Et si nous entrions dans le rêve de Dieu, comme nous le suggère notre pape François.
La deuxième lecture de ce dimanche est tirée de l’apocalypse de St Jean. Elle nous introduit à sa manière à ce rêve : « J’ai vu un ciel nouveau et une terre nouvelle, Car le premier ciel et la première terre s’en étaient allés Et, de mer, il n’y en a plus. Il essuiera toute larme de leurs yeux..Ap. 21
Comment atteindre ce rêve, cette terre nouvelle ?
Cela passe peut-être par un premier retrait… Laisser se retirer cette mer envahissante de nos désirs et de nos doutes pour marcher vers « autrui ». Décentrement…
Peut-être est-ce ce qu’a cherché Charles de Foucault dans sa quête au bout du silence.
Le chemin du désert (1) est le temps où se prépare en nous le royaume.
Jésus. nous invite ailleurs. Il vient déranger nos habitudes Par ses derniers mots, il signe à sa manière son humble retrait.du monde. Dans l’Évangile (Jn13) Jésus le suggère à sa manière :
« Encore un peu de temps… »
Encore un peu de temps avec vous…
À dix jours de l’ascension, nous goûtons déjà ce dimanche aux derniers signes de la présence du ressuscité avant son grand retrait…
Jean nous invite à méditer le contraste saisissant entre la gloire du Fils et son retrait…
Imaginons la scène. Elle se situe après le lavement des pieds et avant la Passion. Déjà le Fils prépare son retrait… Derniers pas de cette danse tragique où Dieu révèle qui IL EST, sans forcer notre liberté.
Vague discrète d’un amour qui a lechè les pieds des disciples avant le don total et silencieux de la croix qui sera lumière pour le monde.
Écoutons le…à nouveau…
Où en sommes-nous ?
Nous avons passé Pâques…
Au Christ lumineux, qui est apparu plusieurs fois pour conforter ceux qui avaient perdu confiance, se prépare un nouveau temps, celui du désert et du manque…
Jésus quitte la plage de nos vies.
Il ne reste plus qu’une étendue immense d’où s’évapore les dernières lueurs de sa présence.
Dans ce désert qui se prépare, les disciples n’auront plus que quelques traces fragiles. Des mots, des gestes, le souvenir d’un Christ à genoux, des paraboles, griffonnées en chemin, ce qui va préparer la naissance des quatre évangiles.
Pourquoi ce départ ?
Pourquoi ce silence ?
Où es-tu mon Dieu ?, disons-nous souvent ?
« Tu m’as répondu », suggère le psaume.
Les fragiles étincelles de la présence du Fils révèlent autre chose.
Dans l’amour reçu, dans la tendresse qui affleure parfois d’un sourire, Dieu nous laisse quelques pâles souvenirs.
Quelques traits sur le sable…
Souvenons-nous de cette belle prière d’Ademar de Barros que je vous invite à relire, à méditer : « j’ai rêvé que je cheminais sur la plage en compagnie du Seigneur »
« Je ne t’ai pas abandonné : les jours où tu n’as vu qu’une trace sur le sable sont les jours où je t’ai porté… »
Dieu n’est pas où on l’attend.
IL EST, mais dans le surgissement inattendu d’un fin silence, insaisissable et incontrôlable.
Il nous porte dans ses bras même si nous ne le sentons pas pleurer à nos côtés
Il nous relève quand nous n’avons plus la force d’avancer.
Il est lumière,
IL EST.
Alors, Non, notre quête n’est pas vaine.
Car l’indicible se cache pour que nous découvrions ailleurs sa présence.
Viens, Esprit de feu !
Nos nuits obscures (2) attendent ta flamme.
Viens redonner courage à ceux qui pleurent dans le silence et la solitude.
Fais de nous des signes de ta présence discrète.
Aide nous à révéler ce feu qui brûle en nous sous le boisseau.
Viens embraser nos cœurs de chair de ta présence silencieuse.
Allume en nous le feu qui déjà réchauffe nos cœurs de pierre.
Laisse-nous être remués par ton dernier appel…
« Aimez-vous comme je vous ai aimé. »
Comme…
« Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ».
Une invitation surprenante nous est faite ce dimanche dans la liturgie de la Parole. Une forme de testament que Jésus laisse à chacun d’entre nous.
Invitation peu banale en soi, mais dont le contenu ne peut que nous interroger, nous bousculer : « aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » et comme je continue de le faire au-delà de mes silences… oserai je ajouter.
Comment faire ce pas ?
Si Jésus se retire, c’est pour que l’amour du « comme » devienne lumière.
Si Jésus disparaît c’est pour que nous devenions ses témoins, non par nos propres forces, mais pour que de son absence vienne le manque, cette quête salutaire qui nous conduit à sentir qu’il est DON et à trouver en nous la Force de réaliser ce qu’il nous offre.
Fais qu’en nous jaillisse l’Esprit.
Viens Esprit Saint
Pour aller plus loin :
(1) voir ici le livre en téléchargement gratuit : https://www.kobo.com/fr/fr/search?query=claude%20j%20heriard
(2) cf. François Marxer, Au péril de la Nuit, Femmes mystiques du XXeme siècle, Paris, Cerf, 2017
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