"En ce temps-là, Jésus se mettait en route quand un homme accourut et, tombant à ses genoux, lui demanda : « Bon Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ? »
Jésus lui dit : « Pourquoi dire que je suis bon ? Personne n'est bon, sinon Dieu seul. Tu connais les commandements : 'Ne commets pas de meurtre, ne commets pas d'adultère, ne commets pas de vol, ne porte pas de faux témoignage, ne fais de tort à personne, honore ton père et ta mère.' »
L'homme répondit : « Maître, tout cela, je l'ai observé depuis ma jeunesse. »
Jésus posa son regard sur lui, et il l'aima. Il lui dit : « Une seule chose te manque : va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres ; alors tu auras un trésor au ciel. Puis viens, suis-moi. »
Mais lui, à ces mots, devint sombre et s'en alla tout triste, car il avait de grands biens. Alors Jésus regarda autour de lui et dit à ses disciples : « Comme il sera difficile à ceux qui possèdent des richesses d'entrer dans le royaume de Dieu ! » Les disciples étaient stupéfaits de ces paroles. Jésus reprenant la parole leur dit : « Mes enfants, comme il est difficile d'entrer dans le royaume de Dieu ! Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le royaume de Dieu. Marc 10, 17-30 (1)
Commentaire de saint Jean Chrysostome : Pour l'attirer Jésus lui montre une récompense de grande valeur et il remet le tout à son jugement. Ce qui pourrait sembler pénible, il le laisse dans l'ombre. Avant de parler de combats et d'efforts, il lui montre la récompense : « Si tu veux être parfait » dit-il : voilà la gloire, voilà le bonheur ! ... « Tu auras un trésor dans les cieux ; puis viens, suis-moi » : voilà la récompense, la récompense superbe de marcher à la suite du Christ, d'être son compagnon et son ami ! Ce jeune homme estimait les richesses de la terre ; le Christ le conseille de s'en dépouiller, non pas pour s'appauvrir dans le dénuement mais pour l'enrichir davantage (2)
Commentaire 2 : On pourrait s'en tenir là, mais une lecture cursive nous conduit plus loin. En Marc 10, 47-52, nous rencontrerons Bartimée, l'aveugle, délaissé par les hommes, rejeté « sur le bord du chemin ». Lui va voir, au delà de l'ombre et laisser même son manteau, son seul bien, pour suivre Jésus. « L'aveugle jeta son manteau,bondit et courut vers Jésus. Prenant la parole, Jésus lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » L'aveugle lui dit : « Rabbouni, que je retrouve la vue ! » Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t'a sauvé. » Aussitôt l'homme retrouva la vue, et il suivait Jésus sur le chemin. » Le contraste est saisissant. Mais l'histoire va plus loin. En Marc 14, 51, le soir de la Passion, un jeune homme suit Jésus, « vêtu seulement d'un drap. On l'arrête, mais lui, lâchant le drap, s'enfuit tout nu.». Pour certains commentateurs, il s'agit du même jeune homme riche, et plus encore de Marc l'évangéliste. Quel chemin ? Que faire, que penser de tout cela ? (3)
Ébauche d'une homélie (commentaires bienvenus) :
Suivre Marc, c'est découvrir les yeux du coeur. Jésus est notre chemin. Il est la vérité et la vie. Ce que l’aveugle voit, à nous de le découvrir, au-delà de ce qui cache l’essentiel.
La première chose à faire, c'est peut-être de se retourner vers le passé et contempler les dons de Dieu. Il faut pour cela fermer les yeux. Masquer ses yeux de chair pour voir l’essentiel. Je vous invite à le faire, maintenant. A repenser à un moment de bonheur, même s'il est loin, même s'il a été fugace. Un moment de joie pure, une rencontre, pour certains, leur mariage, la naissance d’un enfant… Et de voir combien tout cela a été don de Dieu.
Quand on fait l'exercice au plus profond de son cœur, revient souvent un moment de grande émotion, un moment de joie peut-être. Qu’est-ce qui se passe, dans ce regard. On regarde avec les yeux du coeur ?
Au sourire intérieur que l'on pourrait lire sur certains de vos visages peut faire place une hésitation, un regret. Saint Augustin le dit dans ses Confessions: "tu étais là et je ne le savais pas". On peut ajouter, à sa suite, je ne le sentais pas, je ne t'ai pas dit merci., Seigneur, pour le don que tu m’as fait ce jour là...
Pourquoi cette espérance. Par Bartimée, Jésus nous a ouvert le chemin du cœur. Et le chemin du coeur est un chemin de guérison, il ouvre nos yeux à l'essentiel. Nous voyons trop par les yeux du corps ou par les yeux de l’intelligence.
Il
y a toujours un risque, quand on lit un évangile, c’est d’oublier
le contexte, l’enchaînement voulu par l’auteur. Et dans ce cas
précis, le risque est réel, tant le chapitre 10 tout entier est
essentiel dans la compréhension de ce que Marc veut nous dire. La
seule lecture de l’histoire de Bartimée n’est finalement qu’un
épisode du projet de l’évangéliste. Il n'est pas neutre de voir
que Marc place au chapitre 10 les deux récits du jeune homme riche
et celui de Bartimée et surtout entre les deux une première
allusion à la Passion.
Il
y a là une “tension” fondamentale qui se joue ici entre ce qui
peut, dans nos richesses nous aveugler et nous éloigner de Dieu, le
récit du jeune homme riche, qui refuse de tout quitter et de suivre
Jésus et le geste de Bartimée, qui abandonne même son manteau pour
courir derrière Jésus. Et entre les deux, une allusion à la Croix.
Heureux
les pauvres : ils ont accès au mystère, semble dire ici
Marc
[Il
n'y a pas de béatitudes chez Marc].
Commençons par nous rappeler
l’évangile, lu il y a quinze jours. Le jeune homme riche
voyait avec les yeux de l’intelligence. Il croyait qu’il
suffisait de suivre les commandements pour atteindre Dieu. Bartimèe,
celui qui pourtant restait au bord du chemin, qui ne connaissait et
ne pratiquait pas tout ça, a vu, au delà de l'ombre de ses yeux de
chair, ce que les voyants ne voient pas. Il en laisse son manteau,
son seul bien, pour suivre Jésus.
«Prenant
la parole, Jésus lui dit alors : « Que veux-tu que je fasse pour
toi ? » L'aveugle lui dit : « Rabbouni, que je retrouve la
vue ! » Et Jésus lui dit : « Va, ta foi t'a sauvé. » Aussitôt
l'homme retrouva la vue, et il suivait Jésus sur le chemin. »
Le contraste est saisissant.
D'un
côté, le « voyant » qui a vu de ses yeux de chair, mais
n’a pas pu aller à l’essentiel.
De
l'autre, Bartimée, l’aveugle qui ne voit pas mais qui croit et
quitte tout…
A
dire vrai, l'histoire de Marc ne s’arrête pas là. En Marc 14, 51,
le soir de la Passion, un jeune homme suit Jésus, « vêtu seulement
d'un drap. On l'arrête, mais lui, lâchant le drap, s'enfuit tout
nu.». Pour certains commentateurs, il s'agit du même jeune homme
riche, et plus encore, il s’agirait de Marc l'évangéliste
lui-même. Quel chemin ? Que faire, que penser de tout cela ?
Suivre Marc, c'est découvrir les yeux du coeur. Jésus est notre chemin. Il est la vérité et la vie. Ce que l’aveugle voit, à nous de le découvrir, au-delà de ce qui cache l’essentiel.
Un
petit détail au début, dans l'histoire de Bartimée que nous venons
de lire, mérite une autre petite explication. Jésus sort de
Jéricho. Pour les pères de l'Eglise, l'allusion à Jéricho n'est
pas anodine. Elle indique une descente de Jésus dans le monde dans
sa réalité la plus banale. Quand Jésus vient à Jéricho, il vient
vers nous. il veut habiter chez nous. Prenons alors le temps de nous
mettre dans la peau des hommes de Jéricho, d’un Zachée, d’un
Bartimée et de ressentir ce que nous ne pouvons voir de nos yeux.
La première chose à faire, c'est peut-être de se retourner vers le passé et contempler les dons de Dieu. Il faut pour cela fermer les yeux. Masquer ses yeux de chair pour voir l’essentiel. Je vous invite à le faire, maintenant. A repenser à un moment de bonheur, même s'il est loin, même s'il a été fugace. Un moment de joie pure, une rencontre, pour certains, leur mariage, la naissance d’un enfant… Et de voir combien tout cela a été don de Dieu.
Quand on fait l'exercice au plus profond de son cœur, revient souvent un moment de grande émotion, un moment de joie peut-être. Qu’est-ce qui se passe, dans ce regard. On regarde avec les yeux du coeur ?
Au sourire intérieur que l'on pourrait lire sur certains de vos visages peut faire place une hésitation, un regret. Saint Augustin le dit dans ses Confessions: "tu étais là et je ne le savais pas". On peut ajouter, à sa suite, je ne le sentais pas, je ne t'ai pas dit merci., Seigneur, pour le don que tu m’as fait ce jour là...
Ne
nous en voulons pas. C'est le propre de Dieu de donner et de
s'effacer. D'aimer à en mourir.
Ce
que nous n'avons pas vu, ce que nous n'avons pas dit reste encore
possible. Donne nous Seigneur les yeux de la foi. Permet que sur le
chemin de nos vies nous ne doutions plus de ta Présence. Ouvre nos
yeux à ce qui est ta Vérité.
Alors nous pourrons, comme Bartimée courir derrière toi et dire "fait que je vois".
Quand on se tourne vers l'intérieur, quand on goûte à la présence de Dieu, on peut s'écrier, comme dans la 1ère lecture, à la suite du prophète Jérémie: "rassemble des confins de la terre (...) tous ensemble, l'aveugle et le boiteux, la femme enceinte et la jeune accouchée : c'est une grande assemblée qui revient (...) je les mène, je les conduis vers les cours d'eau par un droit chemin où ils ne trébucheront pas". (Jérémie 31, 8-9)
Alors nous pourrons, comme Bartimée courir derrière toi et dire "fait que je vois".
Quand on se tourne vers l'intérieur, quand on goûte à la présence de Dieu, on peut s'écrier, comme dans la 1ère lecture, à la suite du prophète Jérémie: "rassemble des confins de la terre (...) tous ensemble, l'aveugle et le boiteux, la femme enceinte et la jeune accouchée : c'est une grande assemblée qui revient (...) je les mène, je les conduis vers les cours d'eau par un droit chemin où ils ne trébucheront pas". (Jérémie 31, 8-9)
Pourquoi cette espérance. Par Bartimée, Jésus nous a ouvert le chemin du cœur. Et le chemin du coeur est un chemin de guérison, il ouvre nos yeux à l'essentiel. Nous voyons trop par les yeux du corps ou par les yeux de l’intelligence.
Les
yeux du coeur nous ouvre à autre chose. Il nous transforme, y
compris dans le regard porté à nos frères.
Je n'ai pas encore évoqué la dernière phrase de la deuxième lecture (Hébreux 5, 6). Elle est comme un sommet, elle nous conduit de Jéricho à Jérusalem. Au bout du chemin que va suivre Bartimée à la suite de Jésus, en quittant le monde des aveugles vers la vie, il y a le Golgotha, le lieu où le grand prêtre éternel (le fameux Melchisédek de la 2eme lecture) va donner le sacrifice unique : sa vie. Saint Marc y fait déjà une allusion, comme je l’ai dit entre le récit du jeune homme riche et celui de Bartimée. Il aura plus loin une image très parlante de cette route prise par Jésus.
Je n'ai pas encore évoqué la dernière phrase de la deuxième lecture (Hébreux 5, 6). Elle est comme un sommet, elle nous conduit de Jéricho à Jérusalem. Au bout du chemin que va suivre Bartimée à la suite de Jésus, en quittant le monde des aveugles vers la vie, il y a le Golgotha, le lieu où le grand prêtre éternel (le fameux Melchisédek de la 2eme lecture) va donner le sacrifice unique : sa vie. Saint Marc y fait déjà une allusion, comme je l’ai dit entre le récit du jeune homme riche et celui de Bartimée. Il aura plus loin une image très parlante de cette route prise par Jésus.
Que
cherche-t-il à dire ?
Pour
Marc, le peuple juif ne voyait pas l'amour de Dieu. Il était
derrière un voile. Au Golgotha, nous dit Marc, Dieu va déchirer le
voile du haut en bas. Nos aveuglements vont laisser place à la
lumière. Et qu’est-ce qui se révèle : Un Christ qui se donne. Ce
que nous refusons de voir se dévoile sur la Croix. Dieu est don.
Dieu est amour. Alors ouvrons les yeux sur l'essentiel.
Le
chemin de Bartimée, c’est regarder avec les yeux du coeur, voir
l’essentiel, voire que l’amour est don. C’est le chemin de
Marc. Il avait des biens, il se retrouve nu, le jour de la Passion.
Il est nu, mais il voit...
(1) source AELF
(2) Saint Jean Chrysostome, Homélie 63 sur St Matthieu ; PG 58,603 (trad. cf. Marc commenté, DDB 1986, p. 104)
(3) cf. Sur les pas de Marc
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