24 janvier 2021

Autorité et danse - 32

 

Le mûrissement intérieur du Christ qui se prépare dans le silence d’une vie cachée est une belle méditation qui interpelle nos propres chemins de parole. Je m’interroge toujours sur cette notion d’autorité dont parle l’Evangile d’aujourd’hui.

1) L’autorité du Christ vient-elle de son originalité, de sa personnalité ou de Dieu ? Première question qu’il faut peut-être se poser en reprenant la question de Marc 11,28 puis Jn 14, 10  : « Ne crois-tu pas que, moi, je suis dans le Père, et que le Père est en moi? Les paroles que, moi, je vous dis, je ne les dis pas de ma propre initiative; c’est le Père qui, demeurant en moi, fait ses œuvres.» avant de faire, de notre côté, abus d’autorité ? 

C’est un sujet bien délicat qui rejoint le risque clérical. 

2) L’autorité s’explique t-elle dans l’Evangile d’aujourd’hui par la présence particulière et dérangeante du Mal ? Probablement aussi.

La liturgie de ce dimanche nous donne ici à manduquer de beaux textes, difficiles à commenter en tout cas. Nous avons besoin des autres pour temporiser et canaliser nos interprétations « abusives ». C’est au milieu de nos quêtes que se dresse, fragile, la Vérité.(1)

Hier, dans le diocèse de Chartres les diacres se réunissaient (cf. Photo) pour fêter la saint Gilduin, leur saint patron (2) qui a été jusqu’à Rome pour plaider son refus d’être nommé évêque et son souhait de rester diacre. Il est mort à son retour de Rome dans notre diocèse autour de l’an 1000. Un chemin intéressant pour nous diacres.

Notre vicaire général en commentant hier la place du diacre en liturgie a repris cette belle image du Père Faure sj sur le diaconat(3). Le diacre en proclamant la Parole, et parfois en la commentant (4) sur la pointe des pieds, atteint un sommet liturgique puis s’efface progressivement jusque dans le silence laissant au prêtre la présidence de la deuxième table.

Kénose, lavement des pieds, à l’image de Jésus en Jn 13... un mouvement où l’on renonce à toute autorité.

Tout au plus nous reste-t-il le droit de verser une goutte d’eau dans ce qui deviendra le précieux sang en prononçant comme dans un murmure fragile cette belle phrase « Comme cette eau se mêle au vin, puissions être unis à la divinité de celui qui a pris notre humanité ». Puissions nous en effet avoir part au mystère immense qui se noue au creuset de la danse trinitaire...(5)

Le diacre, disait probablement avec humour un commentateur (6) peu être comparable à ces anges qui montent et descendent l’échelle de Jacob... Fonction d’intermédiation. Je le prends avec un sourire.

Intermédiaire, serviteur d’un mystère qui nous dépasse, le diacre est appelé à s’enfoncer dans le silence, s’agenouiller devant le mystère de la Présence comme il s’agenouille devant l’homme. 

Que dire de plus si ce n’est que c’est probablement le cœur du mouvement diaconal ?

Quelle est finalement sa fonction liturgique. Proclamer la Parole puis s’effacer devant le travail qui se joue dans les cœurs, contempler le mystère puis  soulever le calice en silence, en portant la souffrance des hommes et demander à Dieu de nous envoyer son amour et sa paix... 

Lui vient alors d’autres fonctions : porter aux autres ce trésor jusqu’aux périphéries les plus lointaines...


(1) Maison d’Evangile, un lieu de manducation à plusieurs cf. :

https://www.facebook.com/groups/2688040694859764/?ref=share

(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Gilduin_de_Dol

(3) pierre Faure, le rôle liturgique du diacre, cf. https://diaconat.catholique.fr/wp-content/uploads/sites/5/2017/06/LMD-249-role-liturgique-du-diacre-P.-FAURE.pdf

(4) voir aussi http://chemin.blogspot.com 

(5) cf. mon livre éponyme repris également dans « A genoux devant l’homme »

(6) Aimé-Georges Martimort, l’Église en prière, tome 1

19 janvier 2021

Kénose comme accouchement de l’homme bon ? - 31

Si l’on suit la trame de l’invention de Dieu de Tomas Römer jusqu’au bout, on pourrait presque que déduire que le phénomène qui nous a fait passer des dieux multiples, violents et ténébreux au Dieu unique d’Israel est le lent mouvement teilhardien qui nous rapproche de la révélation finale, d’un Dieu qui s’efface et s’agenouille dans le silence, d’un Dieu à genoux devant l’homme à qui est confié la lourde tâche de conduire l’humanité vers la justice, la paix et la concorde.


Théorie du retrait ?

Appel du/vers le visage d’autrui ? 


Lent chemin que ces renonciations aux rites et aux pouvoirs pour trouver en l’homme capable de relation pacifiée ce qui n’était que conflits et discordes.


Sommes-nous capables de cela ? Ou faut-il comme le suggérait Georg Hamann considérer que l’histoire d’Israel est aussi notre histoire et que les balbutiements, les exils d’antan se rejouent à nouveau sans que nous soyons finalement capables de faire mieux ?


La lente manducation de l’histoire, les couches rédactionnelles de l’AT ne sont elles que le terreau d’une révélation plus disruptive qui trouve leur point culminant en Christ avant de retomber dans l’erreur ? 


Y a t’il progression et courbe d’apprentissage ?


Peut-on comme le suggérait Moltmann dire que deux millénaires de théologie n’ont pas servi à éviter la Shoah ? 


Leçon d’humilité et réalisme...

À suivre

18 janvier 2021

Danse du verbe - 30 bis

Je tente un pas de plus, sur la pointe des pieds tant le sujet est fragile.. Il y a dans la lettre aux Hébreux à partir du chapitre 9 un glissement sacrificiel dans lequel on peut tomber. C’est de considérer comme le feront les disciples d’Anselme que ce sacrifice satisfait à un Dieu exigeant et à une forme de réparation. Il faut lire la nuance qu’apporte René Girard pour comprendre que ce signe élevé n’est pas un prix à payer à Dieu, mais la mise en évidence de la violence humaine. 


Quelques indices sont d’ailleurs à relever comme le verset 3 d’Heb 9 : «  Derrière le second rideau, il y avait la tente appelée le Saint des saints (...) puis le verset 12 : 12 il est entré une fois pour toutes dans le sanctuaire, en répandant, non pas le sang de boucs et de jeunes taureaux, mais son propre sang. De cette manière, il a obtenu une libération définitive. » et surtout les 26 et suivants : «  le Christ aurait dû plusieurs fois souffrir la Passion depuis la fondation du monde. Mais en fait, c’est une fois pour toutes, à la fin des temps, qu’il s’est manifesté pour détruire le péché par son sacrifice. 27 Et, comme le sort des hommes est de mourir une seule fois et puis d’être jugés, 28 ainsi le Christ s’est-il offert une seule fois pour enlever les péchés de la multitude ».


L’erreur est bien d’entrer dans un schéma sacrificiel qui voudrait perpétuer la mauvaise interprétation de l’appel au sacrifice d’Isaac et voir de toutes nos démarches sacrificielles une volonté de réduire la colère divine. Ce serait mal interpréter le monde, le mal et Dieu.


Non, la mémoire de la Passion n’est pas un sacrifice ancien et nos prêtres comme nos messes ne sont pas des exercices propriatoires. 


L’enjeu n’est pas d’apaiser le courroux divin mais de faire tomber la violence sacrificielle et de célébrer celui qui déchire le rideau du temple et montre combien l’amour est Dieu ou Dieu amour...


10. 19 Frères, c’est avec assurance que nous pouvons entrer dans le véritable sanctuaire grâce au sang de Jésus : 20 nous avons là un chemin nouveau et vivant qu’il a inauguré en franchissant le rideau du Sanctuaire ; or, ce rideau est sa chair. 21 Et nous avons le prêtre par excellence, celui qui est établi sur la maison de Dieu. 22 Avançons-nous donc vers Dieu avec un cœur sincère et dans la plénitude de la foi, le cœur purifié de ce qui souille notre conscience, le corps lavé par une eau pure. 23 Continuons sans fléchir d’affirmer notre espérance, car il est fidèle, celui qui a promis. 24 Soyons attentifs les uns aux autres pour nous stimuler à vivre dans l’amour et à bien agir. 25 Ne délaissons pas nos assemblées, comme certains en ont pris l’habitude, mais encourageons-nous, d’autant plus que vous voyez s’approcher le Jour du Seigneur.


12. 28 C’est pourquoi, nous qui recevons une royauté inébranlable, soyons reconnaissants et rendons ainsi notre culte à Dieu d’une manière qui lui est agréable, avec grand respect et crainte. 29 Car notre Dieu est un feu dévorant.


13.8 Que demeure l’amour fraternel !


Le basculement entre 12.29 et 13.8 est essentiel. Qu’est ce que ce feu dévorant ? Si ce n’est l’amour.


Qui a lu le livre de M. Pochon évoqué par Geneviève ? https://www.facebook.com/groups/reflexiongh/permalink/4628777297196718/

17 janvier 2021

Danse du verbe - 30


La lente manducation de la lettre aux Hébreux se poursuit, jour après jour... dévoilant progressivement la figure du prêtre selon l’ordre de Melchisedek. Mais est-ce un prêtre comme les autres ? Quelle est la nouvelle figure sacerdotale qui se dessine. Est-ce un prêtre selon l’ancien temps...?

Il nous faut manduquer doucement cette perception particulière de la lettre aux Hébreux en une lecture cursive pour en percevoir l’axe central qui se révèle doucement à nous.


«Pour nous, c’est bien un tel grand prêtre qui convenait: saint, innocent, sans souillure, séparé des pécheurs, et élevé plus haut que les cieux; il n’a pas besoin, comme les grands prêtres, d’offrir chaque jour des sacrifices, d’abord pour ses propres péchés, et ensuite pour ceux du peuple – cela, il l’a fait UNE fois pour toutes, en s’offrant lui-même. La loi en effet institue grands prêtres des humains sujets à la faiblesse; mais la parole du serment postérieur à la loi institue le Fils qui a été porté pour toujours à son accomplissement.»

‭‭Aux Hébreux‬ ‭7:26-28‬ ‭


«Or voici le point capital de ce que nous disons: nous avons un tel grand prêtre, qui s’est assis à la droite du trône de la majesté dans les cieux; il est au service du sanctuaire et de la tente véritable, celle qui a été DRESSÉE par le Seigneur et non pas par un être humain.»

‭‭Aux Hébreux‬ ‭8:1-2‬


Le mot dressé, mérite à lui seul d’être manduqué.


Jean 3 l’évoque de manière fortuite en parlant de Nombres 21 :


«Le SEIGNEUR dit à Moïse: Fais-toi un serpent brûlant et place-le sur une perche; quiconque a été mordu et le verra restera en vie. Moïse fit un serpent de bronze et le plaça sur la perche; si quelqu’un était mordu par un serpent et regardait le serpent de bronze, il restait en vie.»

‭‭Nombres‬ ‭21:8-9‬ ‭


L’élévation est signe... entrons dans la danse du Verbe :


«Il fit alors un rêve: un escalier était dressé sur la terre, et son sommet touchait au ciel; les messagers de Dieu y montaient et y descendaient.»

‭‭Genèse‬ ‭28:12‬ ‭


«Tu dresses devant moi une table, en face de mes adversaires; tu enduis ma tête d’huile, ma coupe déborde.»

‭‭Psaumes‬ ‭23:5‬ ‭


«Lorsque vous passerez le Jourdain, vous dresserez au mont Ebal ces pierres que je vous ordonne aujourd’hui de dresser, et tu les enduiras de chaux.»

‭‭Deutéronome‬ ‭27:4‬ ‭


«Ta tête se dresse comme le Carmel, et tes nattes sont comme la pourpre rouge; un roi est enchaîné dans leurs ondulations!»

‭‭Cantique des cantiques‬ ‭7:6‬ ‭


«tu t’es assise sur un lit d’apparat, devant lequel une table était dressée, et tu y avais placé mon encens et mon huile,»

‭‭Ezéchiel‬ ‭23:41‬ ‭


«il est au service du sanctuaire et de la tente véritable, celle qui a été dressée par le Seigneur et non pas par un être humain.»

‭‭Aux Hébreux‬ ‭8:2‬ ‭


«Celui qui est trop pauvre pour cette offrande choisit un bois qui résiste à la vermoulure; il cherche un artisan habile pour dresser une statue qui ne vacille pas.»

‭‭Esaïe‬ ‭40:20‬ 


«C’est sur une montagne haute et élevée que tu dresses ton lit; c’est aussi là que tu montes pour offrir des sacrifices.»

‭‭Esaïe‬ ‭57:7‬ ‭


«Il dresse une bannière pour les peuples lointains; il en siffle un des extrémités de la terre, et il arrive vite, avec rapidité.»

‭‭Esaïe‬ ‭5:26‬ ‭NBS‬‬


«Le messager du SEIGNEUR dresse son camp autour de ceux qui le craignent, et il les délivre.»

‭‭Psaumes‬ ‭34:8‬ ‭


Jean Chrysostome fait écho avec ce signe qu'il évoque dans une de ses homélies : " La croix est plus éclatante que le soleil, plus brillante que ses rayons, car, lorsque le soleil s'obscurcit, c'est alors que la croix scintille (Mt 27,45) ; le soleil s'obscurcit non en ce sens qu'il disparaît, mais qu'il est vaincu par la splendeur de la croix. La croix a déchiré l'acte de notre condamnation (Col 2,14), elle a brisé les chaînes de la mort. La croix est la manifestation de l'amour de Dieu : « Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique afin que tout homme qui croit en lui ne périsse pas ». " (1)


Le signe élevé sur le monde depuis Nb 21 devient en Jean 3 l’unique sacrifice.


«Si vous ne croyez pas alors que je vous ai parlé des choses terrestres, comment croirez-vous si je vous parle des choses célestes? Personne n’est monté au ciel, sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme. Et comme Moïse éleva le serpent dans le désert, il faut, de même, que le Fils de l’homme soit élevé, pour que quiconque croit ait en lui la vie éternelle. Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, pour que quiconque met sa foi en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle.»

‭‭Selon Jean‬ ‭3:12-16‬ ‭


Contemplons Celui qui s'est anéanti pour notre salut.


«il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à la mort – la mort sur la croix. C’est pourquoi Dieu l’a souverainement élevé et lui a accordé le nom qui est au-dessus de tout nom,»

‭‭Aux Philippiens‬ ‭2:8-9‬ ‭


La Croix, l’abaissement, la kénose ouvre le chemin de notre relèvement. Il est le don unique, l’UNIQUE sacrifice qui n’appelle rien d’autre qu’un amour à transmettre.


«Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils UNIQUE, pour que quiconque met sa foi en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle.»

‭ Jean‬ ‭3:16‬ ‭


Et la danse du Verbe continue :


«Dieu dit: Prends ton fils, je te prie, ton fils UNIQUE, celui que tu aimes, Isaac; va-t’en au pays de Moriya et là, offre-le en holocauste sur l’une des montagnes que je t’indiquerai.»

‭‭Genèse‬ ‭22:2‬ ‭


«Unique est ma colombe, ma parfaite; elle est l’unique de sa mère, resplendissante pour celle qui lui donna le jour. »

‭‭Cantique des cantiques‬ ‭6:9‬ ‭


(1) Saint Jean Chrysostome, Homélie sur « Père, si c'est possible » (trad. Delhougne, Les Pères commentent, p. 72)

16 janvier 2021

Solitudes et danses intérieures 29 bis

 Solitudes et danses intérieures - 29

Nous sommes tous plus ou moins marqués par la solitude, plus particulièrement en ce temps de confinement.

Que faire ?

Prier...

Crier !

Oui crier après Dieu, comme le font si bien les psaumes 

Cri, nécessaire et presque salvateur

Crier pour une rencontre.


Mais bien sûr trouver des moyens pour sortir de cet état...


Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Même si le « chemin du désert »(1) est lieu de conversion, l’homme est un être de relation et il est bon de contempler que dès l’origine, au « terreux » solitaire, Dieu a donné une partenaire(2) un lieu pour entrer en relation, en symphonie(3), plus loin que la danse des chairs, le mot hébreu basar n’a pas fini de dévoiler son amplitude symbolique(4). « Le mythe donne à penser » disait Ricoeur. Gn 2 dévoile l’importance d’entrer en lien, de trouver complémentarité et joies dans la rencontre du visage d’autrui. 


Alors que je méditais, solitaire, sur ce concept, je suis tombé sur ce bel interview de Sylvie Germain, la grande spécialiste de Lévinas qui nous parle de son nouveau roman. Un bel entretien que je vous laisse découvrir.


https://radionotredame.net/embed/306679/


(1) cf. mon livre éponyme 

(2) à lire les belles pages sur ce point de Sylvaine Landrivon, in La femme modelée Cerf 2016, p. 297sq

(3) cf. Aimer pour la vie

(4) ibid.

Où est-il ? Danse 29


 Un frémissement d’ordre dans le chaos, une conjonction dans le désordre, une fleur dans le désert, un sourire dans un monde de brutes, l’amour au milieu de la haine, 

La mort d’un innocent qui détourne notre violence, une liberté dans une succession de déterminisme, une truite qui remonte le courant, une semence qui jaillit dans l’hiver, l’amour au milieu de la haine. 

Une disruption dans une suite logique, le silence intérieur dans un flot de d’insouciance. Un appel au delà de nos peurs, l’insaisissable au sein de nos raisonnements, l’épée tranchante à la jointure de l’âme, l’amour au delà de la haine.

Fécondité au delà de nos stérilités, fidélité au delà de nos abandons, pardon au delà de nos lâchetés, indissolubilités dans la frivolité. L’amour au delà de la haine.

Abaissement malgré nos ignorances, confiance au delà de nos doutes, sacrifice unique de celui qui aime ceux qui veulent le trahir.

Brise légère au delà du feu et du tonnerre. Chant des anges au milieu du silence, paix intérieure au milieu de nos inquiétudes, frémissement au sein des nuits obscures. Soignant au milieu des malades, Miséricorde malgré nos haines. Espérance au delà de la mort.

Dieu ne se démontre pas, il se révèle quand on ne l’attend pas. 

Et pourtant cherche, ne cesse pas de chercher jusqu’à ce que tu cries, comme Augustin : tu étais là et je ne le savais pas » ;-)

15 janvier 2021

Tu m’as appelé ? - danse 28


Tu m'as 
appelé ? Projet d'homélie n.3 du 1er dimanche ordinaire année B 

Belle histoire que je vous invite à relire que le début du livre de Samuel, fruit imprévu d’une femme stérile qu’elle confie au temple en action de grâce. 

Tu m’as appelé ? Le cri résonne dans le silence.

Sommes-nous appelés ? 

A quoi ?

Le risque est de considérer que cet appel ne nous concerne pas... De l’entendre résonner dans la nuit et de l’oublier.


La réponse nous interpelle aussi : me voici.. et nous  qu'aurions nous répondu? que répondons nous aujourd’hui à ces appels souvent cachés dans le murmure de la brise légère; sommes nous capables  de faire silence pour les entendre ?


Nous sommes tous appelés à participer au royaume. Chacun à sa manière. C’est notre vocation de baptisés...

L’actualité fait bcp de bruit sur ce motu proprio du pape  qui donne aux femmes le droit d’être appelées à deux nouvelles fonctions de lectorat et de l’acolytat. 

Qu’est ce que c’est ? (Je vous invite  à creuser ce sujet) 

C’est une avancée de l’Église vers une forme de complémentarité entre les hommes et les femmes, mais ne nous trompons pas. Si les femmes n’ont pas, encore ce qu’on pourrait appeler la première place, celle bien inconfortable d’être choisi pour présider l’eucharistie à l’autel, elles sont comme tous les hommes appelées à travailler au royaume et je dois le reconnaître elles font souvent plus et mieux ce que nous clercs pouvons faire. Car le royaume ne se construit pas à l’autel, mais dans l’agir, dans ces périphéries où nous sommes tous appelés.

L’essentiel n’est pas la figure extérieure, la fonction mais cette éternelle course de l’homme pour suivre Jésus jusque dans son amour le plus large.

Paul, pharisien réputé, avant sa conversion médite très bien sur cette illusion dans un texte  que je trouve central. Ecoutons le : 

«Mais ce qui était pour moi un gain, je l’ai considéré comme une perte à cause du Christ. En fait, je considère tout comme une perte (...) A cause de lui, j’ai accepté de tout perdre, et je considère tout comme des balayures, (...)  pour parvenir, si possible, à (...)  le saisir, pour autant que moi-même j’ai été saisi par Jésus-Christ. En ce qui me concerne, mes frères, je n’estime pas moi-même l’avoir déjà saisi; mais une seule chose compte: oubliant ce qui est en arrière et tendant vers ce qui est en avant, je cours vers le butPhilippiens‬ ‭3:7-14‬ ‭


Le jour du jugement, ce n’est pas notre rang dans l’Église qui comptera mais notre exercice de la charité en actes.


Où demeures tu ? demande les deux apôtres à Jésus.

Viens et suis moi...

Ce n’est peut-être pas seulement dans nos églises de pierre ou dans nos institutions qu’habite le Christ...

Cherchons à le suivre jusque dans ses périphéries...

Saint Athanase, dans une belle méditation que nous offre l’office des lectures de vendredi évoque la possibilité d’« exécuter une seule mélodie : ainsi la Sagesse de Dieu, le Verbe, tenant l'univers comme une lyre, unit les êtres de l'air avec ceux de la terre, et les êtres du ciel avec ceux de l'air ; il combine l'ensemble avec les parties, (...) produit ainsi, dans la beauté et l'harmonie, un seul monde et un seul ordre du monde. (...) prenons l'image d'un chœur composé de nombreux chanteurs. Ce chœur comporte des exécutants variés : hommes, enfants, femmes, vieillards et jeunes gens ; sous la direction d'un seul chef, chacun chante selon sa nature et ses possibilités ». 


L’enjeu est de trouver chacun NOTRE place dans un polyèdre (le mot de François exprime un souci particulier d’unité entre tous et toutes, mais aussi aujourd’hui particulièrement d’unité de tous les chrétiens) il nous reste à construire cette unité au service de la construction du corps....


Tu m'as appelé, me voici! 

Laissons maintenant résonner en nous ces deux phrases. Trouvons le chemin que Dieu a préparé pour nous, pour répondre à son appel 


10 janvier 2021

Baptême du Christ - danse 27

 On parle souvent de triple épiphanie. Qu’est ce à dire ? 

Petite distraction ce soir à la messe dominicale. 

Le baptême du Christ serait le troisième double agenouillement que nous offre la liturgie de Noël et est en même temps une porte d’entrée à la vie du Christ. 

Je m’explique. 

Il y a eu l’agenouillement de Dieu qui nous confie son Fils auquel répond quelques bergers.

Il y a l’agenouillement des mages devant un Dieu qui se révèle par sa faiblesse.

Il y a l’agenouillement du Fils pour recevoir le baptême de Jean, alors même que Jean affirme n’être pas digne de s’agenouiller pour délier ses sandales.


Qu’attendons-nous pour tomber à genoux ? Dieu vient nous visiter. Il plonge symboliquement dans les eaux de la mort pour éveiller en nous le sens de sa mort sur une croix et ce premier agenouillement est chemin pour qu’à notre tour nous prenions le temps de renoncer à nos certitudes et contempler la faiblesse d’un Dieu qui se penche devant l’homme pour l’inviter à la danse...


C’est dans ce mouvement que réside l’amour...


Don de l’Esprit, de l’eau et du sang nous dit Jean, puisque tout est lié. Tout prend chair dans cette kénose trinitaire.


On n’épuise pas pourtant ces textes en 2 paragraphes.. Il y a quatre beaux sermons chez les Pères de l’Église révélés cette semaine par le livres des heures que je vous laisse découvrir. Si Gregoire de Naziance nous donne par exemple à contempler un dialogue entre Jean et Jésus Fauste de Riez donne de son côté une belle correspondance entre Cana et le baptême. Ces jarres d’eaux usées transformées en vin peuvent y être comparées à ce Jourdain purifié par la plongée symbolique de l’Agneau. Tout cela révèle et prépare au sommet de l’incarnation, le mystère de cet amour porté jusqu’au bout, martyr finalement commun de Jean et du Christ au service d’une seule révélation : l’amour infini du Père. L’agenouillement du Fils n’a d’autre sens. On est loin d’une tour de puissance et d’orgueil. La kénose est ici à son paroxysme. 


C’est peut-être ce que nous révèle 1 Jn 5 : « C’est lui, Jésus Christ,

qui est venu par l’eau et par le sang :

non pas seulement avec l’eau,

mais avec l’eau et avec le sang.

Et celui qui rend témoignage, c’est l’Esprit,

car l’Esprit est la vérité.

En effet, ils sont trois qui rendent témoignage,

l’Esprit, l’eau et le sang,

et les trois n’en font qu’un. »


Le baptême du Christ est la première réponse à cette soif de l’AT et finalement à notre soif, culminant dans ce geyser d’eau et de sang que décrit Jean 19





PS : on trouvera sur ce thème d’autres commentaires sous ce lien. https://eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/la-celebration-de-la-foi/le-dimanche-jour-du-seigneur/commentaires-de-marie-noelle-thabut/511470-commentaires-du-dimanche-10-janvier-2/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=commentaires-du-dimanche-10-janvier-2 


J’aime les découvrir le dimanche matin après une longue méditation personnelle ou partagée avec les amis de notre Maison d’Evangile dont je rappelle ici le lien. Un beau groupe qui compte maintenant une centaine de membres et surtout des interventions très respectueuses autour de la Parole cf. https://www.facebook.com/groups/2688040694859764/?ref=share


C’est en s’éclairant et manduquant ensemble ces textes que nous déchirons le voile 😉

07 janvier 2021

Danse avec tout homme - 26

« Dieu est amour : qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui. » La méditation liturgique de la première lettre de Jean nous ramène à l’essentiel, à ces béatitudes qui contemple en chaque homme, cette capacité théophorique, d’être porteur de Dieu. 


Μακάριοι ο πτωχο τ πνεύματι - bienheureux les pauvres en Esprit. La distinction de Mt 5,3 interpelle.


Ce n’est pas rien de contempler dans la kénose du Fils l’appel continu de Dieu à révéler ce qu’il a mis en nous.

L’agenouillement du Fils qui veut demeurer chez Zachée, crie son « j’ai soif » à la Samaritaine ou se laisse toucher en Marc 7 par cette femme étrangère qui lui réclame des miettes est contemplation, d’une certaine manière de ce Dieu en « manque » de l’homme déjà mentionné par Arnold en « danse n. 9 et n.10 », non qu’il soit dépourvu d’infinité, mais parce que l’amour même est « extase »(Fratelli Tutti, ch. 3), tout tourné vers autrui, vers le « visage » d’autrui au sens Lévinassien.


La contemplation de cet foi des petits enfants, de cette amour sans faille, de cette confiance aveugle est toujours pour l’homme lieu de danse et s’inscrit bien dans la symphonie kénotique de l’homme et de Dieu.


C’est à l’Arche que l’on découvre que la foi des touts petits est lumière qui fait éclater nos incertitudes et nos de-espérance. C’est dans le chant et la prière de mes quatre petits enfants que je vibre le plus avec l’amour reçu et partagé. Dieu donne nous l’amour des « simples », ceux qui ne s’encombrent pas des rites et des dogmes, mais demeurent en toi comme tu demeurent en eux. 





On est bien là au cœur de cet agenouillement qui fait le centre de ma trilogie trop souvent citée.

01 janvier 2021

Épiphanie - pistes pour une homélie

Version 6

Que nous apportent la lecture de ces textes ? 

Peut-être une lueur... faible en ces temps de confinement... un frémissement (cf. Isaïe 55), un tressaillement (Luc 1)...

Une lumière au bout du tunnel... Sommes-nous encore en attente de la lumière ? Ou comme les lecteurs d’Isaïe en exil de nous mêmes ?

Nous cherchons, en ces temps difficiles, la lumière comme ces mages qui cherchaient dans le ciel un signe...

Cette lumière est là en nous,  c’est l’espérance qui nous habite, malgré ces temps difficiles.

C’est croire d’abord que Dieu vient nous visiter - qu’il peut faire naître une joie toute intérieure, celle qui nous vient de la contemplation de cet enfant qui nous sauve.

Paul parle ce mystère comme quelque chose d’immense. « Toutes les nations sont invitées au même héritage » nous dit Eph 3

Les mages accourt des 4 coins de l’univers

La bonne nouvelle de Matthieu c’est également l’ouverture aux nations

Ces semences de ce Verbe dont parle Jean dans son prologue, sont pour Matthieu le don de Dieu aux nations. 


L’autre clé est enfin le mystère même de cette crèche que nous contemplons depuis quelques jours...

Grand est notre Dieu quand il se fait petit ? 

Ce qui nous est révélé c’est l’humilité de Dieu.

Humilité - car il est bien petit et pauvre ce Sauveur loin de la puissance et de la violence. Sa royauté n’est pas celle d’Hérode. Il ne naît pas Jérusalem mais à Bethleem.

C’est là le mystère, la Révélation.

Dieu, par sa faiblesse guérit le cœur de celui qui accepte de se dépouiller...

Notre cœur doit se dépouiller et s’élargir.

La crèche est le résumé du mystère de la vie de Jésus - petit il va révéler l’amour qui fait échec aux puissants...


Il nous reste à contempler la grâce que Dieu nous fait et y répondre par nos dons. Dieu vient nous habiter. Quelle va être notre réponse intérieure ?

Peut-être contempler l’infini de Dieu au delà de nos finitudes ?

La contemplation des textes proposés ici ouvre et dilate notre coeur à l’infini de Dieu.  A voir en soi et en autrui ce qu’on appelle les semences du Verbe.

Tout homme de bonne volonté peut trouver le vrai Dieu. 

Comprendre que ce que nous révèle la crèche n’est pas un Dieu de pouvoir, le Dieu de nos projections humaines. Mais un Dieu amour,  un Dieu qui se fait tout petit... pour nous visiter...

Il y a là une tension...

Ouvrons nos cœurs à cette lumière qui vient jusque dans nos ténèbres et dans nos confinements pour nous conduire aux dons.

Les mages viennent les mains pleines. 

Et nous, qu’avons nous a offrir ? 

De l’or... ? nos richesses matérielles à partager ?

Ou la myrrhe, le parfum ultime, notre prière  et l’encens qui élève nos âmes au mystère ?

Contempler les dons des mages c’est aussi voir ce que l’on a reçu et qu’on est prêt à donner. Recevoir et donner...

N’est-ce pas le mystère de notre vie. S’inscrire dans ce don de Dieu nous dépasse.  Noël est-il pour nous le premier pas vers un don sans mesure... ? 

En nous présentant tout à l’heure à l’autel sommes-nous habités vraiment de cette espérance, de cette ouverture du cœur et de cette humilité qui nous fait dire, viens Seigneur révèle en nous et à travers nous ta lumière. Si c’est le cas ce que nous recevrons deviendra en nous lumière joyeuse, frémissante et radieuse. Dieu vient il est lumière...

 




29 décembre 2020

Danse tragique - billet n. 24

Que pouvons-nous dire aujourd’hui, jour de la fête des saints innocents - dans un contexte actuel qui n’est pas beaucoup plus joyeux...?

Le massacre rapporté par le seul Matthieu nous ramène à cette contemplation d’un « Dieu nu » (1) devant la violence et la souffrance des hommes, d’un « Dieu à genoux devant l’homme » (2) y compris Judas.. d’un « Dieu dépouillé » (3) et fragile.

On peut relire Jérémie 31 qui évoque à la fois dans un même paragraphe « la jeune fille se réjouira dans la danse, » et «  Rachel qui pleure ses fils; (...) refuse de se laisser consoler au sujet de ses fils, car ils ne sont plus. » avant de glisser « Ainsi parle le SEIGNEUR: Cesse de sangloter, sèche tes larmes; car il y aura une récompense pour tes actions – déclaration du SEIGNEUR: ils reviendront du pays de l’ennemi.» Jérémie‬ ‭31:13-16‬ ‭

La logique de rétribution de Jérémie a ses limites et il nous faut écouter probablement la fin du livre de Job... Qui est tu pour comprendre ? Mais cela ne sèche pas les larmes de ceux qui sont affligés par le malheur. 

La petite espérance de Péguy est bien petite...

Le cri est nécessaire et ce n’est pas pour rien qu’il résonne dans un grand nombre de psaumes... Où es-tu mon Dieu ? (4)

Dans mon mémoire de licence, « quelle pastorale pour les souffrants ? » (5) je cherche à tracer, non des voix de réponse, mais des chemins d’accompagnement...‬‬


pour ces personnes, nombreuses, en manque d’espérance.

Plusieurs auteurs ont tracé des pistes sur ce chemin. Dans l’essai précité je joins la traduction inédite et fort interessante d’un texte de Karl Rahner. 

On peut citer une fois encore François Varillon avec son « beauté du monde, souffrance des hommes ».

On peut évoquer Hans Jonas, Jurgen Moltmann et son Dieu crucifié...(6) Elie Wiesel et bien d’autres...

On peut aussi rester dans le silence. Mais ce dernier est-il une fuite ? 

Comme celle de la Sainte Famille au désert ? Une fuite pour un plus grand bien ? 

Est-ce que Matthieu introduit ce récit en contemplation des massacres de 70 ?

La seule réponse possible est probablement dans la Croix, dans ce Dieu dépouillé et déchiré. Mais qui peut l’entendre ?


Si j’ai choisi ce thème de mémoire, c’est en entendant un jeune en préparation de son mariage me dire : «  quand je regarde le ciel, je me demande ce qu’il va encore m’envoyer comme malheur ». 

Nous sommes bien démunis...

On peut probablement se glisser intérieurement la question : suis-je complice de ce mal... ? Sans tomber, dans la culpabilité, car c’est le risque bien soulevé par Lytta Basset (7) 

Saint Thomas distingue le mal de faute du mal de peine... mais ne donne pas de solution.

On peut surtout, comme le fait Etty Hillesum se relever et dire « Dieu a besoin de nos mains »(8)

L’année dernière j’étais au chevet d’un ami prêtre - 93 ans, d’une vie donnée et malgré cela une grande souffrance physique et d’une certaine manière forcément spirituelle. Que faire à part un verre d’eau, une main posée sur un cœur meurtri... ?

N’oublions pas que l’Église est là. Elle l’est à Calculta (cf. La Croix d’aujourd’hui) en Grèce comme à Calais. Visages rayonnants d’une Église au service des souffrants...

Sur ce sujet impossible du mal de peine, je me trouve bien petit et suis toujours preneur d’avis...


(1) cf. ma recension du livre d’Arnold

 (2 à 5) cf. mes travaux de recherches éponymes téléchargeables sur Kobo, cf Http://chemin.blogspot.com 

(6) voir aussi dans mon mémoire un bel extrait sur ce thème d’une conférence donnée à Paris

(7) cf. notamment Je ne juge personne 

(8) lettre à Westerbroch in Une vie bouleversée

26 décembre 2020

Une danse instable et fragile - 23

« Ne crains pas...(Gn 15)

Mes yeux ont vu ton salut..

Ton âme sera traversée par un glaive... (Luc 2) »

Trois phrases tirées de la liturgie de la fête de la sainte  famille.  Et une apparente contradiction...

La suite du Christ est à la fois un lieu de paix intérieure et de souffrance extérieure. Lieu de combat au sens donné par Ignace dans ses deux étendards ?


La danse à laquelle j’ai trop fait allusion dans les pages précédentes n’est pas une danse de salon. Suivre le Christ n’est pas de tout repos, car le combat est là, à la fois intérieur et extérieur.


Intérieur car nous sommes toujours traversés par nos contradictions, notre incapacité à répondre à l’appel de « l’où es-tu » de Gn 3, faisant le mal que nous ne voulons pas faire (Rom 7) et incapable d’être amour comme Il est amour (1 Jn 2).


Le martyre d’Etienne (Actes 6&7) qui suit la nativité nous rappelle bien vite que le mal est aussi extérieur.


Et pourtant...

Et pourtant la petite espérance nous fait rêver d’un monde meilleur. 

La sainte famille n’est pas seulement le cocon douillet d’un couple béni par Dieu. Marcher à sa suite est pour nous toujours le lieu d’un combat intérieur et extérieur qui conduit à la victoire du Christ sur la mort.

C’est le terme final, ce royaume à venir, qui donne l’espérance du « ne crains pas... » et de ce « bouclier » (Gn 15) de la foi...(Heb 11).

La danse de Dieu est un dépouillement, une fuite, un combat, une foi (cf. Heb 11), un agir, une victoire.


C’est grâce à la foi que nous pouvons avancer..


Laissons nous conduire par Celui qui vient nous visiter, ouvre le chemin. Si sa mère sera transpercée d’un glaive elle sera la première sur la route à mériter le rang d’apôtre. De sa douleur jaillira une descendance. 

Et la mémoire du glaive qu’elle partage avec des générations de souffrants sera signe et chemin.





« Maintenant je peux m’en aller car mes yeux ont vu le salut... » 

Le salut est au bout d’un long chemin...

Dieu avec nous... Il nous porte...

Viens nous visiter... 



25 décembre 2020

De la paille à la poutre ? - danse 22


Il est né sur la paille et mort sur une poutre...

Si l’histoire de la crèche est contestée, la puissance de la lecture spirituelle de la naissance, racontée par Luc ne déroge pas avec l’ensemble du message de l’évangéliste.




Premier et ultime clin d’œil d’une vie pour dénoncer l’erreur d’une loi hypocrite ou le jugement hâtif du frère du fils prodigue ? (Luc 15).

Il y a un lien à contempler entre cette paille qui accueille le tout petit et ce bois qui supporte le crucifié. Ce lien c’est la chair nue, exposée de celui qui refuse tout égard, toute première place, pour se dénuder dans le service de ses frères (Jn 13) et le don inouï d’une vie offerte. 

Quel chemin entre le Dieu rêvé des premières théophanies de l’Exode (cf. Ex 19) et celui de la crèche. Alors qu’on y voyait trompettes et métaux précieux et qu’on rêvait d’un Dieu du tonnerre voici un Dieu nu exposé et rejeté... fui et trahi... fragile et crucifié...

Depuis le premier jour jusqu’au dernier...il est un Dieu qui se fait petit... pour dénoncer nos rêves de grandeur.

Tout ça pour quoi ?

Pour nous conduire au delà de la paille du voisin, la poutre de notre oeil ?  Si nous cherchons un Dieu puissant nous faisons fausse route. La puissance de Dieu se révèle dans la faiblesse... (cf. 2 Co 12).

Quel est le sens de cette nuit ?

Pourquoi pouvons nous danser de joie ? 


La naissance de Dieu homme est nouvelle naissance...

Il vient habiter l’homme et transformer son cœur...

Ne sommes-nous pas parfois l’aubergiste qui rejette la jeune fille enceinte, le pharisien devant la femme adultère (Jn 8.) celui qui cherche la paille et oublie la poutre...(cf. Lc 6, Mt 5), repousse l’étranger ou le lépreux de notre entourage.

A chaque fois que notre cœur se durcit nous oublions que le chemin n’est pas écrit à coup de burin dans le marbre d’une loi immuable, mais avec le cœur et au cœur de l’homme grâce à une paille sur le sable par un Dieu à genoux devant l’homme, qui ne veut que l’amour...

Que celui qui n’a pas péché jette la première pierre...(Jn 8.) 


C’est ce peut-être ce Dieu là ce que nous contemplons cette nuit. 

Dieu fragile...

La crèche n’est que la clé de sol d’une symphonie trinitaire. 

- Celle d’un Dieu qui renonce à toute manifestation de puissance pour nous dévoiler l’amour...

- Celle d’un Fils qui consent à tout pour tracer un autre chemin que la loi hautaine et méprisante des hypocrites.

- Celle d’un Esprit qui se fait fragile pour tracer en nos cœurs un chemin d’humanité.

Prenons conscience de nos poutres érigées à tort, de nos condamnations trop rapides pour percevoir que l’amour est miséricorde et pardon...

Vous voulez comme David des signes et des rois, des maisons et des institutions ?

Il ne vous sera donné que le signe de Jonas. Un prophète qui se fait petit...

Un petit d’homme couché sur un lit de paille et mort sur une poutre, pour que nos violences soient réduites à néant, nos jugements hâtifs et hypocrites balayés comme les feuilles au vent, nos quêtes de puissance réduites à un chemin d’humilité.

Le Dieu de la crèche et de la Croix est un Dieu à genoux...

Et la danse des trois personnes n’a qu’une direction, celle de nous inviter à la miséricorde et l’humilité...

Il est le chemin, la vérité et la vie...

Le Verbe s’est fait chair fragile parmi nous pour retourner nos cœurs de pierre en coeur de chair.

Le verbe est là - aujourd’hui - présence discrète, démunie, qui invite à l’amour.

Joie des cœurs simples. Danse des anges

Noël

24 décembre 2020

Les noces éternelles ? - danse 21


Il y avait la rencontre à Mambré, la femme stérile qui sourit à l’annonce de sa fécondité...puis toutes ces histoires de puits et de rencontres, d’eau et de noces...

Puis tout s’est transformé en désert 

Les ossements sont desséchés 

La voix du dernier serviteur au Temple s’est tu...

Fin d’un cycle

Hiver..


Nous sommes au samedi saint de Noël, l’heure où la nuit devient épaisse, les étoiles s’éteignent.


La danse de Dieu n’est pas une valse viennoise, elle va de renoncements en renoncements, de fuite en agenouillements...


Comme le suggérait Joseph Moingt à propos du samedi saint, c’est l’heure où il faut écouter les pleurs du monde, visiter les solitudes, être attentifs à la terre qui crie son désespoir...


Dieu viens visiter nos silences...


Et si toutes ces épousailles ne tendaient qu’à une rencontre sublime et discrète, au creux du silence et de nos nuits....


Nouvelles noces, qui chez Luc résonnent avec celles de Cana chez Jean....

A la fiancée qui attend son époux sur une terre désertée Dieu vient comblée la soif...


Demain s’approche la nouvelle alliance...

Nouvelles noces qui se préparent, celle de Dieu en l’homme, celle d’une femme qui ouvre son cœur et prépare son corps à la douleur d’un enfantement difficile, aux noces éternelles et tragiques de l’humain et du divin.


Ici nul artifice, pas d’autres trompettes que celles des anges aux bergers. C’est auprès des rejetés, des bannis que Dieu se met à nu. C’est dans une mangeoire pour animaux impurs, qu’il est déposé le tout petit. Et sa nudité est déjà le signe d’un autre repas, d’une autre nudité, celle d’un corps offert aux coups et aux rejets...


C’est auprès des exclus, des sans abris et des migrants qu’il reviendrait celui que nous espérons dans nos maisons douillettes. 


« Allons-nous tromper nos inquiétudes secrètes et insulter à la gravité du drame contemporain avec ce Noël que nous avons rendu si petit en le farcissant de nos bavardages et de nos mangeailles, au lieu qu’il faudrait nous taire, sortir à la bonne étoile (...) qu’avons nous fait de cette joie pour tout le peuple ? » (1)


Dieu parmi nous, avec nous...?

Que soit béni le tout petit...


Il n’est petit et nu que s’il nous fait retrouver la nudité première. Tombons-nous nos habits de fêtes (Ex 33, 3) pour nous soucier que cette joie soit bien pour tous ? 


Question que je me pose à moi-même car elle ne peut être posée à autrui que dans le silence du cœur. 


Nous sommes pris dans le tourbillon de nos cultures. La danse de Dieu est ailleurs, dans une frugalité et une modération qu’il ne faut pas occulter...


(1) François Cassingena-Trévedy La voix contagieuse, p. 23

23 décembre 2020

Tressaillement et danse - 20

 



« L'enfant a tressailli... »

Que dire quand on est homme et que jamais l'enfant n’a en nous manifesté sa présence ? Peut-on en être jaloux ? 😉 

Il y a pourtant des tressaillements intérieurs, des caresses de Dieu qui nous réveillent et nous font pressentir cela...

Signes discrets d’un Dieu qui vient se révéler à nous dans le silence ?

Signes plus tangibles quand la Parole fait vibrer en nous le mystère....

On devrait peut-être même aller plus loin et glisser sur la pointe des pieds que lorsqu'il nous a été donné de communier au corps et au sang du Christ, nous devenons à notre tour capables de ces « tressaillements » de Dieu en nous. 

Capax dei !

Est-ce ce que suggère François Varillon quand il dit que Dieu vient diviniser ce que nous avons humanisé ? (1)

J’ai du mal avec le mot diviniser, qui nous vient d’Irenée, mais c’est peut-être là qu’il prend chair, dans ce tressaillement intérieur dû à l’inhabitation fugace du Verbe en l’homme...

Alors nous pouvons faire nôtre le magnificat. Car nous entrons à notre tour dans cette danse trinitaire à laquelle le "fiat" marial nous a invités. 


« Heureuse celle qui a cru... » On entend déjà résonner à nos oreilles le chant des béatitudes et notre cœur devrait lui aussi bondir d'allégresse, car, en ce jour de la visitation, l'Église rentre dans la fête et la danse du peuple de Dieu. Après des siècles d’attente, après le désert, l'exil et la peine, la bonne nouvelle d'un Dieu parmi nous devrait nous envahir. Dieu a entendu son peuple et lui a donné un sauveur...

« L'enfant a tressailli... » 

« Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur ! Il s'est penché sur son humble servante ».... (Luc 1, 47)


Ce chant m’habite, habite aussi mes joies, même les plus intérieures. Il prend sa source dans les chants de l’AT et devient signe de nos espérances... il relève les humbles...


Que Dieu tressaille en nous à l’aube du mystère...


(1) cf. Joie de croire, joie de vivre

PS : extrait complété de mon « Chemins de miséricorde »

Voir aussi « la danse intérieure »

La visitation - peinture de ma soeur, L. Franc (c)

19 décembre 2020

De l’agenouillement au relèvement ? - danse 19

Il y a une ligne ténue à ne pas franchir entre agenouillement et sacrifice, humilité et soumission et il ne faut pas tomber dans cet excès fréquent qui fait que tout s’effondre dans l’asservissement. il ne faudrait pas interpréter mon billet 18 dans le mauvais sens. 

La clé est complexe à comprendre. C’est peut-être dans une dynamique conjugale qu’elle s’éclaire le mieux. L’échange sacramentel se dit dans un seul sens, je te reçois et je me donne à toi. 


L’interprétation d’Ephesiens 5 cristallise cette difficulté. Loin d’une soumission délétère de la femme à l’homme c’est dans la compréhension de la réciprocité essentielle qui fait que l’homme est invité au don total de sa vie, comme le Christ, que la logique de l’auteur de l’épître peut être acceptable.



Mais on néglige trop souvent cette réciprocité et l’on sombre alors dans l’asservissement.


Il faut concevoir les choses comme deux tours moyenâgeuses. Deux tours où le dialogue ne se fait pas parce que nos carapaces humaines sont coriaces. On peut s’envoyer des flèches ou des fleurs du haut de la tour, on n’atteindra pas l’autre. L'enjeu est dans cette "descente de tour", où l’on atteint le même niveau de vérité que celui évoqué dans Gn 2,25. 

Etre nu devant l'autre et ne pas en avoir honte. 

S'exposer dans la nudité de celui qui ose s’agenouiller, perdre sa superbe, demander pardon, entrer dans le déssaisissement pour que le dialogue et la réciprocité se fasse. 

Le dépouillement du Christ que nous contemplons à la crèche, ce qu’on appelle kénose, n’est finalement que le premier pas de danse. C’est quand la magie de la réciprocité se fait que la danse devient joie, symphonie, partage, une seule chair, un seul corps.... avec un grand C au bout du voyage. Mais je résume trop ici ce que je développe en plusieurs centaines de page ici... 

https://kobo.com/fr-FR/ebook/aimer-pour-la-vie

Peut-être est-ce Philippiens 2 auquel on doit revenir pour saisir que l’agenouillement est la clé du « c’est pourquoi Dieu lui a donné le nom de Dieu sauve ».

Ce n’est qu’à ce prix que le lavement des pieds du Christ, en Jn 13, est le premier geste ecclésial et sublime du Christ car il devient, loin de tout « cléricalisme », la clé centrale d’interprétation de Jean 15, 15 : je ne fais pas de vous des serviteurs mais des amis... :


« 12 Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. 13 Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime.

14 Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. 15 Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. »

D’agenouillements en agenouillements - danse 18

« Le Seigneur est avec toi... »

C’est le point commun entre la première lecture et l’Evangile de ce dimanche... cela peut être aussi le point de départ d’une méditation.

Laissons nous assez de place dans nos vies pour le Seigneur ?

Dans le livre de Samuel, nous voyons David désireux de construire une maison pour lui. Mais Nathan l’en dissuade. Pourquoi ? 

Il y a de nombreuses manières de faire une place à Dieu dans nos vies. On peut le vénérer dans une église, dire qu’il est là dans le tabernacle et parfois l’oublier en sortant. Après David, Salomon construira un temple, mais oubliera son Dieu et construira d’autres lieux de culte aux petits dieux de ses épouses.

Nous allons aussi faire de belles crèches, cacher le petit Jésus puis essayer de retrouver sa cachette le jour de Noël... mais l’Avent n’est peut-être pas là 😉

L’avent consiste à creuser en nos cœurs la place auquel le Seigneur a droit... Quelle place exactement ?

Suivre Marie, dans son humanité ? Elle est la première en chemin... Elle s’est préparée et devient signe pour nous... 

Si l’ange vient la visiter, c’est probablement parce qu’elle a creusé en son cœur ce qui lui permettra d’accueillir la venue de Dieu....

Comme Zachée à qui Jesus dit « descend, je veux demeurer chez toi » ouvrons, nous aussi, nos cœurs à ce Dieu qui vient nous visiter. Faisons un temple de nos corps, une crèche toute intérieure...

Creusons en nous cette vallée intérieure où Dieu peut venir. Entrons dans le silence, fuyons un instant la course fébrile des Noels païens pour nous rendre disponible à la venue de Dieu...

Comme l’ange d’Arcabas qui s’agenouille devant Marie, contemplons  cette préparation toute particulière d’une femme choisie par Dieu pour recevoir Dieu en son corps. Sa crainte, sa réponse est chemin pour nous.

À notre tour, préparons-nous à devenir temple. Disons à la suite de Marie, « comment cela peut-il se faire que tu daignes me visiter », « mais dit seulement une parole » et j’ouvrirai ma porte, à nouveau, à ta présence.

Jésus Christ est le mystère gardé depuis l’origine nous dit Paul... le mot mystère en grec est plus vaste que le petit Jésus caché pour Noël... 

Prenons le temps d’ouvrir nos cœurs à cette descente toute particulière de Jésus en nous, pour répondre à la suite de Marie, « Fiat »... qu’il soit fait en moi comme le demande ton Verbe, un temple digne ta présence. 

Si l’ange d’Arcabas se met à genoux, ce n’est pas pour rien. Jésus à sa suite, se mettra à genoux devant l’homme le soir de sa Passion, comme l’ont fait les Marie de l’Evangile(1). S’il se met à genoux, c’est peut-être en réponse à tous les agenouillements intérieurs des femmes et des hommes de l’Ancien et du Nouveau testament. La théophanie de Luc ne déroge pas, en effet, aux schémas littéraires de toutes les théophanies de l’Ancien Testament. Elle prépare la venue en nous d’un Dieu à genoux. 

C’est pour moi une danse inachevée entre l’homme et Dieu, une danse humble et fragile... une réciprocité dans l’agenouillement. 

Viens Seigneur, je t’attends... à genoux. Non dans un agenouillement servil, mais parce que le premier, tu te fais petit pour nous visiter.

(1) raccourci criticable  inspiré par Berulle qui voit une seule femme dans les trois femmes au pied de Jésus 

PS : J’ose soumettre ici à votre sagacité le texte de mon homélie de dimanche, issue de nos discussions toujours fructueuses en « Maison d’Evangile » cf. https://www.facebook.com/groups/2688040694859764/

Comme toujours, un accouchement difficile.

PS2 : le titre de danse 18, fait allusion à de nombreux billets publiés ici, mais aussi, plus qu’ailleurs, à mes deux essais déjà évoqués « La danse trinitaire » et « à genoux devant l’homme » disponibles gratuitement sur Kobo/Fnac cf. Ci dessous 

17 décembre 2020

Une nouvelle symphonie ? Danse 17

Je termine ma lecture commentée de « Dieu est nu » en étant quelque peu bouleversé par cette exhortation vers ce que j’appellerais volontiers une révolution humble (kénotique). Qu’est-ce à dire ? Il nous faut trouver de nouveaux moyens de faire Église dit en substance Arnold alors que nos institutions s’enferment dans des impasses... 

Mais quelles sont ces impasses qui expliquent qu’elles ne portent plus les fruits attendus et n’ont pas, en tout cas en Europe, la dynamique de l’universel ? 

Triomphalisme, enfermement, hyper-ritualisme, aveuglement, cléricalisme, inégalités, entre-soi, moralisme, distance ? 

Faut il quitter nos églises pour aller sur de nouveaux terrains périphériques, y compris numériques ? François est-il le seul, au sein de notre hiérarchie, à entendre l’enjeu de cette révolution ?

« Comment faire une pause dans le tourbillon égolâtre et marcher l’un vers l’autre, partager secret, louange et service au lieu du mortel égoportrait ? Il faut croire en une visitation numérique possible qui subvertisse l’individualisme...» nous dit Arnold (P. 255(1)

Qu’est-ce à dire ? Nos institutions ont-elles tué à ce point le dialogue véritable qu’il faille repenser le vivre ensemble autrement ?

« Nous ne sommes plus appelés à jouer un rôle de soliste ou d’élite, mais de partenaires sur pied d’égalité, en y incluant, bien sûr, la légitime et nécessaire divergence de la communauté bigarrée du réél.  (...) troquer l’imposition unilatérale pour l’osmose et la commensalité qui recréent symphoniquement le monde, comme dans la rencontre entre Marie et Elisabeth... (257). 

J’ai moi même creusé longuement ce sujet dans mon essai « pastorale du seuil ». Arnold va plus loin...

Aller vers l’étranger ? Jusqu’au bout du renoncement à l’entre-soi comme ces nouveaux missionnaires qui partent à la périphérie du monde, jusqu’au camp de migrants, pour y trouver le visage du Christ...(cf. l’interpellation de Moria sur KTO lundi (2).

Tous frères ? Sommes nous capables de l’affirmer, de le vivre ? Comment vivons-nous le « Fratelli Tutti » ?

L’unique étranger c’est Dieu (...) celui qui se met dans l’ombre pour que nous puissions « devenir ensemble ». (P. 257)

« Jésus s’identifie à l’étranger (...) pour que nous soyons tous citoyens du même monde trinitaire (258) ». Claire allusion à Mat. 25...


Encore faut-il renoncer au confort du discours, du penser, pour avancer dans l’agir...


J’ajoute sur la pointe des pieds, m’en sentant peu digne : Viens un temps où l’Epoux parti, ils jeûneront et quittant le confort des bastions établis, oseront aller vers les périphéries...


Le plus dur est peut-être le premier pas...je discutais hier avec mon frère qui parle d’une explosion de bénévoles dans son association... au service des plus démunis. La crise va-t-elle réveiller le monde endormi et aider chacun à trouver l’appel de l’Infini vers l’étranger....


(1) Simon Pierre Arnold, Dieu est nu, op. cit.

(2) https://youtu.be/nU2vdbHN-cI

05 décembre 2020

Homélie du 6/12 - 2eme dimanche de l’avent - année B

 Quel est finalement ce qui fait le lien entre les textes de ce dimanche ? 


Il y a en fait deux sortes de montagnes, celles où l’on monte pour proclamer la Parole et les montagnes intérieures que l’homme s’érige loin de Dieu. Ne nous trompons pas de montée. L’évangile nous donne la clé de lecture en évoquant l’abaissement du prophète. Ce qui rend d’ailleurs difficile la place de celui qui doit monter au pupitre pour parler de la Parole divine....


Le risque est en effet d’oublier l’essentiel qui est le chemin même de l’avent. Dieu se révèle surtout dans la descente et nous rejoint dans l’humilité. C’est quand on perçoit cela que l’humilité du serviteur devient l’essentiel. Mais n’allons pas trop vite.


Isaïe ouvre une piste en évoquant la nécessité d’une conversion intérieure.


« Préparer / aplatissez les chemins du Seigneur ».


Qu’est ce à dire ?

Comment rendre plat ce qui est accidenté en nous.

J’entendais récemment un prêtre comparer les besoins dit essentiels que le gouvernement nous autorise à satisfaire avec ce qui semble in essentiel - la place de Dieu dans nos cœurs.


En ce temps de préparation de Noël attention au superflu... le plus grand risque est là.

Ne faisons pas une montagne du superflu.


Laissons-nous interpeller au contraire par cette demande particulière de la Parole, ce qu’elle creuse en nous.


Dans l’évangile de jeudi en Matthieu 7. On entendait déjà que « celui qui entend ma parole et la mets en actes... en pratique... bâtit sur le roc ».


Qu’est ce qui creuse en nous des sillons, « jusqu’au jointures » de l’âme (Heb 4, 12), change nos montagnes intérieures en vallées profondes si ce n’est cette Parole qui nous habite, nous pétrit de l’intérieur....


Le risque le plus fréquent est de détourner la Parole de Dieu à notre profit, de l’utiliser. C’est ce que fait le serpent au désert.


Non, aplanir nos montagnes, c’est se laisser travailler, déranger de l’intérieur par la Parole, jusqu’à l’humilité et la charité véritable.


Au point que tout d’un coup, comme Jean le Baptiste, malgré tout nos désirs de puissance, nos belles paroles, nous nous sentions petit, feuille balayée par le vent devant celui qui vient et dont nous ne sommes pas digne de dénouer les sandales. 


L’enjeu est dans cette humilité qui ouvre en nous un sillon pour que la Parole nous conduise à l’agir.


Nous ne sommes pas dignes...


Sans nous laisser pour autant envahir par la culpabilité... laissons la parole nous travailler de l’intérieur. 


« Que tout ravin soit comblé, toute montagne et toute colline abaissées ! que les escarpements se changent en plaine, et les sommets, en large vallée !

Alors se révélera la gloire du Seigneur. »


Si l’on médite bien Isaïe on perçoit que c’est en creusant en nous un chemin qui s’ouvre à la Parole et à la charité que la gloire c’est-à-dire l’amour de Dieu se révèle 


En s’effaçant Jean laisse passer la lumière...


Paul ajoute dans son épître une petite phrase qui nous donne courage même si la route est longue 


« Dieu prend patience envers vous,

car il ne veut pas en laisser quelques-uns se perdre, mais il veut que tous parviennent à la conversion. »


Et pour cela, il vient nous re-visiter...

Il a aussi besoin de nos mains...


Laissons le nous envahir plutôt que d’être envahi par l’inutile. Préparons notre crèche intérieure.


Il vient.


Tout à l’heure il va nous visiter. En nous avançant vers l’autel faisons notre la Parole du Baptiste.


« je ne suis pas digne de m’abaisser pour défaire la courroie de ses sandales. »


Je ne suis pas digne Seigneur mais dit seulement une Parole et je serai guéri...