09 novembre 2015

Difficile chasteté - 2

Sur ce chemin,  cet art, comme je le disais plut haut, peut être faut-il contempler la chasteté de Dieu dans son rapport avec l'homme,  car sa juste distance nous engendre à la vie. 

"Il a eu pitié de nous, sa tendresse s'est émue et il nous a sauvés, lorsqu'il a vu que nous étions dans l'égarement, que nous allions à notre perte et que nous n'avions aucun espoir d'être sauvés en dehors de lui. Car il nous a appelés alors que nous n'existions pas et il a voulu nous faire passer du néant à l'être !" (1)

L'amour divin, dans le respect de notre liberté créatrice est chemin de croissance tout en étant juste, chaste et miséricordieux. 

(1) homélie du IIème siècle,  source AELF

08 novembre 2015

Difficile chasteté

Trouver la juste place. Tel est l'enjeu de toute relation humaine.  Quelle soit parentale, conjugale ou simplement relationnelle la chasteté est cet art d'être ni trop loin (indifférence) ni trop prêt (main mise sur autrui). C'est l'art de toute vie, à l'école de l'amour.  Le seul guide : cette petite phrase de 1 Cor 13 : "L'amour prend patience... il ne cherche pas son intérêt".





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07 novembre 2015

Parler d'absolu

Les critiques du relativisme sont nombreuses dans l'Église‎. Elles sont parfois la voix de ceux qui prêchent un arc-boutisme sur la Tradition avec un grand T. Loin de moi l'idée de critiquer l'oeuvre de la tradition, mais la loi n'a de sens que pour montrer à chacun un chemin intérieur, une conversion profonde et véritable qui nous travaillent personnellement, au fond de nos particularités et de nos adhérences (1).
Si l'on conjugue morale avec le commandement de ne pas juger autrui, il nous reste peu de champ, sauf à trouver un sens éthique à notre vie, un éclairage intérieur. Pour autant, nous avons aussi à refuser le relatif facile. 
Jean Paul Il le rappelait au prêtres : "au milieu des hommes de cette génération, si plongés dans le relatif, vous devez être des voix qui parlent d'absolu" (2).

Qu'est ce que l'absolu ? Balthasar parlerait probablement d'un "Retour au centre" : Le Christ, qui nous révèle l'amour infini de Dieu, son don incommensurable et l'appel à un "destin de plénitude" (3)

(1) je préfère ce mot à celui galvaudé de "péché", même si cela sent le relativisme.
(2) Bologne, 18 avril 1982, cité in ‎"Avec vous je suis prêtre", Archevêché de Lyon, p. 40.

06 novembre 2015

Le fleuve


Contemplation : 
"Il me ramena ensuite à l'entrée de la maison. Et voici que des eaux sortaient de dessous le seuil de la maison, du côté de l'orient; car la face de la maison regardait l'orient. Et les eaux descendaient de dessous le côté droit de la maison, au midi de l'autel. Il me fit sortir par le portique du septentrion et me fit faire le tour à l'extérieur, jusqu'au portique extérieur qui regardait l'orient; et voici que les eaux coulaient du côté droit. Quand l'homme fut sorti vers l'orient, avec le cordeau qu'il avait à la main, il mesura mille coudées et me fit passer par cette eau: de l'eau jusqu'aux chevilles. Il en mesura encore mille et me fit passer dans l'eau: de l'eau jusqu'aux genoux. Il en mesura encore mille et me fit passer: de l'eau jusqu'aux reins. Il en mesura encore mille: c'était un torrent que je ne pouvais traverser, car les eaux avaient grossi; c'étaient des eaux à passer à la nage, un torrent qu'on ne pouvait traverser. En me retournant, voici que j'aperçus sur le bord du torrent des arbres en très grand nombre, de chaque côté. Et il me dit: "Ces eaux s'en vont vers le district oriental; elles descendront dans la Plaine et entreront dans la mer; elles seront dirigées vers la mer, et les eaux en deviendront saines."

Ézékiel 47:1-5, 7-8, traduction, BCC 1923

Le bruit d'un fin silence - suite

Nous avons commenté plus haut longuement les atouts et les limites d'un esthétisme théologique à partir de GC1 chez Hans Urs von Balthasar, après notre livre éponyme (1) sur "le bruit d'un fin silence (2)" (1 Rois 19). Cette courte remarque chez MD entre en résonance : "Il semble souvent que la meilleure louange de la beauté soit le silence, l'effacement de tout ce qui n'est pas elle." (3)

En soit cette remarque traduit la poursuite de l'effacement de Madeleine, un agenouillement après tant de verbe désordonné, fut-il masqué par une recherche esthétique intérieure qui n'avait pas dévoilé son but ultime, la rencontre avec le vrai Créateur de toute chose.

En soi, cette maxime qui devrait se traduire par un jeûne de la communication, a une limite, celle de l'urgence d'annoncer la bonne nouvelle...‎ Et le dit à sa part, même s'il restera, comme le dit Levinas toujours en-deçà du dire.

‎(1) maintenant intégré dans L'amphore et le fleuve, Createspace 2014
(2) Cette traduction est de Lévinas
(3) Madeleine Delbrêl,‎ Éblouie par Dieu, p. 153, cit. dans le livre de Pitaud, op Cit p. 77

05 novembre 2015

Les compatissants - 2

Pour répondre à la question laissée sans réponse dans le post précédent il me faut entendre ce qu'elle dit à peine plus loin :
"Donne moi la charité 
pour que je baise l'empreinte de tes doigts indélébiles sur les âmes,
sur la ‎mienne comme sur la leur."

(1) ibid. p. 73

04 novembre 2015

Les compatissants

Intéressant chemin que celui de Madeleine Delbrêl en 1927 qui la conduit de l'écriture à la charité. Pour moi qui hésite encore entre les deux (peut/doit-on choisir ? )‎ je note cette strophe dédiée aux artistes qui résume bien mes essais de romans : "Dieu vous a choisis pour moissonner le blé des larmes". (1)

Loin de moi l'idée d'affirmer que j'ai été choisi par Dieu,  mais c'est pourtant bien dans cet axe que j'ai écrit "Le chant du large", "La caresse de l'ange" ou "Le collier de Blanche". Non pour me complaire dans un dolorisme morbide, mais pour souligner, à chaque fois, les germes d'espérance qui jaillissent de ces situations tragiques et révèlent les pas de Dieu à côté de l'homme.


02 novembre 2015

Chemin de désert - Suite


‎Dans son poème sur le désert qui marque sa conversion en 1924, on notera ces strophes qui entrent en résonance avec ce que j'écrivais dans chemin de désert. Le style de Madeleine lui donne une dimension plus métaphorique :
"Mais le désert a dit : "‎Je suis un océan
Qui possède la vie en ses vagues de flammes,
Une enclume embrasée où se forgent les âmes,
Je suis le livre ouvert sur le bord du néant" (1)

On a envie d'ajouter que ‎les flammes de la lumière divine qui viennent lécher nos coeurs, comme des vagues inlassables, forgent en nous ce désir si souvent ignoré et pourtant essentiel, celui du Verbe, dont le livre ouvert(2) ne cesse de creuser en nous ‎l'éternel appel.

Dans leurs lectures, Pitaud et François s'attardent quand à eux sur la proximité entre le livre et le néant et considèrent, probablement avec raison, que cette phrase résume la vocation de Madeleine : "le livre sera toujours lu sur le bord du néant (...) plongée en milieu marxiste" (3)

(1) Madeleine Delbrêl, La route, Paris, édition Alphonse Lemerre, 1927, p. 125-126
(2) est-ce celui dont parle Apocalypse 5 ?
‎(3) op. Cit p. 59

01 novembre 2015

Chemins d'humilité

Après nous autres gens des rues, nous poursuivons notre approche de Madeleine Delbrêl avec sa biographie par Gilbert François et Bernard Pitaud (1). Un poème de Madeleine y résonne avec ce que nous écrivions sur les chemins d'humilité, mais aussi avec cet agenouillement d'Etty Hillesum. Il retrace le cheminement intérieure de la jeune athée, touchée par un appel à 5 minutes de silence de Sainte Thérèse d'Avila.
"J'ai ployé mes genoux et j'ai tendu mes mains et j'ai l'humilité des pauvres qui demandent. Je me suis prosternée car je ne suis pas digne que tu passes ma porte et que tu t' y reposes" (2)

(1) in Gilbert François et Bernard Pitaud, Madeleine Delbrêl, Poète, assistante sociale et mystique, Nouvelle cité, 2014
(2) 2 février 1924, p. 48

La source

Jérémie 31:33 BCC1923

Car voici l'alliance que je ferai avec la maison d'Israël, après ces jours-là, - oracle de Yahweh: Je mettrai ma loi au dedans d'eux, et je l'écrirai sur leur cœur, et je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple.

31 octobre 2015

Un coeur à coeur - humilité et douceur

Il nous faut abandonner toute tentation d'être des sachants. "L'Évangile n'est vraiment annoncé que si l'évangélisation reproduit entre le chrétien et les autres le coeur à coeur du chrétien avec le Christ de l'Évangile. Mais rien au monde ne nous donnera l'accès au coeur de notre prochain sinon le fait d'avoir donné au Christ l'accès au nôtre". Pour Madeleine, ce que nous apprend le Christ, c'est "l'humilité et la douceur", condition nécessaire pour avoir un coeur véritablement fraternel.
A contempler sans modération...

Madeleine Delbrel, ‎ibid. P. 271


30 octobre 2015

Théorie et pratique

"Nous ne pouvons annoncer que la foi dans toute la vérité de son réalisme ‎et, en l'annonçant, nous sommes bien obligés de nous reconvertir nous mêmes." (1) Par ces mots Madeleine adresse le coeur même du problème, ce que Jésus lui même ne cessait de marteler aux Pharisiens : la cohérence entre théorie et pratique, la foi et les actes. Rien ne sert de dire la bonté si elle ne transpire de nos actes, si tendresse et miséricorde, 77 x 7 fois répétée ne prime sur tous les discours. Le langage de l'Église et sa morale, sont creux, s'ils ne transpirent de la course infinie de Dieu aux pieds de l'homme (2).

N'est ce pas aussi ce qu'affirme le pape François quand il parle d'un Dieu qui ‎sort et cherche l'homme (3) comme ce Père du fils prodigue de Luc 15

(1) Madeleine Delbrel, Nous autres gens des rues, ibid p. 264
(2) C. Hériard, Á genoux devant l'homme 
(3) Pape François, Homélie du 20 octobre 2015, source Zénith


29 octobre 2015

Qui est mon prochain ? - 2

Le déplacement qui s'opère à la lecture de Madeleine vient du fait que les vertus communistes du désintéressement, du don de soi, stimulées par la propagande interne du parti mettent en évidence que nous ne détenons pas le monopole de la charité. Je parlais plus haut d'Ahmed‎ pour souligner que l'accueil du prochain n'est pas non plus un monopole du christianisme. Lévinas, dans Difficile Liberté, soulignait avec humour que le royaume de Dieu viendrait sur place quand les chrétiens accepteraient de partager la lumière (je cite de mémoire).
A sa manière, Madeleine précise que le communisme la met dans l'obligation "de réaliser ce que c'est que de faire corps avec l'Église, de ‎substituer vis-à-vis d'elle une obéissance vitale à une discipline passive; d'apprendre que sa matière vivante, sa chair est l'amour mutuel entre chrétiens." (1)

Kénose intra-écclesiale‎ que ce cheminement qui nous conduit à percevoir l'importance d'être actifs (2) et les dégâts d'une passivité laïque entretenue par un clergé trop longtemps attaché à son pouvoir/savoir. 

Congar, dans sa "théologie du Laïcat" a fait sur ce point des avancées qu'il faudrait méditer à nouveau.

(1) Madeleine Delbrêl, Nous autres gens des rues, op Cit p. 262

21 octobre 2015

Qui est mon prochain...

Le visage d'autrui m'appelle disait Emmanuel Levinas‎. A sa manière, Madeleine précise que tous les hommes, "communistes autant que les autres" sont nos proches. "Sans problèmes et sans complications je leur dois, parce que je suis chrétien et parce qu'ils sont des hommes, l'amour du prochain tel que le Christ nous l'a appris et montré, l'amour dont Dieu a voulu que la charité pour lui sont inséparables." (1)
Je rajouterai que notre chemin est, à la suite du Christ, de se mettre à genoux devant l'homme, qu'il soit Pierre ou Judas, Jean ou Thomas, Charles ou Ahmed... même si cela nous coûte.

(1) Madeleine Delbrel, Nous autres gens des rues, op Cit p. 260.

20 octobre 2015

Porté par l'espérance

A la lumière du chemin que trace pour nous les chrétiens d'Orient, nous pouvons entendre à nouveau les propos de Madeleine Delbrel : "ce qui donne un sens au combat de l'Église, ce qui trace le sens de son histoire, c'est l'espérance. Pour marcher, pour se propager, pour libérer, l'Église lutte [j'ajouterai avec les armes fragiles de l'amour], les yeux et le coeur rivé sur les promesses de Dieu. (...) L'espérance chrétienne nous assigne pour place cette étroite ligne de crête, cette frontière où notre vocation exige que nous choisissions, chaque mois et à chaque heure, d'être fidèles à la fidélité de Dieu pour nous. Sur la terre ce choix peut être déchirant. Mais l'espérance nous interdit d'en faire un dolorisme. C'est comme la souffrance d'une femme qui met un enfant au monde. Chaque fois que nous sommes ainsi déchirés, nous devenons comme des brèches ouvertes dans la résistance du monde. Nous livrons passage à la vie de Dieu." (1)

C'est poursuit Madeleine un moyen d'entrer dans la vie intime de l'Eglise.

Bien sûr, les détracteurs parleront d'opium du peuple. Mais notre expérience de la paix trouvée en Dieu et le regard de nos frères nous révèle ex post que cette espérance n'est pas vaine.

‎(1) Madeleine Delbrel, Nous autres gens des rues, op Cit p. 249
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