Plus nos discussions avancent plus je me demande s’il n’y a pas une autre voie que les baptisés n’osent pas prendre et qui pourrait résoudre bien des problèmes.
Au lieu de se cristalliser sur la messe, sa forme, ses rites, et sa présidence, il nous faut inventer, pousser par l’Esprit, d’autres voies alternatives qui ne font pas concurrence à la messe dominicale mais constituent d’autres chemins complémentaires pour faire Église.
Sommes-nous en effet réduits à réciter sans cesse des phrases prémâchées comme si l’intelligence de la foi nous était retirée ?
Nous ne sommes plus au XIXeme siècle, la Bible est ouverte et des laïcs sont formés pour l’ouvrir, la lire, la commenter et en vivre.
Il est temps que ceux qui sont nourris par l’Ecriture inventent d’autres lieux de rencontre, d’autres maisons d’Evangile (*) lieux de « réflexion théologique » qui interpellent le monde par l’intelligence du cœur et non par des automatismes.
C’était l’intuition fondamentale de Joseph Moingt que de dire que l’Evangile sauvera l’Église.
Comment écrivons-nous l’Église au delà des sept sacrements qui ne constituent pas un tout mais un moyen, non exclusif de vivre en Dieu.
Ce que j’ai longuement développé dans mon livre « la dynamique sacramentelle » (1) mérite d’être complété ici...
Il y a vingt ans, quand nous avons créé avec un groupe de laïcs un premier lieu de discussion informelle en semaine entre midi et deux à l’heure de la messe en semaine, dans une paroisse parisienne où travaillaient 150.000 personnes, le curé s’est inquiété qu’on lui pique des followers. Mais force est de constater que ceux qui participaient à ce groupe à la même heure que sa messe sont devenus les piliers de la paroisse de semaine car loin d’une répétition rituelle ils constituaient une « maison » habitée par l’Evangile.
Dans ma paroisse de week-end l’expérience est la même, ceux qui se réunissent le samedi une fois par mois pour lire ensemble l’Evangile sont les acteurs de la vie paroissiale dans sa dimension la plus large. Et leur élan qui s’inscrit dans la durée est autant porteur que les curés qui se succèdent, car s’y conjugue une saine complémentarité entre prêtres et laïcs.
Depuis mon billet 40.2 d’autres initiatives de ce type se sont manifestées à moi et conforte cette idée qu’il est temps d’inventer d’autres voies... n’hésitez pas à les partager ici.
Nous rejoindrons alors la force que représentait l’action catholique d’après guerre, les initiatives lancées par Theobald dans la Creuse ou « la messe qui prend son temps » à saint Ignace ?
Pourquoi l’action catholique a perdu son élan ? Il faut peut-être revisiter cela. Probablement parce qu’elle s’est détachée de la source qu’était l’évangile pour se perdre dans l’activisme. Ses fruits ont pourtant été nombreux.
Il y a une vigilance à déployer pour que nos actes ne soient pas séparés des sacrements mais en soient habités par une saine intelligence de la foi, un souci de discernement et une « danse » féconde entre vie humaine, prière, discernement partages et rites. C’est cette articulation qui est clé et que j’appelle la dynamique sacramentelle dans laquelle tout baptisé à sa place qu’il soit célibataire marié ou divorcé remarié !
Je relisais récemment dans La Croix (2) un bel article sur les Xavières et la fécondité de ce mouvement poussé à travailler pour survivre. Illustration différente et complémentaire des intuitions de Madeleine Delbrel ou des prêtres ouvriers, d’une nouvelle diaconie dans l’Église qui pense, prie et agit... Troisième voie ?
« On doit reconnaître, concluait Michel Quesnel, que de plus grandes responsabilités pourraient être accordées aux femmes dans l’Église catholique si l’on tenait davantage compte des textes de Paul, disait un autre article »(3)
La messe n’est pas le tout. N’ayons pas peur d’inventer d’autres chemins qui ne l’excluent pas, mais déploient sa dynamique et en font un sommet mais non l’unique manifestation de la communauté.
Écoutons ce que disait déjà saint Léon le Grand :
« Soyez les imitateurs de Dieu,�(...) Que les fidèles scrutent donc leur âme et discernent par un examen loyal les sentiments profonds de leur cœur. S'ils découvrent que leur conscience a en réserve des fruits (...) ils peuvent être certains que Dieu est en eux ; et pour se rendre de plus en plus accueillants à un tel hôte, qu'ils se dilatent par les œuvres d'une miséricorde inlassable. En effet, si Dieu est amour, la charité ne doit pas avoir de bornes, car la divinité ne peut s'enfermer dans aucune limite.»(4)
Le chemin tracé par Léon n’est pas exclusif mais s’insère dans la même direction.
La première lecture d’aujourd’hui (Ez 47) est une belle illustration de la fécondité des sacrements. Du Verbe peut couler un fleuve immense.
(1) cf. mon livre éponyme téléchargeable gratuitement sur Kobo.
(2) Les xavières, cent ans de « troisième voie »
Youna Rivallain, La Croix du 2/2/21, à l’occasion de leur centenaire
(3) La Croix du 18/2/21 sur Paul et les femmes. Ce qu’il a écrit, ce qu’on lui a fait dire de Michel Quesnel Médiaspaul.
(4) Saint Léon le Grand, sermon de Carême, source office des lectures du 16/3/21
(*) Voir aussi :
https://www.facebook.com/groups/2688040694859764/
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