Quels sont les enjeux du net à l'aune
de nos efforts en pastorale ? Comment intégrer ce formidable
mouvement collectif, lui donner sens, en percevoir les limites et les
atouts ?
Le jésuite Antonio Spadaro, célèbre
en France depuis son entretien du pape François paru dans Études,
est docteur en philosophie et en théologie, directeur de la revue
Civiltà Cattolica.
L'intérêt de son livre
« Cyberthéologie, Penser le christianisme à l'heure
d'internet » publié en Français chez Lessius, est
d'explorer les enjeux théologiques de la "toile", à la
fois dans ses moyens et sa finalité.
Pour cela, l'approche retenue est en
particulier celle de la sémantique et de l'herméneutique. En
décryptant le nouveau sens des mots sur le Web, l'auteur nous invite
à comprendre les glissements qui se sont opérés, à la faveur
conjointe des idéologies qu'il véhicule - y compris une analyse
fine des apports et des faiblesses des « creatives commons »
et de l'esprit "hacker".
On y trouve aussi une réflexion
pertinente sur les dangers d'internet, ses addictions. Il y décrypte
ses modes, les risques du virtuel qui peut passer à côté des
relations vraies et faire d'un idéal de connexion une "fausse"
impression de communion. Spadaro nous permet néanmoins de discerner
ce en quoi le net peut devenir « un lieu de connexion
significative des personnes, capable de fournir la base pour
construire des rapports de communion dans une société fragmentée ».
Mais ce livre nous ouvre surtout à une
vision théologique du net, qui rejoint d'après lui le génie
teilhardien et sa Noosphère. Car l'intelligence collective qui s'y
déploie peut être aussi une manière d'entrer « en tension »,
de « soulever l'humanité » vers le mieux, sans pour
autant détruire ce qui reste « unique et intransmissible »
en chacun. Si l'on passe ainsi l'écueil «collectiviste » qui
gomme l'individu et son unicité, le net peut être un chemin vers
l'Oméga, et devenir un « réseau eucharistique » ou le
Logos qui s'y révèle est force de convergence, d'attraction pour
nous reconduire à Dieu.