Qui sont les saints d’aujourd’hui ?
Notre pape François parle des saints ordinaires, ceux dont on ne parle pas. Après le rapport de la CIASE, on ne peut ignorer la multitude des personnes touchées par la violence sexuelle des hommes, surtout dans nos églises, victimes souvent d’une bien fausse sainteté, celle de l’apparence extérieure.
Ne regardons pas avec nos yeux de chair, ne nous laissons pas troubler par les ors et les dentelles, les ornements et les distinctions apparentes qu’elles soient des soutanes bien noires, ou des aubes trop blanches, comme celle que je porte aujourd’hui car si le cœur de l’homme peut être capable du meilleur, il peut, derrière cette apparence, rester fourbe, vil, violent et peut conduire au pire comme nous venons de le découvrir dans le document de la CIASE qui brûle encore nos yeux abasourdis.
Faut-il répéter seulement les paroles de Paul pour trouver un chemin intérieur d’humilité ? «Je ne fais pas le bien que je veux et je fais le mal que je ne veux pas.» Rom. 7:19.
Au-delà d’une nécessaire introspection intérieure, ne nous laissons pas, pour autant, tenter par ceux qui cherchent à diviser l’Élan qui nous pousse au désert pour réaliser combien les tentations d’avoir et de pouvoir/ ou de valoir nous empêchent d’avancer.
Ne passons pas à côté, n’oublions surtout pas ceux qui souffrent… Car leurs cris serait alors inutiles…
Dans l'évangile d'aujourd'hui, celui des Béatitudes, on entend encore résonner le cri de Jésus « Heureux , les souffrants ».
C’est du bout des lèvres que nous pouvons espérer qu’ils soient heureux, enfin, ceux que l’on a souvent ignorés, les migrants, les délaissés, les enfants maltraités, meurtris, éliminés. Jésus l’affirme : ils sont tout aimés de Dieu…
Pouvons nous aujourd'hui entendre cette béatitude sans céder à la colère et à la honte devant tant de vies brisées?
Le rapport de la CIASE nous interpelle, chacun à notre niveau, membres d'une même Eglise, Notre Église, le nous ecclésial prend là tout son sens pour réfléchir à son fonctionnement actuel, ses habitudes, de ses petites lâchetés à son silence parfois abyssal... Ne restons pas des spectateurs muets ou pire, des détracteurs qui divisent sans agir !
Notre Église a besoin de nous tous, femmes et hommes, baptisés, laïcs, et clercs pour se reconstruire, se guérir des fausses apparences, et rebâtir sur le roc. Dieu a besoin de nos mains, répétait Etty Hillesum… il ne fera pas le travail tout seul…
Relisons la première lecture sous ce prisme :
« Ne faites pas de mal à la terre,(...)
(...) voici une foule immense,
que nul ne pouvait dénombrer,
une foule de toutes nations, tribus, peuples et langues.
Ils se tenaient debout devant le Trône et devant l’Agneau,
vêtus de robes blanches, avec des palmes à la main.
Et ils s’écriaient d’une voix forte :
« Le salut appartient à notre Dieu
qui siège sur le Trône
et à l’Agneau ! »
(...)
L’un des Anciens prit alors la parole et me dit :
« Ces gens vêtus de robes blanches,
qui sont-ils, et d’où viennent-ils ? »
Je lui répondis :
« Mon seigneur, toi, tu le sais. »
Il me dit :
« Ceux-là viennent de la grande épreuve ;
ils ont lavé leurs robes,
ils les ont blanchies par le sang de l’Agneau. »
Si notre société vit sur l’apparence,
Dieu seul regarde le cœur de l’homme.
Dieu seul sait où est l’essentiel.
Dieu seul est amour.
Un grand espoir se lève pour répondre présents à l’appel du pape de lancer un synode sur la synodalité ou, pour parler plus clair, pour apprendre à marcher ensemble vers la véritable et inaccessible sainteté, celle qui transpire, fragile, du quotidien, de ces femmes et de ces hommes, réunis dans une assemblée vivante où tous les chrétiens, décidés à discerner comment doit s'amorcer ce changement. Il nous faut chercher ensemble, afin que cela ne reste pas l’affaire de « sachants », mais celle d'une véritable assemblée de « pierres vivantes », de priants, d’aimants en actes et en vérité. L’Église a besoin d’un profond renouveau, de cet « aggiornamento » véritable qui a conduit déjà à Vatican II. Elle a besoin de vous, de nous.…
Dans notre diocèse, des groupes vont se créer pour vivre le synode en vérité. Ne passez pas à côté de l’appel. Par la foi qui vous habite, par l’espérance que Dieu a mis en vous, peut jaillir l’Église dont rêve le Christ, ce royaume dont il parle, non une réalité déjà là, mais toujours en devenir, toujours en marche.
La sainteté de l’Église n’est pas une succession de saints passés, mais sa capacité à se laisser toujours à nouveau saisir par le Christ.
Saint Paul le disait à sa manière, le passé est « balayure », ce qui compte c’est se laisser toujours, à nouveau, traverser par la Parole, « se laisser saisir par Lui, le Christ (Ph. 3), le seul prêtre sans tâche, celui qui marche au devant de la multitude.
Ne baissons pas les bras, l’Esprit est là, il ne cesse d’être là pour nous relever, nous faire grandir. Il a besoin de chacun de nous.
* Merci à ma femme et l’amie de la première heure qui m’ont aidé à affiner ma pensée. Libre à vous, amis, de réagir.
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