Hier nous avons vécu le grand silence du samedi saint, le cœur empli et meurtri du souvenir de cette souffrance des femmes et des hommes de notre temps, des enfants maltraités, de tous ces dénis d’humanité qui nous sautent au visage jusqu’à cette guerre meurtrière maintenant aux portes de l’Europe. Combien notre monde semble aujourd’hui fragile !
Le mal a-t-il gagné sa cause ?
Comment espérer encore…?
Où es-tu mon Dieu ?
Où a-t-on mis notre foi ?
Nous étions dans le noir et pourtant…
Et pourtant, hIer soir, d’un feu de joie a jailli la lumière et en brandissant le cierge pascal, j’ai chanté « lumière du Christ…. »
Quelle est cette flamme fragile qui brille soudain dans nos nuits obscures ?
Voici que vient une aube nouvelle, un jardin où une fleur mystérieuse et fragile vient de naître.
Au cœur de nos souffrances et de nos doutes, par le mystère encore insaisissable de la croix se révèle à nous un brin d’espérance….
Que nous dit l’Evangile ?
Ce n’est pas aux disciples qu’il appartient de sentir en premier le bruit d’un doux murmure, mais à une femme, Marie, celle là-même qui probablement (1) a compris à l’avance, à Béthanie, que Jésus allait mourir pour nous et qui le cherche pourtant contre toute espérance dans le jardin du monde…
Le cri de Marie doit rejoindre notre quête…
Il n’est plus là ? L’homme… l’ecce homo broyé par la violence des hommes.
Où es-tu Seigneur ?
La course de Pierre et du disciple bien aimé est d’une certaine manière aussi la nôtre en ce matin de Pâques…
À quoi croyons-nous ?
Y croyons-nous ?
Et nous, le sentons-nous ?
Pouvons nous faire d’une absence une espérance ?
Le saut de la foi à laquelle nous invite la liturgie est finalement de croire qu’à partir de signes fragiles, un vide, un linceul plié, l’espérance peut naître.
Une bien petite espérance et pourtant…
Christ n’est pas mort en vain…
S’il est parti en silence, s’il semble insaisissable, c’est bien parce qu’il a besoin de nous…
Il a besoin de vous, les parents de Jade pour faire naître dans le cœur de votre enfant, baptisée tout à l’heure, l’envie d’aimer…
L’envie d’aimer.
C’est toujours frustrant d’arrêter là la lecture de Jean car dans la suite du chapitre 20, Marie voit, ce jour-là, l’insaisissable.
« Allez dire à ses disciples et à Pierre : “Il vous précède en Galilée. Là vous le verrez, comme il vous l’a dit.” » disait déjà Marc 16,7…
Creusons cela…
Il nous précède en Galilée - c’est à dire dans le monde, auprès des souffrants. Il est absent et pourtant toujours là.
Pourquoi ?
À chaque fois que nous répondons par l’amour à la violence ou la désespérance, Christ est présent…
Il est ressuscité dès que l’amour surgit…
Cela ne veut dire finalement qu’une chose, c’est par nous, en nous, à chaque fois que nous « entrons dans sa danse », celle du don, que Dieu renaît.
Il a « besoin de nos mains » (2) et de nos cœurs pour être, pour renaître.
Osons y croire, porté par ce don fragile de l’Esprit qui met en nous la foi…
Chantons et dansons pour notre Dieu, l’alléluia.
Non dans une danse éphémère, mais parce que cela nous (re)met en route : il est ressuscité.
Osons y croire, osons le vivre…
Aujourd’hui est venu, en nous, se loger une flamme fragile, transformons là en feu de joie.
Donne nous Seigneur cette force toute intérieure de croire en cette aube nouvelle qui fait renaître en nous un chemin de vie.
Donne nous de croire que l’amour est plus fort que la mort, que la lumière va éclairer nos nuits…
Christ est ressuscité.
Il est vraiment ressuscité…
Car en nos cœurs qui s’ouvrent Dieu renaît à la vie.
(1) cf. Sylvaine Landrivon, Les leçons de Béthanie, Cerf 2022.
(2) c’est l’affirmation sublime d’Etty Hillesum, voir ses lettres au camp de Westerbroch in « une vie bouleversée »…
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