25 novembre 2015

L'apostolat de la bonté - Charles de Foucauld

Je tombe sur un article à lire dans La Croix du 13 novembre sur la figure du Père Charles de Foucauld qui vient en écho avec les propos tenus sur ce blog à propos de la "pastorale du seuil". 
Quelques phrases du bienheureux Charles comme ce "crier l'évangile par sa vie" donne à penser. Il est "prophète des déserts d'aujourd'hui".
A lire...

Voir aussi :
- Le chemin du désert
- Pastorale du seuil

24 novembre 2015

Pain brisé

A propos de mon étude en cours sur les chemins de l'humilité, ce petit extrait (1) de Madeleine est à ranger à côté de cette belle phrase de saint Ignace d'Antioche(2) qui voulait être la farine du Christ. Je vous laisse contempler ce qu'elle écrivait le 18/11/53 à un prêtre ouvrier, en plein milieu de la crise de leur dissolution. 
"Ce sont toujours les mêmes contractions qui ont toujours broyé les saints (...) appauvri et rapetissé à travers les secousses cruelles et sanglantes mais organiques de l'obéissance, le Christ-Église à continué de naître dans le monde".

On y retrouve cette expression de Christ-Église, déjà croisée dans Nous autres gens des rues et qui souligne‎ l'indissoluble unité à laquelle Madeleine restera attachée jusqu'au bout.

On y retrouve le drame de ces renoncements si caractéristiques de la période pré-conciliaire (voir des accents identiques dans le journal de Yves Congar de la même époque). Ces souffrances de l'obéissance sont les germes qui ont permis, à leur manière, le Concile. Il trace le chemin de l'Esprit au sein de l'Église.

(1) cité par Gilles François / Bernard Pitaud, ibid p. 235
(2) Lettre au Romains

23 novembre 2015

Alliance ou salut

Dans la foulée de ses propos sur apostolat et mission, Bern‎ard Pitaud poursuit sur la distinction de Madeleine entre alliance et salut. L'alliance (qui n'est pas à prendre au sens biblique) c'est finalement ne pas se contenter de côtoyer l'incroyant. Le salut, c'est lui ouvrir la porte de la miséricorde et l'accès au divin, qu'il rejette au non d'un "isme" quelconque (qu'il soit marxisme, laïscisme, rationalisme ou autre). 

(1) ibid p. 231

22 novembre 2015

Mission ou apostolat ?

Bernard Pitaud (1) insiste plus que ne l'avait fait Jacques Loew (2) sur la distinction chez Madeleine entre apostolat et mission. A son retour de Rome, il semblerait que Madeleine ait cherché à comprendre pourquoi Pie XII lui avait répété 3 fois ce terme d'apostolat qu'elle semble interpréter comme une urgence à annoncer "la gloire de Dieu"(1)
On pourrait gloser sur cette différence et sur le risque que la mission peut être donnée par soi et non donnée de Dieu. A la suite des propos de Ratzinger (3) sur l'importance du lien apostolique on pourrait aussi souligner que l'apostolat est affaire de prêtre. Mais l'apostolat des laïcs en ligne avec la "théologie du Laïcat" chez Congar n'est pas à prendre à la légère. Se faire témoin de la gloire de Dieu n'est pas annoncer naïvement son existence alors que la mort de Dieu est proclamée. C'est peut-être retrouver le chemin d'une théologie de la Croix où cette dernière est la plus manifeste. C'est aussi le culot de ne pas nier son existence, sans l'imposer, mais en le laissant habiter et transpirer en nous.

(1) Gilles François / Bernard Pitaud, Madeleine Delbrêl Poète, assistante sociale et mystique, Paris, Nouvelle Cité, 2015, p. 228
(2) in Nous autres gens des rues 
(3) Les principes de la théologie catholique

21 novembre 2015

Femmes

J'ai envoyé cette citation à une amie qui insiste beaucoup sur la place des femmes dans l'Eglise.
"L'église a toujours besoin qu'on prenne la veille... et depuis le Soir du Jeudi Saint, il vaux mieux ne pas laisser les hommes seuls" (1)
J'aime sa réponse : "Il ne faut pas non plus laisser les femmes seules".

"Homme et femme il les créa", suggère un texte bien connu. (cf. Gn 2)

(1) Madeleine Delbrel, la femme, le prêtre et Dieu, p. 113

20 novembre 2015

Archaïsmes religieux ? - Luc 19, 27 - René Girard 2

Existe-t-il dans le nouveau Testament des traces de l'archaïsme religieux, que l'on trouve plus présent dans l'ancien et qu'il nous faudrait corriger ?  
La phrase sévère de Luc 19, 27, lue mercredi pourrait probablement être classée dedans : "Quant à mes ennemis,ceux qui n'ont pas voulu que je règne sur eux, amenez-les ici et égorgez-les devant moi" (1).
Ce texte qui suit la parabole des dix mines est propre à Luc, même si on lui met en parallèle celle des talents en Mat 25. Pourtant, on trouve chez Luc des traces de violence qui contrastent avec les chemins de miséricorde propre au même auteur (Luc 15).
Matthieu envoie celui qui ne fait pas fructifier son talent aux ténèbres, ce qui n'est pas mieux, mais moins violent. L'égorgement ‎propre à Luc serait-il un hapax, c'est à dire un terme unique dans le NT ? Et le terme serait-il de Jésus ou propre à Luc. On peut espérer que la deuxième réponse soit la bonne, tant elle a dans les jours actuels des résonances avec d'autres archaïsme tout aussi violent. En prenant de la distance avec toutes les violences, à l'école de René Girard, on met en lumière ces faiblesses d'une transmission orale et de l'importance d'une exégèse construite.

Pastoralement, ces phrases mériteraient d'être expliquées, plutôt qu'ignorées en oubliant l'impact qu'elles ont sur les âmes sensibles.
En toutes hypothèses, il faut entendre en contrepoint la phrase qui elle vient de l'AT : "Dieu ne veut pas la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive". Ezéchiel 18,23

(1) traduction liturgique, source AELF

Ajout du 23/11 qui me semble bien compléter le post ci-dessus :

"Dans une parabole, Jésus se cache souvent et il n'est pas toujours là où on le pense. (...) Dieu n'est pas d'abord celui à qui nous rendons des comptes mais celui que nous avons en dépôt et dont nous avons la charge. Dieu ne nous confie pas son argent, c'est lui même qui se donne à nous" (2).

'2) Patrick Lauder, diacre, la Croix du 17/11/15

Au fond de notre coeur

A la suite de Charles de Foucauld, mais tels des porte-Christ ordinaires, il nous reste à établir nos âmes "comme autant de creux de silence où la Parole de Dieu peut se reposer et retentir" (1)

(1) Madeleine Delbrel, ibid p. 191


19 novembre 2015

Racines d'humilité

Pour suivre ce que Madeleine suggère sur la différence entre les oeuvres et l'inhabitation par Dieu, il nous faut contempler ce qu'elle dit dans "S'unir au Christ en plein monde" (1)‎ :

"Dans n'importe quelle sainteté il faut une racine d'humilité qui nous mette le nez en terre et nous rende capable de prier. Dans l'autre sens, la ligne pique en plein ciel : c'est la prière. Tous les saints inventés par Dieu n'ont pu être saints qu'en étant humbles".

Pourquoi cette voie ? Probablement parce que nos oeuvres seules risquent de nous laisser croire qu'elles sont de notre fait, alors qu'elle n'ont de sens que si elles viennent et sont portées par et en Dieu. C'est dans notre vie intérieure que s'opère le décentrement le plus radical et dès que nous prenons de la distance avec elle rejaillit la tentation du valoir.

"Tu es celle qui n'est pas", poursuit-elle, rejoignant, selon Bernard Pitaud le néant de saint Jean de la Croix (2). Nous en parlions longuement dans notre analyse "chemin du désert" à propos du "tout est rien" de Thérèse d'Avila‎. Seule cette manière de contempler nos actes nous rapprochent véritablement de Dieu. Le reste est orgueil et vanité.

(1) op Cit p. 133, cité par Gilles François / Bernard Pitaud, Madeleine Delbrêl, Poète, assistante sociale et mystique, op Cit p. 185
(2) Pitaud, op Cit p. 186

18 novembre 2015

Irénée de Lyon - Le primat de la charité

L-a-t-on assez affirmé ? J'entendais récemment qu'une des grandes spécialités françaises étaient l'art de la parole et non des actes. Un reproche qui pourrait être collectif.  "Il est meilleur et plus utile pour nous d'être peu cultivés et peu savants et, en revanche, de nous approcher de Dieu par l'amour, que de nous croire profondément savants et expérimentés et en même temps pécher contre notre Seigneur. Voilà pourquoi Paul s'est écrié : la gnose enfle, mais la charité édifié". (1)

Cette citation de Balthasar illustre le brillant résumé de l'oeuvre de saint Irénée. Le theologien démontre que toute l'hérésie gnostique est dépassée par un seul fait : l'amour du crucifié. C'est l'incarnation du Christ qui rend toutes les théories vaines, car son amour n'est pas théorique il a pris chair et s'est fait serviteur... 

(1) Irénée de Lyon, Contre les Hérésies, 1, 345, cité par Hans Urs von Balthasar, GC2, op. Cit. p. 40

17 novembre 2015

Activisme et agir - 2

Une des illustrations des propos rapportés plus haut sur ce thème est dans la réflexion posée par Madeleine dans "missionnaires sans bateau" en 1943 : "On ne peut être missionnaire sans avoir fait en soi cet accueil franc, large, cordial, à la parole de Dieu , à l'Evangile" (...), pour qu'elle se "fasse chair en nous. Et quand nous serons ainsi habités par elle, nous devenons aptes à être missionnaires" (1)

On est là au coeur de l'inhabitation‎ véritable et nécessaire qui transforme l'homme en instruments de Dieu. Un chemin d'humilité ( kénotique).


(1) Madeleine Delbrêl, Oeuvres complètes, La Sainteté des gens ordinaires, tome 7, Paris Nouvelle Cité, 2009,  p. 89

16 novembre 2015

Laudato Si, 117 - Résonance

Ma dernière petite nouvelle, "La caresse de l'ange" n'est autre, en fait, qu'un essai d'illustration de cette parole du Pape François que je retrouve en relisant sa dernière encyclique : "Quand on ne reconnaît pas la valeur d'une personne vivant une situation de handicap on écoutera difficilement les cris de la nature elle même". (1)

LS, 117, source : Pape François Laudato Si, Edition du Céras, 2015


Relire Réné Girard

Face à la barbarie, l'apport du philosophe est essentiel...

15 novembre 2015

Activisme et agir

Je découvre sous la plume de B. Pitaud cette distinction entre "agis et actifs". Il nous faut, dit-il " nous laisser agir par le Christ. Ou encore : il faut le laisser ‎agir en nous. Il y a au coeur de l'action du chrétien une passivité fondamentale, un abandon nécessaire au dynamisme de l'Esprit". Ce qu'il décrit à propos de Madeleine Delbrêl est pour lui au coeur de l'école française, inspiré par l'ouvrage d'Henri Brémond. Cette tradition sulpicienne rejoint ce que je travaille en ce moment sur le titre déjà esquissé ici de "Chemins d'humilité".
C'est rappelle-t-il aussi une vision très paulinienne et j'ajouterai très kénotique : "ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi" Gal. 2. 20

Gilles François / Bernard Pitaud, Madeleine Delbrêl, Poète, assistante sociale et mystique, op Cit p. 141

14 novembre 2015

Aller à la périphérie

Amusante description(1) de l'accompagnement de la mort de Monsieur L. par Madeleine Delbrêl dans sa première expérience de la périphérie(2). Elle lui met des lumignons en croix sur le corps jusqu'à ce qu'arrivent les pompes funèbres qui précisent que cela n'est pas l'habitude de la famille. Il faut alors tout réorganiser pour que l'arrivée des amis communistes s'y retrouvent et qu'une unité soit possible autour du défunt. 
N'est-ce pas le risque de nos projections sur l'autre. Marcher dans la "boue" (3)  à d'autres enjeux. Il s'agit de rejoindre sans perdre son âme mais dans le respect de l'autre.

(1) Gilles François / Bernad Pitaud, Madeleine Delbrêl, Poète, assistante sociale et mystique, op Cit p. 106.
(2) Evangelii Gaudium § 20, 30 et 46
(2) Evangelii Gaudium § 45 

12 novembre 2015

Charité active et signifiante

Dans ses notes sur son installation à Évry en 1933, une petite phrase de Madeleine Delbrêl donne à penser. "Se confondre avec l'Eucharistie de la paroisse (...) et lui servir de signe"(1). ‎Il y a là ce que j'appelle une dynamique sacramentelle (2).

Comme le note les pères François et Pitaud, cela résume bien la pastorale de Madeleine où l'Eucharistie n'est pas cantonnée à une liturgie isolée mais où l'on se fait porte-Christ dans une charité active et signifiante.

(1) Gilles François / Bernstein Pitaud, Madeleine Delbrêl op. Cit p. 105
(2) cf. ma recherche éponyme, Createspace 2015