11 janvier 2007

Soif de Dieu...

Si le désir est l'aspiration de l'âme vers Dieu, c'est en ayant soif de Dieu qu'elle devient capable de le saisir. Ce n'est donc pas par un enseignement subi qui impose que la soif peut naître, mais dans un "être avec" qui fait jaillir en l'autre la soif véritable. C'est pour moi le fondement de toute pastorale inductive, celui du compagnons d'Emmaüs, qui marche avec et laisse transpirer le désir d'aller plus loin.

10 janvier 2007

Mort...

La mort du Christ, nous dit Balthasar, (à propos de Rm 6,10) "c'est la mort au péché et c'est aussi la mort à toute espérance humaine de réussite". Rien n'est s'il n'est en Dieu.

09 janvier 2007

Même notre oui est inutile

Est-ce que nous n'avons pas souvent la tentation de "chasser Dieu de la finitude", de refuser de "recevoir quoique ce soit de lui, afin de produire" par nous mêmes nos propres fruits" (1) Pour Balthasar cet orgueil est comme renversé depuis sa racine par la "sagesse immanente" qui était "le premier fruit de Dieu et qui dans la création a toujours accepté d'être fécondé par Dieu et la Parole" (1)

Nous voulons tout maîtriser, tout décider et marquer par nos oui notre participation à la vie... Mais, comme le souligne le théologien, au calvaire même, "le oui de Marie est inutile". C'est Dieu qui de toute démarche humaine devenue inutile. Du grain mort peut faire jaillir la vie. "Quand la Parole définitivement muette a pu faire de tout son corps la semence de vie de Dieu, l'incarnation s'est achevée

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.335

Balises : Kénose, Marie

08 janvier 2007

Kénose...

Balthasar nous parle alors de ce "Le silence où le Père lui-même se retire dans l'invisible." Ce silence rappelle celui de la création, où, de la même manière, "après avoir doué ses créatures de forces fécondantes, il s'était éloigné silencieusement, ne lui parlant plus qu'à travers leur langage propre...". Pour lui, le retrait du Père s'achève et s'accomplit avec la déréliction de la croix. Mais ce silence mortel est le moment imperceptible de la génération et de la naissance de l'homme nouveau en celle qui est le sein de l'Eglise et dans la pauvreté la plus absolue de la compassion. Ce mystère est aussi pour moi, celui de Marie, cette mère qui "souffre avec" est devient en cela l'image même de l'Eglise, impuissante et aimante, image véritable de l'amour même de Dieu.
Ne peut on dire aussi que c'est la mort que Jésus donne sacramentellement aux hommes et qu'il fait fructifier en vie dans le sein de l'Eglise. Une mort qui devient signe. Si le gain de blé ne meurt, il ne portera pas de fruits...

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.333-5

07 janvier 2007

La lumière...

Pour Balthasar, au bout de la mort jaillit tout à coup la lumière, "comme une première création (...) au terme de la vacuité du mal jaillit la plénitude du pardon. Mais la nuit sans fin était déjà elle même la lumière absolue (...) le pardon était donné parce que toute oeuvre possible était devenue impossible". Pour lui la colère de Dieu s'est heurtée à l'amour du Fils. Cette colère que l'homme avait soulevé par son refus est anéantie par "celui ci s'expose à la colère et la désarme, la rend sans objet". Cela ne répond pas à toute question dit Balthasar, mais pour moi cela révèle le "jeu trinitaire" qui complète à l'image d'un Dieu puissant et juste et donc susceptible de colère face à l'injustice, une autre facette de Dieu, infinie aussi, qui se manifeste dans la tendresse et l'impuissance du Fils. C'est dans cette tension que je perçois ainsi la Trinité

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.325

06 janvier 2007

Prier la parole - IV


Enzo Bianchi a une petite pique contre les "faiseurs d'exercices", ce qu'il appelle la "devotio moderna" qui est souvent anthropocentrique ou égocentrique et vise les mouvements du coeur. Pour lui, la lecture de la Parole doit chercher une méditation authentique, toujours théocentrique ou christologique. La lectio "n'est jamais centrée sur soi". (1)
On rejoint ce que disait saint Augustin : si la lecture de l'Ecriture n'ordonne pas vers la charité, c'est qu'elle est faussée dans son interprétation.

Mais n'est-ce pas là toute la difficulté. Comment une lecture peut être véritable si elle n'implique l'homme dans son intériorité et comment cette lecture peut ensuite rebondir sur une "ouverture" à l'autre ET à Dieu... ?

Enzo Bianchi, Prier la Parole, Vie Monastique, nº15. p. 20

Déréliction - III

Pour Balthasar, "Le mystère le plus profond de l'économie du salut, c'est Dieu en face de lui-même et même contre lui-même. Le Père laisse le Fils au milieu des pécheurs souffrir la déréliction la plus totale et de Fils souffrant sous le coup qui lui vient du Père, crie vers lui, alors qu'il n'en demeure pas moins encore, à ce moment la, totalement Dieu, non seulement mû, mais aussi porté et enfermé dans l'amour du Père" (1)

Certes un des points surprenants du mystère est la non réaction du Père devant l'innommable souffrance du Fils, mais c'est là où la colère de Dieu devant notre ignorance, colère qu'il contient pour nous, peut être signe plus grand. Cette contenance est signe de l'immense tendresse. Dans le don du Fils, transparaît pour moi le don du Père, qui accepte de se taire pour que le corps brisé rayonne pour l'éternité et donne tout son sens à l'eucharistie...

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.324

05 janvier 2007

Le Grand Silence

Comment ne pas saluer ici dans ses pages sur le décentrement, la kénose et l'abandon, le nouveau film de P. Gröning, le Grand Silence et au travers lui cette épopée de la Grande Chartreuse où des hommes font l'expérience de la solitude et de la prière, du dépouillement et de la méditation...
Ce documentaire, qui commence par l'évocation de mon texte préféré de l'Ancien Testament : 1 Rois 19, est une invitation au silence intérieur. A voir absolument...

Une ligne de fuite

"Jésus a subi la contradiction : non seulement celle de Dieu offensée par l'homme mais aussi celle de l'homme menacé à mort par Dieu, voué à la mort sous le jugement de Dieu, puisqu'il était entré dans la ressemblance de la chair du péché (homiôma) : fait péché pour nous" (1)
C'est ainsi, dit Balthasar que se réconcilie l'apparente contradiction entre l'amour miséricordieux et la colère de Dieu dans les deux passages de l'épître aux Romains (1 Rm 1 à 3), Rm 3,25 ou il est présenté à la fois comme la victime expiatoire et dans Rm 9 comme portant les vases de colère... (2)
Ces textes visent pour Balthasar "un point de fuite" où la ligne de la colère et celle de l'amour se rencontrent. Or cela n'est possible que si l'objet de la juste colère de Dieu est replacé dans la relation Trinitaire. (3)
Et cela n'a de sens pour moi que dans ce cadre, c'est-à-dire au sein d'une triple kénose où se joue à la fois l'amour et le don parfait...

(1) Urs von Balthasar, ibid DD 3, p. 321
(2) p.323
(3) p.323

04 janvier 2007

Agonie

Pour Balthasar, celui qui se débat dans l'agonie du Mont des Oliviers est révélateur de pathos (de son amour comme de sa colère sur les refus d'amour). Il porte les conséquences de sa médiation pour nous. Pour Urs von Balthasar, c'est ainsi que le rejet du Vendredi Saint est si terrifiant; et c'est aussi pourquoi dans la déréliction, se cache pourtant déjà le oui pascal de la justice de Dieu.

Je retiens personnellement ce lieu de combat intense, que les évangélistes évoquent sur la pointe des pieds, mais qui est pour moi le mystère même de la lutte entre le bien et le mal...

(1) UvB DD 3 p. 321

03 janvier 2007

Colère de Dieu - V

Il y a pour Balthasar, "une descente toujours plus en profondeur sur l'échelle de l'obéissance" jusqu'à la totale incarnation finale du Verbe divin (...), un enfouissement de plus en plus profond de la colère de Dieu au coeur des hommes médiateurs. Et cela va si loin que le prophète n'a plus finalement qu'à laisser muette cette voie de la colère - comme pour Jésus et Jérémie. La colère se tait mais pas la souffrance...

02 janvier 2007

Sainte Colère - IV

Si l'on poursuit dans cette analyse, la mort du Christ apparaît alors comme le point focal de la violence de l'homme, mais aussi de la violence de Dieu, au sein même de la manifestation même de Tendresse et de miséricorde. Le Christ est alors à la fois porteur de nos fautes, subissant la violence des hommes, mais aussi sacrement, signe efficace du pardon de Dieu, parce qu'acceptant, par son oui, de porter et de subir cette violence de Dieu, jusqu'à l'expérience de l'abandon. Il n'en subit pas la force comme la résultante d'un sadisme de Dieu, mais comme le signe d'un point de convergence, une hyperbole entre la rage de Dieu face au non de l'homme, dont il en subit l'expérience et dans le même temps comme signe de l'amour infini du Père qui refusant de frapper l'homme, accepte que le Christ devienne sacrement, signe du pardon de Dieu, parce que son abandon même est chemin de résurrection. On est au coeur du mystère même de la croix... (1)

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.320-328
Balises : Décentrement Balthasar

Prier la parole - III

Se mettre à l'écoute nous dit E. Bianchi c'est écouter le Christ. Non pas se lancer dans une prière qui reste un monologue auto-centré mais se rendre écoutant...
St Ambroise : "Ecoute le Christ ! C'est à lui que tu parles quand tu pries, c'est lui que tu écoutes quand tu lis les divines écritures".

(1) Des devoirs des ministres sacrés I, 20,28 (PL 16, 50A)

01 janvier 2007

Prier la parole - II

Souvent nous dit E. Bianchi, notre usage de la Parole devient dangereux et sectaire, lorsqu'il n'est plus que le choix des thèmes accrocheurs qui vont permettre d'orienter la vie du groupe. Notre écoute est intéressée. Notre lecture est orientée... C'est pourquoi, l'auteur nous invite à lire et méditer longuement, et à prier de sorte que la Parole nous domine, nous décentre. Cette lecture est plus riche si elle suit la liturgie, ou reprend l'intégralité d'un évangile ou d'une lettre, en cherchant, non pas à choisir ce qui nous parle, mais à rester écoutant...

PS : Je vous avez annoncé quelques éléments de réflexion suite à la lecture d' Enzo Bianchi, Prier la Parole, Vie Monastique, nº15.

Voici, donc, dans les billets à venir et en alternance avec nos commentaires de Balthasar et en préparation du temps de carême et de notre reprise de la lecture de l'Evangile de Jean, quelques passages commentés de cette excellente lecture...

Balthasar : Sainte colère... III

Je ne peux qu'amener le lecteur de ce blog à se plonger dans la lecture de ce tome de Balthasar pour comprendre toute l'argumentation de l'auteur, qu'il serait difficile de traduire en quelques mots, sans en trahir l'originalité.
Si Hans Urs von Balthasar note que la colère de Dieu, bien visible dans l'Ancien Testament n'est pas effacée des propos de la vie publique de Jésus, puisqu'elle transparait dans de multiples paraboles (vignerons, invités du repas, Lazare) ou dans des attitudes du Christ (pharisiens, figuier, marchands du temple). Ces conjonctions ne peuvent nous amener à considérer Dieu comme un pur amour éthéré, mais bien comme un infini de miséricorde mais plein aussi d'une violence contenue, violence qui résulte de l'exaspération de Dieu face aux noms des hommes. La grande difficulté est de maintenir cette tension sans laisser libre cours à une vision d'un Dieu vengeur ou sadique. La violence de Dieu est le fruit même de son amour. Mais puisqu'il est Dieu, la façon dont il contient, maîtrise cette violence, la manière dont il reste le Miséricordieux est au coeur même de sa manifestation et de sa kénose... (1)

(1) d'après Hans Urs von Balthasar, Dramatique Divine, 3 L'action, ibid p.316-320
Balises : Décentrement, Balthasar