04 novembre 2005

Eglise sacrement

"Cum vero Ecclesia sit in Christo signum et instrumentum seu veluti sacramentum intimae totius generis humani unitatis eiusque in Deum unionis..." ce qui se traduit par "L'Eglise est dans le Christ comme le sacrement c'est-à-dire le signe et l'instrument de l'unité profonde de tout le genre humain et de son union à Dieu." (1)
Cette dimension sacramentelle de l'Eglise est une ouverture particulière qui élargit le sens même de la vie du chrétien. Pour reprendre une analyse donnée plus haut sous le titre "Verticalité", le danger de notre culture de la personne, de l'individu tout puissant, nouvelle tour de Babel de notre humanité, est de vivre et construire pour soi, sans intégrer la dimension de communauté. L'Eglise est à l'inverse une école de la communauté. La cité de Dieu est la direction de cette église parfois malade et fragile, mais toujours en marche vers sa dimension sacramentelle. Comme l'amour du prophète Osée pour sa prostituée, le Christ nous aime malgré nos faiblesses et c'est à travers celle-ci que ce construit la révélation. Le souffle qui habite l'Eglise vient travailler son essence, vient l'habiter et c'est ce souffle intérieur qui est signe et instrument en nous de l'invisible. L'Eglise est "l'infrangible sacrement de l'unité" disait saint Cyprien.
"Pour que le signe (visible) puisse réaliser dans les faits une pareille médiation de l'extérieur vers l'intérieur cela implique qu'à l'intérieur il faut qu'il en ait reçu le pouvoir et cela est signifié par l'expression institué". (2)
J. Ratzinger rappelle d'ailleurs que cette notion d'Eglise sacrement a été introduite par Henri de Lubac dans "Catholicisme, les aspects du dogme'' dans sa critique d'une foi personnelle, de l'individualisme d'une recherche d'un Dieu pour soi seul.

Je crois que c'est le travers le plus fréquent de notre temps. Une volonté de maîtrise qui n'est finalement qu'orgueil et démesure, à l'image parfois de ces mots que j'aligne tous les jours et qui sont si souvent suivi de peu de chose, de peu d'amour. L'Eglise est autre chose que des mots, que ce blog. L'Eglise est dans la communauté d'amour que nous formons et qui transpire de l'amour de Dieu...
(1) LG, cité par Joseph Ratzinger, ibid, p. 46
(2) d'après Joseph Ratzinger, ibid, p. 51ss

03 novembre 2005

Mourir pour vivre

Dans le baptême, la mort (les eaux, la mer) et la vie (source) sont étroitement mêlée. Le baptême est le plongeon dans la mort et dans la source de la vie. Seul le renoncement à soi-même conduit au pays de la vie. Cette double symbolique est très forte.
Mais ce renoncement n'est "sacramentel" que lorsque la foi est un don fait par l'intermédiaire de la communauté, qu'elle même reçoit en don. La foi ecclésiale conduit à penser que le baptême, c'est le sacrement de la foi ! Et c'est bien ce que signifait cette affirmation du credo pendant le rite du baptême.

02 novembre 2005

Baptême

Par le sacrement du baptême, le nouveau baptisé entre en "communauté de nom avec le Père, le Fils et l'Esprit". Il entre dans une nouvelle unité pour appartenir au milieu d'existence délimité par ce nouveau nom, comme les nouveaux époux qui ne font qu'une seule chair, le baptisé est appelé à cette communion de nom. Il est "en Christ".
Etre baptisé, c'est ainsi "participer au rapport de Jésus avec Dieu (...) et recevoir pour sien le nom du Christ" (1) Cela implique donc en soi une mort à soi-même. J. Ratzinger souligne à ce sujet que dans la tradition, le baptême était précédé d'un "Crois tu en Dieu". La confession de foi était alors suivie d'un acte concret de conversion. On est loin,, rajoute-t-il de la forme administrative (et j'aujouterais presque superstitieuse) que peut prendre certains baptêmes. En un sens, c'est le risque et la conséquence d'un baptême systhématique des enfants.
Faut-il pour autant promouvoir ce baptême, au risque de ne plus baptiser personne. Oui si, comme le suggère J. Ratzinger le baptême est accompagné d'une démarche post-catéchuménale, comme elle l'est précédé pour les adultes.
A ce sujet, il fait deux remarques. Il rappelle que le Credo n'est pas une formule publicitaire : "Il ne peut-être exprimé que s'il l'on réalise en même temps l'acte de conversion au Fils de Dieu crucifié et si l'on assume par là aussi bien la passion que les promesses de la Vérité."
Enfin il souligne que le catéchuménat doit être autre chose qu'un cours de religion : "il est une partie du sacrement : non pas un enseignement préalable mais une partie intégrante de celui-ci. D'un autre côté, le sacrement n'est pas un simple rite liturgique, mais un processus, un long cheminement qui mobilise toutes les forces de l'homme, son intelligence, sa volonté, son sentiment." (2)

(1) Joseph Ratzinger, ibid, p. 32 et ss
(2) ibid p. 35 et 36

01 novembre 2005

Blogue catholique, une petite chaîne amicale

Je vous informe que je viens d'ouvrir une petite chaîne destinées à des blogues catholiques fidèles au magistère et désireux d'avancer ensembles sur les chemins de la foi, et de l'entraide spirituelle. Renseignement et inscription en ligne, en bas de chaque billet de ce blogue.

PS : Hébergement sur Ringsurf...

Sacrement, sens et médiation

"Il n'y a pas de sacrement sans parole" (1). La foi ne vient pas à l'homme comme à un Moi isolé, mais celui-ci la reçoit de la communauté, de ceux qui ont cru avant lui et lui apportent Dieu comme une réalité de leur histoire. La communauté a donc un rôle essentiel de médiation, d'accompagnement, mais cet accompagnement est-il un rouleau compresseur ou un chemin d'Emmaüs, une explication de texte qui laisse à l'autre le cheminement intérieur, jusqu'à ce qu'il soit prêt à apercevoir dans la fraction du pain, le signe efficace d'un amour qui respecte sa propre liberté de marcher...
"La parole introduit dans notre relation à Dieu le facteur temps. (...) Nous voudrions avoir trouvé Dieu par nous même, nous mettons une contradiction entre tradition et raison, entre tradition et vérité qui s'avère en fin de compte mortelle. L'homme sans tradition, sans lien avec une histoire vivante est sans racine et s'efforce à une autonomie qui est en contradiction avec sa nature."
Il y a un parcours à refaire, comme ces quarantes passés au désert par le peuple d'Israël, et cette exode, nous avons chacun à la vivre, intérieurement, accompagné par l'éclairage avisé de nos pasteurs.

(1) Joseph Ratzinger, ibid, p. 29
(2) ibid p. 30

31 octobre 2005

Une proposition de la foi adaptée.

"La mise au point d'une forme de catéchuménat adapté à notre époque compte parmi les tâches les plus urgentes devant lesquelles se trouvent l'Eglise et la Théologie." Ces lignes écrites en 1982 gardent toutes leur pertinence... Mais la difficulté reste semblable. Entre l'affirmation d'une foi claire, d'une parole tranchante, qui dérange et conduit à la conversion du coeur et le langage des hommes, il y a un chemin intermédiaire à trouver, difficile, délicat. Je le cherche en tout cas...

(1) Joseph Ratzinger, ibid, p. 26

30 octobre 2005

Foi vécu et proclamée...

On a parfois tendance à trop séparer la foi intérieure qui nous a été donnée et qui reste inscrite au fond de notre coeur et celle que nous exprimons avec nos mots... A quoi sert de proclamer que Jésus est le Seigneur, si au fond de notre coeur on ne croit pas que Dieu est le ressuscité des morts. C'est en tout cas, ce qu'affirme Rom 10,9 qui parle de cohérence et de salut. Ton coeur est en vue de la justification et ta bouche en vue du salut....
Origène parlait déjà de l'"aima tou logon", ce sang du Verbe qui nous atteint. Notre foi doit s'inscrire dans cette fragilité intérieure qui s'ouvre au dialogue pneumatique (par le souffle, l'Esprit) entre Père et Christ, jusqu'à entendre résonner en nous la lettre aux Hébreux (10,5) : "Tu ne voulais pas de sacrifice alors tu m'as donné un corps.... C'est dans ce dialogue que se joue la rencontre entre ce que J. Ratzinger qualifie d'expression verbale et nominale de la foi. Pour lui (1), il n'y a pas séparation entre métaphysique et salut mais comme l'affirmait déjà Henri de Lubac, il y a rencontre, ultime maturation de l'évolution néotestamentaire jusqu'en Mt 28,19 : "allez faire des disciples, je serais avec vous...". Notre mission de baptisé n'est pas d'ailleurs dans la seule proclamation mais bien dans cette unité entre les actes et la vérité de notre bouche. Et c'est là le chemin de l'hyperbole... Dieu ne veut pas de sacrifice, mais nous a donné un coeur et un corps, pour aimer en vérité.
"Le Dieu unique est concrètement dans la rencontre avec le Dieu fait homme et avec l'Esprit-Saint qui l'a envoyé.."
Pour H. de Lubac "Dieu n'est pas solitude mais extase, complète sortie de soi". Cela signifie pour J. Ratzinger que ce mystère de la Trinité nous a ouvert une perspective toute nouvelle : le fond de l'être est communion. La foi trinitaire est communion. Et si l'on croit selon la Trinité, on ne peut plus qu'être appelé à signifier cette communion, à devenir communion.
A travers l'histoire la communion de l'Eglise est médiatrice entre l'être et le temps. Comme l'affirmait déjà Saint Augustin, le souvenir est médiateur entre l'être et le temps et pour lui, cela conduisait à concevoir le Père comme Mémoire.
"Dieu est tout simplement Mémoire, c'est-à-dire Etre retenu, pour autant que l'être est retenu dans la durée. La foi chrétienne comporte en vertu de sa nature l'acte du souvenir, et par là elle fonde l'unité de l'histoire et l'unité des hommes par référence à Dieu". Pour Benoît XVI, "l'unité de l'histoire n'est possible que parce que Dieu leur a donné la mémoire". Cela a pour moi des implications importantes sur ce qui a déjà été ébauché sur le rapport entre tradition et Parole car la mémoire n'est possible qu'à travers une lecture et donc une interprétation... Qu'elle place laissons nous à l'héritage, à la tradition. Est-ce la mémoire où le souvenir qui constitue l'Eglise ou une vaine apparence ? Peut-on concevoir une hiérarchisation du souvenir...

En ce jour de dimanche où l'Evangile nous invite à la méditation sur l'hypocrisie des pharisiens, ce texte donne à penser...

(1) Joseph Ratzinger, ibid, p. 16 et suivantes

28 octobre 2005

Le sel de la sagesse

J. Ratzinger rappelle, ce que j'ignore d'aillers, que le rite d'accueil du baptême pouvait se faire avec la présentation du sel, comme pour le catéchuménat.
Pour lui le sel est signe de sagesse. Il exprime que l'on a du goût pour la vérité, que l'on cherche à trouver du goût à la vérité.
Cela rejoint ce que j'exprimais plus haut sur cette nécessité constante d'une intelligence de la foi, ou pour le paraphraser d'un apétit pour la foi, de sorte que nos actes, et nos signes soient nourries de cette lente compréhension intérieure...

(1) Joseph Ratzinger, ibid, p. 38 et ss

26 octobre 2005

Oeucuménisme

"Une des conséquences essentielles du IIème Concile du Vatican est que la théologie soit continuellement ramenée dans sa pensée et son langage à la dimension oecuménique". (1)
Cette ouverture, ou doit-on dire prétention à l'oecuménisme me semble essentielle à conserver en mémoire, au delà de la souffrance qui marque souvent nos difficiles balbutiements vers une plus grande unité. Toute "recherche vers Dieu" ne peut se faire si elle conduit encore à séparer nos points de vue et l'unité de la Cité de Dieu est notre horizon....
Joseph Ratzinger, Les principes de la théologie Catholique, Essais et Matériaux, Téqui, 1982, ed. 2005., p. 8

25 octobre 2005

Tragédie grecque

"L'homme grec de la tragédie n'est rien face au Christ dans sa capacité à vivre la souffrance" (1) Il n'est qu'un pâle figure du théâtre du monde face à la réalité humaine et sa dramatique...
Peut-on pour autant dire que la souffrance du Christ est indépassée ? Certains martyrs l'ont peut-être été. Mais faut-il pourtant se situer dans une comparaison morbide qui n'aurait que pour résultat de mettre en lumière la cruauté des hommes. Ce qui est certain, c'est que le martyr injuste de certains ont complété en leur chair celui de l'innocent et que pour nous chrétiens, il n'est pas neutre, que cela soit Dieu qui souffre sous nos coups...


(1) d'après Hans Urs von Balthasar, in Herrlichkeit, III, I. p 97

FL59 Herrlichkeit, Eine theologische Ästhetik, Band III, I Im Raum der Methaphysik, Teil I - Altertum, Johannes Verlag, 1965, ISBN 3 265 101 59 2

24 octobre 2005

Kénose

Le secret final de la kénose de Dieu en Christ est proche par analogie du secret de l'être, qui ne s'éclaire seulement que lorsque la lueur de Dieu apparaît à travers la pauvreté de la croix (1). Il y a pour moi dans cette phrase toute la méditation déjà évoquée du bruit d'un fin silence, ce Dieu qui s'abaisse dans le cri d'un souffrant pour crier son amour...

(1) Ferdinand Ulrich, Homo Abyssus, Das Wegnis des Seinsfrage, Einsielden 1961), cité par Hans Urs von Balthasar, Herrlichkeit, Eine theologische Ästhetik, Band III, I Im Raum der Methaphysik, Teil I - Altertum, Johannes Verlag

Copyright et traduction...

Attention....
Les notes suivantes sont issus de la lecture des deux volumes de Balthasar Herrlichkeit Band III Methaphysik, tomes I & II en allemand. A la différence des billets précédents, la traduction française est "personnelle", elle reste plus soumise à caution que celle utilisée dans les tomes précédents.
J'en profite pour dire que mes nombreux extraits, critiquables en soi, au sens du copyright se justifient par plusieurs arguments ;
- il s'agit pour moi que de l'ulitisation du droit de citation (moins de 1O lignes à chaque fois) et de commentaires,
- je reprends le principe retenu par le moteur de recherche G. qui penche pour l'opt out, dans la mesure où cet ouvrage n'est plus disponible en français dans les librairies (ce qui m'a d'ailleurs conduit à acheter la version allemande...)
- il s'agit d'un essai de vulgarisation d'un texte qui reste volumineux et austère... Mes billets restant déjà en eux-mêmes probablement difficiles d'accès, inexact et imprécis tant dans la citation que dans l'analyse... Je laisse le lecteur libre de ses appréciations et commentaires
- cette publication est non commerciale...
Si cette interprétation du droit était critiqué par qui que ce soit (via ce mail, je supprimerais bien sûr (avec regret) tout ce travail exploratoire...

23 octobre 2005

Marie au coeur du drame

Pour Balthasar, Marie est dans une position dramatique entre les deux testaments. En elle, le Christ rejette la chair et le sang ("qui ne peuvent hériter du royaume de Dieu" (1 Co 15,50) mais "en humiliant ainsi toujours plus profondément sa mère, Jésus la prend, inconnaissable aux autres, toujours plus profondément dans sa propre humiliation, qui le mène à n'être plus sur la croix que "chair et sang" nus. (...) Toute la figure de Marie est tellement conçue d'une manière intra-biblique et intertestamentaire que sa conception virginale doit tout à fait être vue dans le parallélisme qui surenchérit à l'égard des naissances merveilleuses d'enfants que mettent au monde des femmes de l'Ancien Testament."
Pour moi cependant, cela reste accessoire par rapport au message et par rapport à cette possible médiation d'une femme bénie entre toutes les femmes, qui ne peut en rien être comparée à l'unique médiateur, mais dont la conduite à la fois simple et archétypique, s'est révèlée pleinement au pied de la croix. Stabat mater dolorosa. Elle se tenait debout, la mère des douleurs. Et cette compassion est déjà pour nous chemin et signe indépassabe.
Cela permet de comprendre d'une certaine manière, cette nécesssaire double polarité qu'évoque Balthasar (287) entre une sainteté mariale et subjective et celle pétrinienne et objective. On est au coeur de la dramatique interne, insoluble en vertu de laquelle Marie prend part structurellement en tant que prolongement (plénitude, corps) et partenaire (épouse du Christ) à sa mission rédemptrice.
Peut-on aller jusqu'à justifier le sacerdoce masculin comme cete garantie objective de l'homme dans une dualité ou la part subjective est tenue par la femme ?

(1) d'après Dramatique Divine, II-2, Urs von Balthasar, ibid p. 264-5
(2) ibid p. 287

22 octobre 2005

Réciprocité

"Si la femme a été tirée de l'homme, l'homme a son tour naît par la femme. Si la femme est mère d'un enfant humain qui est personnellement Dieu, alors elle doit être appelée Theotokos, celle qui enfante Dieu." (1) Cette échange pour moi met à un terme à la vision machiste de l'homme. Il y a interdépendance des libertés, même si la liberté finie de la vierge est la clé de l'incarnation, elle reste lieu de liberté. Et Dieu s'est agenouillé devant la femme qui a rendu possible cette kénose...

(1) d'après Dramatique Divine, II-2, Urs von Balthasar, ibid p. 232

21 octobre 2005

Don et réponse...

Pour Balthasar, le don du Christ, nouvel Adam, ne peut être "achevé" que lorsqu'il y a réponse (Ant-Wort) de la femme [Eglise]. Il établit alors un parallèle intéressant entre Ant-wort et Ant-litz (voir) visage... (Ant - Anti, contre).
Cela évoque pour moi, comme toujours, une relecture du sens du sacrement de mariage. Comme le fait Paul dans Ephésiens, le dialogue entre Christ et Église s'inscrit dans la même dynamique que le "je te reçois et je me donne à toi". De fait, je devrais dire d'ailleurs l'inverse, puisque le sacrement dérive de cette correspondance. Mais il y a dans la kénose, cette dimension archétypique qu'il me semble important de méditer. Il ne s'agit pas seulement d'agir, mais cet acte n'a de sens que s'il conduit à une réponse. La passion ne serait pas "efficace" si elle n'avait été précédée de cet accompagnement des coeurs. Et cependant, comme le démontre Emmaüs, il restait encore un chemin à parcourir. La réponse de l'Eglise ne pouvait venir d'elle-même que dans la mesure où le souffle l'habite et lui "souffle" la réponse. Le dialogue Christ-Eglise pourrait être ainsi presque réduit au dialogue intra-trinitaire, à la symphonie des hyspostases... Et à cette symphonie, Dieu, dans sa miséricorde inépuisable, nous convie à devenir les instruments.
La deuxième remarque résulte du parallèle entre An-Wort et An-Sicht... Entre les mots et le visage. Visage du Christ, Verbe du Christ, verbe de l'Eglise, visage du Christ. Cela évoque bien sûr les accents lévinassiens de l'exposition du visage, qui sommes toutes ne sont pas étranger à mon premier point (cf. lien)
Plus loin (1), Balthasar évoque la création d'Eve, comme n'étant pas une création extérieure, ou un processus naturel, mais comme venant de l'intérieur et d'en haut. Cette approche prend tout son sens pour l'Eglise, nouvelle Eve, qui naît du désir du Christ et de Dieu. Elle ne lui est pas étrangère mais vient bien du dedans et c'est aussi pour cela et comme cela que nous sommes en Christ (en christoî).
La mission de l'Église, comme la mission de la femme, est continuation et conséquences de sa procession à partir du nouvel Adam. C'est pour Balthasar "accueillir et mener à la plénitude la fécondité de l'homme au sens large". Et pour l'Église, c'est bien de cela qu'il s'agit.
Ce que je trouve le plus éclairant demeure cependant cette vision pleine de signification : "Du côté (blessé) de celui qui sommeille (sur la croix) est tiré et façonné le "visage" répondant de la femme (Ep. 5,27) dont l'homme (vir) ne peut pas se passer. Le mystère de l'homme et de la Femme de la première création le montre mais ce mystère ne reçoit sa mystérieuse plénitude que dans le mystère du Christ-Eglise (Ep. 5, 27-33)." (2). Rappelons que ce sang versé est à la fois celui évoqué dans l'institution de l'Eucharistie, mais aussi ce fleuve qui coule du Temple dans la vision du prophète...
Alors, le cri de Jean-Paul II à Lourdes en 2005 prend un double sens : "Femme/Eglise, sentinelle de l'invisible.
(1) d'après Dramatique Divine, II-2, Urs von Balthasar, ibid p. 227 et 229
(2) ibid p. 231