On a parfois tendance à trop séparer la foi intérieure qui nous a été donnée et qui reste inscrite au fond de notre coeur et celle que nous exprimons avec nos mots... A quoi sert de proclamer que Jésus est le Seigneur, si au fond de notre coeur on ne croit pas que Dieu est le ressuscité des morts. C'est en tout cas, ce qu'affirme Rom 10,9 qui parle de cohérence et de salut. Ton coeur est en vue de la justification et ta bouche en vue du salut....
Origène parlait déjà de l'"aima tou logon", ce sang du Verbe qui nous atteint. Notre foi doit s'inscrire dans cette fragilité intérieure qui s'ouvre au dialogue pneumatique (par le souffle, l'Esprit) entre Père et Christ, jusqu'à entendre résonner en nous la lettre aux Hébreux (10,5) : "Tu ne voulais pas de sacrifice alors tu m'as donné un corps.... C'est dans ce dialogue que se joue la rencontre entre ce que J. Ratzinger qualifie d'expression verbale et nominale de la foi. Pour lui (1), il n'y a pas séparation entre métaphysique et salut mais comme l'affirmait déjà Henri de Lubac, il y a rencontre, ultime maturation de l'évolution néotestamentaire jusqu'en Mt 28,19 : "allez faire des disciples, je serais avec vous...". Notre mission de baptisé n'est pas d'ailleurs dans la seule proclamation mais bien dans cette unité entre les actes et la vérité de notre bouche. Et c'est là le chemin de l'hyperbole... Dieu ne veut pas de sacrifice, mais nous a donné un coeur et un corps, pour aimer en vérité.
"Le Dieu unique est concrètement dans la rencontre avec le Dieu fait homme et avec l'Esprit-Saint qui l'a envoyé.."
Pour H. de Lubac "Dieu n'est pas solitude mais extase, complète sortie de soi". Cela signifie pour J. Ratzinger que ce mystère de la Trinité nous a ouvert une perspective toute nouvelle : le fond de l'être est communion. La foi trinitaire est communion. Et si l'on croit selon la Trinité, on ne peut plus qu'être appelé à signifier cette communion, à devenir communion.
A travers l'histoire la communion de l'Eglise est médiatrice entre l'être et le temps. Comme l'affirmait déjà Saint Augustin, le souvenir est médiateur entre l'être et le temps et pour lui, cela conduisait à concevoir le Père comme Mémoire.
"Dieu est tout simplement Mémoire, c'est-à-dire Etre retenu, pour autant que l'être est retenu dans la durée. La foi chrétienne comporte en vertu de sa nature l'acte du souvenir, et par là elle fonde l'unité de l'histoire et l'unité des hommes par référence à Dieu". Pour Benoît XVI, "l'unité de l'histoire n'est possible que parce que Dieu leur a donné la mémoire". Cela a pour moi des implications importantes sur ce qui a déjà été ébauché sur le rapport entre tradition et Parole car la mémoire n'est possible qu'à travers une lecture et donc une interprétation... Qu'elle place laissons nous à l'héritage, à la tradition. Est-ce la mémoire où le souvenir qui constitue l'Eglise ou une vaine apparence ? Peut-on concevoir une hiérarchisation du souvenir...
En ce jour de dimanche où l'Evangile nous invite à la méditation sur l'hypocrisie des pharisiens, ce texte donne à penser...
(1) Joseph Ratzinger, ibid, p. 16 et suivantes
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