31 décembre 2005

Le luxe de la division des chrétiens...

Athénagoras : "l'homme moderne et le monde ne peuvent plus s'offrir le luxe de la division chrétienne, des raisonnements et des réserves qui ne sont plus inspirées par l'évangile, des discussions académiques confortables et sans fin". Déclaration du patriarche à l'occasion du premier anniversaire de la levée de l'anathème. (1)

Je pense que nous devons tout faire pour mettre en place cette unité, à commencer par la conversion de notre regard sur les autres et au delà de ce qui est le fondement de notre foi...

(1) cité par Joseph Ratzinger, ibid p. 242

30 décembre 2005

Vers les orthodoxes...

Paul VI le 20 septembre 1963 écrivant au patriarche Athénagoras citait Philipiens 3, une parole que le patriarche reprendra dans un texte décisif à Noël 1965 (2 Co 5,18) : "ce qui était vieilli a disparu, voici que du neuf à ressurgi" (1)
Je crois que dans cette intuition doit reposer nos efforts. Certes cela reste périlleux, car nous sommes dépendants de nos évolutions respectives, de la construction de nos traditions qui constituent notre propre unité, et en même temps, il subsiste au delà, une unité plus grande, que nous partagions au temps des Pères de l'Eglise et avec laquelle nous devons faire du neuf. Cela passe bien sûr par une purification de notre mémoire et un pardon véritable et partagé. Comme un vieux couple qui partage la même origine de désir, mais qui doit secouer tout ce qui masque leur élan initial.
(1) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 229 à 232

A méditer...

29 décembre 2005

Unité ?

En complément du billet précédent, un peu pessimiste, je tiens ici à souligner la volonté clairement afficher d'avancer dans ce difficile chemin de l'unité :
On peut "se demander avec encore plus d'insistance si la permanence de la division est justifiable, car ce n'est l'unité qui a besoin d'être justifiée mais la division." (1).
Il semble plus important en effet d'entrer à mon avis dans une orientation de pensée et d'action qui respecte l'attitude oecuménique : l'autre dans sa recherche de ce qui est l'essentiel du christianisme ; attitude pour laquelle "l'unité est un bien prioritaire qui exige des sacrifices, tandis que la séparation a besoin d'être justifiée en chaque cas". (2)
Joseph Ratzinger va plus loin en opposant "Au chauvinisme ou confessionnalisme de la division" (...) "une herméneutique de l'union qui fait une lecture de la confession en s'orientant dans le sens de l'union." Pour lui deux attitudes s'opposent :
a) "un chauvinisme confessionnel qui s'oriente, en définitive, non d'après la Vérité mais d'après l'habitude et qui fixé dans ce qu'il a de propre, s'attache avant tout précisément à ce qui est orienté contre les autres
b) de l'autre côté, on a un une indifférence de la foi qui voit des obstacles dans la question de la vérité, (...) en fait une alliance de surface (...) porteuse de nouvelles divisions
.
La solution serait pour lui dans "une foi en recherche de l'unité" qui se laisse purifier et approfondir en vue de l'atteindre. Cette foi "exige de haut dépassement et impose le plus extrême dépouillement, réclamant de lui une patience inépuisable et la disponibilité pour une purification et un approfondissement toujours nouveaux". "Le christianisme repose sur la victoire de l'invraisemblable : "sur l'aventure de l'Esprit Saint qui conduit l'homme au dessus de lui et qui précisément par là le ramène à lui-même. (3)
(1) - (2) - (3) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 223- 226-227

28 décembre 2005

Les limites d'un oecuménisme hâtif...

Pour J. Ratzinger, un concile véritablement oecuménique pourrait bien fédérer un pluralisme et le conduire à l'universalité des chrétiens mais il n'y aurait pas là une véritable union et l'unique dogme commun serait celui de son impossibilité. On n'arriverait pas à l'union de l'Eglise mais à la renonciation définitive de l'unité... (1).
Je dois dire qu'au delà de cet extrait un peu court, la lecture de ses pages sur l'histoire des essais de rapprochement au cours des 50 dernières années est saisissante et instructive... Le chemin est long et escarpé au delà de la bonne volonté des uns et des autres, il y a effectivement quand on y réfléchit des enjeux pas simples, en particulier face à la disparité du protestantisme...

(1) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 220

27 décembre 2005

Noël vers Pâque, aboutissement

Depuis ce petit enfant livré jusqu'à Pâque, on progresse dans la révélation jusqu'à assister à l'aboutissement d'une Pâque définitive qui révèle le sens de l'histoire. C'est l'histoire d'un exode. Elle commence avec Abraham par l'invitation à sortir et cela reste continuellement son mouvement propre qui atteint à sa véritable profondeur dans la Pâque de Jésus-Christ : dans l'agape eis télos, dans l'amour radical qui va jusqu'à l'exode total hors de soi-même, à la sortie de soi pour aller aux autres jusqu'au don radical dans la mort. "Je m'en vais et je viens vers vous" (Jn 14, 28) (1) Notre vie n'a de sens que dans ce décentrement, ce quitte ton pays pour te trouver toi-même, mais ailleurs, en Christ, dans l'amour total qui n'est pas en toi... C'est peut-être ce que Hb 10,20 décrit comme le "passage au travers du voile de la chair". Est-ce pour autant une désincarnation ? Non, c'est en un sens une transfiguration qui nous serait demandée. Purification pour devenir être de lumière ? Décentrement pour une liberté nouvelle, au delà de ce qui nous retient hors de l'amour véritable. On voit dans ces balbutiements la difficulté même d'expression, la fragilité d'un excès de spirituel et l'importance, en même temps de cette ek-stase... "hors de soi pour se trouver soi-même" (2).
(1) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 210
(2) cf. J. Moltmann Theologie der Hoffnung, München, 1966 (5ème édition).

23 décembre 2005

Tout a changé

C'est à la fois une aporie chrétienne et une réponse chrétienne : rien n'a changé pour le monde et pourtant tout a changé. Il y a transformation du concept du Salut impliquée dans la diastase de point central et de fin, du télos et du péras comme l'exprime le cardinal Daniélou.
Et c'est peut-être en cela que Noël est plus qu'un conte merveilleux. Il est la manifestation première de la kénose d'un Dieu qui se fait petit enfant, être de chair fragile et pourtant rupture dans la chaîne implacable de la violence et de la mort. Le bruit d'un fin silence dans la violence d'un monde qui se déchaîne... et dont le massacre des saints innocents sera le premier signe.

22 décembre 2005

L'agir d'abord

La priorité de l'actio sur le Verbum est essentielle. Dieu a agi avant que l'homme le cherche...
"La résurrection d'entre les morts était attendue par Israël comme la conclusion de l'histoire, donc, au sens le plus littéral du mot comme eschaton, comme l'ultime action de Dieu" (1) Mais, j'ajouterais, elle n'a été que partielle, pour nous laisser le temps de goûter/désirer à sa présence.
Dans cette résurrection, "le cadre de l'histoire est dépassé, au dessus de l'histoire et ancré sur elle". (2) La résurrection est introduite dans l'histoire et nous sommes invités en quelque sorte à croire à l'eschaton au sein de l'histoire, à l'historicité de l'oeuvre eschatologique de Dieu. "La mort du Christ, la mort de Dieu provoquée par l'homme met en lumière avec l'effrayant effet d'un éclair l'épouvantable puissance de destruction de la méchanceté humaine, de la subversion des valeurs humaines comme la justice ou la piété au nom duquel Jésus a été condamné à mort. Mais cela signifie que Dieu maîtrise le passé de l'homme - le péché - en invitant à regarder vers l'avenir - vers le Christ (...) eschaton de l'histoire". (3)
De cette analyse surgit "une ligne de l'histoire du salut qui se prolonge encore et se situe à présent entre les deux signes du "déjà" et du "pas encore".
Je rejoins ce qui m'avais frappé également dans la thèse de R. Girard (cf. "Des choses cachées depuis la fondation du monde"). Ce que l'incarnation démontre ce n'est pas un Dieu qui assoiffe son désir de justice, mais bien au contraire, la mise au pilori du tout-amour.
Et c'est en cela qu'un renversement de l'histoire est rendu possible.
(1) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 207
(2) ibid p. 208
(3) p. 209

21 décembre 2005

Dieu Immuable... ? - II

Lorsque J. Ratzinger insiste sur le primat de l'histoire sur la métaphysique, sur toute la théorie de l'essence et de l'être, ce primat est mis en évidence par le fait que "l'image même de Dieu est soustraite à la simple doctrine de l'ousia". Il me semble que c'est ici que se situe la frontière décisive entre le concept du Dieu de la Bible et celui des Pères, ce qui constitue la difficulté constamment soulignée de la fusion patristique des pensées grecques et biblique et met en évidence une tâche dont la théologie chrétienne est loin d'être venue à bout. Pour le concept grec de Dieu l'essentiel est que Dieu est l'être pur immuable et que par conséquent il est agissant en aucune façon; son immutabilité absolue inclut qu'il s'enclose en lui-même, qu'il soit exclusivement tourné vers lui-même sans relation avec l'être mouvant (1). Pour le Dieu biblique, si je le comprends bien, la relation et l'agir sont plus essentiel. En cela création et révélation sont les deux propositions de base à son sujet. On peut ainsi dire que l'être ne "nous est pas accessible autrement que dans son agir." (2)
Cette vision rejoint ce que je cherchais depuis longtemps et qui me restait encore en porte à faux par rapport à ce que j'avais lu chez Thomas d'Aquin. J'y retrouve des éléments appréciés chez Varillon, notamment dans sa vision un peu iconoclaste mais combien éclairante de la souffrance de Dieu

(1) cf. Aristote, Politique 1325b 28 et Métaphysique 1074b, 21-35
(2) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 206

19 décembre 2005

Une brisure...

"La puissance de la mort, qui est la constante caractéristique de l'histoire a été brisée en un certain point par la puissance de Dieu et par là, une espérance toute nouvelle a été infusée dans l'histoire". (1)
C'est le nouvel Adam qui bouleverse notre histoire. Dieu s'est fait chair. Telle est notre foi.
(1) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 206

18 décembre 2005

Liberté fragile - II

Pour Joseph Ratzinger, le "concept central d'une philosophie et d'une théologie chrétienne de l'histoire devrait être la liberté, la liberté réelle qui inclut la non déductibilité et exclut par le fait même la cohérence parfaite de tout système de pensée; (...) Jésus-Christ avènement de la nouveauté et de l'imprévisible". (1) Si Dieu pouvait être pensé, déduit, il ne serait plus lui-même un être libre. On retrouve ce qui a déjà été évoqué largement dans ce blogue, à propos des liens entre liberté finie et infinie, à partir notamment des textes d'Urs von Balthasar... "La liberté a alors à faire dans chaque cas avec l'amour et l'amour avec le salut... Cela signifie ensuite que l'homme trouve le salut non pas dans un accès réflexe à lui-même, mais au delà dans la réflexion, dans un arrachement à lui-même, non dans une permanence en lui-même mais dans une sortie de lui-même. Cela signifie qu'en acceptant l'autre, le particulier, ce qui lui semble non nécessaire et libre, l'homme trouve la Totalité et le Vrai". (2)
J'aurais pu écrire ces phrases dans mes billets sur le décentrement... mais je m'incline devant cette ouverture à l'altérité... et je trouve là une consécration à cette recherche difficile sur la raison, l'intelligence de la foi, non comme une seule intelligence mais comme à travers l'acte de recevoir une possibilité d'être éclairé par l'autre.
(1) et (2) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 189

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17 décembre 2005

Liberté fragile

La faiblesse du concept rahnérien serait une conception de la liberté trop axée sur l'auto-réalisation, qui confrontée à la liberté divine conduirait à l'impression que Dieu agit seul. A travers cela on aboutit pour J. Ratzinger à une pré-destination. La Totalité rahnérienne n'est pas pour lui ouverte, à la différence d'une tension spirituelle qui doit être absolument une synthèse ouverte". (1) Mais où se trouve l'ouverture... Dans une fidélité à la Tradition, dans une quête incessante à travers la science théologique, où finalement peut-être dans ce décentrement qui me questionne depuis si longtemps, ce pas en avant dans l'inconnu de Dieu... ?

(1) d'après Joseph Ratzinger, ibid p. 188

Ek-stase... Dépassement

Pour J. Ratzinger, la direction à prendre pour dépasser Rahner serait "une spiritualité de conversion, de l'ek-stase, du dépassement de soi, qui est bien aussi un concept fondamental de Rahner "mais qui perd dans sa synthèse son sens concret.
Rahner a voulu trop. A l'inverse, Hans Urs von Balthasar a défini son programme d'une théologie de l'histoire en lui donnant le titre "le tout par fragments" pour bien souligner dès l'abord qu'il n'est pas donné à l'homme de voir et de lire le tout en lui-même, mais qu'il peut que "le pressentir en fragments dans ce qu'il a de positif et de particulier". (1)
La lecture de ces deux grands théologiens du XXième siècle qui marque ma vie depuis deux ou trois ans et cette écriture s'éclaire petit à petit à travers cette prise de distance par un tiers... Elle interpelle au delà de la lecture d'un mot à mot où l'on reste marqué par un certain mimétisme... Je pense que la vérité se trouve dans cette tension, dans cette recherche hyperbolique entre ce qui est révélé et ce qui peut traverser notre quête de l'intérieur, comme ce dépôt insaisissable d'un souffle fragile...

(1) d'après J. Ratzinger, ibid p.186 et 187

15 décembre 2005

Que tous soient un...

Les crises ne peuvent être dépassées que par la solidarité de tous les chrétiens. C'est justement pour cela que le dialogue oecuméniques est maintenant plus nécessaire qu'autrefois. Nous les chrétiens, ne devons nous pas apprendre de ceux qui sont loins de l'Église que le dialogue est le seul chemin pour résoudre les différends et que c'est seulement ensemble que nous pouvons affronter les grandes tentations qui attaquent les fondements même de la foi ? Personne ne peut s'enfermer dans son autosuffisance. Chaque chrétien, chaque confession, a besoin de tous les autres chrétiens et de tous les hommes, même si dans son Èglise il témoigne de la plénitude de la vérité. Il faut bien avoir conscience que la division des chrétiens est un péché contre l'Esprit Saint et qu'elle est le plus grand obstacle sur le chemin de la conversion du monde au Christ. Le Sauveur a prié pour que tous soient un afin que le monde croie (Jn 17,21).
Métropolite Seraphim, communication à Bucarest en 1998, cité par Magnificat, nº 132, novembre 2003

unité

14 décembre 2005

Nouveauté...

La phrase de K. Rahner "Celui qui accepte son existence ... celui-là dit oui au Christ (ibid p. 225ss) contredit la nouveauté du christianisme et réduit la libération chrétienne à une libération illusoire. (1)

Il ne s'agirait pas d'accepter sa condition comme un Job moderne, mais d'entrer dans une tension, qui va au-delà...
(1) d'après J. Ratzinger, ibid p. 185

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13 décembre 2005

Un fil rouge

Il n'y a pas de bon choix, ni de choix facile. Notre vie est toujours plus complexe et fragile dans un monde où les répères sont flous ou multiples. Je pense que seule une prise de distance, un temps de réflexion, un temps d'éclairage et de prière nous permet de trouver ce difficile équilibre.
La lecture d'un tiers aide à ce cheminement même si elle nous dérange dans nos certitudes. C'est ce que j'essaye de vous faire partager depuis près d'un an... J'espère que cela vous est utile... mais le petit nombre de retour m'interpelle. Bonne préparation de cet avénement...