Les textes de ce dimanche nous interpellent sur notre manière de prier. Ils nous conduisent à sortir du troc vers une véritable contemplation.
L’échange d’Abraham (Gn 18) est en effet un peu désespérant. Il se situe juste après l’épisode de Mambré, cette visite particulière où Abraham débute une route nouvelle, mais avant le chapitre 22 et cette fausse piste du sacrifice d’Isaac. Abraham n’a pas encore perçu la vraie nature de Dieu, il négocie avec lui comme un marchand de tapis ? (1) Abraham est bien imprudent de demander cela.
Qu’est ce que cela nous dit de Dieu ?
Dieu n’est pas celui qui demande le sacrifice du premier-né pour calmer sa colère. Nous n’avons pas à entrer dans un troc. Il nous faut au contraire changer notre regard sur Dieu lui-même. Et c’est probablement toute la pédagogie de Dieu qui commence ici. (2)
C’est probablement le cœur du message de l’Evangile. Jésus nous invite à passer du Dieu marchand au Dieu père. À contempler sa tendresse.
Dieu n’est pas un distributeur de don qui demande un montant pour un service,
Dieu EST amour.
C’est en contemplant cette affirmation fondamentale que notre cœur peut se retourner loin d’une exigence vers une confiance, plus intérieure.
Dieu ne nous donnera probablement pas la réussite aux examens, ne guérira pas toutes nos maladies, ne changera pas nos pauvretés en richesse.
Dieu EST qu’amour disait François Varillon.
C’est quand nous rejoindrons son envie d’aimer que sa tendresse deviendra lumineuse, que son amour deviendra lieu de contagion, que nous danserons avec lui sa danse…
Ne rabâchons pas les « Notre Père » comme des euros à aligner pour obtenir sa clémence.
Contemplons plutôt notre Père…
Changeons notre regard…
Jeudi nous fêtions la fête d’Elie, ce grand prophète qui s’est pris pour Dieu en massacrant ses concurrents.
Il lui a fallu 40 jours au désert pour percevoir que Dieu n’était pas dans la foudre ou le feu, mais qu’il se perçoit dans cette brise légère et insaisissable du silence intérieur.
Profitons de l’été pour arrêter nous aussi notre course et entrer dans cette écoute particulière où Dieu prends soin, non de nos faux désirs, mais de l’essentiel, et nous donne la paix intérieure, la foi, l’espérance et la charité. (3)
Élie nous conduit vers ce chemin fragile, où Dieu se résume à la fraction du pain.
Il est cette trace fragile qui réveille en nos cœurs la contemplation d’une flamme sous la brise ténue de l’Esprit ?
Réécoutons ce que nous disait Ambroise…
« Pourquoi détournes-tu ton visage ? Que la lumière brille au milieu de nos ténèbres. [qu’il brille] dans nos cœurs pour faire resplendir (...) la gloire qui rayonne sur le visage du Christ. (...) le Christ [est là] lumière du Père, » (4)
L’enjeu est peut-être de contempler non pas un feu qui détruit comme à Sodome, mais bien ce buisson ardent qui ne consume pas et mais réchauffe, console, et donne cette paix intérieure particulière, cette grâce lumineuse, ce torrent dont nous ne pourrons jamais percevoir l’immensité (5).
Apprends nous Seigneur à oser prier et à demander l’essentiel : ce don de l’Esprit (6) qui transforme notre cœur en danse, qui convertit nos demandes en prière et en chants, qui nous dévoile comme à Elle que le « bruit d’un fin silence » n’est autre que à prière des anges comme le souligne une belle interprétation de 1 Rois 19 (2)
(1) voir également ci-dessous l’extrait du commentaire de Marie-Noēlle Thabut n.1 très éclairant sur ce point
(2) voir mon livre pédagogie divine
(3) ibid.
4) Saint Ambroise, commentaire sur le psaume 43,(Ce commentaire fut le dernier travail d'Ambroise, quelques semaines avant sa mort.)
(5) Bonaventure à la suite d’Ezechiel nous décrivait comme une petite amphore incapable de recueillir l’immensité du don de Dieu.
(6) voir ci dessous le commentaire conseillé par Michel Mertens dans RCF
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