En ce temps d'hiver, prenons de la distance et laissons nous émerveiller par les dons de Dieu.
Contemplation inouïe que ce chapitre 8 des Proverbes que nous propose l'office des lectures du 18/2 :
« Le Seigneur m'a faite pour lui, principe de son action, première de ses œuvres, depuis toujours.
Avant les siècles j'ai été formée, dès le commencement, avant l'apparition de la terre.
Quand les abîmes n'existaient pas encore, je fus enfantée, quand n'étaient pas les sources jaillissantes.
Avant que les montagnes ne soient fixées, avant les collines, je fus enfantée, avant que le Seigneur n'ait fait la terre et l'espace, les éléments primitifs du monde.
Quand il établissait les cieux, j'étais là, quand il traçait l'horizon à la surface de l'abîme, qu'il amassait les nuages dans les hauteurs et maîtrisait les sources de l'abîme, quand il imposait à la mer ses limites, si bien que les eaux ne peuvent enfreindre son ordre, quand il établissait les fondements de la terre.
Et moi, je grandissais à ses côtés. Je faisais ses délices jour après jour, jouant devant lui à tout moment, jouant dans l'univers, sur sa terre, et trouvant mes délices avec les fils des hommes. » (Pr 8, 25-31)



Écoutons saint Athanase sur ce point :

La Sagesse personnelle de Dieu, son Fils unique, est créatrice et réalisatrice de toutes choses. En effet, dit le Psaume :Tu as tout fait avec sagesse, la terre est pleine de tes créatures. Afin que les créatures non seulement existent, mais existent bien, Dieu a décidé que sa propre Sagesse descendrait vers les créatures afin d'imprimer en toutes et en chacune une certaine empreinte et représentation de son image ; ainsi serait-il évident qu'elles ont été créées avec sagesse et qu'elles sont des œuvres dignes de Dieu.

De même, que notre verbe humain est l'image de ce Verbe qui est le Fils de Dieu, ainsi notre sagesse est, elle aussi, l'image de ce Verbe qui est la Sagesse en personne. Parce que nous possédons en elle la capacité de connaître et de penser, nous devenons capables d'accueillir la Sagesse créatrice, et par elle nous pouvons connaître son Père. Car celui qui a le Fils a aussi le Père, et encore : Celui qui m'accueille accueille celui qui m'a envoyé. Parce que l'empreinte de cette Sagesse existe en nous et en toutes ses œuvres, il est tout à fait juste que la Sagesse véritable et créatrice, appliquant à elle-même ce qui concerne son empreinte, dise : Le Seigneur m'a créée comme une de ses œuvres. ~

Puisque le monde, par le moyen de la sagesse, n'a pas reconnu Dieu dans la Sagesse de Dieu, c'est par la folie de la prédication que Dieu a jugé bon de sauver ceux qui croient. Désormais Dieu ne veut plus, comme dans les temps primitifs, être connu par l'image et l'ombre de la Sagesse : il a voulu que la véritable Sagesse en personne prenne chair, devienne homme, subisse la mort de la croix, afin qu'à l'avenir tous les croyants puissent être sauvés par la foi en cette Sagesse incarnée.

C'est donc elle qui est la Sagesse de Dieu. C'est elle qui, auparavant, par son image introduite dans les choses créées (et c'est en ce sens qu'on la disait créée), se faisait connaître et, par elle, faisait connaître le Père. Par la suite, elle-même, qui est le Verbe, est devenue chair, comme dit saint Jean ; après avoir détruit la mort et sauvé notre race, elle s'est manifestée plus clairement elle-même et, par elle-même, elle a manifesté son Père. Ce qui lui a fait dire : Donne-leur de te connaître, toi, le seul Dieu, le vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ.

Toute la terre a donc été remplie de sa connaissance. Car il y a une seule connaissance : du Père par le Fils, et du Fils à partir du Père. Le Père met sa joie en lui, et le Fils se réjouit de la même joie dans le Père, ainsi qu'il le dit : J'y trouvais ma joie, je me réjouissais jour après jour en sa présence. (1)

℟ Sur le visage du Christ
rayonne la gloire de Dieu.

La loi fut donnée par Moïse,
la grâce et la vérité
sont venues par Jésus Christ !

On notera en particulier cette phrase d'Athanase qui traduit ce que Karl Rahner appelle l'auto-communication de Dieu en nous et qui révèle ce que je contemple comme « l'Amour en toi » : «  l'empreinte de cette Sagesse existe en nous » dit-il.

Qu'est-ce que l'empreinte chez Athanase ? Est-ce ce que Bonaventure appelle la trace ? Est-ce ce qui fait de nous des pales images de Dieu, sur le chemin de la ressemblance, dont seule le Christ est la plénitude ?

Ce qui est bon en nous vient de Dieu. Cette lueur fragile mise en nous et qui nous conduit à aimer... C'est cela la lumière souvent mise sous le boisseau et qu'il nous faut relever et laisser transparaître.
Dieu a « voulu nous engendrer par sa parole de vérité pour faire de nous comme les prémices de toute créatures »  (Jacques 1, 8,

 (1) Saint Athanase d'Alexandrie, discours contre les Ariens, Le Christ, Sagesse du Père et office des lectures du 18/2/20 source AELF

17 février 2020

Job, Dieu et le scandale du mal - La Croix, jeudi 6 février 2020

Deux livres en résonances sur Le livre de Job, déroutant à bien des égards en écho à mes travaux sur ce thème (3)

Job est une « tentative de conciliation » de l'existence du mal et de Dieu."Pourquoi ? (...) Job, comme chacun d'entre nous en pareille circonstance, voudrait au moins comprendre », écrit la bibliste. (1) « Les hommes parlent et Dieu se tait ; ils parlent d'autant plus, d'ailleurs que Dieu se tait : S'ils se taisaient, peut-être Dieu pourrait-il parler ? » (...) quand Job, enfin peut se taire, apaisé, toute sérénité retrouvée… Il a bien fait d'attendre. »

Dieu « transfigure l'absurde » en décrivant un monde sublime où tout est « effervescence gratuite ». Aux pourquoi de l'homme, il n'y a pas d'autre réponse que la gratuité : Dieu est « Dieu pour rien »(2). Une découverte qui suffit pour apaiser les angoisses de Job et lui redonner goût à la vie.

(1) Marie-Noëlle Thabut Qu'est-ce que j'ai fait au Bon Dieu ? Job, la souffrance et nous, Artège, Poche, 2020, Cité par Dominique Greiner, Job, Dieu et le scandale du mal, La Croix, jeudi 6 février 2020

(2) Alain Houziaux, Job ou le problème du mal. Un éloge de l’absurde, Cerf , 2020, ibid. 
(3) où es-tu mon Dieu ? Amazon

14 février 2020

Esclave du mal - 2

La vraie punition du mal est de conduire au mal (1) d'entrer dans une forme d'aliénation et d'adhérence vers un toujours plus qui n'est que l'expression d'une constante insatisfaction. Le danger est de se complaire dans cette course, de d'auto-congratuler dans l'orgueil ou l'avarice qui enferme sur soi, dans cette adhérence qui constitue ce que l'Église appelle péché. Le mot est sur-utilisé et donc connoté, mais l'esclavage est bien là dans cette auto-complaisance.

La sexualité beaucoup utilisée par Augustin pour sa démonstration n'échappe pas à cet esclavage. Même en la masquant derrière la danse sponsale de deux êtres unis pour la vie et l'harmonie qui en sort, il faut reconnaître qu'une certaine animalité reste présente et nécessite toujours au moins discernement si ce n'est prudence. La théologie du corps est en quelque sorte une belle réhabilitation de l'amour conjugal, elle ne doit pas servir pour autant à justifier, comme je le vois parfois, même chez des prophètes du genre, à excuser tout. « L'amour prend patience. Il ne cherche pas son intérêt » nous rappelle Paul (1 Co 13).
L’enjeu est d’éduquer nos pulsions, de les transformer en dynamique de vie et d’amour, pour et au service du couple et de ses fruits. Comme le suggère Sesboué : « humaniser la pulsion sexuelle et faire de la dynamique des corps l’expression efficace (le sacrement en tant que signe et cause) d’un amour vraiment spirituel » (2)
Méfions nous de nous-mêmes et des excuses que l'on se donne. Je parle d'expérience. Nos esclavages ne sont pas apparents. Ils nous tiennent par de belles ruses...

(1) je paraphrase ici une réflexion de Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p. 204sq.
(2) ibid. p. 208

Querido Sacerdocio

En écoutant le débat sur RND, il semblerait que le pape François a eu raison de ne pas mêler la question du célibat des prêtres à l’Amazonie qui nécessitait une attention particulière.
Peux-t-on espérer que c’est reculer pour mieux sauter et que la question de l’ordination des hommes mariés voire même le diaconat ou à terme une certaine forme de sacerdoce féminin soit abordée plus tard ?

À suivre.

Querida Amazonia - pape François


Un texte d'une grande richesse à découvrir sous ce lien : http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/apost_exhortations/documents/papa-francesco_esortazione-ap_20200202_querida-amazonia.html
On y retrouve la spiritualité particulière du pape, sont attachement aux petits, à l'écologie au sens large, sa vision polyèdrique de l'Église (cf. le mot clé polyèdre dans ce blog) et sur une culture du dialogue.
Si son insistance sur le rôle du prêtre est déjà critiquée par ceux qui attendaient une disruption en faveur des diacres ou des hommes mariés, il faut peut-être méditer le chapitre sur l'inculturation de l'Eucharisrie et notamment le numéro 85 qui me semble caractéristique de l'ensemble de l'approche : « L'inculturation doit aussi se développer et se traduire dans une manière incarnée de mettre en œuvre l'organisation ecclésiale et la ministérialité. Si l'on inculture la spiritualité, si l'on inculture la sainteté, si l'on inculture même l'Évangile, comment ne pas penser à une inculturation de la manière dont les ministères ecclésiaux se structurent et se vivent ? La présence pastorale de l'Église en Amazonie est précaire, en partie à cause de l'immense extension territoriale, avec de nombreux lieux d'accès difficiles, une grande diversité culturelle, de sérieux problèmes sociaux, et avec l'option, propre à certains peuples, de s'isoler. Cela ne peut nous laisser indifférents et exige de l'Église une réponse spécifique et courageuse. »

Construisons cette réponse, non seulement pour l'Amazonie, mais pour toute l'Église qui a besoin que se poursuive l'élan de Gaudium et Spes et ce que j'appelle dans la lignée de Theobald la dynamique sacramentelle (1) qui ne se limite pas aux 7 sacrements mais fait entrer toute la communauté dans une marche salutaire et ecclésiale.

(1) cf. mon essai éponyme

Esclave du mal - Pédagogie 13

Notre participation au péché originel n'est pas la conséquence de la faute d'un homme hypothétique du nom d'Adam mais la constatation objective de notre enfermement collectif dans une logique pécamineuse dont l'Esprit seul peut nous défaire (1)

L'enjeu du Premier Testament est de nous immerger dans ce contexte non par l'immersion dans une histoire exacte mais par l'interprétation constante entre récit, révélation et relecture personnelle. Comme je ne cesserai de le répéter (2) à la suite d'Hamman le Premier Testament est notre histoire, il révèle sans cesse notre propre adhérence au péché.

(1) cf. à ce sujet le long développement de Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p. 183sq.
(2) cf. Pédagogie divine à paraître

12 février 2020

De l'esclavage à la liberté - Pédagogie divine - 8


Trêsor de cette office des lectures d'aujourd'hui qu,il faut déguster lentement à commencer par cet extrait de la lettre aux Galates qui complète bien l'état de mes travaux actuels de recherche sur la pédagogie divine (1) ; « 3.15 Frères, j'emploie ici un langage humain. Quand un homme a fait un testament en bonne et due forme, personne ne peut l'annuler ou lui ajouter des clauses.
3.16 Or, les promesses ont été faites à Abraham ainsi qu'à sa descendance ; l'Écriture ne dit pas « et à tes descendants », comme si c'était pour plusieurs, mais et à ta descendance, comme pour un seul, qui est le Christ.
3.17 Alors je dis ceci : le testament fait par Dieu en bonne et due forme n'est pas révoqué par la Loi intervenue quatre cent trente ans après, ce qui abolirait la promesse.
3.18 Car si l'héritage s'obtient par la Loi, ce n'est plus par une promesse. Or c'est par une promesse que Dieu accorda sa faveur à Abraham.
3.19 Alors pourquoi la Loi ? Elle a été ajoutée, pour que les transgressions soient rendues manifestes, jusqu'à la venue de la descendance à qui ont été faites les promesses, et elle a été établie par des anges par l'entremise d'un médiateur.
3.20 Ce médiateur en représente plus d'un, mais Dieu, lui, est un.
3.21 La Loi est-elle donc contre les promesses de Dieu ? Absolument pas. S'il nous avait été donné une loi capable de nous faire vivre, alors vraiment la Loi rendrait juste.
3.22 Mais l'Écriture a tout enfermé sous la domination du péché, afin que ce soit par la foi en Jésus Christ que la promesse s'accomplisse pour les croyants.
3.23 Avant que vienne la foi en Jésus Christ, nous étions des prisonniers, enfermés sous la domination de la Loi, jusqu'au temps où cette foi devait être révélée.
3.24 Ainsi, la Loi, comme un guide, nous a menés jusqu'au Christ pour que nous obtenions de la foi la justification.
3.25 Et maintenant que la foi est venue, nous ne sommes plus soumis à ce guide.
3.26 Car tous, dans le Christ Jésus, vous êtes fils de Dieu par la foi.
3.27 En effet, vous tous que le baptême a unis au Christ, vous avez revêtu le Christ ;
3.28 il n'y a plus ni juif ni grec, il n'y a plus ni esclave ni homme libre, il n'y a plus l'homme et la femme, car tous, vous ne faites plus qu'un dans le Christ Jésus.
3.29 Et si vous appartenez au Christ, vous êtes de la descendance d'Abraham : vous êtes héritiers selon la promesse.
4.01 Je m'explique. Tant que l'héritier est un petit enfant, il ne diffère en rien d'un esclave, alors qu'il est le maître de toute la maison ;
4.02 mais il est soumis aux gérants et aux intendants jusqu'à la date fixée par le père.
4.03 De même nous aussi, quand nous étions des petits enfants, nous étions en situation d'esclaves, soumis aux forces qui régissent le monde.
4.04 Mais lorsqu'est venue la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils, né d'une femme et soumis à la loi de Moïse,
4.05 afin de racheter ceux qui étaient soumis à la Loi et pour que nous soyons adoptés comme fils.
4.06 Et voici la preuve que vous êtes des fils : Dieu a envoyé l'Esprit de son Fils dans nos cœurs, et cet Esprit crie « Abba ! », c'est-à-dire : Père !
4.07 Ainsi tu n'es plus esclave, mais fils, et puisque tu es fils, tu es aussi héritier : c'est l'œuvre de Dieu. » (Ga 3, 15-29; 4, 1-7)

Ressuscités avec le Christ, cherchons les choses d'en haut. Vous qui êtes baptisés dans le Christ,
vous avez revêtu le Christ. Revêtez l'homme nouveau, créé selon Dieu, dans la justice et la sainteté de la vérité.
  
Ambroise, dans sa réponse aux questions que pose à Orontien sur le chapitre 8 de la lettre aux Romains, complète bien cette épitre : « D'après saint Paul, celui qui, par l'Esprit, fait mourir le comportement charnel, celui-là vivra. Ce n'est pas étonnant qu'il vive, puisqu'il devient fils de Dieu, ayant l'Esprit de Dieu. Il est fils de Dieu à tel point qu'il ne reçoit pas un esprit d'esclavage mais l'esprit des enfants d'adoption ; et à tel point que le Saint-Esprit de Dieu rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Ce témoignage est bien celui de l'Esprit Saint puisque c'est lui qui crie dans nos cœurs : Abba, Père, comme c'est écrit dans la lettre aux Galates. Mais ce qui témoigne hautement que nous sommes fils de Dieu, c'est que nous sommes héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ. Est héritier avec lui celui qui est glorifié avec lui ; et il est glorifié avec lui, celui qui, en souffrant pour lui, souffre avec lui.

Pour nous encourager à souffrir, saint Paul ajoute que tout ce que nous souffrons est peu de choses, sans proportion avec les biens à venir de cette grande récompense qui rétribuera nos labeurs : récompense qui se révélera en nous lorsque nous serons recréés à l'image de Dieu et que nous pourrons regarder sa gloire en face.

Pour mettre en valeur la grandeur de cette révélation à venir, l'Apôtre ajoute que la création elle-même attend cette révélation des fils de Dieu. Cette création est maintenant livrée malgré elle au pouvoir du néant ; mais elle est dans l'espérance. Car elle espère que le Christ l'aidera par sa grâce à se libérer de l'esclavage de la dégradation inévitable, et à recevoir la liberté glorieuse des fils de Dieu. Ainsi y aura-t-il une seule liberté, pour la création et pour les fils de Dieu, lorsque la gloire de ceux-ci se révélera. Mais maintenant, tant que cette révélation se fait désirer, toute la création gémit en attendant de partager la gloire de notre adoption et de notre rédemption. Elle enfante déjà cet esprit qui la sauve, et elle veut être délivrée de l'esclavage du néant. ~

Il est clair que les créatures qui gémissent en attendant l'adoption des fils ont en elles les premiers dons de l'Esprit. Cette adoption des fils, c'est la rédemption du corps tout entier, lorsque celui-ci, en qualité de fils adoptif de Dieu, verra en face ce bien éternel et divin. Il y a déjà adoption filiale dans l'Église du Seigneur lorsque l'Esprit s'écrie : Abba, Père, selon la lettre aux Galates. Mais cette adoption sera parfaite lorsque ceux qui seront admis à voir la face de Dieu ressusciteront tous dans l'immortalité, l'honneur et la gloire. Alors la condition humaine s'estimera vraiment rachetée. C'est pourquoi l'Apôtre ose dire : Nous avons été sauvés en espérance. L'espérance sauve en effet, comme la foi, dont il est dit : Ta foi t'a sauvé. » (2)

L'Esprit du Seigneur est liberté, parce que Christ nous a libérés pour crier Abba ! Père !
 
Dans ton amour inépuisable, Dieu éternel et tout-puissant, tu combles ceux qui t'implorent, bien au-delà de leurs mérites et de leurs désirs ; répands sur nous ta mésiricorde en délivrant notre conscience de ce qui l'inquiète et en donnant plus que nous n'osons demander.(3)

(1) livre à paraître
(2) Ambroise de Milan, Lettre à Orontien
(3) source : Office des lectures, mercredi de la 5eme semaine ordinaire, AELF

11 février 2020

Création et prophétie - 27

Quand Irénée trace avec prudence une nouvelle interprétation de la Genèse en disant que c'est « à la fois un récit du passé et une prophétie de l'avenir » (1)

Il nous ouvre à une autre interprétation de notre propre histoire appelée à sortir d'une fausse liberté pour laisser place à la possibilité d'un Dieu qui nous conduit au-delà de nos enfermements.

Une lecture spirituelle des textes nous conduit toujours beaucoup plus loin qu'une contemplation du passé...

(1) Irénée de Lyon, Contre les hérésies V, 28,3 traduction Rousseau p.654 cité par Bernard Sesboué, L'homme, merveille de Dieu, Paris, Salvator, 2015 p. 137

Temple de Salomon et temple intérieur - Amour en toi 54

Ce beau texte du livre des Rois appelle à une lecture spirituelle quand on le met en résonance de la théologie paulinienne du temple : « En ces jours-là, lors de la consécration du Temple, Salomon se plaça devant l'autel du Seigneur, en face de toute l'assemblée d'Israël ; il étendit les mains vers le ciel et fit cette prière :

« Seigneur, Dieu d'Israël,
il n'y a pas de Dieu comme toi,
ni là-haut dans les cieux,
ni sur la terre ici-bas ;
car tu gardes ton Alliance et ta fidélité envers tes serviteurs, (...)
    Est-ce que, vraiment, Dieu habiterait sur la terre ? Les cieux et les hauteurs des cieux ne peuvent te contenir : encore moins cette Maison que j'ai bâtie ! Sois attentif à la prière et à la supplication de ton serviteur.
Écoute, Seigneur mon Dieu, la prière et le cri qu'il lance aujourd'hui vers toi.
    Que tes yeux soient ouverts nuit et jour sur cette Maison, sur ce lieu (...)
    Écoute la supplication de ton serviteur (...) lorsqu'ils prieront en ce lieu.
Toi, dans les cieux où tu habites, écoute et pardonne. ». (1 Rois 8, 22-23.27-30, AELF)

On devrait avoir la même prière en sortant de l'eucharistie. Car comment Dieu peut avoir place en nous ?

Cela donnerait quelque chose comme cela : Est-ce que, vraiment, Dieu peux habiter [en nous, lui que rien ne peut] contenir : encore moins cette Maison que j'ai bâtie ! (...) Écoute, Seigneur mon Dieu, la prière et le cri qu'il lance [que je lance] aujourd'hui vers toi. (...) Écoute la supplication de ton serviteur (...) Toi, dans les cieux où tu habites, écoute et [pardonne-moi]...

 « Ne savez-vous pas que vos corps sont les membres du Christ ? » (1 Co 6,15)